On continue sur l'Ordre Jedi

Héhé!
Bekan Kalad leva la tête vers l’escalier qui menait à l’entrée du Temple Jedi. La présence des sentinelles qui la protégeaient farouchement était l’illustration des tensions qui secouaient une République soumise par un tyran.
Peu de temps après la fin de la Crise Alsakan qui avait mené à l’élection de Julius Contispex, des croyants de la secte avaient commencé à s’amasser autour du sanctuaire des utilisateurs de la Force pour pratiquer leur prosélytisme forcené. À haute voix, d’une seule clameur, ils les exhortaient à s’ouvrir à leur Foi et à se convertir.
Les Jedi avaient tenté de les éloigner et de les disperser mais cela avait provoqué des incidents graves avec des Jedi non humains, si graves que le Chancelier Suprême dut intervenir pour calmer les esprits échauffés de ses partisans et les rappeler. En échange de cette paix de facto, les Jedi n’intervenaient pas dans les affaires du culte.
Une situation de plus en plus inconfortable à cause de ce qui se passait quotidiennement dans les rues de la Cité Galactique et sur d’autres mondes de la République. De plus en plus de serviteurs de l'Ordre trouvaient de plus en plus insupportable l’emprise du culte fanatique sur les strates de la société et brûlaient d’agir.
Sans parler des quelques condisciples humains chez qui le Chancelier Suprême trouvait grâce. Bekan pour sa part, avait choisi de se consacrer à l’Ordre à défaut de pouvoir se consacrer librement à la République. Comme la majorité de ses camarades.
Toujours accompagné de son padawan draethos, le natif d’Alsakan salua rapidement les sentinelles sur son chemin qui lui répondirent d’une inclinaison du menton, sous leur capuchon. Il grimpa les marches jusqu’à arpenter le grand hall.
Beaucoup de Jedi y étaient présents, pris dans de vifs échanges à propos des leçons du jour prodiguées par les instructeurs. Ou de sujets bien différents, comme la politique. Alors qu’il contournait ces groupes, il surprit un dialogue vif entre deux padawans, un humain et une falleen.
Le jeune homme disait ceci :
- Je trouve que les gens sont plutôt injustes avec le Chancelier Contispex. C’est vrai qu’il n’est pas parfait, mais il a quand même accompli de bonnes choses.
La falleen, créature aux traits reptiliens, réprimait son agacement sous un masque stoïque.
- On peut savoir lesquelles ?
- Eh bien pour commencer, les rues sont plus sûres.
- Plus sûres ? S’étrangla-t-elle. Pour les humains certainement, pour les autres j’ai de sacrés doutes !
- Mes parents me racontent quand je leur rend visite que les rues étaient dangereuses avant l’élection de Contispex. Tu pouvais te prendre un coup de vibrolame si la racaille voyait que tu portais des bijoux trop voyants ou des vêtements trop luxueux pour te les voler.
- Ceux qui souffrent de la pauvreté ont rarement le choix, tu sais.
- Certains non humains semblent très bien s’en accommoder et même en jouir. C’est une très bonne chose de les avoir enfermés au ghetto.
- Sauf que les autorités enferment tous les non humains, criminels et gens honnêtes, sans aucune distinction. Tu appelles ça, de la justice ?
- Je suis sûr que le Chancelier le fait pour le bien de toute la société. Il est nécessaire de prendre des mesures drastiques.
- Et ces Disciples de Hapos, les Gardiens de Pureté ? Tu trouves cela normal qu’ils agressent des humains qui ne pensent pas comme eux ou des non humains qui disposent d’un permis de travail ?
- Ces incidents sont regrettables, certains font parfois de l’excès de zèle. Mais je suis prêt à parier que d’autres usent parfois de provocation, en se présentant en des lieux où ils ne devraient pas se trouver. Rien de tel que la victimisation pour retourner l’opinion publique contre l’ordre établi.
- Qu’en sais-tu ? Tu t’y trouvais ?
- Permets-moi de te retourner la question.
Elle soupira.
- Il a mis fin à la corruption au Sénat et a mis au pas des dignitaires qui se croyaient supérieurs aux intérêts de la République. Comme le sénateur Vemus d’Anaxès.
