Après plus d'un mois de silence, voici la suite de cette histoire. Je vous livre le chapitre entier pour ne pas casser l'action qui est ici une bataille spatiale.
Etant dans un "trou" d'écriture - peut-être la fatigue ? - il faut maintenant que je me remotive pour continuer.
, pour ceux qui n'aiment pas lire sur forum.
Isil soutint longuement le regard de Nulee’Na avant d’abaisser ses paupières pour engager sa méditation. Les deux jeunes femmes se trouvaient au centre de la salle réservée aux Jedi, assises en tailleur, l’une face à l’autre. La première portait sa courte tunique blanche coutumière, sur laquelle elle avait passé sa non moins traditionnelle bure, la seconde portait une armure légère et souple en matériaux composites, à la mode Twi’lek. Les femmes de cette race avaient une façon très particulière de concevoir leurs vêtements. Une façon qui pouvait apparaître très suggestive aux non natifs de Ryloth. Ainsi, son armure brune couvrait seulement le torse et le bassin. Elle portait en outre des gantelets, des protège-épaules et des bottes montantes. Un large passant de même couleur enserrait son front et courait derrière ses longs lekkus tressés de bandelettes de cuir. Ses yeux légèrement orangés se fermèrent à leur tour.
*
* *
Le commandant Nembro tendit son doigt vers l’espace infini et s’exclama :
— Le voilà… à notre merci !
Devant eux se profilait la lourde silhouette du croiseur de bataille dont la vitesse modérée prouvait qu’il ne s’attendait pas à être attaqué.
— Je ne veux surtout pas qu’il puisse passer en hyperespace ! grogna Dark Remus le visage dissimulé dans son ample capuche sombre. Préparez le générateur antigravitationnel. Je veux un puits de gravité sur sa trajectoire dès que nous aurons désocculté. Cible prioritaire, son hyperdrive. Une fois détruit, le
Defiance sera à notre merci !
— Devons-nous faire sortir la chasse ?
Le Sith serra un poing ganté de noir devant lui.
— Inutile, ses boucliers ne sont pas levés. La surprise est totale et joue en notre faveur. Nous l’aurons anéanti avant même qu’il se rende compte de ce qui lui arrive.
La masse du Centurion augmentait à présent à vue d’œil. Pour le
Ragnarok, le croiseur républicain était un adversaire dangereux et puissant, grand comme deux Interceptors normaux. Mais le prototype de Dark Remus presque trois fois plus grand que l’original conservait l’avantage de la taille et son dispositif lui permettant de se soustraire à la vue et aux senseurs de l’ennemi, lui donnait un atout définitif.
— Préparez-vous à désocculter ! ordonna le Sith les yeux rivés sur son adversaire. Et à faire feu de toutes les pièces !
*
* *
L’harmonie et la paix. Voilà ce qu’Isil cherchait dans sa méditation. L’harmonie, pour fuir les visions cauchemardesques qui s’étaient imposées à elle à l’approche du mystérieux artéfact, et l’avaient déstabilisée en la plongeant dans un monde obscur de chaos. La paix, pour chasser les émotions qui l’avaient submergée. Cette dernière lui paraissait la plus difficile à obtenir dans la Force, tant ses pensées revenaient systématiquement sur Hiivsha lorsqu’elle s’abandonnait à la quiétude du moment. La jeune Jedi avait beau fermer les yeux et ne penser à rien, le visage du contrebandier flottait dans l’intimité de ses paupières et à chaque fois, son rythme cardiaque s’accélérait. Elle se refusait à ressentir de l’inquiétude pour lui mais son trouble s’accentuait lorsque s’imposait en elle l’idée d’une absence physique voire même charnelle.
Dans un effort violent, elle tenta de chasser toutes ces pensées pour se replonger dans la pureté de la Force, dans ses lignes de lumière qui scintillaient tout autour et au-delà du vaisseau. Soudain, les lignes se déformèrent et une zone sombre apparut, prenant l’espace d’une seconde l’apparence d’un être de cauchemar dont les mandibules hideuses s’ouvrirent pour avaler le
Defiance. La coque de ce dernier se mit à suinter de sang pour se couvrir de rouge avant d’exploser en une pluie de morceaux de chairs sanguinolentes qui ensevelit instantanément la Jedi.
Réfrénant un cri, Isil rouvrit ses yeux au moment où Nulee’Na en faisait autant, le visage blême. Les deux jeunes femmes échangèrent un regard et comprirent l’avertissement que la Force venait de leur adresser. Comme un seul homme, elles se dressèrent et sortirent précipitamment de la salle pour s’engouffrer dans les coursives. Telles des forcenées, elles négligèrent l’ascenseur pour avaler sous leurs pieds, avec l’aide de la Force, les escaliers montant vers la passerelle dans laquelle elles déboulèrent, ouragan vivant, sous le regard ahuri de l’officier de quart.
— Alerte maximum, hurla Isil en se précipitant vers une console devant laquelle se tenait un jeune sous-officier Céréen : levez les boucliers, vite !
L’officier de permanence de commandement souleva un sourcil et les regarda comme s’il avait affaire à deux folles.
— Qu’est-ce qui vous prend ? s’exclama-t-il d’un ton hautain, de quel droit donnez-vous cet ordre ?
Sans se donner la peine de répondre, Nullee’Na le bouscula pour écraser un bouton rouge de la paume de sa main. Aussitôt, toutes les sirènes du bâtiment se mirent à rugir et des lumières rouges à tournoyer un peu partout. De son côté, Isil se pencha vers le Céréen qui la regardait en hésitant.
— Désolée, pas le temps de vous expliquer !
Elle passa la main devant ses yeux en articulant lentement :
— Levez les boucliers en urgence absolue !
