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Chapitre 24 : La Cité Verticale
 
Le patron de l’établissement regarda son client d’un air qui montrait tout son mépris. L’ishori n’appréciait pas beaucoup que son bar soit fréquenté par des ivrognes. Cela finissait toujours par créer des problèmes. Il observa encore un moment, d’un œil mauvais, le jeune homme affalé sur une banquette, la tunique tâchée de bière corellienne. Le spectacle faisait peine à voir.
Une jeune dorneane s’approcha alors du jeune homme, et le regarda avec un grand sourire.
– Salut mon bonhomme, fit-elle en le regardant dans les yeux. On se sent seul ?
Le type la regarda avec curiosité, certainement trop saoul pour comprendre qu’elle vendait ses charmes et allait extorquer des crédits à un pauvre type qui avait trop bu.
– ‘lut… marmonna le buveur. La forme ?
La dorneane s’assit sur la banquette près de lui, et se pencha dans sa direction, offrant une vue plongeante sur son décolleté travaillé et vertigineux. L’homme, trop occupé à vider sa bouteille, ne réagit même pas. D’un coup d’œil, la fille avisa le sabre laser accroché à la ceinture de sa cible. Elle hocha la tête.
– Un petit Jedi…
Elle fit glisser ses cuisses nues le long des jambes du Jedi.
– On prétend que vous avez un gros… énorme… gigantesque… sabre laser, fit-elle sur un ton langoureux très suggestif. J’ai toujours voulu vérifier…
Elle se colla carrément à lui, et il sentit un durcissement incontestable. Ce n’était pas son sabre laser… A moitié conscient de ce qu’il faisait, il se laissa caresser la joue d’abord, puis le torse. La main de l’extraterrestre descendait avec assurance, quand un vacarme se fit entendre. Une série de bips furieux et frénétiques. La jeune fille se tourna pour en déceler la source, et tomba nez à nez avec un droïd excité qui semblait la menacer en braillant en langage binaire.
Une autre série de bips plus ou moins insultants lui fit comprendre qu’elle n’était pas la bienvenue, et elle déguerpit avec un regard noir pour le droïd.

– Tu sais… hic… Edo. Vous autres les droïds… hic… vous avez bien de la chance. Impossible d’avoir un père despote… hic… impossible de tomber amoureux d’une droïdette qui se fera tuer… hic… impossible d'avoir un frère criminel… hic… impossible d’être mis en prison… hic. Vous en avez de la chance.
Kano partit d’un rire gras des plus stupides, avant d’avaler une bonne gorgée de sa bière corellienne de basse qualité. A côté de lui, Edo 27 émit des sons méprisants de réprimande. S’il avait pu, le fier droïd aurait ajouté : « Et impossible d’être saoul comme un gamorréen en période de noce… ». Mais il se contenta de biper et de hausser ses épaules métalliques.
Le Chevalier Jedi le décevait beaucoup. Lors de leur voyage en hyperespace, Kano s’était soudain levé, et avait prétendu avoir retrouvé une partie de sa mémoire, sans raison particulière. Le Jedi avait déprimé tout le reste du trajet. Il avait expliqué que tout lui tombait dessus en même temps. D’abord la mort de Marvic, puis celle d’Alera. Il avait ensuite appris des origines dont il se serait bien passé. Et voilà qu’il venait de se souvenir de la mort de sa mère telle qu’on la lui avait contée.
Edo 27 n’avait pu que compatir à la douleur de l’humain. Lui-même sentait quelque chose au fond de ses puces de mémoire, comme de la tristesse en pensant à ses anciens maîtres, les Sanaka. Des humains respectables (ce que le droïd trouvait rare) qui avaient été injustement tués. Il pensa également à ce Jedi, l’ami de Marvic, à qui Kano lui faisait souvent penser par certains traits de caractère.

