par Dollowin Branthor » Mar 17 Aoû 2021 - 12:06 Sujet: Re: Fan Fiction - Ben Solo
L'étoile perdue
Voyage méditatif dans les tourments de l'âme de Ben Solo
7 - La plume et l'écume - 20 ap BY
(Le combat des éléments, le cœur d'un adolescent, la lutte de la vie)
Depuis l’aube, Ben méditait face à la mer, assis sur un rocher. Les vagues puissantes, inlassables se fracassaient en gerbes d’écume blanche contre les rochers noirs, impassibles. Aux flancs des rocs de bronze rugueux s’étalaient des tapis d’algues irisées, diaprées de couleurs vives, et dans leurs creux innombrables s’agitaient tout un peuple vivant de bestioles invisibles, grouillantes, insatiables. La silhouette sombre des brisants déchiquetait le rivage, dessinant une géographie incertaine, rendue comme insaisissable par le mouvement ininterrompu du ressac.
Le vent froid giflait son visage d’impitoyables rafales glacées et le soleil, encore haut au milieu du ciel, réchauffait son dos, ses épaules et son cou. Loin au-dessus de lui, luttant contre le vent, un magnifique oiseau blanc au bec rouge planait, surveillant les vagues, à l’affut d’une proie. Ben plongeât son esprit dans celui de l’oiseau et vit, comme lui, la mer démontée, immense, et le ciel bleu, glacé, plus immense encore. Un autre oiseau, plumage noir et bec d’or, volait au-dessus des flots, menaçant la chasse de l’oiseau blanc. Se laissant porter par le vent, l’oiseau noir parvint à la hauteur de l’oiseau blanc, le défiant du regard. Imperturbable, l’oiseau blanc scrutait la mer.
Alors qu’il amorçait un mouvement de descente en piqué vers les vagues, l’oiseau noir assaillit l’oiseau blanc. Coup de griffes, coup d’ailes, bec rouge contre bec d’or, dans un tourbillon de plumes nacre et noires, égaux de taille et de force, les oiseaux luttaient férocement. Ben, fasciné, contemplait le combat. Lorsque l’oiseau noir se résigna à fuir, une plume couleur d’encre se détacha de ses ailes. Virevoltant dans les bourrasques, elle atterrit tout près du garçon qui la saisit et l’accrocha aux franges de son vêtement de lin.
Laissant passer loin de lui la fureur du combat, Ben tourna son regard vers les vagues où se mêlaient toutes les nuances de l’ombre et de la lumière. Bleu du ciel, noirceur de l’onde, blancheur de l’écume... Effrayantes et impétueuses, elles éclataient avec force contre les rochers qui brisaient leur élan, protégeaient le garçon de l’inquiétante fureur des flots. Pareils aux embruns qui tournoyaient tout autour de lui, mille pensées fugaces, informes, assaillaient son esprit.
De tout son cœur, Ben se concentrait sur ces bribes d’émotions qui l’environnaient. Il les scrutait, les évaluait, les enchâssait dans l’écrin de sa méditation. La peur, puissante comme les vagues allait et venait, sans jamais l’atteindre, disloquée par le roc de la paix qui l’enceignait. Le vent, violent et glacé comme la colère qui vivait en lui depuis toujours, ne faiblissait pas, luttait contre l’immuable chaleur du soleil, contre l’immense compassion que lui avaient transmis ses parents, tout l’amour dont ils l’avaient chargé depuis sa naissance. Au-delà de tout, il ressentait la vie, la vie au creux des rochers, la vie au fond du ciel, la vie née du soleil et des vagues, la vie en lui, dans son cœur, ses veines, son sang, la vie plus forte que tout. Défiant le vent et la mer, Ben récita pour lui-même :
_Il n'y a pas d’émotion. Il y a la paix. Grâce à la paix, je trouve la clarté. Il n'y a pas d'ignorance. Il y a la connaissance. Par la connaissance, je trouve la compassion. Il n'y a pas de chaos. Il y a de l'harmonie. Par l'harmonie, je trouve la sérénité. Il n'y a pas de mort. Il y a la Force. Grâce à la Force, je me retrouve. La Force est avec moi et je ne fais qu'un avec la Force. »
La paix… L'harmonie… La Force… tout était là, entre le vent, la mer, les rochers, le soleil, dans la vie grouillante qui bruissait tout autour de lui, dans le flux et le reflux des vagues, et leur grondement sourd, ininterrompu. Ben se laissa submerger par la Force, il l’accueilli, la laissa inonder tout son être, chaque particule de son corps. Jamais de ses quinze années de vie il ne s’était senti aussi puissant. Il regarda l’horizon immobile, baigné de lumière. Le ciel se faisait plus sombre, le jour baissait, la nuée bleue se parait de mauve, d’or, d’orange, de pourpre.