- Vemus n’est peut-être pas irréprochable mais ce qui lui est arrivé, n’est rien de plus qu’une parodie. Il n’a même pas eu droit à un avocat pour se défendre ! Lui fit-elle remarquer.
- Il a peut-être passé un accord avec les juges pour avoir une remise de peine.
- Ma parole, on croirait que tu as assisté à son procès ! Répliqua la falleen, non sans sarcasme.
- Je reconnais que je n’ai pas eu cet honneur, tout comme toi. Mais si le Sénat l’a réélu, c’est pour une bonne raison. Contispex est efficace dans ce qu’il entreprend.
- La peur est une excellente raison.
Bekan kalad était déjà bien hors de portée de voix pendant ce temps, laissant leurs paroles se perdre dans le brouhaha des autres conversations. Mais cela illustrait l’épineux problème qui commençait à poindre au sein de l’Ordre Jedi. Le Haut Conseil tentait de rester uni malgré les pressions exercées par des Jedi désireux d’agir contre le culte et des Jedi – minoritaires et humains – soutenant indiscutablement le Chancelier en exercice car celui-ci représentait la République et les citoyens. Quand ils ne partageaient pas une partie de sa doctrine idéologique.
- Oriko, attends-moi à la Salle d’Armes, ordonna-t-il à son padawan.
- Oui, maître.
Le draethos obliqua au couloir de droite, suivi de la machine qu’il avait réparée tandis que l’alsakani prenait la direction du Haut Conseil. Alors qu’il était sur le point d’arriver, la porte du Haut Conseil s’ouvrit pour laisser passer un Jedi humain, la mine sombre et les poings humains, qui manqua de le bousculer.
Il s’écarta pour ne pas être percuté alors que l’autre le salua en marmonnant entre ses dents.
- Bekan.
- Kotil, répondit l’ancien padawan de Ri’ila Terka.
Il entrevit le sourire de Zeri Baltwo qui vint l’accueillir en personne. La lorrdienne pour qui il ressentait une affectation plus qu’amicale lui frôla la main, discrètement. Il lui rendit ce contact chaleureux.
- Comment s’est passé la réunion avec le Chancelier et l’ambassadeur Hutt ?
- Ils ne se sont pas entre-tués. Mieux, ils ont même passé un accord.
Elle esquissa un sourire.
- Les maîtres seront heureux de l’entendre. Ils sont tendus, Kotil Marek a encore fait des siennes.
- Cela ne me surprend pas de sa part.
La position de Kotil Marek concernant la situation actuelle était bien connue de tous, ce n’était un secret pour personne. Il menait ceux qui prônaient une rébellion ouverte contre la neutralité du Haut Conseil – certains n’hésitèrent pas à la qualifier de lâcheté – et pourquoi pas contre la politique du régime en cours.
Cela ne faisait qu’accentuer la précarité de la situation. Pendant combien de temps encore, le Temple Jedi demeurerait-il un havre de paix ?
- Ne les faisons pas attendre, le pressa-t-elle.
- Cela vaut mieux.
Elle l’introduisit dans la salle puis referma le lourd battant dans son dos. Le Jedi alsakani se redressa, les mains croisées devant lui, s’inclinant devant ses supérieurs.
- Maîtres, je reviens à l’instant de la réunion entre l’ambassadeur Hutt et le Chancelier Suprême.
- Le Conseil t’écoute, Bekan.
L’humain éprouva un certain plaisir face à la familiarité maternelle que lui accorda la vénérable twi lek à la peau verte. Il se considérait comme son fils spirituel.
- Merci, maître Terka.
Il commença le résumé de l’entretien riche en enseignements entre le Chef d’État de la République et le représentant des kadijics de Nal Hutta.
- En conclusion, les deux parties ont trouvé un compromis, achevait-il. Les Hutt s’engagent à libérer les deux pilotes capturés et à coopèrent aux enquêtes lancées par les autorités sur les trafics douteux qui essaiment dans les systèmes de la République. En outre, ils soutiendront la Quatrième Flotte de l’amiral Hisku afin de pacifier les frontières de l’Espace Bothan, En échange, la République doit rappeler la Cinquième Flotte du système Ubrikkia et doit verser des indemnités en compensations des dommages subis par la planète Tol Amn.