Puis les deux voyageurs étaient arrivés sur Nar Shaddaa, et Kano s’était rué sur le premier bar venu pour y vider des litres d’alcool. Et là, Edo ne pouvait plus décemment approuver. Il avait beau renverser discrètement les verres de Kano dès que celui-ci avait le dos tourné, le Jedi en recommandait toujours un. Edo se demandait d’ailleurs comment son compagnon allait bien pouvoir payer, et commençait à craindre que son maître n’ait à le vendre pour pouvoir payer l’addition…
Kano recommença à parler. Cela faisait bien une semaine qu’ils étaient là, et il ressassait toujours les mêmes choses. Soit il était saoul et disait des âneries, soit il était dans une de ses phases entre ses cuites et s’excusait platement de son attitude… avant de recommencer de plus belle. Edo doutait que l’alcool fasse oublier la mort d’Alera à Kano. Les humains avaient de drôles de coutumes…
– Pellaeon s’est foutu de moi… hic… Kahn n’est pas là, je l’aurais déjà senti cet espèce de fils de Sith !
Edo s’abstint de tout commentaire sur les origines communes de Kahn et Kano, et ne dit pas non plus que la Force ne devait pas trop être présente en Kano à cet instant…
Lassé de ce triste spectacle, Edo jeta un œil électronique avec son senseur optique par la baie en transparacier. Nar Shaddaa, une lune en orbite de Nal Hutta, la demeure des Hutts, était aussi appelée la Cité Verticale. Tout comme Coruscant mais avec des proportions moindres, la cité était composée de tours immenses, entre lesquelles se croisaient des véhicules en tous sens.
Mais il s’agissait du seul point commun avec la capitale républicaine. Nar Shaddaa était également surnommée Lune des Contrebandiers, et cela indiquait à quel point le site était peu fréquentable. Il s’y tramait toujours une histoire louche, une bagarre entre gangs ou un rassemblement de mafieux. La cité était en effet sous l’influence des Hutts depuis bien longtemps.
Edo avait peu apprécié d’être amené ici, où il risquait à chaque coin de rue d’être enlevé pour être revendu en pièces détachées au marché noir. Il ne tenait pas à ce que ses composants finissent dans un recycleur d’ordures ou dans un droïd de torture (la honte de la classe mécanique)… Mais si Kahn s’y trouvait vraiment, cela valait la peine. Au fond de lui, Edo 27 en voulait autant à ce Jedi Noir que Kano. Ses sentiments pour mademoiselle Alera avaient peut-être été d’un autre type, mais sa rancœur était équivalente.
En bon professionnel, le petit droïd observa les clients du bar. Personne ne prêtait attention au jeune homme saoul, et encore moins à son droïd. Il s’agissait de la règle dans ce genre d’établissement : ne pas faire attention aux autres. Edo distingua un groupe de corelliens en pleine partie de sabbac, un couple d’opquis qui se disputait violemment, des bothans qui papotaient politique, et une multitude d’autres races, dans un état d’ébriété variable, qui vaquaient à leurs occupations. Il aperçut la dorneane qui tentait sa chance avec un autre client, avec plus de succès.
Le regard d’Edo s’arrêta sur un petit individu, dont les traits étaient entièrement masqués par une capuche noire. Le type, de race indéterminable, avait une solide carrure dissuasive malgré sa petite taille. Il s’aperçut qu’Edo l’épiait, et lui jeta un regard noir. Edo distingua deux yeux menaçants qui luisaient, mais ses senseurs optiques défaillants ne lui apprirent rien de plus. Il détourna le regard pour ne pas créer d’incident avec le client.
Son attention revint à Kano, qui chantonnait à présent bêtement une chanson de son enfance.
– J’en ai marre de ce trou… grogna le Jedi. On se casse, Edo.
Ce dernier ne demandait pas mieux. Il se positionna pour que Kano puisse s’appuyer sur lui en se levant. Le jeune homme se mit à marcher, faisant un effort visible pour ne pas tituber. Il se tenait légèrement à son fidèle droïd. En passant devant le comptoir, il sortit des crédits de sa poche pour payer, se gratta la tête en essayant de calculer, avant qu’Edo ne s’empare de la monnaie pour régler lui-même la note. Bien sûr, Kano n’avait pas assez sur lui, et Edo se résigna à poser un de ses blasters sur le comptoir. Le patron ishori parut satisfait de la compensation, et ils s’éloignèrent.