Quand le soleil aurait disparu, l’épreuve commencerait, et Ben devrait prouver sa valeur et sa force. Une anxiété pleine de hardiesse le gagnait, il se sentait prêt à tout, plus audacieux que jamais. Il fixa le soleil qui descendait vers les flots, s’imprégnant de toutes les nuances de la lumière déclinante, de la chaleur qui subsistait, du tourbillon d’or en fusion qui brulait ses yeux. Il le fixa jusqu’au dernier instant, jusqu’au rayon vert qui enlumina l’horizon de son fugitif éclat d’émeraude et dans l’obscurité naissante, il ferma les yeux. Quand il les ouvrit, la nuit était tombée et des milliers d’étoiles parsemaient le ciel. Il se leva et récita à nouveau en un murmure à peine audible, sereinement, cherchant à graver profondément chacun des mots dans son esprit :
_La Force est avec moi et je ne fais qu'un avec la Force.
Sûr de lui, déterminé, il se mit à courir, bondissant de roche en roche, le pied sûr, se fiant entièrement à son intuition, à ses sens parfaitement aiguisés, en éveil. Il courrait vers la plage, vers la forêt où devait l’attendre son maitre.
En arrivant dans la forêt, il fut saisi par le silence qui y régnait. Depuis le matin, le chant des vagues l’avait bercé inlassablement mais ici, la végétation étouffait tous les bruits. Surpris par cette tranquillité si soudaine, il senti une légère inquiétude pointer en lui. Il arrêta sa course folle au milieu des arbres. Aucune trace de lumière. Aucun signe de Luke. Il lui fallut quelques instants pour s’habituer aux ténèbres qui l’environnaient. Le feuillage épais des arbres masquait les étoiles, la nuit était sans lune, profonde, impénétrable et froide.
Ben sentait tout autour de lui la forêt vibrer de mille signes de vie imperceptibles. Il tenait tous ses sens en alerte, son esprit ouvert, aux aguets, tendus vers un seul but : retrouver Luke. Progressant avec lenteur dans le noir, il s’appliqua à ressentir toute la vie qui bruissait autour de lui, la végétation de plus en plus dense, les bestioles cachées dans les replis de la terre, des racines, des écorces, les oiseaux de nuit à l’affut, la terre couverte de feuilles et de branches en décomposition, les troncs d’arbres immenses, leur majestueux branchage, leur feuillage exubérant… il n’avait pas besoin de lumière.
Il ressentait la Force, merveilleusement équilibrée, circuler entre tous les êtres vivants de la forêt, entre les arbres, les buissons, les tiges, les racines, les taillis, tous les animaux tapis dans l’ombre, entre la forêt et lui. Il marcha ainsi longtemps, évitant les ronciers, les embûches des racines, des terriers et des lianes, ses mains courant sur le tronc des arbres, sur le haut des fougères, les yeux fermés, l’esprit ouvert à la Force. Il marcha, bien plus longtemps qu’il ne l’aurait voulu. Son maître aurait dû être là.
Ben ne sentait plus aucune trace d’inquiétude, mais une sorte d’agacement, tel que seul son oncle savait provoquer en lui, un agacement plus pénible que le bourdonnement d’un insecte, plus tenace qu’une tâche de résine sur le lin clair de sa tunique. Mais cet agacement n’avait pas sa place en lui. Ben fit appel dans son cœur à tout le calme qu’il avait accumulé depuis l’aube pour le chasser. La paix revint, lumineuse, et avec elle, la sensation d’une présence proche.
Ben avança vers cette présence avant de distinguer dans la pénombre une haute silhouette au visage masqué par une capuche. L’inconnu s’avança vers Ben Solo le toisant de toute sa hauteur, et fit jaillir des replis de sa cape le faisceau lumineux d’un sabre laser, le sabre de Ben. L’inconnu le menaçait et gardait son esprit inaccessible à celui du garçon. En un instant, l’ennemi disparut pour réapparaître l’instant d’après quelques mètres derrière lui, éclatant d’un rire glacial. Le temps que Ben se retourne, il avait à nouveau disparut pour réapparaitre encore plus loin sur la gauche. Puis encore une fois sur la droite, puis à nouveau juste devant Ben.
