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Musique pour accompagner la lecture]
Nous venons de mondes bien différents. Mais tous, nous partageons ce pouvoir qui coule dans nos veines depuis notre naissance.
- CHAPITRE II -
Poe Dameron tira encore une fois sur son uniforme, dans l’espoir que le tissu se desserre un peu. Il était catégorique, même les combinaisons de pilote étaient plus confortables que cet attirail beige brodé de fils cuivrés, qui lui interdisait tout mouvement trop ample et le faisait bouger comme un porg. Lorsqu’il le portait, il avait l’impression que même C3-PO disposait d’une meilleure mobilité. Seule la lourde cape brune lui plaisait. Elle ajoutait une prestance à sa silhouette et l’aidait à se sentir plus en confiance face aux six autres Sénateurs à la tête de la République Galactique Unifiée.
Coruscant avait été libérée quelques mois après la Bataille d’Exegol, par un acte héroïque de Finn, qui se sentait très mal à l’aise à chaque fois qu’on lui rappelait son rôle décisif dans cette victoire – Poe veillait donc à le lui rappeler souvent. Les leaders de la Résistance avaient alors été forcés de s’allier aux puissantes familles du Noyau pour réfléchir à une nouvelle manière d’organiser la République, et éviter la résurgence d’un nouvel Empire. Avoir des milliers de Sénateurs, chacun représentant plusieurs dizaines voire centaines de mondes, s’était révélé inefficace, empêtrant le système dans une bureaucratie pesante et une corruption grandissante qui l’ont fait s’écrouler sur lui-même. La Nouvelle République avait tenté de déplacer le siège de pouvoir de planète en planète pour que les systèmes éloignés du Noyau se sentent d’avantage inclus dans la République. Quelques années avant que la guerre n’éclate à nouveau, il avait été proposé d’élire un Premier Sénateur pour remplacer le Chancelier, dans le but qu’une voix forte sorte du lot et apaise les divisions au sein du Sénat. Mais le climat d’instabilité avait mis un terme à ces tâtonnements, et la stratégie de démilitarisation de la Galaxie s’était révélée pour le moins infructueuse, en parachevant de précipiter cette Nouvelle République vers sa chute.
Pour tenter d’enrailler la corruption, d’avoir des voix multiples prenant les décisions tout en évitant de faire stagner les débats entre des milliers de Sénateurs, la RGU avait opté pour un septemvirat, sept Sénateurs, chacun représentant une des régions de la Galaxie : le Noyau Profond, le Noyau, les Colonies, la Bordure Intérieure, la Zone d’Expansion, la Bordure Médiane et la Bordure Extérieure, que Poe représentait en tant que natif de Yavin IV. Un territoire compliqué, car encore plus qu’ailleurs les syndicats du crime y étaient puissants, longtemps impunis dans cette région. Il se devait de rester droit, et tout faire pour représenter les voix qui se sentaient mises à l’écart du gouvernement galactique.
Des discussions avaient commencé pour savoir s’il fallait modifier la délimitation des régions galactiques avec des critères plus modernes, mais les voix avaient été en faveur d’un résolu conservatisme. C’est à ce moment-là que Poe avait compris que malgré les apparences, il allait être compliqué de faire bouger les choses. Au moins sur un champ de bataille, ou à bord d’un cockpit, chaque avancée, chaque victoire ou chaque défaite était claire. Mais sur le terrain de la politique, il avait l’impression d’avancer dans le noir, en permanence. C’était seulement après six ans à son poste de Sénateur qu’il commençait à appréhender les effets des décisions prises au tout début de son mandat. Oui, Poe préférerait être au milieu des tirs de blasters plutôt qu’au prise avec des politiciens, mais c’était ça, à présent, son champ de bataille. Il devait poursuivre la lutte pour laquelle il avait tant sacrifié.
Il descendit de la navette de transport, bondée à cette heure matinale, et avança sur la grande place bétonnée, en direction du Sénat. Il leva brièvement la tête vers les anneaux orbitaux qui couvraient désormais une large partie du ciel de Coruscant. La population de la planète ne cessait de grandir, surtout depuis qu’elle était redevenu le centre politique galactique, et les plus riches d’entre eux ne rêvaient que de pouvoir s’élever encore plus haut que les autres. Deux anneaux étaient entiers, un troisième en construction. À ce rythme, la planète finirait un jour enveloppée dans une immense sphère de métal. Il n’aimait pas l’existence de ces anneaux, mais au moins ils lui rappelaient une de ses rares victoires franches en tant que Sénateur, augmenter les contrôles sur la provenance des minerais d’acier pour éviter qu’ils soient extraits par des esclaves (ce qui avait fait quadrupler la facture globale et déplu à de nombreuses corporations).