Ils sortirent sur un des grands balcons qui surplombaient le vide de la cité. Au-dessous comme au-dessus d’eux, régnait la sarabande des véhicules qui se déplaçaient en trombe. Les tours de Nar Shaddaa n’avaient pas la classe de celles de Coruscant, et tout cela avait un aspect beaucoup plus sombre et insalubre que sur la capitale de la Nouvelle République.
Les deux compères prirent le chemin du hangar où était posé l’Arc de Cristal. En chemin, ils longèrent plusieurs établissements plus ou moins louches, qu’Edo toisa avec dédain. De l’autre côté, une rambarde protégeait d’une chute de plusieurs centaines de mètres. Un turbotrain passa en trombe à côté d’eux, transportant ses passagers dans toute la cité. L’appareil, composé de plusieurs wagons, volait à l’aide de répulseurs et était guidé par des barres métalliques suspendues à des mètres au-dessus du sol.
Ce fut à ce moment qu’Edo s’aperçut que le type à la capuche noire était derrière eux. Edo ne croyait pas au hasard, et connaissant l’état de son compagnon, préféra gérer l’affaire lui-même. Mais Kano avait le regard fixé sur la vitrine d’un bar juste à côté. Il semblait avoir repris un peu de ses esprits.
– Edo…
Le droïd argenté se tourna à son tour. Il ne vit dans le bar que quelques personnes en train de jouer au sabbac. Comme par hasard, le gars qui les filait s’était arrêté lui aussi.

La partie durait déjà depuis un petit moment, et l’humain qui y participait ne cessait de gagner. Ses partenaires commençaient à le regarder vraiment de travers, n’appréciant pas sa chance insolente. Il firent un nouveau tour. Quand ils abattirent leurs cartes, l’humain sourit de toutes ses dents.
– Par ici les crédits ! fit-il en tendant la main vers les gains.
Une patte velue se posa sur sa main, commençant à l’écraser.
– Tricheur… grogna le togorien.
L’extraterrestre à l’apparence féline tira sur le poignet de l’humain pour l’approcher de lui. La table fut jetée à terre, les cartes avec. Les autres joueurs se levèrent à leur tour, partageant visiblement l’avis du togorien.
Ce dernier, furieux, saisit l’humain par le col et le jeta aisément vers le mur de la pièce. L’humain rebondit et tomba à terre. Il se mit alors à rire de façon sardonique. Seul contre tous ces non-humains costauds et en colère, il n’était pas en position de faire le malin.

– Edo, allons-y ! fit Kano, prêt à agir.

L’humain se releva souplement, alors que le togorien s’approchait de lui. L’extraterrestre leva les pattes, qui furent subitement tranchées. Il hurla, avant que la lame du sabre laser de l’humain ne le transperce. Le togorien grogna et s’effondra.
Surpris, les autres s’écartèrent de la lame noire du Jedi.
Ap-xmasi keepuna ! implora un rodien, en hutt.
Pushee wumpa, rétorqua l'humain dans la même langue.
– Calme mec… fit doucement un hortek.
Le sabre laser noir lui ôta la tête en un clin d’œil, tandis que Kahn hurlait de rire. Il poursuivit le massacre en s’attaquant aux personnes autour de lui avec une frénésie meurtrière inquiétante.

Kano surgit dans la pièce et activa son sabre laser. La lame violette se déploya avec élégance, projetant sa lumière pâle dans la petite pièce. Kahn tourna immédiatement la tête vers lui, délaissant ses victimes.
– Tiens donc, Kano ! Quelle heureuse surprise ! Tu veux te joindre à nous ?
Avec un hurlement de dément, Kano chargea. Mais la bière corellienne ne stimulait pas les capacités des Jedi, et il trébucha lamentablement sur le corps inanimé d’un bith. Kahn rit de plus belle, quand une autre forme surgit. Edo s’était lancé, répulseurs à fond, et percuta le Jedi Noir à la poitrine, le projetant à terre. En un éclair, le droïd fit surgir ses blasters et tenait Kahn en joue.
– Tu vas payer, pourriture d’humain !
Kano fut surpris d’entendre son droïd parler. Le choc émotionnel qu’avait subi Edo 27, en retrouvant l’assassin d’Alera, avait dû chambouler ses circuits et avait libéré ses paroles. Mais le droïd vit alors le visage de son ennemi. A quelques détails mineurs près, très exactement le visage de Kano…
Il couina, entrant en conflit interne avec sa programmation qui lui interdisait de faire du mal à son maître Kano. Heureux d’être encore en vie grâce à cette opportunité, Kahn se redressa et brandit son sabre noir, prêt à l’abattre sur l’infortuné droïd. Etalé par terre et victime de son abus de boisson, Kano ne put rien faire quand la lame fendit l’air.

