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Chapitre 9 Le cockpit était plongé dans l’obscurité. Les débris avaient recouvert la proue du
Freedom Messenger et l’alimentation électrique était coupée. Encore un peu étourdi par la violence du choc, j’entrepris de me désangler. Mes premières tentatives se révélèrent infructueuses : le mécanisme avait souffert du crash. Je réussis finalement à passer le harnais en mode manuel puis à le défaire.
Encore étourdi par la violence du choc, je décidai de venir en aide aux autres. Galieet avait un peu de mal avec les sangles, lui aussi, mais Horsk s’était relevé et aidait l’ambassadrice Brenn’
TOR.
Le vaisseau tout entier était presque silencieux ; seuls quelques craquements de métal se faisaient entendre par moment. Mais je craignais l’imminence d’un incendie ; malgré les précautions prises pour vider les réservoirs exposés au choc, il pouvait subsister du combustible… Suffisamment pour détruire l’épave. Nous devions nous hâter d’évacuer les lieux.
Puisque le vaisseau était à la renverse, il fallût que nous marchions sur les murs. Tâche peu aisée, étant donné la configuration étroite des coursives : impossible d’avancer debout, il fallait se pencher. Évidemment, moi, je me pliais presque en deux… Thnod et Galieet étaient bien embêtés, eux aussi.
Alors que nous arrivions au niveau du sas, j’entendis le bruit d’autres pas devant nous. Quelques secondes plus tard, des silhouettes apparurent, avec au premier plan celle reconnaissable entre mille de Tiken.
— Ça va ? demandai-je calmement, malgré mes craintes.
L’équipage du
Forte Tête était devenu ma seconde famille. Même si je savais que la séparation était proche – mon commandement prendrait fin dès la mise en service de mon futur croiseur kuati –, je tenais absolument à ce que tout aille bien pour eux.
— Rien de cassé, répondit Kol’yan, le second twi’lek de Tiken. Mais on a été secoués.
— Il faut qu’on sorte, ajouta un homme derrière lui.
— Je suis d’accord, approuvai-je immédiatement. Mais l’alimentation est coupée… Nous sommes coincés dans cette foutue carcasse.
— Il y a des outils dans la soute, annonça Thnod. On devrait pouvoir se débrouiller.
Il nous fallut quelques minutes pour exhumer du fatras de caisses quelques outils bien utiles. Je me retrouvai finalement avec un marteau pneumatique à fixation magnétique, que j’appliquai contre le sas d’accès bâbord – le seul encore à l’air libre.
Trois coups et la porte fut projetée en l’air comme un vulgaire morceau de ferraille. Décidément, les CR-20 ne rendaient guère hommage aux capacités de l’ingénierie corellienne…
— Bien pratique, marmonnai-je en voyant le panneau retomber au sol dans un grand fracas.
Je tournai la tête d’un côté comme de l’autre ; nous étions arrivés dans une clairière plutôt vaste. Sur ma droite, la fumée obscurcissait la trace brûlée provoquée par le vaisseau pendant sa chute. Elle devait bien faire plusieurs centaines de mètres et se perdait dans les bois.
J’aidais ensuite les autres à sortir de la carcasse. Galieet était encore un peu secoué, mais il semblait quand même en assez bon état. Les autres souffraient de contusions ou avaient leur uniforme abîmé ; la toge de l’ambassadrice Brenn’
TOR était tâchée par du liquide de refroidissement.
Après l’équipage vinrent les droïdes (Enfin, ceux qui avaient survécu au crash) et les caisses de matériel. Il y avait de l’équipement de secours, des vivres, des outils et quelques armes. Je décidai également de prélever certaines pièces sur le croiseur, qui de toute façon n’était plus en état de voler. Une idée m’était venue à l’esprit et je voulais l’expérimenter.
Il nous fallut trois heures pour mener à bien ces tâches et monter un camp de fortune – sommaire mais nécessaire.
C’est après l’achèvement de ces manœuvres nécessaires que l’ambassadrice vint me trouver, alors que j’examinai mon datapad. Sofis Brenn’
TOR nous avait aidés autant que possible, ce qui était tout à son honneur ; la plupart de ses collègues n’auraient sans doute pas bougé le petit doigt pour nous assister.
— Je sais pourquoi vous venez, déclarai-je en l’entendant arriver – c’était la seule à ne pas avoir de bottes.
— Nous n’avons toujours pas vu de traces de ceux qui ont abattu notre vaisseau, dit-elle de sa voix toujours calme.
Je lui montrai une pile de tuyaux soigneusement empilés, à cinq mètres de nous.
— En voici la raison.
Elle fronça les sourcils.
— Je ne comprends pas. Ce ne sont pas des pièces pour les abris ?
— Les tôles conviendront mieux… Mais ces tuyaux servent déjà.
— Vous manquez de clarté.
— Nous, bien sûr, nous savons ce qu’ils sont – des morceaux de ferraille sans aucune valeur. Mais vu de l’orbite… Depuis un satellite d’observation…
— Vous voulez dire qu’ils évitent l’assaut parce qu’ils pensent que des missiles les attendent ?
— Précisément. Enfin… L’assaut aérien uniquement. Ils arrivent par le sol.
D’un grand geste de la main, je lui montrai la forêt alentour.