Au pied d’un building en duracier, Finn et Rose l’attendaient. Il les voyait se tenir la main, il lui murmura quelque chose à l’oreille, et ça la fit rire. Ça mis du baume au cœur du vieux pilote. Finn avait peu changé, ces dernières années. Seule une cicatrice qui partait de sa tempe et barrait sa joue était apparue à la suite de la reprise de Coruscant. Il passait beaucoup de temps à aider Rey à l’Académie, mais il essayait de passer sur Coruscant aussi souvent que possible. Quant à Rose, elle avait désormais une longue mèche blanche dans ses cheveux noirs, qu’elle laissait retomber autour de son visage.
C’était bien plus facile de jouer au Sénateur quand Poe se sentait entouré par les gens en qui il avait confiance. Il pouvait déjà compter au quotidien sur Connix. Sans elle, il serait complètement perdu au milieu de toutes ses obligations de Sénateur. Représenter des mondes aussi divers et aux intérêts aussi éloignés que ceux de la Bordure Extérieure demandait de considérer à chaque instant une quantité phénoménale de données. Il soupçonnait parfois que la décision de gouverner en septemvirat avait été pensée pour que les soutiens de Leia aient le moins de poids possible dans le nouveau système de gouvernance, ou en tous cas qu’ils perdent du temps et de l’énergie en restant empêtrés dans des conflits irréconciliables, pendant que les crapules tentaient de magouiller pour revenir à un système aussi corrompu qu’avant.
— Ah ! Enfin M. Le Sénateur daigne nous honorer de sa présence ! s’exclama Finn en dissimulant difficilement son sourire, et en serrant son ami dans ses bras. On l’attend depuis à peine, quoi, une demi-heure ?
— Plutôt le double, appuya Rose en s’avançant à son tour vers Poe. Je pensais que tu voulais arriver tôt au Sénat pour te préparer.
— C’était le plan oui, dit-il en passant la main dans son épaisse barbe sombre. Mais Connix me retient depuis des heures, il paraît que je ne suis pas au point sur les conflits historiques entre Eiram et E’ronnoh, et qu’arriver à la session sans être assez préparé était risqué.
— Elle pense que les Néo-Centristes pourraient tenter de raviver de vieilles querelles ? s’inquiéta Rose. Mais pourquoi ?
— Juste pour nous faire perdre du temps. Détourner notre attention sur des conflits mineurs. Et pendant ce temps, ils auront le loisir de lâcher tout le poodoo qu’ils souhaitent, soupira l’ancien pilote.
Ils se mirent en route tous les trois vers le haut bâtiment en forme de champignon, déjà clairement visible bien qu’il fût encore loin.
— Mais le cas de ces deux planètes, ce n’est pas ce qui m’inquiète le plus, reprit Poe. Connix est vraiment douée quand il s’agit d’avoir des oreilles partout au Sénat, et elle est certaine que tôt ou tard, Dashit va ramener le cas de l’Académie Organa sur le tapis.
— Quelle enflure ! ne put retenir Finn.
— Il ne peut vraiment pas encadrer que Rey veuille rester indépendante, hein.
— J’ai bien peur que non, continua-t-il. Mais il se fiche bien de l’Académie en tant que telle, c’est surtout d’avoir un groupe de guerriers utilisateur de la Force hors du contrôle du Sénat qui l’inquiète.
— Mais Rey ne forme pas des guerriers ! s’indigna Finn.
— Malheureusement, ce n’est pas comme ça que Dashit voit les choses. Et c’est à son tour de présider la séance d’aujourd’hui.
En enfant typique d’une riche famille de Coruscant, Cos Dashit représentait les mondes du Noyau, et il était le leader des Néo-Centristes. Le Sénateur du Noyau Profond et la Sénatrice de la Zone d’Expansion se rangeaient derrière lui, et malgré la théorique égalité des sept Sénateurs et Sénatrices en poste, il avait rapidement commencé à agir comme s’il était au-dessus des autres. Poe avait tenté d’être la voix d’une force politique d’opposition, et de rassembler des alliés sous la bannière des Résistants (trouver des noms n’avait jamais été son fort). Il avait gagné l’adhésion du Sénateur des Colonies, un Abednedo qu’il appréciait beaucoup, mais qui n’était résolument pas le chauve-faucon qui volait le plus loin. Les deux autres sénatrices, une Sarkhai et une Kiffar, s’alignaient pour l’instant avec lui, mais il sentait leur allégeance fragile. Dans l’affaire de l’Académie, ça faisait 3 voix contre 4 pour le décret visant à ce qu’elle soit intégrée à la hiérarchie sénatoriale ou contrainte de fermer, la bascule serait donc immédiate s’il prenait l’envie à Cos Dashit de verser quelques pots de vin.
