Ça faisait un petit moment que je n'avais pas écrit de nouvelles... Donc je me suis dit que j'allais profiter de mon 20000ème message pour en sortir une !
Et pour cette fois, j'ai choisi un sujet qui me trottait dans la tête depuis que j'ai remis en page un des recueils SWU...
Normalement, ça devrait fonctionner en tant que "one-shot", mais je suis tellement imprégné par la
Fédération Impériale que mon regard n'est pas très objectif, donc s'il y a un souci n'hésitez pas à me le signaler, je verrai pour arranger ça
Repentance tardive Lyn Tallato bouscula presque deux soldats lorsqu’elle jaillit du turboascenseur.
Autrefois, elle se serait excusée. Mais les stormtroopers n’étaient pas du genre bavard… Et ses sentiments envers l’uniforme impérial étaient si ambivalents, à présent, qu’elle avait envie de le voir aussi peu que possible.
Elle était d’ailleurs tellement perturbée par les dernières rumeurs –
Oui, des rumeurs, ça ne peut être que ça – qu’elle avait envie d’être seule. Isolée comme possible des autres Impériaux, à condition que ce soit possible sur cette station.
Il n’y avait qu’un seul officier qu’elle souhaitait côtoyer, à cet instant, et elle espérait le trouver dans sa cabine.
Dès que la porte coulissa, elle vit que son souhait était exaucé : un général l’attendait là, assis sur le lit. Un homme de grande taille et d’une carrure imposante, dont les cheveux blonds étaient à présent striés de blanc.
Il leva son visage en la voyant entrer et elle sentit ses derniers doutes s’envoler : le visage de son époux était trop perturbé, ses yeux noisette trop voilés, pour que les informations qu’elle avait espérées fausses soient démenties.
— Ils l’ont vraiment fait ? murmura-t-elle en approchant de lui.
La gorge serrée, Thalas Garind acquiesça.
— Oui, lâcha-t-il dans un souffle.
Lyn sentit ses jambes flageoler, et elle serait tombée au sol si quelque chose au fond de son esprit ne l’avait pas aidée à tenir. Peut-être était-ce tout simplement la répugnance à se trouver davantage en contact avec cette station maudite, cette Étoile Noire vouée à la dévastation et à la mort.
Elle posa une main sur l’épaule de Thalas.
— J’ai espéré toute la journée qu’il s’agissait d’une rumeur stupide, lancée par un plaisantin de mauvais goût, lui confia-t-elle.
Elle s’assit à ses côtés.
— J’aurais préféré, répondit son mari. Mais j’étais là. Dans la salle d’observation des officiers. Ils nous avaient rassemblés pour assister à ce… spectacle.
Il avait presque craché le dernier mot.
— Il y en a eu quelques-uns pour applaudir – une bonne moitié, peut-être – mais les autres sont restés stoïques. Comme moi. Je pense que je n’ai pas réalisé tout de suite ce qui venait de se produire.
— Tarkin était là ? lui demanda-t-elle.
— Non. À ce qu’on dit, il était dans la salle de contrôle… Avec Vador et Leia Organa.
Le cœur de Lyn se serra à l’idée de ce qu’avait enduré la jeune femme. Elle-même avait assisté des années plus tôt au massacre de gens de son peuple… Mais ce qui s’était produit ce jour-là était sans commune mesure avec ce qui venait d’arriver.
— Bon sang, Thalas, quand avons-nous fermé les yeux ? dit-elle en sentant les larmes lui monter aux yeux. Quand avons-nous laissé le Mal l’emporter ?
— Tu parles comme Athalée, lui fit-il remarquer.
Ce n’était pas la première fois qu’il lui disait cela, mais le ton sur lequel il avait prononcé ces mots, lui, était nouveau. D’ordinaire, c’était un reproche, voire, une fois ou deux, de la colère. Là, il s’agissait d’un simple constat, lourd de sens.
— Et si elle avait raison, depuis le début ? répondit-elle. Pendant des années, tu as pensé qu’elle faisait un blocage en réaction à ce qui est arrivé à son oncle, et à cause du comportement de Carth. Mais peut-être a-t-elle seulement perçu la véritable nature de l’Empire bien avant nous…
— Ne mets pas tout l’Empire dans le même sac, répliqua Thalas. C’est Tarkin qui est aux commandes, ici. Il ne représente pas le régime dans la Galaxie entière.
— Peut-être, mais il est Grand Moff, aux commandes d’une arme de destruction massive. Et…
Elle sélectionna les meilleurs mots qui lui venaient à l’esprit pour ouvrir les yeux de son mari.
— Le régime qui lui a confié l’Étoile Noire est le même qui l’a félicité pour son action sur Ghorman. Tu te souviens de Ghorman, Thalas ? Des milliers de gens qu’il a écrasés avec son destroyer ? Il a fait pire encore que la Marche Sanglante, ce jour-là.
— C’était il y a plus de quinze ans…
— Justement ! Et si l’Empire était mauvais
depuis le début ?
Elle ne rajouta rien, laissant ces mots suspendus entre eux pour qu’ils infusent dans l’esprit de Thalas.
Lentement, il tourna la tête vers elle.
— Tu te rends compte de ce que tu insinues…
— Oui.
— Selon toi, nous nous battons dans le mauvais camp.