Sur ces mots, les douze maîtres se penchèrent les uns vers les autres, dans des murmures agités. Les flux de la Force se convulsèrent sous le coup de l’optimisme et d’un doute prégnant. La kiffar fut la première à se redresser.
- Jedi Kalad, nous aimerions avoir votre avis. Pensez-vous que le Chancelier Suprême et les Hutt tiendront parole ?
- C’est difficile à dire, Maître Okepo. Les Hutt, comme vous le savez, ne sont pas très ouverts aux suggestions mentales et je ne suis pas certain de leur bonne volonté. Cependant, maître Terka m’a remis un rapport d’un des agents de l’Ordre qui opère dans leur Espace et a estimé l’état de leur force militaire. Selon ce rapport, les kadjics ne seraient pas en état de faire face à une offensive d’envergure bien coordonné sur plusieurs fronts. Pour être plus précis, j’ignore s’ils seront en mesure de contenir une seule attaque concentrée le long d’une de leur routes commerciales. Cela monopoliserait la quasi totalité de leurs unités.
- Nous sommes au fait que les Hutt ne sont pas en ballottage favorable sur le plan militaire, acquiesça Edei Qeto. Donc il est fortement probable qu’ils n’auront pas d’autre choix que d’honorer leur engagement pour éviter l’escalade.
L’approbation de ses confrères fut unanime.
- Il est donc autant probable que le Chancelier Suprême n’impose aux Hutt d’autres conditions, fort de son avantage, avança Maître Tlir.
- Il n’aurait aucun mal à le faire, étant donné que les Hutt traînent une réputation sulfureuse méritée, y compris dans les systèmes non humains de la République, déclara Maître Giutt.
- Les Hutt ne sont pas stupides, ils chercheront sans doute le soutien des sénateurs comme ceux de l’Honorable Fraternité, observa Maître Salesu.
- Cela m’étonnerait que l’Honorable Fraternité prenne le risque de frayer avec ces criminels. Ils perdraient tout crédit politique, répliqua Maître Huhol.
Le houk Treski leva la main pour mettre un terme au débat en cours. Il gronda en direction de l’alsakani.
- Jedi Kalad ?
Celui-ci comprit que le houk désirait l’entendre. Il s’éclaircit la gorge.
- Le Chancelier Contispex est un homme difficile à cerner, j’en ai acquis la certitude. Il est suffisamment intelligent pour ne pas ignorer les avantages des tensions en cours avec les Hutt. Cela lui permet de passer pour un vertueux souhaitant lutter contre le crime organisé. Jouer l’apaisement lui conférerait une image de pacifiste tandis que accentuer la pression ne ferait qu’augmenter sa popularité déjà solidement installée. Il est évident que les citoyens respectent et même apprécient la poigne.
- Pour être clair, quelle option privilégiera-t-il ? S’enquit Elani Yam.
Le regard de Bekan biaisa vers la togruta.
- La fermeté. Bien entendu, ce n’est qu’une hypothèse, car comme je vous le rappelle, Contispex est un homme difficile à cerner.
Les douze maîtres perçurent la sincérité dans la réponse de Bekan. La Force laissa échapper une onde de satisfaction.
- Ce sera tout. Merci pour votre rapport, Jedi Kalad. Nous en avons terminé pour aujourd’hui, conclut Treski en se levant de son siège.
À l‘unisson, les onze autres maîtres se remirent sur leurs appuis et Bekan les devança en quittant la salle le premier. Il bifurqua vers Zeri, à qui il demanda :
- On se retrouve au réfectoire, tout à l’heure ?
- D’accord, accepta la lorrdienne.
Ils perçurent la présence de Ri’ila Terka qui se rangea à leur hauteur.
- Bekan, je peux te parler en privé ? Lui demanda son ancienne instructrice twi lek.
Ses deux lekkus s’agitèrent sur ses épaules lorsqu’elle lui indiqua d’une torsion du menton la salle du Haut Conseil. Le quadragénaire alsakani soupira devant son amie et amant, avant d’emboîter le pas à la non humaine.