Une autre lame s’interposa soudain, et le choc projeta des étincelles d’énergie. D’un coup de pied, Teydo Pa’aja envoya Kahn rouler à terre. Le Jedi Noir se releva d’un bond en vrille, et engagea le duel avec le Jedi au sabre doré.
Kahn frappa sauvagement, et Teydo para en reculant. Kahn revint à la charge, pour être accueilli par un coup de pied sauté pivotant effectué par Pa’aja. Kahn resta debout, solide, et tenta d’embrocher son adversaire, qui esquiva. La lame noire fendit le mur derrière Teydo.
Un balayage horizontal de Teydo ne surprit pas Kahn, qui se pencha et resta sur cette position pour tourner sur lui-même en frappant. Teydo bondit pour éviter, et para un nouveau coup alors qu’il était encore en train de sauter. Revenu à terre, il plaça sa lame contre celle de Kahn et poussa de toutes ses forces. Kahn recula d’un pas, laissant plus de place à Teydo pour manœuvrer.
Le Jedi de Koltary bondit en tournoyant sur lui-même à une vitesse surhumaine, amplifiée par la Force. Quand il retomba sur Kahn, le Jedi Noir eut du mal à éviter cette toupie mortelle qui pouvait le mettre en pièces à chaque coup. Il fit alors appel à la Force, et Teydo vit son attaque échouer quand il fut propulsé vers le mur.
Kahn chancela alors, sans raison. Il maudit intérieurement les problèmes que posait son corps d’emprunt. La Force Obscure était trop forte pour cet hôte, et il faiblissait à vue d’œil. Chaque recours à la Force le faisait dépérir. Même la Force n’était pas à son plein potentiel, et Kahn n’avait même pas senti la présence des Jedi dans le secteur. Il n’avait pas pu se battre à fond contre ses adversaires, qu’il estimait pouvoir en temps normal occire les uns après les autres sans peine.
La situation dans laquelle il se trouvait était dangereuse : Teydo Pa’aja se préparait à poursuivre la lutte, le droïd faisait le point dans sa programmation, et Kano n’allait pas tarder à s’en mêler à nouveau.
Peu satisfait, le Jedi Noir fut raisonnable et se résigna à fuir. Il tourna le dos à Pa’aja qui se relevait, ignora le droïd et passa près de Kano.
– Tu survivras, frangin. A très bientôt…
Il sortit du bar, sous le regard effrayé des clients et des passants. Derrière lui, Kano se levait et s’apprêtait à le suivre, avant de sentir à nouveau que son état ne le lui permettrait pas. Il tituba, et vit Teydo qui vint le soutenir.
– Teydo… Je dois…
– Reste là, répondit son vieil ami. Il n’ira pas bien loin.

Lorsque Kahn sortit du bar, il sentit immédiatement une mise en garde de la Force. Réagissant par instinct, il activa son sabre laser et put s'en réjouir : sa lame intercepta un laser qui visait directement sa tête. Puis il effectua un autre blocage, avant de localiser son agresseur. En fait, il ne vit que le canon d'un fusil qui dépassait de la fenêtre d'un bâtiment de l'autre coté du gouffre. Le Jedi Noir se trouvait donc acculé, entre le tireur embusqué en face et les Jedi dans le bar derrière.
Tu vas payer, Jedi Noir. Golpi Rilim rechargea son fusil et visa soigneusement. Le laser partit, et Kahn roula sur le côté pour éviter. Golpi était enfin sorti de cuva bacta, pour prendre sa revanche. Mais Kahn restait un Jedi Noir, et Rilim l'avait sous-estimé.
Kahn ne savait pas par quel chemin partir. Il entendit alors le bourdonnement caractéristique de l’approche d’un turbo-train. L’appareil passa à toute vitesse à quelques mètres de la rambarde, et Kahn appela la Force pour bondir sur le wagon de tête, ravi d'avoir une porte de sortie.
Golpi jura quand le turbo-train lui cacha sa cible, et fut encore plus agacé quand, une fois le train parti, il se rendit compte que Kahn avait disparu. Avec un juron de dépit, il se releva de sa position de tireur pour rejoindre Teydo.