Aussitôt, l’opérateur se retourna vers sa console en répétant :
— Boucliers… urgence absolue…
De ses doigts agiles, il enfonça plusieurs touches et aussitôt sur son écran, des ponts lumineux apparurent tout autour de la forme symbolisant le vaisseau.
La plus grande confusion régnait sur la passerelle. L’officier de quart tentait de reprendre la main sur sa console pour stopper l’alerte, mais la Twi’lek lui résistait. De son côté, l’enseigne égrenait mécaniquement la montée en puissance de la protection du Centurion :
— Dix pour cent… vingt pour cent… trente pour cent…
Isil cria à l’adresse d’une jeune femme :
— Vue arrière, immédiatement !
L’opératrice n’eut même pas un regard pour son supérieur qui se débattait toujours avec l’autre Jedi et obtempéra. L’espace apparut sur l’écran géant.
Le temps d’une seconde, Isil pensa amèrement que Nulee’Na et elle s’étaient trompées. Il n’y avait rien derrière eux ! Mais l’instant d’après, un voile se forma devant leurs yeux incrédules, une distorsion qui fit danser les étoiles visibles le temps pour une forme menaçante de se matérialiser.
— Un Interdictor ! cria quelqu’un.
L’officier lâcha la Twi’lek, stupéfait. Une seconde encore et une grande quantité de traits lumineux s’échappaient du colosse. Quelque part, une série d’explosions sourdes ébranla le vaisseau, à peine audibles dans le vacarme des alarmes.
— Boucliers soixante pour cent… annonça l’enseigne.
— Plus vite, s’exclama Isil malgré elle.
Plusieurs éclats de lumière jaillirent de l’agresseur.
— Torpilles à protons ! s’écria l’opérateur des senseurs. Impact dans cinq secondes.
— Boucliers soixante-dix pour cent… quatre-vingts…
Le choc fit osciller le Centurion et chacun se cramponna à ce qu’il put pour ne pas perdre l’équilibre. Au même moment, Valin Narcassan et Shalo Torve pénétraient sur la passerelle.
— Que se passe-t-il ? s’exclama le premier.
— Nous sommes attaqués par l’arrière, cria l’officier de quart désemparé. Nous n’avons rien vu venir… ils… ils ont surgi de nulle part !
— Boucliers levés, madame ! annonça plus fort le Céréen en regardant Isil.
Narcassan se rua sur son fauteuil en ordonnant :
— En avant toute, vitesse maximum ! Ordre à toutes les batteries d’ouvrir le feu.
Les coups portés sur les boucliers résonnaient à présent d’un peu partout comme des centaines de poings martelant une tôle.
— Capitaine Morgan, au rapport ! ordonna froidement l’amiral à son officier de quart.
Ce dernier fit trois pas vers lui.
— Je ne sais pas d’où est venu ce vaisseau, amiral… les deux Jedi ont fait irruption sur la passerelle pour déclencher l’alerte et ordonner de lever les boucliers. Sur l’écran arrière il n’y avait rien puis d’un seul coup, cet Interdictor est apparu … apparu de nulle part !
Le pacha lança un regard à la Twi’lek et à sa consœur.
— Je crois bien que vous venez de sauver le
Defiance, mesdemoiselles… pour le moment du moins, ajouta-t-il.
Il pressa un bouton pour se brancher sur la sono générale.
— Alerte générale. Ceci n’est pas un exercice. Tous les chasseurs à l’envol pour une protection rapproché du bâtiment. Objectif, l’Interdictor qui nous attaque par tribord arrière. À toutes les pièces, feu à volonté sur les générateurs de boucliers de l’assaillant.
Puis se tournant vers Torve.
— C’est quoi ce vaisseau, Shalo ?
Le Maître Jedi se laissa aller à une grimace dubitative.
— Un énorme Interdictor, à première vue… je n’ai jamais rien vu de tel… peut-être un prototype de l’Empire ?
— Lieutenant Will, lança l’amiral au pilote, peut-on le distancer ?
— Je ne sais pas, amiral, je fais mon possible.
— Pouvons-nous passer en hyperespace ?
— Pas pour le moment, l’ennemi génère un puits de gravité qui nous en empêche.
Isil s’avança, accompagnée de Nulee’Na.
— Permission de prendre nos vaisseaux, amiral ?
Narcassan fit oui de la tête.
— Allez-y, jeunes filles, que la Force soit avec vous !
Les deux Jedi quittèrent la passerelle comme elles y étaient entrées : en coup de vent.
— Console technique, lança le pacha à l’adresse d’un Twi’lek penché devant ses indicateurs, rapport d’avarie !
Le sous-officier se retourna vers lui, le visage crispé.
— La première salve a touché le bâtiment avant que les boucliers ne soient complètement levés. Il y a eu plusieurs explosions au niveau du générateur d’hyperdrive, amiral. Je pense que c’est la première chose que l’ennemi a visé.
— Ils ne veulent pas que nous leur faussions compagnie, marmonna Maître Torve.
— Des dégâts ?
Le jeune twi’lek ne put répondre. Il fut interrompu par une voix familière.
—
Bump à la passerelle ! Amiral, vous m’entendez ? — Je vous écoute, Bump. Quelles sont nos avaries ?
—
Perte de puissance de trente pour cent sur les moteurs principaux. Les boucliers semblent tenir le coup mais leur résistance diminue rapidement à cause de la puissance de feu de l’ennemi… jamais nous n’avons été pilonnés ainsi. — Pouvons-nous passer en hyperespace ?
—
Là encore, amiral, le générateur d’hyperdrive a été endommagé au niveau de ses stabilisateurs. Si on ne fait rien, leur utilisation risque de provoquer des distorsions dans la matrice d'espace-temps. — Vous pouvez réparer ?