La grande porte étincelante d’ivoire se referma derrière eux deux et la native de Ryloth passa devant les douze sièges vides des maîtres, le regard songeur. Les mains derrière le dos, elle revint lentement sur ses pas pour se planter face à son ancien élève. Elle conservait une impassibilité de façade, comme si elle s’apprêtait à le réprimander. Ou plutôt quand elle s’apprêtait à le réprimander, du temps où il était son apprenti.
Il espérait avoir passé ce stade depuis son accession au titre de Chevalier, mais il n’en finirait jamais de réapprendre quelques leçons.
- Tu n’approuves pas la position du Haut Conseil.
Ce n’était pas une question et elle ne lui en tenait pas ombrage d’une opinion qu’il n’avait jamais exprimé à voix haute, hormis dans la Force. Kotil Marek était loin d’être isolé au sein de l’Ordre, beaucoup de Chevaliers et de padawans sur le point de passer les Épreuves pensaient comme lui. Ce qui à terme se révélerait être comme un facteur de déstabilisation, voire même de scission.
- Non, maître, reconnut-il.
Dans la Force, il devina qu’elle appréciait son honnêteté.
- Tu penses que Kotil Marek a raison.
- Disons que je comprends ses motivations, répondit-il. Il n’a pas tort d’affirmer que le culte Pius Dea sévit depuis trop longtemps à la tête de la République. Ni que le Haut Conseil tarde trop à réagir face à leurs exactions.
La twi lek hocha la tête.
- Tu ne le suis pourtant pas, remarqua-t-elle.
- Disons que je ne l’ai jamais beaucoup apprécié personnellement. Il a tendance à se laisser guider par la passion et à faire preuve d’une certaine suffisance. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il a tort sur tout.
- T’a-t-il proposé de le rejoindre ?
- Pas encore.
Bekan eut le pressentiment qu’ils en étaient arrivés à la raison principale de sa convocation par son ancien mentor.
- Nous vivons une époque dangereuse, Bekan, affirma-t-elle. Nous avons choisi de coopérer avec le Chancelier mais nous ignorons ses véritables projets à l’avenir. C’est pourquoi il est important que l’Ordre demeure soudé.
- Ce qui nous amène ?
- Nous ne pouvons pas permettre que plusieurs des nôtres prennent des initiatives hasardeuses. Kotil Marek étant le chef de file des dissidents, nous avons besoin d’être informés de ses moindres faits et gestes. Le Conseil pense que tu es le plus à même de remplir cette mission.
La réponse de l’alsakani fut nette et sans équivoque.
- Non.
- Bekan…
- C’est donc à cela que nous en sommes réduits ? S’indigna-t-il. À nous épier les uns les autres, parce que le Haut Conseil est incapable de prendre une position claire et de l’assumer ?
- Je suis navrée de te mettre dans cette situation, tu sais que je suis de ton coté, tenta-t-elle de le tempérer.
La twi lek soutint son regard acerbe empli d’une profonde amertume.
- Alors pourquoi acceptez-vous de vous rabaisser ?
Elle demeura muette et il répondit alors pour elle.
- Parce que vous avez peur.
- Bekan, tu oublies à qui tu t’adresses.
L’alsakani avait gardé une profonde estime pour la twi lek qui l’avait amené de son monde natal. Il avait aspiré à suivre son exemple.
- Pardon, maître. Mais cela ne change rien à ce que je pense de tout ceci. Je ne suivrai pas Kotil mais vous lui donnez raison en osant me demander ce que vous me demandez au nom du Conseil.
- J’avais prévenu les autres maîtres que tu t’y opposerais et je leur ferai part de ta réponse. Je sais cependant que nous pourrons compter sur ta loyauté, le moment venu.
Elle posa la main sur son épaule, pour sceller de nouveau leur entente.
- Vous me connaissez mieux que personne.
Elle le prit dans ses bras, comme le ferait une mère pour son fils. Zeri Baltwo les surprit ainsi, accompagné d’un inconnu encapuchonné.
Elle appela son camarade.
- Bekan, ton père est là.
Voilà, j'espère que cela vous a plu


Allez, à la prochaine