Le trio arriva en face du Sénat. Sur l’esplanade qui s’étendait dans l’ombre de l’imposant bâtiment, une statue avait été érigée, pour commémorer l’héroïque reconquête de la planète aux griffes des derniers généraux du Premier Ordre. Après l’offensive sur Exegol, le gros de la flotte s’était réuni sur Ajan Kloss, puis s’était rapidement dispersée pour débarrasser la Galaxie des dernières traces du Premier Ordre, qui gardait le contrôle de certaines planète clef. Après six mois de poursuite et de combats acharnés, ils furent repoussés vers leur ultime bastillon, Coruscant. Toute la flotte se retrouva donc à assiéger la planète, mais les derniers vestiges du Premier Ordre ne comptaient pas se rendre si aisément, et malgré leur débâcle lors des autres batailles, ils semblaient ici préparés à tenir un blocus, quitte à affamer la population innocente. C’est Finn qui avait pris les commandes d’une équipe d’intervention avec pour mission de se rendre au sol, débarquant furtivement dans les bas-fonds, dans le but d’infiltrer le haut-commandement et de les forcer à capituler. La mission ne s’était pas déroulée comme prévu. Ils avaient rapidement été découverts, Finn perdit beaucoup d’hommes. Mais à cet instant, le destin frappa, car Finn était devenu célèbre parmi les stormtroopers, il était celui qui avait eu le courage de déserter. Il parvint ainsi à rassembler ses anciens frères d’arme sous la bannière de la Résistance, à mener une révolte au sein des derniers lambeaux du Premier Ordre, ce qui signa son effondrement définitif.
La statue représentait cet instant, Finn à la tête d’un groupe de troopers jetant leur casque au sol pour le suivre au combat.
Poe s’apprêta à gratifier son ami d’une de ces remarques admiratives qui l’embarrassaient tant, mais Finn le prit de vitesse. Il attrapa Rose par la main, et ils coururent jusqu’aux portes du Sénat. Non pas que ça ne lui aurait pas plu de courir également, mais ses vêtements étaient définitivement trop serrés pour ça. Il leva à nouveau la tête vers la statue, et avant qu’il puisse se remettre en route, trois figures sveltes lui barrèrent le passage. Le contour de leur tête était recouvert d’une large capuche métallique vaguement hexagonale, et leur visage par un masque argenté, sur lequel figuraient deux yeux noirs et divers motifs symétriques. Le premier sortit un blaster qu’il colla contre l’abdomen de Poe, tandis que les deux autres se plaçaient de chaque côté, de sorte à cacher l’arme aux passants.
— Tiens donc, mes bons amis du Syndicat Pykes ! lança-t-il en faignant d’ignorer l’arme pointée sur lui. C’est rare de vous voir sur Coruscant, et encore plus – aïe !
— Sénateur Dameron, souffla le Pyke en enfonçant son blaster entre les côtes de Poe, vous semblez rencontrer des difficultés à recevoir nos derniers messages. Mes supérieurs s’impatientent, ils ont… hâte de pouvoir collaborer avec vous, et m’envoient donc collecter votre réponse en personne. Vous vous rappelez les termes de notre proposition, n’est-ce pas ?
— Oui, oui bien sûr ça va me revenir, articula-t-il entre ses dents, le souffle coupé. Si vous pouviez juste appuyer moins fort sur votre – aah ah, non, bon, très bien – votre proposition donc, celle où je suis censé prendre votre partie devant le Sénat, vous reconnaître en tant qu’acteur du commerce galactique, et vous accorder le monopole sur tous les secteurs de la voie Hydienne, en fermant les yeux sur vos activités illégaaah – non reconnues, sur vos activités non reconnues. Cette proposition-là ?
— Précisément, Sénateur.
— Et bien je suis navré, mais la réponse est toujours non, dit-il fermement, en durcissant son regard et sa posture malgré la douleur. Vous ne faites pas partie du modèle galactique que j’espère bâtir ici. Et vos petits tours d’intimidation ne m’impressionnent pas. Vous n’avez aucun pouvoir sur Coruscant, et encore moins devant le bâtiment le mieux gardé de la planète.