— Lors de notre chute, je n’ai aperçu aucune ville aux alentours. De là à déduire qu’il n’y en a pas, il n’y a qu’un pas… Que je ne franchirai pas. Ils savent sans doute où nous sommes. Mais la forêt est dense, et leur camp de base sûrement éloigné. Ils mettront au minimum une journée ou deux avant d’arriver.
— Pouvons-nous contacter la République pour obtenir de l’aide ?
Je la regardai, gêné. Je m’attendais à la question, mais la réponse… Eh bien, elle ne me plaisait pas.
— Nous pourrions sans doute si le relai du vaisseau était intact, et… Malheureusement… L’antenne a été arrachée lorsque je me suis « posé ».
Elle tenta de conserver son optimisme à toute épreuve.
— Notre absence de signal pourrait tout aussi bien les alerter.
— D’ici là, je veux connaître le terrain pour savoir comment les affronter.
Je me dirigeai vers un coffre métallique à proximité de moi et l’ouvris. Les affaires qu’il contenait étaient étonnement bien rangées, malgré le crash. C’était une tenue de combat : un plastron de plastoïde gris et un casque qui me couvrait le dessus et l’arrière du crâne. J’enfilai les deux avant de convoquer tout l’équipage.
— Votre attention s’il vous plaît, criai-je pour être entendu parmi les conversations. La nuit tombera sûrement bientôt, et je préfère ne pas être pris par surprise demain matin. Nous allons donc nous diviser en deux groupes. Je mènerai le premier, qui comprendra aussi Thnod, Ren et Horsk, aux alentours de la zone pour repérer des points de repli stratégique, et peut-être poser quelques balises de repérage courte portée. Le second, sous les ordres de Galieet, découpera les plaques de blindage du
Freedom Messenger pour monter un bâtiment de fortune. Rien de bien solide, mes amis, mais je veux que nous soyons prêts.
Je montrai du doigt un petit escarpement de rochers qui trônait au milieu de la clairière.
— Voilà l’endroit où vous installerez notre campement. Programmez les droïdes d’entretien pour qu’ils creusent un double réseau de tranchées. Renforcez-les avec les chutes de tôles, et installez les générateurs derrière. Si possible, épargnez les tourelles et laissez-les en fonctionnement. Messieurs, en avant !
Nous nous séparâmes en deux groupes. Le mien s’apprêtait à partir quand Brenn’
TOR revint vers moi, en me faisant signe qu’elle voulait me parler seul à seul.
— Colonel, j’aimerais vous poser une question.
— Je vous écoute.
— Avec ces défenses, avons-nous une chance de nous en sortir ?
Je la regardai étrangement ; en fait, j’espérais que mes hommes n’étaient pas aussi perspicaces qu’elle.
— Pas la moindre, avouai-je sans ambages. Nous ne sommes qu’une dizaine d’hommes… Et pas des soldats. Nous avons face à nous des mercenaires mandaloriens, des indigènes, peut-être quelques pirates… Je veux juste disposer des défenses nécessaires pour négocier.
— Alors…
— Je préfère proposer des crédits que de perdre un homme. Les crédits, ça se récupère.
Et, sans lui laisser le temps de répondre, je m’éloignai pour retrouver mon escouade prête au départ.
Thnod, Ren et Horsk avaient déjà récupéré quelques balises sur les droïdes endommagés lors du crash. Bien utilisées, elles pouvaient nous prévenir de l’approche de l’ennemi.
— Couvrez-moi, leur ordonnai-je avant de franchir l’orée de la forêt.
J’essayais de me montrer déterminé, calme même, mais il y avait un je-ne-sais-quoi dans l’air… Je me sentais mal à l’aise. Mon instinct m’indiquait qu’on nous guettait déjà. Un prédateur était à l’affût, et nous étions sa cible.
Ce sixième sens m’avait aidé à me tirer de quelques mauvais pas, par le passé. Je n’avais plus qu’à espérer qu’il en soit de même ce jour-là…
Si les abords de la clairière étaient marqués par les traces de notre atterrissage forcé, il n’en allait pas de même pour le reste des bois. Les arbres arboraient des couleurs chaudes, assez différente des arbustes que j’avais l’habitude de voir dans les serres de Bespin et de Coruscant. Ici, la nature était sauvage, plus encore que sur Corellia qu’on considérait pourtant comme un monde préservé. Je n’avais jamais vu ça. La voûte au-dessus de nous était faite d’un mélange si artistique de rouge flamme et de jaune doré que cela aurait pu être le chef d’œuvre d’une quelconque civilisation antique aujourd’hui disparue.
— Les arbres ont-ils tous cette couleur dans la nature ? demandai-je à Thnod, qui marchait à mes côtés.
— Ce sont des feuillus brentaaliens, m’expliqua-t-il sans cesser de surveiller les alentours. Ça se voit à la forme des feuilles ; ils ont dû être importés ici il y a longtemps. D’habitude, ils sont verts, mais nous devons approcher du déclin de l’année ; sans doute la plus belle saison, mais aussi la plus dangereuse, à cause des feuilles qui tombent. Restez sur vos gardes.