—
En plein combat ? Impossible amiral ! Il faut que nous soyons au calme quelque part une dizaine d’heures. — Et le générateur de secours ?
—
Il a souffert aussi, mais il est encore potentiellement opérationnel, du moins pour un passage très bref en hyperespace… sinon, il y a risque de surchauffe et d’explosion. Valin Narcassan grimaça sur son siège.
— D’accord, Bump, préparez-vous à passer en hyperespace avec le générateur auxiliaire dès que nous serons en mesure de le faire.
À l’extérieur, l’espace s’était transformé en champ de bataille et rempli de petits points qui se mirent à papillonner autour des vaisseaux. C’était les trois escadrons du régiment de chasse aérienne du
Defiance qui venaient de sortir, désignés respectivement escadron rouge, vert et bleu pour la conduite des opérations. Chacun regroupait quatre escadrilles de cinq chasseurs tactiques soit vingt Aurek. Étaient venus s’y ajouter une centaine de chasseurs impériaux que Dark Remus s’était résigné à faire sortir à son grand dam, lorsqu’il constata que son plan initial venait d’échouer.
— Pour tous les diables ! s’emporta-t-il, comment ont-ils su ? Pourquoi ont-ils levé les boucliers avant notre désoccultation ?
— Il y a des Jedi à bord, observa calmement Suri. Ils ont dû sentir notre présence dans la Force.
Le poing du Sith s’écrasa sur une console qui se fendilla sous la violence de l’impact.
— Où en sont nos boucliers ?
— Ils tiennent le coup, même si leur puissance diminue lentement. Le
Defiance perdra ses protections avant nous.
— Bien !
Le Zabrak découvrit ses dents jaunes et pointues dans un rictus malsain.
— Il est à bord, je sens sa présence à travers l’essence de Ghar ! Bientôt, il sera à moi !
Isil et Nulee’Na s’étaient précipitées jusqu’au hangar où les mécaniciens avaient préparé leur vaisseau respectif. Au moment où la première s’engageait sur la rampe d’accès du sien, une voix éclata non loin d’elle :
— Je viens avec toi !
Argail arrivait à toutes jambes et s’engouffra derrière elle dans l’appareil.
P2-A2 était déjà à son poste. La jeune femme se rua dans le cockpit et sans prendre le temps de s’harnacher, poussa sur la commande des gaz. Argail se jeta à son tour dans le siège du co-pilote.
— Qu’est-ce que tu fiches ici ? demanda Isil légèrement surprise.
— Je savais que tu n’allais pas pouvoir résister à l’appel de la bagarre, s’écria-t-il, et comme tous les chasseurs étaient sortis, facile de deviner que tu allais prendre ton appareil… depuis le temps que je rêvais de le visiter !
En rugissant, l’ancien vaisseau de Maître Beno Mahr — une sorte de corvette hybride ressemblant à un croisement entre le Défenseur Jedi et le cargo YT1100 d’Hiivsha — s’extirpa du hangar, suivi par celui de la Twi’lek.
— Tu sais piloter ?
— Pas du tout, avoua le sergent. Enfin, presque pas du tout. J’ai essayé une ou deux fois mais à chacune j’ai foutu une trouille bleue… à moi ainsi qu’à celui qui était à mes côtés. Depuis, plus personne ne veut me laisser les commandes.
L’espace tout autour d’eux était saturé de traînées rouges. L’Interdictor faisait feu de toutes ses batteries. Les plus grosses dirigées vers le Centurion, les plus petites sur les Aurek qui avaient engagé avec les chasseurs impériaux un ballet frénétique. Au régiment de chasse du
Defiance, s’étaient jointes les deux escadrilles de cinq chasseurs de l’Unité Opérationnelle Intégrée, désignées par le qualificatif de « jaune ». Au total, soixante-dix unités avaient pris l’espace : la totalité de la défense rapprochée du croiseur de bataille. Minuscules, comparés aux deux vaisseaux de guerre, ils ressemblaient à des mouches s’agitant autour de deux banthas.
— Ici noir leader… à tous, voici mes instructions ! lança Isil d’une voix autoritaire comme son grade au combat l’y autorisait. Bleu, vert et rouge, vous vous occupez des chasseurs impériaux. Jaune avec moi et noir deux. Objectif, les générateurs de boucliers de l’Interdictor.
La corvette d’Isil obliqua vers l’énorme cuirassé ennemi, en louvoyant au maximum pour éviter les tirs des batteries légères de canons lasers, donnant l’exemple à ceux qui la suivaient. P2-A2 émit une longue plainte électronique suivie d’une série de modulations contrariées. Sans se retourner, Isil lui répondit :
— Oui, je sais, je ne suis pas en tenue… mais nous ne sommes pas à bord d’un Aurek, et je ne compte pas me laisser toucher.
Comme elle disait ces mots, un tir rebondit sur ses déflecteurs et le vaisseau oscilla.
— Rectification, je ne compte pas me laisser trop toucher !
— C’est ce que j’espérais également, ajouta le militaire.
Sur sa passerelle, Dark Remus observait le combat spatial ainsi que le Centurion qui filait à présent à vitesse maximum.
— Où va-t-il comme ça ? ironisa-t-il. Pense-t-il pouvoir m’échapper ? Même s’il parvenait à passer en hyperespace, les radiations émises nous permettraient de le suivre.
— Peut-être se dirige-t-il vers ce nuage gazeux, là-bas, Maître, suggéra Suri Magdiik en pointant son doigt vers une trace orangée et bleutée légèrement sur leur gauche.
— Une nébuleuse ! s’exclama le Sith. Il va chercher à s’y réfugier dedans, comme un pleutre ! Sortez le rayon tracteur !
