L’Equilibre dans la Force (The High Republic (Phase 2) #01 à 05), par Cavan Scott, Ario Anindito et Andrea Broccardo
Jedha ! La Lune des Pèlerins est le siège de la Convocation, une assemblée où les différents représentants des organisations adeptes de l’utilisation de la Force (les Jedi bien sûr, mais aussi les Fallanassi, les disciples des Whills et d’autres) tentent de coexister et d’en apprendre davantage les uns des autres. Mais cet équilibre est précaire, et l’arrivée d’une nouvelle organisation et de son Hérault pourrait bien le faire éclater !
La Haute République est de retour chez Panini avec ce premier tome (sur deux) de la série régulière se déroulant désormais dans la Phase 2, soit 150 ans avant les événements liés au Flambeau Stellaire de la précédente série. Tout est à refaire pour le scénariste et pour les dessinateurs !
Et au scénario, ma foi, cela fonctionne. En prenant comme point de vue celui du Jedi Vildar Mac, un peu bourrin sur les bords, mal dégrossi, avec un passif qui a de faux airs de celui de Quinlan Vos, cela fonctionne car finalement, le lecteur découvre Jedha en même temps que Mac, et se fait guider, comme lui, grâce aux bons conseils de la Padawan Matthea Cathley. Et c’est passionnant à lire. Alors oui c’est assez dense, oui, on balance un certain nombre de noms et oui, vous risquez de vous y perdre un peu avec les différents courants d’utilisateurs de la Force au début. C’est fait exprès, à mon sens : Jedha est une fourmilière, qui grouille de religieux (plus ou moins extrémistes d’ailleurs, on y reviendra), d’attrape-touristes, d’arnaqueurs, de pèlerins, etc. On est (très) loin des décors et de l’ambiance propre, presque froide, à bord du Flambeau Stellaire de la précédente série. Là, on a presque l’impression de percevoir la saleté, le côté surpeuplé de Jedha, bref, on y est. L’immersion est réussie.
Très vite donc, notre valeureux duo va se retrouver à pourchasser Tey Sirrek, troisième personnage principal de la série, accusé de vols et d’un meurtre qu’il n’a bien évidemment pas commis. Nous sommes un peu dans l’archétype connu du « ce n’est pas moi mais je vais enquêter et me retrouver à chaque fois au mauvais endroit au mauvais moment mais puisqu’enfin de vous dis que ce n’est pas moi », heureusement contrebalancé par un personnage au design très réussi et à la gouaille certaine. On pourra cependant reprocher à Cavan Scott de jouer un peu la montre sur le troisième numéro de cet arc, qui est un gigantesque flash-back sur le passé de Sirrek. Alors, en lui-même, il est intéressant, mais il aurait été peut-être plus stratégique de diluer les flash-backs au long de l’arc. Là, il en résulte un curieux sentiment de temporisation…
Un rapide mot sur le récit supplémentaire du premier numéro, nous présentant tout autant la Convocation que les enjeux autour de la Jedi Oliviah Zeveron à venir ainsi que la présence d’un personnage du roman
La Voie de la Duperie, et vous obtenez un mélange trop dense de 8 pages, qu’il vaut mieux presque sauter puisque l’arc en lui-même nous proposera des scènes similaires un peu plus tard…
On suit donc pendant 3 numéros, 3 numéros et demi l’avancée de l’enquête de Vildar et Matthea sur Jedha, on en apprend davantage sur Tey Sirrek quand, au milieu du quatrième numéro donc, surgit le Hérault de la Voie de la Main Ouverte. Et là, on sent bien que tout bascule : cette deuxième moitié du quatrième numéro est passionnante, fait véritablement office de suite au roman précédemment cité et se conclut par le début de la Bataille de Jedha, maintes fois évoquée par mon camarade Lain dans ses reviews de la Phase 2.
Sauf que là, il y a comme qui dirait un problème : on est censé comprendre que, finalement, la Cité Sainte s’embrasse littéralement lorsque le Hérault, débouté par la Convocation, se met à harranguer les foules et à prêcher ses inepties somme toutes peu crédibles et d’une évidente mauvaise foi. Et certains des membres de la Convocation… l’écoutent sans broncher. Sans réagir. Sans l’interrompre, ni même essayer de convaincre les citoyens présents des erreurs entendues. On rajoute à cela l’utilisation d’une créature bien connue et semble-t-il parfaitement domestiquée au point que, même à distance, elle semble pouvoir affecter tel individu et pas tel autre (et alors là, il va falloir à un moment qu’on nous en dise plus sur leur fonctionnement).
Les vingt dernières pages semblent oublier tout le début de l’intrigue pour se consacrer donc à l’évolution de la situation sur Jedha, qui va empirer de plus en plus à mesure que l’on progresser vers la conclusion du tome. Et, finalement, cela ne me gêne pas : comme les personnages, nous sommes pris par les événements, et il faut bien les suivre. On appréciera quelques points (l’acte de Vildar à la fin, qui je l’espère sera développé dans le tome 2, la présence de certains personnages dans l’ombre, etc) !
Aux dessins, la série démarre de façon très très réussie avec un Ario Anindito qui fait feu de tout bois, nous propose de superbes designs, un Jedha qu’on perçoit vraiment, instaurant une ambiance qui n’est pas du tout la même que celle de la précédente série, une belle réussite !
Les teintes sur cette série sont davantage pastel, mais, dans le troisième numéro, on sent bien qu’une partie des décors est sacrifiée pour tenir les délais… ce qui débouche logiquement hélas sur la présence sur les deux derniers numéros d’Andrea Broccardo. Alors oui, les styles des deux dessinateurs sont suffisamment proches pour que la transition se fasse en douceur, mais transition il y a tout de même, et elle se fait au détriment du second. Les personnages ont peut-être moins de charisme, sont moins impressionnants physiquement (du moins, ils semblent davantage avoir le même gabarit là où chez Anindito, Vildar Mac est clairement quelqu’un de massif qui te fait voler s’il te met une droite!). Mais sa prestation est loin d’être déshonorante pour autant, d’autant plus lorsqu’on voit la quantité de décors inédits et de nouveaux costumes et personnages qu’il doit mettre en scène.
Bon, sauf en ce qui concerne la statue. Il y comme qui dirait un problème quand on la voit dans
Rogue One et qu’on compare avec les dernières pages du comic…
Une lecture très intéressante et qui démarre dans les trois premiers numéros de l'arc de façon très accessible ! Mais suivant votre façon de suivre la Haute République, le twist du quatrième numéro vous sera plus ou moins clair : c’est hélas l’inconvénient de l’avantage d’avoir une intrigue narrative qui se déroule d’un média à l’autre…
Note : 80 %