En y regardant de plus près, je compris le sens de son avertissement : nous marchions sur un tapis végétal légèrement pourrissant, composé de feuilles plus ternes que celles qui restaient encore sur les arbres. Il était épais et légèrement humide, une texture qui me rappelait celle d’une éponge de Galitari après une cuisson vapeur. Si vous ne connaissez pas ce succulent mets aldéranien, je ne peux que vous le conseiller… À déguster avec un bon vin vert de la même planète.
— C’est embêtant, lâcha Horsk, qui inspectait le sol du regard. Les traces ne restent pas visibles très longtemps, parce que le sol est en perpétuelle mutation. Je ne saurais dire si quelqu’un est passé par ici récemment. Tenez, ici, par exemple.
Il désignait un carré de sol absolument quelconque à mes yeux.
— Le sol a été enfoncé par quelque chose d’assez lourd, mais il est impossible d’en déterminer la forme ; ovale, circulaire ou même triangulaire !
Il se dirigea vers un autre creux léger.
— Là, en revanche, c’est clairement une empreinte de bo…
Il se passa alors tellement de choses que j’eus du mal à comprendre de quoi il en retournait. Une forme sombre tomba sur Horsk qui laissa échapper un grognement étouffé ; deux surgirent des fourrés sur notre droite et deux autres d’arbres sur notre gauche. Tous tenaient fermement un blaster en main.
— Lâchez vos armes et couchez-vous au sol !
J’échangeai un regard avec Thnod, et je vis alors la peur dans ses yeux. Ce n’était pas dans son habitude de réagir ainsi.
— Qui êtes-vous pour nous menacer ? lançai-je en tentant de manifester un peu de courage.
Mais l’un des hommes approcha et me porta un coup au côté avant de me faire trébucher. J’entrevis son casque, et, à ma grande horreur, une visière caractéristique. En forme de T, elle inspirait la terreur à la Galaxie depuis plusieurs millénaires.
Les Mandaloriens étaient déjà là.
Les autres firent moins de difficultés que moi et s’allongèrent au sol.
— Allez prévenir le
Mand’alor, lança l’un des guerriers à un autre.
— « Le » Mandalore ? chuchotai-je à Thnod. Ce n’est pas une planète ?
— Nous nommons notre principal monde
Manda’yaim, m’apprit-il à voix basse. Le
Mand’alor est le chef de notre peuple.
— Donc s’il est là, c’est qu’il ne s’agit pas de simples mercenaires, devinai-je aussitôt.
— C’est ce qu’on dirait…
Quelques minutes passèrent, puis le messager revint en compagnie d’un nouvel homme. Les plaques argentées de son armure ressortaient sur sa combinaison d’un bleu profond ; deux blasters pendaient à sa ceinture.
— Voyons ce qu’on a, lança-t-il d’une voix déformée par le filtre de son casque.
— On dirait que ce sont des soldats républicains, dit un des guerriers.
— Pas sûr qu’ils méritent de se faire appeler « soldats » ! s’esclaffa un autre.
— La République n’a pas d’armée, lâcha leur chef d’une voix dure.
— Vous vous trompez, lançai-je avec aplomb.
Il tourna sa tête vers moi ; à cause du casque, je ne pouvais pas voir ses yeux, mais j’eus l’impression qu’il me jaugeait du regard.
— Vraiment ? lâcha-t-il d’une voix basse, presque menaçante. Vous pensez que quelques vaisseaux lourds et des grades pompeux suffisent à faire une armée ?
— Notre objectif est le maintien de l’ordre et la protection de la paix, répliquai-je. C’est bien plus proche de ce qu’est une armée qu’un assemblage de brutes tendant une embuscade à une mission diplomatique.
— Vous ne savez pas de quoi vous parlez.
Il fit alors la dernière chose à laquelle je m’attendais : il enleva son casque.
Son visage me surprit. Le
Mand’alor était bien plus jeune que je ne le pensais, probablement plus que moi ; son teint mat et ses cheveux noirs longs et bouclés lui donnaient un air juvénile qui ne s’accordait pas avec l’armure massive qu’il portait.
Son regard était dur. Presque usé. Il avait vu des choses terribles et cela l’avait durablement marqué. Mais malgré cette patine déposée par les événements, il restait aussi dur que l’acier – Inflexible.
— Vous pensez que mes troupes ont attaqué votre vaisseau ? me demanda-t-il.
Sa voix était plus chaude qu’avec le casque, mais elle demeurait ferme malgré tout.
— Qui d’autre ? Les Kordiens ? Ils n’ont pas la technologie nécessaire pour ça.
— Vous ignorez beaucoup de choses, c’est évident. Mais je ne vais pas combler vos lacunes. Silas ?
Un guerrier s’avança.
— Nous allons vérifier leurs identités. Connecte-toi au registre du Département Judiciaire.
— Une minute ! intervins-je aussitôt. Comment pouvez-vous avoir accès à ces données ?
— Je suis celui qui pose les questions, indiqua le
Mand’alor.
Il n’en dit pas davantage. Pendant quelques instants, nous restâmes ainsi, attendant que le dénommé Silas établisse l’accès avec la base de données des agents de la République. L’espace d’un instant, il orienta son datapad vers moi pour capter mon identité.
— Je l’ai, lança le guerrier en s’adressant à son chef. Colonel Jagen Tarsus Eripsa. Né sur Bespin. Père sénateur du secteur Anoat et du Corridor d’Ison, mère présidente de TibannaCorp. Passé par l’Académie d’Anaxes.