Le commandant Nembro s’insurgea :
— Le rayon tracteur, Seigneur ? Sur un vaisseau de cette taille et de cette puissance ? Nous allons griller le générateur !
Le Sith tourna son visage hideux vers le militaire.
— Au diable le générateur. Il faut retarder son arrivée dans la nébuleuse, sinon, nous risquons de le perdre. Pire, s’il passe en hyperespace là-dedans, nous ne pourrons déceler les radiations laissées par son saut !
— Oui, Seigneur ! se contenta de répondre le commandant.
C’est exactement ce qu’avait l’intention de faire l’amiral Narcassan qui trouvait inconfortable le fait d’avoir un ennemi à ses trousses sans pouvoir lui faire face pour tenter de reprendre l’avantage. Lorsque le navigateur lui avait signalé ce nuage gazeux, il avait aussitôt pris sa décision en se tournant vers Maître Torve.
— Que diriez-vous d’une partie de cache-cache, Shalo ?
Le Jedi avait laissé transpirer un léger sourire.
— Ce sera peut-être l’occasion de changer de tactique.
— Pilote, droit sur la nébuleuse par bâbord avant, vitesse maximum.
Une secousse plus forte balança le
Defiance. Quelqu’un cria :
— Nous avons été touchés !
Comme l’amiral regardait Torve, ce dernier fit non de la tête.
— C’est autre chose, dit-il.
— Un rayon tracteur ! s’écria le pilote.
En effet, tout le bâtiment tremblait à présent sous la contrainte inverse que produisait le rayon du
Ragnarok sur sa coque. L’amiral appela dans son communicateur.
— Bump ! Vous êtes là ?
La voix familière répondit aussitôt.
—
Oui, amiral, que se passe-t-il ? — L’ennemi nous a pris dans son rayon tracteur.
—
Il est malade ? Il ne pourra jamais forcer le [i]Defiance à s’arrêter ! [/i]
— Il cherche juste à nous retarder. Nous essayons de gagner une nébuleuse et cela le contrarie. Où en sont les boucliers et les moteurs ?
—
Les boucliers tiennent, mais ils ne sont plus qu’à quarante pour cent de leur potentiel et ça descend toujours au fur et à mesure que nous encaissons les coups. Les moteurs sont remontés à quatre-vingt-dix pour cent. — Poussez-les au maximum ! Nous allons bien voir si son rayon tracteur tient le coup.
—
Impossible, amiral, sinon nous allons affaiblir les boucliers. À moins que…Comme le lieutenant s’était arrêté, l’amiral poussa un grognement d’impatience.
— Une suggestion, Bump ?
—
Je me disais que c’était peut-être le moment de tester les générateurs mésoioniques en condition réelle. Si on pouvait dévier toute leur puissance sur les boucliers, on pourrait dériver l’énergie de ces derniers sur la propulsion. Ainsi nous gagnerions en vitesse et les boucliers remonteraient au maximum. — À condition que les prototypes ne nous lâchent pas en plein combat, objecta Narcassan. Nos tests sont loin d’être achevés. Nous n’avons pas pu juger de leur endurance à pleine puissance.
—
Je sais, amiral. Je ne suis pas devin. Le pacha consulta Torve du regard mais ce dernier se tint coi. L’amiral pressa de nouveau le bouton de son micro.
— Entendu, Bump, lancez les générateurs et dès qu’ils seront à pleine puissance, basculez leur énergie vers les boucliers.
—
C’est parti, amiral ! s’exclama la voix toujours plein d’entrain de l’officier-mécano.
La bataille spatiale se poursuivait, ponctuée d’explosions qui illuminaient l’espace comme un feu d’artifice. La radio elle-même était saturée des ordres distribués consciencieusement par les leaders d’escadrille à leurs membres, des avertissements que se lançaient les coéquipiers entre eux, des commentaires de victoire chaque fois qu’un chasseur impérial disparaissait des écrans radars ainsi que des cris de désespoir lorsque l’un des Aurek était abattu.
Isil et Nulee’Na, protégées par les deux escadrilles jaunes, arrivaient à présent aux abords de l’immense bâtiment. Sa coque en forme de bec était surmontée d’une haute tour au sommet de laquelle trônait la passerelle de commandement depuis laquelle Dark Remus observait le combat. Elles venaient de recevoir l’ordre de s’en prendre au générateur de rayon tracteur qui ralentissait le
Defiance.
—
Jaune leader à Noir leader, un groupe d’impériaux foncent sur nous. A priori, ça n’a pas l’air de leur plaire de nous voir venir si près pour leur rendre visite. — Noir leader à escadrilles jaune, engagez le combat. On va finir la route toutes seules, reçu noir deux ?
—
Je suis d’accord, répondit Nulee’Na. On va s’occuper du générateur de rayon tracteur. Toutes mes torpilles et mes missiles sont parés. Y’a plus qu’à tout cracher ! — Pareil pour moi ! Notre sergent attend depuis trop longtemps de voir enfin du spectacle.
Argail répliqua vivement.
— J’ai toujours dit que les femmes au volant étaient des dangers publics… quand je vois comment vous pilotez, mesdemoiselles, je persiste et signe !
Isil reprit, d’une voix moqueuse en voyant le visage plutôt blême du militaire :
— Je crois que
s’il aurait su, il aurait pas venu ! Le Défenseur et la corvette d’Isil arrivaient à présent devant le
Ragnarok et plongèrent sous sa coque, cherchant à se protéger dans l’irrégularité de ses structures pour échapper aux batteries de défense locale. Isil fit tournoyer plusieurs fois son appareil pour éviter un tir de barrage protégeant une sorte de tranchée qui devait lui permettre de se rapprocher de sa cible. Les doigts d’Argail se crispèrent sur les accoudoirs du fauteuil à tel point que ses articulations perdirent toute pigmentation.