— Mes supérieurs seront très déçus par votre arrogance, Dameron. Il est vrai que nous ne pouvons attenter à votre vie ici sans compromettre nos affaires. Néanmoins, nous avons de nombreux yeux sur Coruscant. Si vous veniez à quitter la planète, à vous aventurer dans le vaste monde…
Il rangea son arme, et épousseta la cape de Poe, une épaule après l’autre.
— Enfin, mes supérieurs sont avant tout magnanimes. S’il s’avérait que vous preniez un vaisseau, vous dirigiez droit sur Oba Diah pour les rencontrer, et traitiez avec eux directement, ils seraient prêts à vous laisser une dernière chance de prendre la bonne décision. L’offre serait sans doute moins avantageuse pour vous que celle que nous portons maintenant, mais cela vaudrait mieux que de finir avec un trou dans ce bel uniforme, vous ne pensez pas, Sénateur ?
Poe les regarda s’éloigner, le regard bouillonnant de rage. Puis il vit Finn et Rose revenir vers lui.
— Alors, t’en mets du temps, lança Finn en arrivant à sa hauteur. Je sais bien que tu te fais vieux, mais quand même.
— C’étaient qui, ces trois-là ? demanda Rose, visiblement inquiète.
— Des admirateurs, répondit Poe en calmant sa colère. Venez, ne perdons pas plus de temps.
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Cos Dashit prit soin d’arriver avec quelques minutes de retard. Pas trop, pour ne pas perdre en crédibilité, mais suffisamment pour faire patienter les plus ponctuels, les laisser dans l’expectative. Ce moment, où chacun était là pour l’écouter, lui, qu’il pouvait ainsi disposer de leur temps, c’était des plus… grisants. Il avait été contrarié que Poe Dameron arrivât aussi tardivement, des six c’était celui qu’il préférait voir s’impatienter. Il faut dire que malgré son air renfrogné, qui pouvait impressionner, Dameron n’avait rien d’un politicien. Oh il faisait des efforts, mais au fond il restait un pilote de X-Wing. Un homme d’action. La politique l’ennuyait si vite, c’était un spectacle des plus amusants ! À la moindre contrariété, il montait sur ses grands Fathiers et faisait perdre toute crédibilité à son discours. Il était là, le problème de ces héros qui s’improvisaient politiciens : ils se montraient incroyablement prévisibles.
Il s’installa enfin sur le disque au centre du bureau sénatorial, et il s’éleva à travers le plafond pour arriver dans la grande pièce hexagonale qui accueillait six autres disques similaires. C’était une réplique à échelle réduite de l’ancienne chambre du Sénat qui ne servait plus que pour les sessions exceptionnelles en grand comité et les élections des nouveaux sept Sénateurs.
Il fit un rapide tour sur lui-même pour saluer ses confrères et consœurs, à chaque coin de la pièce, et passa un doigt sur sa moustache. Malgré son jeune âge, son bouc et ses cheveux commençaient à virer au gris. Pas un beau gris argenté, comme les tempes de Dameron, non, juste un gris terne. Tout, chez cet homme, était-il donc destiné à l’horripiler ainsi ? Il s’éclaircit la gorge avec assurance, et commença à dérouler son préambule :
— La Nouvelle République avait fait le choix d'une grande démilitarisation de la Galaxie, ne maintenant qu’une flottille ridicule. En parallèle, les actions illégales menées par la générale Organa dans le cadre de sa Résistance représentaient un bien maigre butin pour les industries de l’armement, engraissées pendant vingt ans par l'Empire, et forcées à une période de disette. Alors forcément, face à des commandes démentielles d'équipement militaire par d'anciens oligarques impériaux, prêts à spolier leur fortune dans un ultime effort pour abattre cette république, ils ne se sont pas fait prier. Et comme les activités de ce type de structure gagnent à rester discrètes, ça n'a pas été un problème de passer sous le radar, menant au renforcement sans limite du Premier Ordre.
Il marqua une pause, observa l’effet de ces premières phrases sur son auditoire, puis reprit.