Cela ne fit qu’arracher un reniflement de dédain au
Mand’alor. Ce qui, naturellement, avait le don de me mettre hors de moi.
— Vous vous croyez meilleur ? lui assénai-je en dépit de toute prudence.
— Oui, me répondit-il simplement.
Je n’étais pas du genre à me vanter, ou si peu. Mais je n’acceptai pas non plus qu’on me rabaisse en prétendant que je n’avais pas mérité ma situation ! Anaxes ne s’obtenait pas sans efforts (du moins, quand on n’était pas soi-même Anaxsi) et je n’étais pas responsable du statut de mes parents. Le reste, j’en étais même fier. Mes prénoms étaient ceux de mes aïeux – mon grand-père maternel, Jagen Astrell, et mon grand-père paternel, Tarsus Eripsa, hélas tous deux décédés prématurément. Et être né sur Bespin, l’une des plus belles colonies corelliennes, n’avait rien de honteux.
— Jango, lança alors un autre guerrier, regarde celui-là.
— Qu’y-a-t-il, Miles ? demanda le
Mand’alor en se tournant vers l’homme qui lui était indiqué.
— C’est un Jurgan, cracha le dénommé Silas.
Une lueur de haine apparut dans le regard de Jango – une haine profonde, viscérale, qui n’était pas sans me rappeler celle que je vouais aux esclavagistes qui avaient inspiré ma carrière de militaire.
— Un
aruetiise… De ce clan de traîtres…
— J’ai quitté mon clan, se défendit Thnod avec autant de vigueur que possible, compte tenu des circonstances. Je n’ai plus rien à voir avec les miens.
— Ah ouais ? Comment être sûr que tu n’es pas un espion des Death Watchs ?
Le mépris latent dans ses mots me décida à intervenir. Tout cela sentait le jugement expéditif à plein nez.
— C’est un de mes hommes.
— Ça reste à voir, répliqua le chef des Mandaloriens.
— Il est à mes côtés depuis plusieurs mois. Je lui fais confiance.
Jango me jaugea du regard.
— Vous êtes prêt à vous porter garant de lui ?
— Et de chacun de mes hommes, acquiesçai-je aussitôt.
Il continua à m’observer ainsi, pendant près d’une minute, avant de rendre enfin sa décision.
— Ramassez vos armes, nous ordonna-t-il. Sauf vous, Jurgan. Si vous faites le moindre geste suspect, je vous abats.
— Que comptez-vous faire de nous ? demandai-je, étonné.
— Vous ne manquez pas d’aplomb… constata-t-il, presque approbateur. Votre vaisseau s’est écrasé près d’ici, n’est-ce pas ? Nous allons nous y rendre et retrouver le reste de votre équipage. Ensuite, nous aviserons.
— Comment savez-vous que nous ne sommes pas les seuls survivants ?
— Logique. Si c’était le cas, vous auriez pris votre matériel de survie avec vous, plutôt que de l’abandonner sans surveillance.
C’était plutôt bien raisonné, je devais l’admettre.
— Allez, guidez-nous.
Je fis quelques pas avant de m’arrêter aussitôt.
— Et pourquoi vous amènerais-je à notre campement ?
— Nous ne sommes pas vos ennemis, me répondit le
Mand’alor.
— Ça reste à voir.
— Plus vous perdez de temps ici, moins nous en aurons pour nous préparer à l’arrivée de notre
véritable adversaire ! s’énerva-t-il alors.
J’acquiesçai silencieusement. Mon instinct me soufflait qu’il disait la vérité. Après une centaine de mètres de progression, alors qu’il se trouvait à mes côtés, je lui dis à voix basse :
— Nous sommes ici parce que le gouvernement kordien a demandé un négociateur pour traiter avec des mercenaires mandaloriens.
— Et vous avez été abattus par un missile dès que vous avez parlé avec le contrôle spatial, répondit Jango d’un ton sec. Nous l’avons vu sur nos scopes.
— Vrai.
— Korda est un immense piège, et nous sommes tombés dedans les premiers.
— Mais un piège tendu par qui ? demandai-je en écartant une branche à hauteur de tête.
— Les Death Watch.
— Connais pas.
— Ce sont des dissidents mandaloriens, m’expliqua-t-il avec une amertume palpable dans la voix. Il y a quelques années, un protecteur du nom de Jaster Mereel – notre
Mand’alor – a décidé d’un code de conduite de notre peuple. Il n’a pas eu que des alliés. Certains de nos clans se sont détournés de lui : Vizsla, Reau… Jurgan. Ils ont formé un groupe nommé Death Watch, destiné à rendre aux Mandaloriens ce qu’ils estiment être « notre fierté »…
— C’est-à-dire ?
— Une place galactique de premier choix. En temps qu’ennemis de la République.
— Génial… marmonnai-je sans joie. Il ne manquait plus que ça. Nous sommes loin de votre secteur, signalai-je alors.
— Il y a trois mois, nous avons été recrutés pour une mission de sécurisation sur ce monde. Une opération de routine… Sur le flimplast. C’était en fait un piège tendu par les Death Watch et leurs alliés au gouvernement de Galidraan. Jaster Mereel a été tué. Nous sommes parvenus à évacuer les blessés et les morts, mais j’ai choisi de rester ici avec une poignée de guerriers pour faire payer
TOR Vizsla.