Depuis vingt ans.
— Oui…
— Je refuse de l’admettre ! s’emporta-t-il en se levant du lit. J’ai affronté les Séparatistes, j’ai combattu les pirates, et tout cela pour
protéger les habitants de la Galaxie ! C’était le sens même de mon engagement, la continuité de ce que je faisais sur Polcaphran avant la guerre. Tu me vois dire aux morts de la campagne des Confins Ouest «
désolé, les gars, mais nos ennemis avaient raison depuis le début » ? Enfin, Lyn !
— Je vois très bien ce que tu veux dire. Admettre que l’on a eu tort… Ce n’est pas simple, reconnut-elle. Mais je sais compter. Aldérande vient d’être détruite avec… Combien d’habitants, déjà ? Cinq milliards ? Dix ? Environ la population de Polcaphran. Nous avons perdu, entre la Marche Sanglante, le massacre de Nadomei et les martyrs de la Résistance, un peu plus de deux cent mille personnes. Fais le calcul, Thalas : cette arme a fait, en un instant, au moins vingt mille fois plus de victimes que toute la Guerre des Clones sur notre monde. Et je ne parle que des êtres pensants… Combien d’animaux, combien de merveilles, naturelles ou manufacturées, ont été anéantis du même coup ? Cette arme a commis le pire crime de l’histoire de la Galaxie.
Et j’ai participé à sa création.
Thalas la regarda et vit à quel point elle était perturbée, davantage encore que lui. Il entreprit de la réconforter.
— Tu n’étais qu’à l’intendance…
— J’ai organisé l’acheminement de matériaux, la conception de circuits d’approvisionnement et la constitution d’équipes chargées de nourrir la population à bord, du prestataire civil de base au Grand Moff en personne. Crois-tu vraiment que je suis innocente ? Certes, j’ai moins de responsabilités que Tarkin, mais je suis bien plus coupable que tous les pauvres gens qui ont péri avec ce monde.
Avec un geste doux, son époux essuya une larme sur son visage, avant de la réconforter en la serrant contre lui.
— Nous sommes ensemble, chuchota-t-il à son oreille. Nous allons trouver une solution pour sortir de là. Peut-être que nous pourrions être affectés sur Polcaphran, comme Carth… Ça nous permettrait de voir plus souvent Ahris.
— Quel monde allons-nous lui laisser, Thalas ?
— Un monde impitoyable, soupira-t-il, où il devra se battre pour se tailler une place. Mais je suis certain qu’il s’en tirera. Il tient trop de toi pour se laisser faire…
Malgré la situation, cette remarque arracha à Lyn un mince sourire.
Qui s’effaça quand une nouvelle pensée lui traversa l’esprit.
— La dernière fois que nous avons vu Thalie, elle disait qu’elle allait quitter Anaxes…
— Je pense qu’elle l’a fait, répondit son époux. Elle a déjà subi l’ostracisme parce qu’elle portait le nom d’un traître une fois, je doute qu’elle ait eu envie de recommencer. Mais je vois à quoi tu penses… Je ne pense pas qu’elle soit allée sur Aldérande… La planète était trop associée idéologiquement aux Rebelles, et elle voulait surtout la paix pour elle et les enfants.
— Comment en être certains ? demanda Lyn, effrayée à l’idée que sa meilleure amie n’était peut-être plus qu’une nuée de poussières à proximité flottant aux environs de la station spatiale.
— On ne peut pas l’être. On peut juste espérer…
Le comlink de Thalas sonna, et il répondit aussitôt.
— Garind.
Lyn n’entendit pas ce qui lui était communiqué, mais elle vit ses traits se déformer sous l’effet de la surprise.
— Très bien, j’arrive, dit-il avant de refermer l’appareil. Tu ne vas jamais le croire, ajouta-t-il en direction de son épouse. Il y a une alerte dans un bloc de détention du secteur principal… Des Rebelles ont fait évader Leia Organa.
Ce n’était effectivement pas une nouvelle à laquelle Lyn s’attendait.
— Ici ? À bord de l’Étoile Noire ?
Thalas acquiesça.
— Ça demande une sacrée dose du culot, lâcha-t-elle dans un souffle.
Il ne put que confirmer.
Avant de sortir, il se tourna vers elle, et elle aperçut sur son visage un petit air mutin qu’il n’avait pas pris depuis bien longtemps.
— S’introduire dans une base extrêmement bien protégée au mépris de toute la prudence de la galaxie, ça me rappelle quelque chose… Pas toi ?
Elle saisit la référence et sourit une fois encore.
— Quand je te dis que nous sommes dans le mauvais camp… Ces Rebelles ont plus de choses en commun avec notre chère vieille Résistance qu’avec les Séparatistes que nous combattions.
— L’avenir le dira.
Quand il sortit d’un pas vif, avec son uniforme parfaitement lissé, l’époux de Lyn semblait être redevenu l’impassible général Garind. Mais, aux yeux de la Polcaphréenne, ce n’était qu’une carapace qui cachait autre chose.
Elle sentait, à travers leurs derniers échanges, que quelque chose d’autre s’était réveillé en lui.
Le courage de résister, de dire non, de se battre face à l’injustice et à la cruauté.
Et, en dépit des circonstances, cela redonnait à Lyn l’envie d’espérer.