— Accrochez-vous, ça va remuer ! cria la Jedi immergée dans la Force pour bien distinguer chaque tir menaçant l’appareil.
Plusieurs coups puissants ébranlèrent le
Defiance et malgré les boucliers, une explosion provoqua une boule de feu sur l’avant tribord du vaisseau. Une batterie de canons lasers venait de subir l’impact d’un missile protonique.
— Amiral, s’exclama le Céréen devant sa console. Les boucliers ne sont plus qu’à vingt pour cent… en chute libre !
Narcassan frappa du poing sur les bras de son siège.
— Nous n’arriverons jamais à temps dans cette nébuleuse !
Il écrasa le bouton des communications.
— Bump !
—
Oui, amiral ? répondit aussitôt la voix du lieutenant.
— Nous perdons nos boucliers trop vite et nous sommes encore trop loin de la nébuleuse. Il faut passer sur les générateurs mésoioniques maintenant avant de nous retrouver à poil !
—
Maintenant, amiral ? Mais nous ne sommes pas prêts. Il y a un risque de nous retrouver sans boucliers durant quelques secondes le temps du transfert d’énergie. Pour la première fois, Valin Narcassan décela de l’anxiété dans la voix de son subordonné d’ordinaire si optimiste.
— Combien de temps ?
—
Difficile à dire, amiral, cinq ou six secondes…— Je vous en donne trois pour effectuer le transfert.
—
Bien, amiral. J’entame le décompte… dans dix secondes, on coupe tout. — Il ne nous reste plus qu’à compter un peu sur notre chance, n’est-ce pas Shalo ? lança l’amiral à l’intention du Jedi assis devant la console de coordination des batteries.
Maître Torve eut pour toute réponse une grimace peu convaincue et ordonna :
— Paré à tirer avec tous les lance-missiles et tous les lance-torpilles à mon commandement !
Il ajouta en regardant Narcassan.
— Si ça peut les distraire ne serait-ce qu’un instant.
Comme le décompte était sur cinq, sa voix claqua comme un coup de fouet.
— Feu !
Une volée de tubes oblongs s’envola vers l’énorme masse du poursuivant.
— Ça devrait au moins le secouer un peu, avança le Jedi en suivant l’avancée des projectiles sur l’écran.
La voix du lieutenant Bump s’exclama.
—
Boucliers coupés. Transfert en cours ! Narcassan soupira.
— Nous venons de baisser notre pantalon. Il ne nous reste plus qu’à serrer les fesses !
Les missiles et les torpilles venaient d’atteindre leur cible. Le
Ragnarok accusa le coup sans férir. Pourtant, ses générateurs de boucliers avaient dû être particulièrement sollicités.
— Une véritable machine de guerre, observa Maître Torve. Je me demande d’où il sort ?
Plusieurs explosions ébranlèrent le Centurion. Elles furent ressenties jusque sur la passerelle. L’amiral enclencha le micro.
— Toutes tranches, rapport sur les avaries !
Les rapports se succédèrent rapidement, souvent en quelques mots exemplaires de concision de la part de professionnels sachant combien au combat chaque seconde était essentielle.
—
Transfert d’énergie terminé ! s’exclama la voix de Bump.
Les boucliers sont de nouveau opérationnels à deux cents pour cent ! Nacassan se frotta les mains.
— Parfait, à présent, droit sur cette nébuleuse. Poussez-moi ces moteurs au maximum !
Les dégâts pouvaient paraître sérieux pour quelqu’un qui se trouvait sur place, mais vu l’énormité du vaisseau, ce n’étaient que des blessures non mortelles. Les incendies et les dépressurisations provoqués par les explosions étaient contenus par les cloisons étanches qui quadrillaient le bâtiment en une savante grille de protection. Un hangar avait été mis hors service par des torpilles à protons, deux batteries légères de protection rapprochée et une batterie de canons lasers avaient souffert des tirs qui s’étaient engouffrés dans la brèche temporelle liée au transfert d’énergie sur les boucliers. Différents autres endroits de la coque avaient été touchés et laissaient échapper des lueurs de brasiers activement combattus par les équipes de sécurité.
La bataille entre les Aurek et les chasseurs impériaux continuait autour des deux mastodontes. L’habileté des pilotes et l’extrême maniabilité des petits vaisseaux rendait difficile les coups au but y compris pour les batteries de défense rapprochée des cuirassés. Sur les écrans du centre des opérations aériennes du
Defiance, actif comme une fourmilière, des symboles lumineux clignotaient furieusement pour indiquer en temps réel l’état des appareils. Neuf avaient été abattus. Pour la plupart, ils avaient explosé dans l’espace après avoir perdu leurs boucliers, ne laissant aucune chance de survie à leur pilote. Cinq endommagés avaient été enjoint de regagner leur hangar. Du côté de l’ennemi, on devait se satisfaire de vingt-deux chasseurs impériaux abattus. Cette différence s’expliquait par la solidité des monoplaces républicains équipés de boucliers quand ceux de l’empire n’en possédaient pas et se révélaient en conséquence bien plus fragiles.
Isil était arrivée au centre du bâtiment sous le ventre du géant et tira violemment sur son manche pour s’extirper de la tranchée. Son appareil effectua une parabole destinée à le mener à portée de tir du générateur de rayon tracteur. La corvette fut aussitôt prise à partie par la défense locale. Sous l’impact, le vaisseau frémit.
— P2, assure-toi que nos boucliers tiennent le coup ! ordonna la Jedi sans quitter des yeux son objectif qui se trouvait à présent droit devant.