— Et vous faites ça depuis trois mois ?
— Nous les avons harcelés comme possible. Mais ils ont reçu des renforts récemment… Et nous ne faisons plus le poids. Maintenant, je cherche à sortir mes hommes de là.
— Et nous pourrions être votre porte de sortie, devinai-je aussitôt.
— Tout juste.
Nous approchions du camp, mais personne ne semblait avoir repéré notre approche. Cela m’agaça considérablement. L’équipage du
Forte Tête était sans conteste efficace et gérait parfaitement bien le vaisseau, mais au sol, ils étaient aussi à l’aise qu’une bande quarrens sur Tatooine.
— Il y a quelque chose ! entendis-je finalement alors que nous n’étions plus qu’à quelques dizaines de mètres de notre objectif. À vos postes !
Je ne reconnus pas la voix qui lança l’ordre, et c’était tant mieux pour son propriétaire. En plus de ne pas monter la garde correctement, il signalait sa position à un éventuel ennemi…
Au moins, le travail avait avancé en notre absence. Un campement de fortune avait été aménagé contre la petite falaise que j’avais désigné comme fond du campement. À sa base se trouvaient plusieurs rangées de panneaux de duracier, devant lesquels des tranchées censées empêcher le passage avaient été creusées. Les droïdes avaient fait un travail net et rapide. Plusieurs plaques avaient été abaissées pour établir un pont de fortune, que nous empruntâmes pour entrer.
— Je ne vous félicite pas pour votre vigilance, grondai-je en pénétrant dans l’espace entre les tentes tout juste montées. Les Kordiens auraient pu attaquer pendant mon absence.
— Ce ne sont pas les Kordiens qui nous inquiétaient, dans l’immédiat… répondit Galieet en sortant d’une des tentes.
Il jeta un regard suspicieux à Jango, qui se tenait toujours à mes côtés.
— Les capteurs étaient activés, ajouta-t-il avec un lourd sous-entendu.
Ils étaient donc informés de notre capture par les Mandaloriens depuis le début. Mais comme il ne s’agissait que de balises radar légèrement perfectionnées, il leur manquait le plus important : le son.
— La situation a évolué, déclarai-je sans ambages. Nous devons parler à l’ambassadrice Brenn’
TOR Elle apparut alors, sortant de la même tente que Galieet.
— Je suis à votre disposition.
Elle s’adressa alors à Jango.
— Je suis l’ambassadrice Sofis Brenn’
TOR, native de Caamas et mandatée par la République Galactique. C’est un plaisir de vous rencontrer.
— Jango Fett, répondit l’autre en serrant la main que Brenn’
TOR lui tendait.
Il ne fit pas mention de sa qualité de
Mand’alor, et je la gardais par-devers moi, même si cette omission titillait ma curiosité.
— Vous êtes toujours aussi polie face aux inconnus armés ?
— La courtoisie est la base de la bonne entente dans la galaxie, répondit l’ambassadrice avec un sourire. Et cela n’a jamais tué personne.
— Vous seriez surpris…
— Je souhaite qu’il n’y ait pas de malentendu entre nous : sommes-nous à présent vos otages ?
— Non.
Brenn’
TOR ne sembla pas surprise.
— Bien. Dans ce cas, peut-être pourrions-nous poursuivre cette discussion à l’intérieur ?
Elle nous invita à entrer dans la tente, étonnamment bien meublée. Elle était occupée par de petits fauteuils légers mais élégants et confortables, ainsi que par une table de bois véritable. Je reconnus le mobilier de la capsule diplomatique située sur la partie ventrale du
Freedom Messenger. Cette partie-là du vaisseau était particulièrement blindée… La corvette appartenait au Sénat, après tout. Et les politiciens préféraient généralement être à l’abri pendant que le petit personnel affrontait les risques du métier.
Fett nous exposa toute la situation, dans une version plus détaillée que ce qu’il m’avait raconté. Il nous parla des Death Watch, de leur chef, Vizsla, de la guerre qu’il menait et des pertes que les Véritables Mandaloriens – ceux de Jango – avaient subies. Ils n’avaient plus de vaisseau capable de franchir les défenses kordiennes… Seule une intervention du Département Judiciaire pouvait mettre rapidement un terme à cette situation.
Nous convînmes d’une alliance.
L’ambassadrice Brenn’
TOR aurait souhaité négocier avec nos adversaires pour stopper le conflit sans effusion de sang. Mais ni moi ni Jango n’y étions vraiment favorables, et elle dut se ranger à notre avis.
Fett n’avait que peu de guerriers avec lui, mais il battit le rappel des patrouilles envoyées pour repérer l’avancée des Death Watch… Et pour chasser. Coincés depuis trois mois, les Mandaloriens ne disposaient plus de rations suffisantes pour tenir sans un apport local… De notre côté, il restait bien quelques provisions, mais si cette situation s’éternisait, nous serions ravis d’avoir des compléments.
Grâce à l’accès Holonet du satellite kordien piraté par les Mandaloriens, un signal de détresse fut émis. La base républicaine la plus proche était loin, beaucoup trop pour intervenir à temps – d’autant que je connaissais bien la réactivité relative de notre administration centrale… Aussi, je proposai de le transmettre à mon cousin Theran via sa ligne de com privée. La Corporation Astrell disposait d’une force de défense privée, et Taris était dans un secteur proche. Si quelqu’un pouvait intervenir à temps, c’était bien lui.