— Bien sûr, des commandes d'une telle ampleur attireraient forcément l'attention tôt ou tard. La Générale Organa, paix à son âme, présentait toujours un... flair hors du commun pour ce genre d'affaire. Elle a mené l'enquête, elle avait senti avant tout le monde l'orage qui arrivait, et face à l'inaction et l'incompétence de la Nouvelle République, elle a pris les devants, en montant son propre réseau de défense. Dont le sénateur Dameron ici présent était un membre illustre, et même le meneur après la tragique disparition de Son Altesse Royale. Le but de ce récit, est d’éviter que les erreurs de la Nouvelle République ne se reproduisent. Inspirons-nous de la Sénatrice Leia Organa, et décidons aujourd’hui que la République Galactique Unifiée sera le client principal de toutes les plus grosses structures de fabrication militaire de la Galaxie. Construisons un arsenal qui dissuadera toute résurgence d’insurrection, que tous les cartels de la pègre qui font régner leur loi se mettent enfin en rang face à notre puissance de feu, que l’ordre règne enfin dans cette Galaxie bien trop longtemps dépourvue d’une poigne forte ! Voici la raison du texte que je vous propose de voter aujourd’hui, à l’occasion de cette session.
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Poe était totalement sonné. La session avait duré plusieurs heures, le texte d’armement massif de Dashit avait été soumis à un délai pour examen, mais malgré ça il n’arrivait pas à se remettre du speech d’ouverture. Il avait osé. L’immonde salopard, il avait osé. Il fut ramené à la réalité par des voix à côté de lui. Et par BB-8 qui vint rouler contre sa jambe, avec un bib soucieux. Rose et Finn faisaient un compte-rendu détaillé de la session à Connix. Poe remarqua qu’ils étaient dans son appartement, bien qu’il n’ait pas de souvenir précis du trajet retour. Il entendit Rose mentionner une concentration anormale de vaisseaux de combat autour de Kintan, et Finn ajouter qu’une équipe serait envoyée pour enquêter ou négocier, mais que le Sénat avait de gros doutes sur la pleine coopération des Niktos dans cette affaire. La voix de l’ancienne lieutenante le tira définitivement de sa torpeur :
— Hé ho, Poe, tu me reçois ? Est-ce que tu te souviens quel pourcentage Liek’rhe a mentionné pour la taxation des transports non affiliés à une guilde officielle ?
Poe n’en avait aucune idée. Il se leva, plaqua ses mains dans son épaisse chevelure bouclée, et articula d’une voix rauque :
— Il a osé… Rose, Finn, vous l’avez entendu comme moi, il a osé mentionner Leia, salir sa mémoire, il instrumentalise son combat pour servir ses rêves autoritaristes...
— Ça y est, tu parles comme un politicien, je pense que les ficelles du métier commencent à rentrer…
La tentative de son ami pour alléger l'atmosphère n’eut pas l'effet escompté sur lui. Poe poursuivit comme s'il ne s'était pas interrompu, toujours furieux.
— Je l’ai vu réprimer un rictus, il était clairement soulagé qu'elle ne soit plus là pour interférer avec ses machinations. Leia était une vraie menace pour tous ces sénateurs corrompus, ces descendants des familles qui se sont enrichies grâce à la domination impériale et qui sont nostalgiques de cette époque-là !
Il avait le regard perdu sur le soleil couchant à travers la baie vitrée. Il se servit un verre de brandy savaréen, le but cul-sec sans quitter l’horizon des yeux, et se tourna vers ses amis, qui arboraient tous un air inquiet. Des larmes embrumèrent son champ de vision, mais il dit fermement :
— Kaydel Ko Connix… Rose Tico… Finn, c’est à nous de reprendre ce rôle. Il est impératif que nos voix se fassent entendre pour que ce septemvirat ne vire pas au cauchemar. Sinon, tous les efforts, tous les sacrifices qu’on a faits, et la mort de Leia, tout ça… ça n’aura servi à rien.
— Ouais. Bien dit mon vieux, s’exclama Finn en se levant pour lui taper sur l’épaule. Je sais que c’est une bataille difficile à mener, mais on sera avec toi jusqu’au bout. Et Rey aussi. D’ailleurs, elle aurait dû nous rejoindre il y a déjà plusieurs heures, non ? Ça fera du bien à tout le monde d’être à nouveau réuni.
— En parlant de ça, intervint Rose sans lever les yeux de son comlink, vous devriez jeter un œil aux dernières nouvelles sur l’holonews. Tout un quartier industriel de Fondor est en flammes. Et il semble que les Skywalker soient impliqués.
— Impliqués, comme dans "ils ont essayé de sauver les victimes", on est d’accord ? avança Finn d’un ton circonspect.
— Sans doute, mais ce n’est pas vraiment comme ça que les médias ont l’air de vouloir présenter les choses…
— C’est Dashit. Il a le bras suffisamment long pour influencer ce genre de choses, lança Poe. Il veut retourner l’opinion contre Rey. Ça, son objectif de réarmement de la Galaxie, ça fait partie de son plan. On est de retour sur un champ de bataille.
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