par Chertref » Mer 29 Jan 2025 - 11:48 Sujet: Re: Univers Re-Etendu Legendes
Pour vous donner envie et rassurer certains sur la qualité des textes à relire.
Voici le premier chapitre du Tome 1 de la Trilogie du Despote qui se passe après l'Aube des Jedi
Chapitre 1
Origines – Les Deux Princes
Profond est le puits du passé. Ne devons-nous pas le qualifier d’insondable ? Les avis divergent quant au véritable début de l'histoire de notre galaxie : autrement dit, le moment où les mythes brumeux d'anciens empires ou de races disparues s'évanouissent pour laisser place à un histoire cohérente qui nous conduit au présent galactique. Certains affirment que la fondation de la République marque la naissance de l'histoire, mais je soutiens, comme bien d'autres, qu'elle commença véritablement il y a près de vingt-cinq mille ans avec l'émergence du premier empire humain et l'ascension de celui que nous appelons aujourd'hui Xim le Despote.
S.V. Skynx
L’Aube des Temps : Une brève histoire de l’amas de Tion
+3 ap. BY
505 EL (Année 505 de l’Ère de la Libération)
12ème année du règne de Xer
Le siège de Corlax en était à son douzième jour lorsque les forces assaillantes atteignirent la capitale. Les combattants liviens avaient piégé les abords de la ville avec des mines et érigé des barrages routiers avant de se disperser, transformant les banlieues incendiées en un labyrinthe de tirs de snipers, d’explosions surprises et de véhicules blindés ensevelis sous les décombres. Les assaillants ne cédèrent pas : dès le début de l’attaque, des escadrons d’Oiseaux de Bataille Cronaises volèrent à basse altitude, défiant les tirs anti-aériens pour larguer des missiles de fébrilium. Ces derniers firent s’effondrer les tours étincelantes et teintèrent l’air d’une couleur rouge sang.
C’est dans ce paysage dévasté, sous un ciel carmin, que Marco IV Jaminere, Prince Mineur de Sorasca, rencontra Xim, fils de Xer.
Depuis longtemps, Jaminere attendait ce moment. Depuis les corridors du palais familial, il avait observé les campagnes rapides et brutales de Xer VIII, le Roi-Pirate d’Argai. Ce qui avait commencé par des raids audacieux pour amasser des trésors s’était transformé en une conquête qui avait surpris le Royaume de Cron, plaçant l’infâme pirate sur son trône. Les mondes récalcitrants furent soumis un par un, avec une brutalité qui surprit même ceux qui, comme la famille de Jaminere, considéraient les pirates d’Argai comme des sauvages.
Pendant trois ans, ils avaient observé, depuis leur monde supposément sûr, les systèmes tomber, les uns après les autres, sous l’emprise de Xer. Ce qui avait d’abord inspiré l’admiration pour l’audace du Roi-Pirate devint une peur grandissante lorsqu’ils apprirent la destruction du Palais de Bois de Pasmin et les massacres sur Nuswatta. Une fois tout Cron sous son joug, Xer se tourna vers les Trois Royaumes Unis de Sorasca, Barseg et Cadinth. Aux monarques, il fit une proposition simple : « Soumettez-vous ou mourez ».
Ils choisirent de se soumettre.
Le roi Coros IX Jaminere était un pragmatique. Il savait qu’il ne servait à rien de défier la brutalité de Xer et chercha à tirer parti de cette soumission inévitable. Les Trois Royaumes Unis avaient leurs propres ennemis. Sorasca et Corlax se livraient une guerre ancestrale, génération après génération, remontant à leur séparation avec les Tyrans à l’aube de l’Ère de la Libération. Ainsi, lorsque Xer tourna ses yeux avides vers Corlax, Sorasca fut heureuse de prêter ses forces au conquérant.
Parce qu’il était un Prince Mineur (le deuxième fils, mais troisième et dernier dans la ligne de succession), son père n’hésita pas à envoyer Marco IV Jaminere en première ligne. Comme tous les jeunes hommes de son monde, qu’ils soient princes ou non, Jaminere avait été entraîné à combattre leurs ennemis ancestraux. Il avait de l’expérience dans les combats contre les pirates et pensait être prêt à affronter tout ce que l’ennemi pouvait lui opposer, même s’il venait tout juste d’avoir dix-neuf ans.
Cependant, il commença à douter de ses certitudes alors que son unité blindée peinait à se frayer un chemin à travers les faubourgs de la capitale. Il survécut de justesse à la collision de son véhicule avec une mine terrestre, et son conseiller, un ami de longue date de son père, fut abattu par un sniper. La balle traversa son crâne et frôla le visage de Jaminere de quelques millimètres, éclaboussant sa joue de sang. Lorsque son unité atteignit finalement le bastion récemment capturé, plus de la moitié de ses soldats étaient tombés dans la boue parsemée de cendres de la ville en ruines.
Malgré ces épreuves, Jaminere entra dans la forteresse improvisée — une usine encore en activité deux semaines auparavant — avec une exaltation difficile à contenir. On lui avait dit que le chef des forces cronaises dirigeait l’assaut final depuis cet édifice, et il brûlait d’envie de rencontrer cet homme.
Il ne s’agissait pas de Xer VIII. Jaminere avait déjà rencontré le Roi-Pirate, brièvement, lors de sa visite à la cour de Sorasca. Xer avait été tout ce que sa légende prétendait : un homme immense, à la barbe en bataille et à la voix tonitruante, vêtu d’une chemise de soie écarlate négligemment entrouverte, laissant entrevoir des médaillons dorés représentant des dizaines de mondes conquis, étalés sur une poitrine large et velue. Maintenant, Jaminere avait une chance de rencontrer Xim, fils unique de Xer, qui avait dirigé en première ligne les campagnes de son père, gagnant renommée et victoires, bien que chèrement acquises en vies humaines. Il avait, contre toute attente, le même âge que le Prince Mineur : pas encore vingt ans.