Lentement, l’individu à capuche qui avait suivi Edo et Kano retira son vêtement. Il était resté calmement devant le bar, et l’heure était venue d’agir. D’un bond bien plus agile que celui de Kahn, il sauta à son tour et atterrit sur un des derniers wagons.
Il regarda devant lui pour localiser sa cible. Ses griffes se plantèrent dans le métal du toit du wagon, pour éviter d’être désarçonné par la force du vent et de la vitesse. Il s’apprêta à entamer la poursuite périlleuse.
Il avait failli échouer face à Reez, l’apprenti Jedi Noir. Et il allait avoir à utiliser toutes ses ressources pour stopper le Maître, Kahn. Le noghri Jedi Ka’tar, du Groupe Kenobi, avait encore trouvé un défi à sa mesure.

Kano mit un certain temps à bien comprendre tout ce qui venait de se passer, ses idées n’étant pas encore très claires. Il chancela à nouveau, pour être retenu par la forte poigne de Teydo Pa’aja. Son ami lui murmura quelques paroles.
– Ca va aller vieux ?
– C’est pas brillant, marmonna Kano. Encore une fois, qu’est-ce que tu fais là ?
– Je vais tout expliquer. Allons ailleurs, il vaut mieux.
Les deux amis quittèrent le bar, Edo sur les talons. Une fois sur la terrasse, Teydo sembla chercher quelqu’un du regard. Enfin, un homme en combinaison noire apparut à une centaine de mètres. Il tenait un fusil laser haute-technologie à grande portée, arborant un air dépité. Il s’approcha de Teydo.
– Je l’ai manqué… Je suis désolé.
– Ne t’inquiète pas Golpi, Ka’tar s’en charge. Aide moi à emmener Kano dans un endroit calme.
Le petit groupe se mit en marche, Kano marchant avec peine. Ils arrivèrent enfin dans un vieux hangar, où un petit vaisseau de voyage reposait sur son train d’atterrissage. Golpi Rilim tapa un code sur le clavier externe de l’appareil, et la porte s’ouvrit en coulissant.
Teydo déposa Kano sur une couchette, et fit appel à la Force pour améliorer son état… déplorable. Le Jedi secoua la tête, et fit une grimace.
– J’ai un de ces mal de crânes…
– Tu fais peine à voir, mon pauvre Kano.
– Teydo, qu’est-ce qui s’est passé ? Tu vas bien ?
– Mieux que toi en tout cas. Ca fait des jours que nous sommes sur Nar Shaddaa à la poursuite de ton frère, et je ne m’attendais pas à te trouver là. J’avais bien senti la présence d’un Jedi, mais j’ignorais que c’était toi. Je sentais ton ébriété, et je n'imaginais pas que c'était toi. Je suis ravi de te voir.
– Et moi donc ! s’exclama Kano, encore assez fatigué. Mais je pensais…
– Que la Nouvelle République me mettrait en prison ? Kano, peu de monde croit à ta culpabilité. Un bith que Kahn a épargné sur Dantooine t’a vu venir deux fois dans la pièce où ton frère avait commis son massacre. Il a témoigné en disant que selon lui il y avait deux hommes différents. Surtout qu'il a affirmé avoir vu deux sabres de couleur différentes. Et… Kyp Durron lui-même a pris ta défense devant les autres Jedi.
– Alors je ne suis pas pourchassé ? fit Kano, surpris.
– Les choses sont assez compliquées. Il y en a encore qui te pensent dangereux. Un avis de recherche a été lancé. Que ce soit ton frère ou toi, vous devez être tous deux maîtrisés. Mais maintenant que tu es là, tu es en sécurité. Ce qui n’est pas le cas de Kahn, avec un noghri en colère aux trousses…
"En effet, Kyp a décidé de me confier la recherche. Bien sûr, tes détracteurs me voient d’un mauvais œil parce que je t’ai défendu sur Dantooine. Mais il m’a chargé de retrouver Kahn et toi si possible. J’ai formé mon équipe. Nous avions localisé Kahn sur Nar Shaddaa, mais ignorions si c’était bien lui… ou toi."
"Nous l’avons suivi, avec des plans élaborés à chaque fois. Je le surveillais dans ce bar, et Golpi Rilim était posté avec son fusil à l’extérieur. Ka’tar, lui, prétendait avoir vu un autre Jedi, toi en l’occurrence, et est parti enquêter de son côté."
"J’ai compris que c’était bien Kahn quand il a piqué sa crise dans le bar. Notre intervention a échoué, mais nous t’avons retrouvé. C’est déjà ça."
Kano se tourna vers Golpi Rilim.
– Enchanté de vous rencontrer, agent Rilim. Et merci d’être de mon côté.
– Je vous en prie. Je fais confiance à Teydo. Et j’ai une dent contre ces Jedi Noirs depuis que l’un d’eux m’a envoyé deux semaines en cuve bacta. Mais je l’ai raté…
– Tu n’y es pour rien, fit Teydo, je te voyais mal l’abattre alors qu’il était sur un turbotrain à pleine vitesse.