L’inconnu riait toujours, tournait autour de lui, apparaissant et disparaissant de plus en plus vite. Il semblait être partout et nulle part à la fois. Il maintenait son esprit totalement inaccessible. Ben se sentit devenir fou, mais un éclair de lucidité lui fit comprendre que c’était exactement ce que voulait l’inconnu. Il parvint à se concentrer sur la seule chose dont il avait besoin : son sabre. Rassemblant ce qui lui restait de calme, il fit appel à la Force, tendit la main, et de toutes ses forces attira le sabre vers lui. L’inconnu s’immobilisa soudainement, comme surpris par la puissance du garçon. Le sabre bondit des mains de l’intrus vers son jeune propriétaire qui l’attrapa au vol. Sans perdre de temps il se mit en position d’attaque, menaçant. La silhouette sombre leva les mains vers sa capuche et découvrit son visage. Sous la cape noire, le visage de Luke souriait.
Ben compris que son oncle venait encore une fois de se jouer de lui. L’agacement qu’il avait ressenti contre lui avant le combat rejaillit dans son cœur, décuplé. Ce n’était plus de l’agacement c’était de la rage, une rage qu’il connaissait trop bien. Ben laissa la colère l’envahir, le consumer, exploser. Brandissant son sabre laser, il s’élança avec violence vers son maitre. Luke réagit rapidement, dégainant son propre sabre, et contra l’attaque du garçon. Ben frappa à nouveau mais son maitre ne le laissa pas faire. En un mouvement de force il l’immobilisa, le retenant prisonnier de la force. Brulant de colère, Ben cherchait à se libérer. Se débattant, il comprit que la lutte était vaine, son oncle le dominait. La colère fit place au désespoir. Ben sentit la honte empourprer son visage et les larmes monter, brûlantes, à ses yeux. Luke le libéra. Il s’approcha de son neveu qui tremblait encore de rage, de découragement et d’épuisement, à genou, prostré. Il posa la main sur son épaule. Le garçon tressaillit à ce contact et se redressa vivement, comme prêt à repartir à l’attaque. Luke le regarda dans les yeux, l’air infiniment calme.
_Que t’arrive-t-il Ben Skywalker ?
À ce nom qui était tout son héritage, Ben parvint à se calmer. Le nom de Luke et de Leia, résonnait profondément en lui comme un appel irrésistible.
_Qu’as-tu appris face à la mer Ben ?
_Le conflit est partout maitre, autour de moi, en moi. La colère ne me quitte pas, ni l’amour, ni la peur, ni la force. Il déchire tout, il me déchire…
_Et qu’est-ce qui surpasse le conflit ?
Ben mis quelques instant avant de répondre. Etouffant les sanglots qui montaient à sa gorge, il essuya d’un revers de sa manche son visage couvert de sueur, de poussière, et les larmes qui séchaient sur ses joues.
_La vie. La vie, la croissance et l’être.
_Et que viens-tu d’apprendre ?
_A ne pas me fier aux apparences. Je me croyais apaisé, j’étais seulement fier.
_N’oublie jamais cela Ben. Ce conflit qui est en toi, il ne vient pas de toi. Ne le laisse pas te consumer. La vie, ta vie est bien plus forte. La force est puissante en toi mon jeune padawan, mais tu n’es pas encore un Jedi. Tu as magnifiquement réussi ton épreuve. Mais pour celles qu’il te reste tu devras apprendre à te contrôler d’avantage.
_Pourquoi dites-vous que j’ai réussi ?
_Tu as médité du lever au coucher du soleil avec une grande sagesse, tu as traversé la forêt dans l’obscurité la plus totale simplement en te fiant à la Force, à ce qu’elle te transmettait. Tu t’es laissé guider par elle jusqu’à moi. Tu es parvenu à m’arracher ton sabre, Tu as été mesuré, réfléchi, calme. Ce qui s’est passé ensuite ne faisait pas partie de l’épreuve. Tu as fait d’énormes efforts, tu es épuisé. Viens, nous rentrons au temple.
Ben resta immobile, la tête basse, ne sachant plus quoi penser. Luke le saisi aux épaules, le serra brièvement contre lui et chercha son regard.
_Je suis fier de toi, fils de la Force. Un jour tu seras un grand chevalier. Tu me surpasseras de très loin.
Quand ils furent de retour au temple qui surplombait la falaise, le jour se levait, brumeux et froid. Ben marchait avec résolution aux côtés de son oncle. Son visage était grave et calme, mais son regard brûlait d’une flamme incandescente qui embrasait ses yeux sombres. Ses doigts serraient étroitement une grande plume noire déchiquetée. Il ne voulait pas seulement surpasser Luke. Plus que tout au monde, et jusqu’à la mort, il voulait bien plus que cela.
"La Force est avec toi jeune Skywalker. Mais tu n'es pas encore un Jedi" Dark Vador - L'Empire contre-attaque