Le reste de la journée fut consacré aux derniers travaux du camp. Par chance, le réservoir du vaisseau n’avait pas explosé, ce qui nous permettait de disposer d’un potentiel énergétique très confortable. Le vaisseau lui-même avait été quelque peu réaménagé pour servir de retranchement. Sa tourelle de défense, ridiculement faible dans l’espace, était au sol une arme formidable que nous installâmes sur le flanc, non sans quelques difficultés.
Les Mandaloriens travaillèrent aux côtés de mes hommes. Je me pris à les observer. J’étais fasciné – je le suis d’ailleurs toujours – par leur sens de l’organisation. Ils n’avaient ni grades formels, n’échangeaient que peu d’instructions et semblaient plutôt obéir à l’habitude qu’autre chose. Ayant été élevé dans un système très réglementé, où la hiérarchie était si importante, cette répartition des tâches, volontaire et non-imposée, me semblait impossible. Mais les Mandaloriens semblaient en faire la règle : chacun faisait le maximum pour le groupe, sans se préoccuper des instructions décidées par un quelconque chef, et cela m’impressionnait.
Mais ils avaient bien un leader. Fett. Jango Fett. Cet homme… Il dégageait quelque chose, une aura de charisme. L’efficacité des supercommandos lui était (au moins en partie) due. Il était jeune, sans doute plus que moi, mais son expérience écrasait mes maigres états de service. J’appris par la suite qu’il était né pauvre et que sa prise d’armes était le résultat du meurtre de sa famille ; mais, portant le titre de
Mand’alor, il entrait dans une logique pluri-millénaire, un pouvoir qui nous dépassait de beaucoup lui et moi. C’était un descendant des Zhells héritier de la puissance des Taungs, et en cela il m’était largement supérieur.
Mais, pour l’heure, je voyais aussi en lui un sacré enquiquineur.
En fin d’après-midi, je me retrouvai à l’extérieur du campement. Là, quelques Mandaloriens entraînaient au tir des membres de l’équipage, plus habitués à se battre avec des ordinateurs qu’avec des blasters. Je repérai Galieet, à qui le dénommé Silas enseignait le port des armes de poing. Le Givin se montrait attentif, mais ses talents limités dans ce domaine semblaient exaspérer son instructeur.
— Et dire que vous appelez ça des « guerriers »…
Je me retournai ; Fett avait remis son casque, mais il restait reconnaissable.
— Non, des soldats, répondis-je calmement. Mettez-le aux commandes d’une corvette, et vous verrez ce qu’il vaut…
— Ce n’est pas ce que j’appelle se battre, répondit-il avec dédain.
— Vraiment ? Alors, qu’est-ce donc ? Un plaisir ?
— Un jeu. Tout se passe à distance, avec un incroyable sentiment d’impunité. Les boucliers, les canons longue portée… Tout cela n’a rien d’un véritable combat.
— Vous vous trompez, Fett. Vous ne savez pas ce que l’on ressent aux commandes d’un vaisseau spatial, quand on a des vies à sa charge et peu de chances de s’en sortir en cas d’erreur.
— Sur le champ de bataille, on n’a pas non plus de deuxième chance.
Cours vite,
tire bien, ce sont les règles que l’on peut suivre.
— Dans l’espace, c’est plus une question d’unité. Ce n’est pas le nombre, mais la cohésion qui fait la force. Un simple chasseur, bien employé, peut avoir plus d’importance qu’un croiseur mal placé.
— Non. Dans ce genre de batailles, le vainqueur est celui qui a la plus grosse flotte. N’est-ce pas pour cela que vous avez fait construire votre destroyer ?
Ainsi, Fett était au courant pour le chantier du
Knight’s Blade.
— Vous êtes bien informé pour quelqu’un qui est coincé sur ce caillou depuis trois mois…
— J’ai de bons informateurs. Alors ?
— Il y a du vrai, et du moins vrai. L’armement lourd est un atout, mais c’est surtout le blindage et la capacité d’accueil des chasseurs qui m’ont intéressé.
— Pour que d’autres puissent aller se faire massacrer à votre place ?
Piqué au vif, je répliquai :
— Je ne laisse pas volontairement mes hommes dans un merdier,
moi.
Il mit quelques instants avant de répondre.
— Vous êtes un beau parleur. Fort en mots, mais sans rien derrière.
— Je doute que vous valiez mieux.
— Vous méritez une bonne correction.
Un défi ? Voilà qui était tentant. Il était en bonne forme, mais amaigri par ses mois passés sur Korda. De mon côté, je manquais un peu d’entraînement, mais je pouvais me targuer d’avoir de bons réflexes.
— Entendu, répondis-je avec un sourire confiant. Blasters en position paralysante ?
— Je pensais à un vrai duel. À l’ancienne.
Il fit signe à l’un de ses hommes et lui cria quelque chose dans leur langue. En réponse, le soldat lui apporta ce qui ressemblait à une vibrolame assez brillante.
—
Beskad, déclara Jango en exposant l’arme. Vous n’en avez pas, bien entendu. Mais une vibrolame fera l’affaire.