L’engin filait à une vitesse folle. Kahn s’agrippait de toutes ses forces au toit du wagon. Par chance, il était abrité derrière une partie surélevée du toit, ce qui limitait la force du vent. Il n’avait qu’à rester là, et pourrait descendre dès que le train ralentirait. Pour l’heure, l’engin filait entre les hautes tours de la Cité Verticale, à plusieurs centaines de mètres du sol.
Ka’tar, de son côté, avait d’autres projets. Ses griffes et le soutien de la Force l’avaient empêché jusqu’ici d’être propulsé en arrière par la vitesse. Mais il n’avait pas l’intention de rester passif, et comptait bien rejoindre sa proie, à quelques wagons devant lui.
Il eut la même surprise que le reste du groupe avait eu depuis le début de leur séjour sur Nar Shaddaa : Kahn n’était pas perceptible dans le champ de la Force. Enfin, pas comme aurait dû l’être un Jedi Noir puissant. Le noghri avait son explication : Kahn disposait d’un corps neuf, qui avait des problèmes avec la Force qui l’habitait, et qui donc n’émettait pas cette énergie qui l’aurait rendu repérable auprès de d’autres Jedi. Un avantage en fin de compte…
Ka’tar leva une de ses pattes postérieures, et planta sa griffe un peu plus loin. Puis il fit de même avec l’autre patte, et se mit ainsi à progresser le long de la carlingue de l’appareil, qui fonçait entre les bâtiments immenses. Il se servit de sa vision excellente de chasseur pour avoir un contact visuel de son objectif. Le Jedi Noir était aplati contre le wagon, abrité derrière une surélévation qui servait à la climatisation. Comme Teydo et lui l’avaient fait depuis le début de la semaine, il masqua sa présence en atténuant la Force qui coulait en lui. Il ne la déploierait qu’une fois assez proche pour attaquer le Jedi Noir.