Le droïde modula une réponse qui se voulait rassurante mais que ne comprit par Argail, accroché à son siège.
— Si vous voulez vous amuser, sergent, vous pouvez prendre en manuel l’une des deux tourelles de tir, proposa Isil un sourire en coin.
— Excellente idée, s’exclama le militaire. C’est un petit jeu auquel je suis plutôt doué et ça m’occupera l’esprit.
Pour joindre le geste à la parole, il s’arracha de son baquet et se rendit au pied de la tourelle supérieure dans laquelle il grimpa. Quelques secondes plus tard, les turbolasers entraient en action sous son contrôle.
— On arrive, signala la jeune femme dans le micro à l’attention de sa coéquipière toujours dans son sillage. Je vais lâcher tout ce que j’ai d’un seul coup… nous n’aurons pas droit à un second passage.
Elle apercevait déjà le projecteur du faisceau tracteur et le générateur d’asservissement juste à côté. Pour mieux viser, elle fit comme beaucoup de Jedi au combat et ferma les yeux pour solliciter la Force et voir l’objectif à travers Elle. C’était à la fois différent et plus précis, plus distinct. L’appel à la Force décuplait ses sens et développait son instinct de tireur, semblait ralentir le temps en affutant ses réflexes et rendait possible en manuel des visées que personne d’autre ni aucun appareil n’aurait pu égaler. Au moment voulu, son index pressa le bouton de tir sur lequel elle avait asservi tous les systèmes. Une volée de missiles immédiatement suivie de toutes les torpilles disponibles quittèrent la corvette en une série de trainées blanches convergentes. Sur son bâbord, Lunee’Na l’imita de façon parfaitement synchrone. Aussitôt après, les deux vaisseaux effectuaient un break serré pour un dégagement par la droite afin de s’extirper au plus vite du périmètre de défense de l’Interceptor.
Sur ce dernier, les explosions en chaîne furent ressenties jusque sur la passerelle. Un opérateur s’exclama :
— Seigneur, nous venons de perdre le rayon tracteur !
Ramus se dressa sur son siège les poings serrés.
— Que s’est-il passé ?
Un autre opérateur, affecté au radar, répondit :
— Deux vaisseaux de taille moyenne ont réussi à infiltrer nos défenses et ont fait sauter le générateur du projecteur.
Le commandant Nembro lança un coup d’œil inquiet au Sith qui accusa le coup.
— Intensifiez le tir ! Dérivez la puissance des boucliers arrière sur l’artillerie lourde !
Puis en se tournant vers son apprentie, il ajouta :
— Je ne comprends pas comment ses boucliers peuvent tenir aussi longtemps ! Normalement, sur un Centurion, ils auraient déjà dû lâcher !
—
Attention, nous avons de la visite sur le chemin du retour, s’écria la voix de Nulee’Na qui venait de repérer une douzaine de chasseurs impériaux fondant sur eux.
— Argail, tu vas pouvoir t’amuser ! lança Isil dans le micro.
—
Enfin, je commençais à me refroidir, railla ce dernier.
Ce disant, il fit pivoter sa tourelle et ouvrit le feu sur les assaillants. La visée dut être excellente ou la chance avec lui, car le premier chasseur explosa presqu’aussitôt. Une exclamation de joie jaillit de la gorge excitée du soldat. La corvette effectua un tonneau barriqué pour éviter les premières salves de tirs et passa à grande vitesse au milieu de l’essaim ennemi qui se dispersa en rompant sa formation. Au même instant, une voix grésilla :
—
Ici jaune leader, on s’en occupe ! Les deux escadrilles jaunes comptaient encore huit appareils. Les Aureks foncèrent sur l’adversaire avec l’avidité d’un meurt-de-faim devant une assiette de ragoût fumant. L’espace immédiat se remplit de traits de plasma en fusion. De nouveaux, les communications radio allèrent bon train.
—
Jaune trois, vous en avez un au cul !
— Jaune cinq à jaune leader, je n’ai plus de boucliers !
— Jaune leader à jaune cinq, rompez la formation et rentrez au bercail. Bonne chance !
— Ici jaune huit, je vais débarrasser jaune trois de son pot de colle, je me place…Puis deux secondes plus tard après une explosion dans le vide spatial :
—
C’est tout bon, jaune trois, clean derrière vous ! Isil et Nulee’Na ne restèrent pas inactives et engagèrent également le combat. Si les deux vaisseaux étaient plus gros que les chasseurs impériaux, ils étaient tout aussi maniables et les tourelles de turbolasers de la corvette d’Isil lui permettaient de tirer quelle que soit sa position dans le ballet mortel, ce qui en faisait un dangereux prédateur. Derrière son viseur, Argail tournoyait dans tous les sens, brutalement, ne s’épargnant nullement dans les à-coups violents que son siège subissait chaque fois qu’il inversait son sens de rotation. Deux minutes plus tard, il inscrivait son deuxième ennemi à son tableau de chasse.
—
Youhou, l’entendit-on,
j’adore ce job ! Isil sourit en effectuant un yo-yo haut pour se placer derrière un adversaire. Les canons avant crachèrent leur venin. Le chasseur impérial perdit l’un de ses stabilisateurs et partit en vrille percutant un coéquipier. Les deux vaisseaux s’embrasèrent instantanément et se disloquèrent sous l’impact en une myriade d’étincelles et de langues de feu.
—
Joli le doublé, noir leader, fit la voix de jaune leader.
La Jedi ne répondit pas. La guerre n’était pas une jolie chose pour elle et supprimer des vies ne la remplissait ni de joie, ni d’orgueil comme certains professionnels de la chose.
Le secteur étant dégagé, elle lança dans son micro :
— Escadrilles jaune, on revient vers le
Defiance !