— Entendu, dis-je en sentant mon assurance fondre comme neige au soleil. Et au niveau des protections ?
— Combinaison de combat. Rien de plus.
— On arrête au premier sang, donc…
— Exact.
Il commença à retirer ses plaques de blindage, tandis que j’ôtai mon plastron. L’ambassadrice Brenn’
TOR s’approcha alors de moi.
— Ne pouviez-vous pas faire autrement ? me demanda-t-elle.
— Pardon ?
— Ce duel est risqué. Quel que soit le vainqueur, il ne l’aura emporté qu’en battant son adversaire. C’est le genre de situations qui engendrent rancœur, susceptibilité et jalousie. Un cocktail qui pourrait être fatal à notre toute jeune alliance.
— Vous voulez que je perde ?
— Je n’ai pas dit ça.
— Mais vous le pensez.
— Colonel, en mon for intérieur, j’espère que vous parviendrez à régler ce différend dans le respect de chacun. Et sans blessure.
— Si je ne le fais pas, nous perdrons totalement le respect des Mandaloriens. Ils ne jurent que par la force…
— Et vous aurez l’occasion de montrer la vôtre très vite. Nos ennemis approchent…
Je restai silencieux, l’espace de quelques secondes. Derrière moi, Fett avait fini d’ôter son équipement et m’attendait avec une impatience croissante.
— Il sera trop tard, lâchai-je alors avant de me détourner de l’ambassadrice.
Je revins vers mon rival alors qu’elle s’éloignait vers le camp. Prévenu par les Mandaloriens, quelques-uns de mes hommes avaient approché. Galieet, à peine remis de sa dure séance d’entraînement, me tendit une vibrolame en restant silencieux. Je pris l’arme et la soupesai : elle était légère, et la poignée confortable. La portée était sensiblement la même que pour le
beskad, ce qui me donnait un avantage sur Fett, à l’allonge réduite.
Tiken me fila une tape sur l’épaule en me souhaitant bon courage ; quant à Thnod, il me chuchota quelques derniers conseils à l’oreille.
— Il est habitué à se battre en armure et cela va jouer sur la force qu’il met dans ses déplacements. Il pourrait être déséquilibré s’il cherche à donner un coup trop puissant… Il faut donc le forcer à attaquer en premier…
— Merci, lui répondis-je à voix basse avant de m’éloigner.
Je me trouvai finalement face à Fett, l’épée en main. J’adoptai une posture vaguement Jedi, selon mes critères – et ceux de mes holofilms favoris : les deux mains sur la garde, la lame légèrement inclinée et de biais, prêt à frapper.
— Prêt ? me lança-t-il alors.
— Allons-y.
Il ne fit aucun geste, et je ne me précipitai pas non plus, gardant à l’esprit les conseils de Thnod. Cette passivité sembla l’agacer ; il se mit marcher sur le côté, et je l’imitai aussitôt, comme pour délimiter l’arène circulaire dans laquelle allait avoir lieu le combat. Nous fîmes un, deux puis trois tours, sans qu’aucun de nous ne passe à l’attaque.
Puis, soudainement, tout accéléra.
J’eus le sentiment qu’il allait attaquer une fraction de seconde avant de le voir prendre appui sur son pied gauche pour se propulser vers moi, le
beskad en avant. Je m’écartai aussitôt et n’évitai sa lame qu’à quelques milimètres ; je répliquai alors par un grand balayage qui s’acheva quand nos deux armes se heurtèrent. Tout s’était déroulé extrêmement vite, mais ce n’était que le début du duel.
Nous reprîmes position sur nos appuis, et, l’adrénaline aidant, nous passâmes à l’attaque. Fett avait du talent, c’était indéniable ; mais je me débrouillai pour éviter ses coups et tentai d’y répliquait, sans trop de succès d’ailleurs.
Le
Mand’alor était bien plus proche de moi, à présent, aussi puis-je essayer une manœuvre hasardeuse ; me protégeant de son épée avec ma propre lame, je me jetai sur lui pour l’entraîner au sol, dans la poussière et les cendres.
La manœuvre le surprit et il tomba, avec moi.
—
Fierfek ! lâcha-t-il en heurtant la terre séchée.
Il tenta de m’assener un coup de poing, que j’évitai une fois encore de justesse.
Le deuxième m’atteignit en pleine poitrine.
Fett ne le savait pas, mais je gardai là un médaillon familial – un emblème de ma famille en argent, renforcé de pigments d’un bleu nuit magnifique, issu des coquillages kegyssens de la mer des As sur Corellia, non loin du domaine de Tayrili. C’était une tradition familiale, et je ne m’en séparais jamais.
La force du poing du guerrier heurtant le métal dur logé sur mon torse : c’était là un cocktail redoutable sur le papier, et qui effectivement nous neutralisa tous les deux.
Nous nous retrouvâmes côte-à-côte au sol, moi tentant de reprendre ma respiration, lui massant ses phalanges endolories.
— C’est… un… haletai-je difficilement.
Fett m’interrompit soudainement.
— Taisez-vous, m’intima-t-il avec dureté.
Je lui obéis. Je n’entendis que le sang taper dans mes oreilles, ou du moins était-ce que je crus un instant. Retrouvant peu à peu mes esprits, je sentis alors que les vibrations venaient de l’extérieur, et non de l’intérieur de mon corps.