– Faisons confiance à Ka’tar, fit Teydo Pa’aja. Il donnera du fil à retordre à Kahn.
– Qui est ce Ka’tar ? s’enquit Kano.
– Un Jedi du Groupe Kenobi, dont nous sommes censés n’avoir pas connaissance, et que tu as vu à bord du Survivant. Il a été affecté, à sa demande, au groupe que j’ai formé pour retrouver les « Jedi Perdus », comme on vous appelle, toi et ton frère, au sein de l’Ordre Jedi.
– Vous êtes nombreux à nous chercher ? demanda Kano.
– Je mène un groupe, Wurth Skidder un autre et Ganner Rhysode le troisième. Mais méfie-toi, même s’ils ont des ordres, Wurth et Ganner ont l’air ambitieux et peu enclins à l’indulgence s’ils te trouvent. Kyp leur a dit de ne pas te faire de mal, mais je suis inquiet. De toute façon, ils sont partis sur de fausses pistes et c’est nous qui t’avons. Tu ne risques plus rien.
– Bien. Mais Edo et moi resterons avec vous pour trouver ce cher Kahn.
– Et cette fois, il ne m’échappera pas, fit une voix électronique.
Kano n’avait donc pas rêvé. Par miracle, Edo 27 semblait avoir retrouvé l’usage de sa voix. Tous les regards se tournèrent vers lui.
– Ce salopard d’humain va payer pour tout ce qu’il a fait !
– Ravi de t’entendre parler, dit Teydo Pa’aja. Comment vas-tu ?
– Bien merci, monsieur Pa’aja. Mais à présent que je le peux, je tiens à déplorer l’attitude de mon maître ces derniers temps.
Kano, un peu honteux, fit un sourire benêt.
– Moi aussi mon vieux Edo, dit Kano. Merci à tous d’être là. Nous avons tous des raisons d’en vouloir à Kahn, mais je doute que le frérot sorte indemne de sa course avec ce fameux Ka’tar…