Ce dernier abordait à présent la zone colorée par les gaz de la nébuleuse.
— Que tous les chasseurs rentrent au bercail ! ordonna l’amiral au centre des opérations. Au plus vite, avant de les perdre dans ce brouillard !
Aussitôt, les Aurek revinrent vers leur bâtiment tandis que les chasseurs impériaux en faisaient de même côté ennemi. Pour ces derniers, la perte du contact avec le cuirassé était encore plus problématique dans la mesure où, s’il venait à passer en hyperespace, les chasseurs impériaux ne possédaient pas d’hyperdrive contrairement aux Aurek. Si leur vaisseau les abandonnait, c’était pour eux la mort assurée.
Lentement, tandis que les hangars refaisaient le plein d’appareils, la masse du Centurion se dissolvait dans la brume orangée et bleutée. C’était en tout cas l’impression visuelle ressentie depuis la passerelle de son poursuivant.
Dark Remus ne décolérait pas.
— Comment a-t-il pu résister jusqu’ici ? s’écria-t-il à la cantonade sans que personne ne prenne le risque de lui répondre.
Le
Defiance disparut à sa vue.
— Nous allons le perdre, osa le commandant Nembro avec un réalisme téméraire.
Le Sith le fusilla des yeux.
— La Force va m’aider à le suivre, déclara le Zabrak dans un rictus.
Sur le
Defiance, le dernier chasseur venait d’apponter suivi du Défenseur de Nulee’Na et de la corvette d’Isil. Aussitôt que les deux Jedi furent sorties de leur vaisseau, un chef de hangar leur transmit l’ordre de rejoindre Maître Torve dans la salle de méditation des Jedi, ce qu’elles firent immédiatement, laissant Argail à ses sensations de combat spatial au milieu de ses amis mécanos.
Shalo Torve était déjà plongé dans la Force lorsqu’elles entrèrent dans la salle dépouillée. Les deux jeunes femmes s’assirent devant lui sans prononcer un mot et fermèrent à leur tour les yeux. Une fois rejoint son esprit, il s’adressa à eux à travers la Force.
— Il nous faut opposer un barrage mental au Sith qui se trouve sur ce vaisseau inconnu. Je l’ai senti. Il utilise la Force pour suivre le
Defiance à travers la nébuleuse. Isil, j’ai besoin de toute ta sensibilité en Elle pour brouiller sa vision.
La Jedi hocha mentalement la tête et laissa glisser son esprit le long des lignes scintillantes qui émanaient de la Force tout autour d’eux. Elle ressentait la présence de chacun des deux vaisseaux. Mais elle sentait également autre chose de plus sombre qui s’interposait. Un esprit noir et froid qu’elle pouvait presque sentir tactilement. Un esprit âgé, très âgé. Un visage atrocement creusé par les siècles s’imposait lentement à sa vision. Des mains cornues, sèches, fripées comme la mort, s’avancèrent vers elle pour tenter de la saisir. Un fluide glacial se mit à courir dans ses veines qui prirent progressivement une couleur indigo. Une douleur s’empara de son torse, comme si quelque chose en elle était aspiré à travers sa poitrine vers l’extérieur de son corps. La vie s’échappait de son âme. Le visage répugnant d’une tête cornue et décharnée, rouge sang, se superposait à présent à un trou noir qui avalait tout autour de lui : les planètes, les étoiles, les nébuleuses… À sa gauche, elle distingua un bâton de lumière, blanc, presqu’aveuglant vers lequel elle tendit la main. Ses doigts se refermèrent dessus, et elle s’agrippa à lui pour ne pas se laisser aspirer par le trou noir occupant à présent l’emplacement de la bouche du visage monstrueux. Devant elle flottait l’artéfact pourpre. Il se multipliait. À présent, il y en avait trois, plus une petite sphère de même couleur vers laquelle les trois objets convergèrent lentement, avant de se refermer tout autour et former ainsi une boule plus grande. Des vapeurs noires sortaient désormais de cette dernière comme autant de tentacules spectraux tentant d’arracher la jeune Jedi à son soutien lumineux pour l’attirer dans le trou noir. Isil s’empara du bâton à deux mains et le plaça devant elle. La lumière devint plus puissante sous l’afflux de sa volonté, chassant les ténèbres et la menace du trou noir. Le visage s’évapora et les lignes de la Force se remirent à scintiller de la façon la plus pure.
Que se passe-t-il, Maître ? demanda Suri comme le Sith venait de lâcher un cri. Il tourna vers elle un visage torturé, légèrement pâle.
— J’ai perdu le contact du
Defiance dans la Force. Quelque chose m’a repoussé… quelqu’un… une jeune femme…
— Une Jedi ?
— Oui, une Jedi.
— Fallait-il qu’elle soit puissante pour interrompre votre poursuite mentale, Maître !
— Sans doute, Suri, sans doute. Mais je sens que j’aurais bientôt la possibilité de la voir devant moi !
— Quels sont vos ordres, Seigneur Ramus ? demanda Nembro incertain quant à la route à donner au cuirassé.
— Décidez par vous-même, commandant, il ne nous reste plus qu’à nous confier au hasard pour retrouver le
Defiance. Mais où qu’il aille, je le retrouverai… maintenant, ou plus tard… nous avons toute l’éternité pour cela !
Ils évoluaient à présent dans une sorte de brouillard dense, parcouru d’éclairs électrostatiques qui irisaient de différentes couleurs les gaz de la nébuleuse. Dans ce milieu hostile, les senseurs étaient devenus aveugles et les instruments affolés étaient inopérants. L’amiral Narcassan venait de donner l’ordre d’abattre de soixante-dix degrés sur bâbord avec une inclinaison de quarante-cinq. Il comptait bien réitérer une telle manœuvre plusieurs fois histoire de semer définitivement le cuirassé. Il s’agirait ensuite de sortir de l’amas gazeux pour pouvoir passer en hyperespace afin de trouver un havre permettant de procéder aux réparations indispensables, notamment sur l’hyperdrive. Selon les officiers-mécaniciens Artel et Bump, il y en avait pour un minimum de trois jours.