Un tir de blaster retentit, suivit par un horrible rugissement.
— Au nom de la Force, lançai-je alors, qu’est-ce que…
Des commandos mandaloriens sortirent alors des arbres en courant, tirant derrière eux avec acharnement. Je me relevai aussitôt, persuadé que les Death Watch nous avaient déjà retrouvés.
Mais au lieu de soldats en armure, c’est une immense créature qui surgit de la forêt à leurs trousses, emportant deux arbres sur son passage. Elle était d’aspect vaguement lézardesque, avec une collerette osseuse et des vertèbres apparentes ; une vision de cauchemar incarnée. Une lueur de folie brillait dans ses yeux jaunâtres.
Une Mandalorienne, à l’armure dorée, se retourna et jeta une grenade pour le monde. Voyant que l’explosion ne le ralentissait pas, elle reprit sa course.
Les Mandaloriens en fuite se précipitèrent vers nous, et la bête les suivait. Nous n’avions aucune chance de rejoindre à temps le camp de fortune et ses maigres protections. Fett jura et attrapa les deux pistolets blasters qu’un de ses hommes lui lança avant de faire feu sur la tête de la bête. Thnod faisait de même avec son blaster… Et le mien.
J’étais désarmé.
— Galieet ! Tiken ! Courez ! Faut qu’on se mette à l’abri !
Ils ne se firent pas prier. Par instinct, juste avant de démarrer, je ramassais ma vibrolame, pourtant bien futile face à ce monstre.
Mais ces mouvements attirèrent l’œil de la bête, qui incurva légèrement sa trajectoire vers ces nouvelles proies, moins dérangeantes que celles couvertes de métal et armées de blasters.
Je n’avais aucune chance de courir assez vite pour lui échapper, aussi décidai-je de rester là pour focaliser son attention.
— Colonel ! hurla Thnod en me faisant signe de partir.
Le feu concentré des Mandaloriens ne parvenait pas à pénétrer la cuirasse d’écailles du monstre, ni même à le ralentir. La seule solution pour moi était de me jeter sur le côté au moment de son passage et de compter sur son élan pour qu’elle s’éloigne de moi.
Alors que la bête n’était plus qu’à quelques mètres, je me rendis compte que j’avais sous-estimé sa largeur…
Je sentis le choc dans tout mon corps. La bête me cueillit au moment où je sautais sur ma gauche, et me catapulta sur sa tête où j’heurtais son horrible collerette.
Étourdi, écorché, mais globalement indemne, je me retrouvai derrière ses yeux et relativement à l’abri de son courroux sauvage. La Force m’avait sauvé, sans que je ne sache ni comment ni pourquoi.
Mon uniforme était déchiré et se prenait dans les écailles de la bête. D’une main, je sentis la dureté de la collerette osseuse, de l’autre…
De l’autre, je sentis de la chaleur, et une surface lisse, presque douce.
Je posai mon regard sur cette zone, derrière les plaques frontales. Elle était dégagée, vulnérable, et je disposai d’une lame !
Je pris mon arme et en positionnai la pointe au milieu de cette surface de chair accessible. La bête grogna et tenta de relever la tête.
J’appuyai et ma lame s’enfonça dans son crâne comme dans du beurre.
Le monstre poussa un rugissement de douleur et se débattit, m’envoyant valser dans les airs une fois encore. Alors que je me réceptionnai tant bien que mal, je le vis trébucher et s’abattre sur le sol.
J’allais sans doute avoir des bleus sur toute la surface du corps, mais je me sentais étrangement bien. Je vis Fett et ses hommes approcher prudemment de la bête, tandis que Thnod accourrait pour m’aider à me relever.
— Vous êtes indemne ? me demanda-t-il en m’attrapant la main.
— Plus ou moins, répondis-je avec une grimace.
— Vous avez eu de la chance. Beaucoup de chance.
Fett l’entendit et approcha lentement.
— Je suis d’accord avec le renégat, annonça-t-il.
Thnod se tendit mais ne répondit pas.
— C’est une sorte de zakkeg local, expliqua le
Mand’alor en désignant le monstre. Un prédateur que nous avons visiblement dérangé sur son territoire et qui cherchait à nous le faire payer.
— C’est ce que j’ai cru comprendre, ouais… marmonnai-je.
L’ambassadrice Brenn’
TOR arriva très vite, accompagnée par Galieet et Tiken.
— Vous allez bien, constata-t-elle en me voyant debout.
— Je m’en suis tiré.
— J’en conclus que l’affaire du duel est réglée ?
J’hésitai sur la réponse à avoir. Techniquement, le combat s’était achevé sur un match nul…
À ma grande surprise, ce fut Fett qui répondit.
— Je retire ce que j’ai dit. Même si c’est le résultat d’une chance éhontée, tuer une de ces bêtes demande… Un certain sang-froid.
C’était un appel à la conciliation, et je m’empressai de le saisir.
— Et garder ses hommes en vie pendant trois longs mois sur une planète aussi hostile que celle-ci mérite à coup sûr le respect. Vous aviez raison, Madame, ajoutai-je en direction de Brenn’
TOR. Le duel n’était pas la meilleure des solutions…
Elle eut un sourire amusé.