Le Jedi Noir n’avait toujours pas réagi quand Ka’tar atteignit le wagon juste derrière celui de tête. Le noghri progressait lentement, mais sûrement. Il s’apprêtait à passer à l’action.
Malheureusement, ce fut le moment que choisit Kahn pour jeter un coup d’œil derrière lui. Il sursauta en voyant le visage effrayant du noghri à une vingtaine de mètres derrière lui. Kahn se leva alors, et Ka’tar fut surpris de voir que le Jedi Noir tenait debout malgré la force du vent. Il avait certainement exercé une pression sur son poids à l’aide de la Force, et était prêt à attaquer.
Rapidement, Ka’tar se mit aussi sur ses pieds pour être en mesure de se défendre. Kahn le poussait à un jeu dangereux. Il suffisait de peu pour que la vitesse ne les entraîne tous deux en arrière. Par sûreté, Ka’tar planta les griffes acérées de ses pattes postérieures dans le toit, et attendit son adversaire.
Par chance, le turbotrain avait diminué sa vitesse, certainement à cause de la proximité d’une station. Kahn s’en était rendu compte, et jugea le moment propice pour attaquer. Il courut vers le noghri, et tous deux firent jaillir leurs armes respectives simultanément.
Un instant plus tard, le sabre noir percuta un des poignards laser gris du noghri. Le bruit du véhicule en déplacement dominait celui du choc des armes, mais l’effet était tout de même impressionnant. Kahn porta quelques attaques, que Ka’tar bloqua aisément avec le seul poignard qu’il avait activé. Ses mouvements rapides et souples montraient son entraînement d’assassin froid et efficace.
Encore une fois, Kahn sentit que la Force l’abandonnait à mesure qu’il y avait recours. Son corps provisoire ne supportait pas cette énergie brute qui se déclenchait sans répit. Tout comme cela avait été le cas face à Teydo Pa’aja, Kahn ne pouvait pas utiliser son potentiel à fond, et la Force en lui était atténuée. Il était en position de faiblesse.
Kahn appela la Force pour amplifier la puissance d’un de ses coups, mais sentit immédiatement les conséquences de cet acte. Il recula pour reprendre son souffle et ne pas offrir une victoire facile à son adversaire.
Ka’tar avait enfin senti Kahn dans le champ de la Force, dès que le Jedi Noir avait fait appel à ses pouvoirs. Mais il sentit également que la Force faiblissait. C’est bizarre, se dit le noghri, la Force semble vouloir fuir ce type. J’imagine que son corps n’était pas prêt à l’accueillir…
Le Jedi Noir refusait de se laisser abattre par ses défaillances corporelles. Il attaqua à nouveau le noghri, sabre au poing. Ka’tar fit une parade basse, et Kahn en profita pour faire une vrille en envoyant son pied dans le visage de son adversaire. Ka’tar ne broncha pas, et lança une griffe qui entailla l'épaule de l’humain. Les lames étaient toujours pointés vers le sol, et Kahn désactiva la sienne pour la dégager, avant de l’allumer à nouveau et de se fendre vers l’extraterrestre. Ce dernier fit une esquive en tournant sur lui-même. Kahn attaqua de plus belle, faisant un balayage de haut en bas, tout en passant derrière Ka’tar.
Le Jedi para le large coup au dernier moment, faisant rebondir le sabre noir contre son poignard. C’est alors qu’il vit, à quelques dizaines de mètres du train, un pont qui approchait à grande allure. Le noghri savait que le bas du pont allait frôler le toit du turbotrain, et allait percuter les deux combattants.
Kahn avait le dos tourné au danger en approche, et restait concentré sur le combat. Ka’tar entendait profiter de la situation. Il para encore un coup de Kahn en direction de sa tête, et attendit le moment propice.
Le train approchait, soutenu par des poutres anti-grav à des centaines de mètres du sol, et arrivait en dessous d'une passerelle surplombant le vide. Ka’tar contracta ses muscles au dernier moment, et bondit de toutes ses forces. En décollant, il constata avec amertume que Kahn avait eu le temps de rouler à terre. Cela lui suffirait-il à éviter le pont ?
S’élevant dans les airs, Ka’tar pivota pour se retrouver face au train. Il avait dû calculer son saut pour pouvoir retomber sur le train, et avait donc bondi vers l’avant pour ne pas rater son coup. Il était encore dans les airs, à quelques mètres au-dessus du wagon. De loin on eût dit qu’il était un des petits speeders qui sillonnaient le ciel de Nar Shaddaa.
Ka’tar passa au-dessus du pont, tendit ses pattes pour prendre appui sur la rambarde, et poussa à nouveau pour se propulser en avant. Il fonça en l’air, rattrapa le wagon de tête et vit que Kahn avait tenu bon. Etendu sur le dos, le Jedi Noir avait eu la chance de passer sous le pont, certainement à quelques centimètres près. Le noghri Jedi n’avait pas dit son dernier mot. Il retomba lourdement sur le wagon. Son saut et son calcul avaient été parfaits : il retomba sur son adversaire, encadrant de ses pattes postérieures les deux flancs du corps de Kahn, exactement comme il l'avait fait lors de son premier combat contre Reez.
Ka’tar sortit un poignard, résolu à en finir. Kahn, bloqué à terre, n’aurait pas la latitude de mouvement nécessaire pour sortir son sabre et parer. Avec ses courts poignards, Ka’tar était avantagé. Mais il vit alors que Kahn faisait à son tour jaillir un poignard laser, identique à ceux du noghri. Le non-humain comprit vite qu’à un moment ou à un autre, le Jedi Noir lui avait subtilisé une de ses armes.
Profitant de l’effet de surprise, Kahn frappa de son poignard. D’un bond, Ka’tar s’était écarté pour éviter la lame incandescente. Kahn se leva et attaqua, commettant sa dernière erreur. Il n’arrivait pas à la cheville du noghri dans la maîtrise du poignard, et Ka’tar le savait. Alors que Kahn attaquait faiblement, handicapé par sa Force fuyante, Ka’tar lui saisit le poignet armé, tira son adversaire face à lui et le regarda une dernière fois.
Médusé par la rapidité du noghri, Kahn n’eut pas le temps de réagir. Simultanément, Ka’tar lui enfonça son poignard dans le ventre et une griffe dans la poitrine, puis le souleva de terre avec force. Kahn ouvrit de grands yeux ronds, et tomba à genoux quand Ka’tar relâcha sa prise.
Le tueur professionnel qu’était le noghri allait achever le vaincu. Il leva son poignard, sans cérémonie. Mais Kahn ne souhaitait pas que les choses finissent ainsi. Il rengaina ses deux armes d'un geste et regarda Ka'tar droit dans les yeux. Rassemblant ses dernières forces et le peu d’énergie que lui offrait encore la Force, il fit abstraction de ses blessures pour sauter à l’écart du wagon.
Avec un soupir, Ka’tar regarda le corps du Jedi Noir qui disparaissait de façon plus noble dans les abysses obscures de Nar Shaddaa.