Sur la passerelle du
Defiance, quelques officiers étaient venus assister au spectacle de la traversée de la nébuleuse. Ce n’était pas tous les jours qu’on pouvait observer un tel phénomène. Les irisations gazeuses étaient particulièrement de toute beauté, offrant des dégradés de couleurs et des formes dignes des plus belles aurores boréales.
— À quoi avons-nous affaire ? demanda l’amiral alors entouré des principaux officiers du bord. De toute ma carrière, je n’ai jamais vu un Interdictor de cette taille.
— Aucun d’entre nous, si ça peut vous rassurer, amiral, lâcha le colonel Vellaryn. Et je serais étonné si quelqu’un, au Quartier-Général, savait que l’Empire possède un tel bâtiment.
Le commandant Sayyham attira l’attention de tous d’un petit ricanement comme elle en avait le secret.
— Si ça se trouve, il n’y a non plus personne dans l’Empire Sith qui le sache.
Son effet réussit, car tous les yeux se portèrent vers elle à la grande satisfaction de la Loordienne.
— Que voulez-vous dire, Keraviss ? demanda Narcassan.
Un sourire en coin, la femme reprit.
— Je viens de tomber sur un communiqué des services de renseignements républicains… juste avant que nous n’entrions dans la nébuleuse. Un communiqué… très intéressant. Il semble bien qu’un tel bâtiment a attaqué il y a peu des éléments de la flotte Impériale, détruisant un Harrower, trois frégates et un Centurion : le Scarificateur… sister-ship impérial du
Defiance !
Un bref silence accueillit sa déclaration. L’amiral le brisa un instant plus tard.
— Intéressant… s’agit-il du même bâtiment ? A-t-on d’autres détails Keraviss ?
— Oui, amiral. Selon un rapport impérial confidentiel, l’assaillant serait un Interdictor modifié de trois fois la taille du modèle standard possédant, tenez-vous bien, un dispositif d’occultation qui le rendrait invisible à l’œil mais aussi aux senseurs !
Nouveau silence. Les révélations s’abattaient sur eux comme autant de cartes sur une table de pazaak.
— Ce qui explique que nous ne l’ayons pas vu arriver, marmonna Maître Torve.
— Sauf nos deux Chevaliers Jedi, rectifia l’amiral. Si on prend au sérieux les renseignements que le commandant Sayyham vient de nous communiquer, nous avons affaire à un curieux adversaire qui s’en prend autant à la République qu’à l’Empire bien qu’ayant un Sith à bord.
— C’est effectivement curieux, conclut Vellaryn au comble de la perplexité à l’instar de tous les présents.
— Keraviss, essayez d’en apprendre plus de nos amis de l’Empire, reprit l’amiral avec un sourire de biais. Quant à nous, pour l’instant, l’important est de sortir indemne ou presque de cette situation dans laquelle nous ne pouvons lutter équitablement pied à pied avec notre adversaire quel qu’il soit et quelles que soient ses intentions.
Le Centurion progressait comme son ennemi, en aveugle. Seul l’instinct de navigation de son commandant prévalait. Celui-ci effectuait de savants changements de cap destinés à semer son poursuivant d’une façon certaine. Dans leur salle de méditation, les trois Jedi du bord poursuivaient leur transe destinée à empêcher le Sith adverse de se servir de la Force pour localiser le croiseur de bataille.
La nébuleuse n’était pas bien étendue, et au bout de sept heures d’une navigation tendue et usante pour les nerfs, les gaz colorés se dissipèrent lentement pour laisser de nouveau la place à l’espace infini. Par précaution, l’amiral préféra rester dans la bordure de la nébuleuse le temps que l’hyperdrive de secours soit utilisable. Non seulement cela lui permettait de replonger dans le brouillard salvateur si par malheur l’Interdictor le retrouvait, mais les gaz noieraient le résidu de radiations que le saut en hyperespace allait générer rendant tout traçage impossible.
La question de savoir auprès de quelle planète se réfugier se posa.
— Nous allons sur Rothana, décida Narcassan.
— Mais, n’est-ce pas nous éloigner de Coruscant et de Kuat où nous pourrions réparer plus facilement ? demanda Cregg Vellaryn.
— Tout à fait. En toute logique, nous devrions effectivement essayer de gagner l’une de ces deux planètes… mais justement, notre ami devrait penser la même chose et nous chercher plutôt dans les mondes du Noyau. Il y a sur Rothana des industries spatiales qui, même si elles ne valent pas encore celles de Kuat, pourraient nous être fort utiles pour réparer notre bon vieux
Defiance.
— Et puis, selon nos officiers-mécaniciens, plus le trajet en hyperespace sera bref, moins nous risquerons de problèmes avec le générateur hyperdrive de secours, ajouta Maître Torve pour clarifier la situation définitivement.
— Et pour l’artéfact ? demanda Keraviss Sayyham.
L’amiral se laissa choir sur son siège de Commandeur, accusant sans le vouloir son état de fatigue. Il essayait de mettre de l’ordre dans toutes les questions qui couraient dans sa tête pour rester le plus lucide possible.
— Nous allons charger des membres de la CPM de convoyer cet encombrant objet jusqu’à Tython à bord d’une navette. Ils auront le temps d’effectuer un aller-retour avant que nos réparations soient achevées !
Quelques minutes plus tard, le
Defiance sautait dans l’hyperespace.