Certains l’appelaient Xim le Cruel, d’autres Xim l’Audacieux, Xim le Brave ou, pour une raison obscure, Xim l’Inexorable. Jaminere ne pouvait réprimer sa curiosité ; il se demandait lequel de ces surnoms était véridique. Avec un soupçon de romantisme, il espérait qu’ils le soient tous.
Ainsi, après s’être identifié aux gardes Cronaises et obtenu l’autorisation d’entrer dans le bastion, il fut escorté jusqu’au centre de commandement, le cœur battant et le visage encore taché de sang séché.
Jaminere se souviendrait toujours de sa première impression en voyant le Prince-Pirate : elle fut décevante, presque banale. Il avait imaginé Xim plus grand.
En vérité, il y avait peu de Xer en lui, du moins au premier coup d’œil. Jaminere le trouva debout avec quelques officiers autour d’une carte de la ville, griffonnée et marquée de notes, sous une lumière crue. Il ne portait ni chemise écarlate ni médaillons dorés, mais un gilet en tissage métallique noir sur une tenue de camouflage grise. Malgré l’armure, il était évident qu’il avait une silhouette mince. Son visage était étroit, avec des pommettes saillantes, un nez droit et court, et des cheveux bruns coupés très court sur un crâne légèrement disproportionné. Ni beau ni laid, il n’y avait rien en lui qui le distinguait, sinon l’attention qu’il imposait aux autres soldats.
Lorsque Jaminere entra dans la pièce, Xim leva les yeux de sa carte. Leurs regards se croisèrent pour la première fois, et Jaminere ressentit un léger frisson qu’il qualifierait plus tard de prémonition. Les yeux de Xim, légèrement enfoncés sous des arcades sourcilières marquées, arboraient des iris de la couleur d’une mer au crépuscule : sombres, froids et profonds. Pourtant, en leur centre, dans les pupilles noires elles-mêmes, brillait une lueur semblable à une flamme.
Jaminere attribua d’abord cette lueur à un effet de la lumière, mais dans les années à venir, lors d’autres moments intenses, les yeux de Xim brilleraient de nouveau de cette manière, et il serait ramené à leur première rencontre sous le ciel rouge de Corlax.
Lors de ce premier regard, ce scintillement ne l’arrêta qu’un instant. Il dit :
— Je suis le Prince Marco IV Jaminere. C’est un honneur de vous rencontrer, Xim, fils de Xer.
Sur ces mots, il frappa son poing droit sur son épaule gauche, le salut traditionnel de Sorasca entre égaux. Xim ne répondit pas tout de suite, se contentant de plisser légèrement les yeux, et Jaminere se demanda si le Prince-Pirate n’attendait pas une déférence plus marquée. Pourtant, un prince de Sorasca, même mineur, ne s’inclinait devant personne, et leurs royaumes étaient, nominalement, des partenaires. Jaminere maintint donc son salut, tandis que Xim l’observait de l’autre côté de la table sans expression. Quatre longues et lourdes pulsations de cœur s’écoulèrent.
Enfin, Xim s’adressa à ses officiers :
— Laissez-nous. Je veux parler à notre invité en privé.
Les officiers quittèrent la pièce sans un mot, laissant les deux jeunes hommes se faire face au-dessus de la table et de la carte annotée.
Finalement, Xim expira profondément.
— C’est une bonne chose que vous soyez ici. Combien d’hommes avez-vous amenés ?
Jaminere abaissa son salut et énuméra le nombre de soldats, de véhicules blindés et d’unités d’artillerie qu’ils avaient réussi à acheminer à travers la ville en ruines. Les chiffres étaient bien en deçà de ses espérances, mais le visage de Xim ne laissa transparaître aucune déception. Il ne montrait pas grand-chose, en réalité.
Xim prit un crayon et ajouta des cercles sur sa carte déjà bien usée.
— Nous aurons besoin de vos forces ici, ici et ici. C’est la seule manière de compléter l’encerclement. Je vous laisse décider de la façon dont vous déploierez vos unités.
Jaminere étudia la carte. Le sang séché sur son visage commençait à le démanger, mais il résista à l’envie de l’essuyer. Il examina les territoires déjà conquis et les fortifications qu’il restait à prendre. Aussi terribles que les douze premiers jours du siège aient été, il semblait que le pire était encore à venir.
— Qu’en pensez-vous ? demanda Xim.
Parce qu’il sentait que l’autre jeune homme attendait une réponse honnête, Jaminere se risqua :
— Si cela devient une bataille d’usure, nous risquons de ne pas pouvoir la remporter. Pas sans plus d’hommes.
— Les forces de mon père sont réparties entre Raxus, Rudrig, Barseg et ici. Nous avons très peu de renforts à disposition.
Jaminere fixa à nouveau ces yeux sombres, si durs.
— Je peux demander à mon père des renforts, mais s’il décide d’en envoyer, et c’est un grand si, il faudra deux ou trois jours pour qu’ils arrivent. Les Liviens pourraient envoyer leurs propres renforts d’ici là.
— Ou bien, les forces dans la capitale pourraient tenter une percée. Cela leur coûterait cher, mais ils pourraient considérer que c’est leur meilleure option.
Xim soupira profondément. La lumière crue au-dessus de lui creusait des ombres dans chaque pli de son visage, lui donnant l’air bien plus vieux que ses dix-neuf ans. En réalité, il paraissait même plus âgé que son père, car malgré ses cheveux grisonnants, le Roi-Pirate avait une jeunesse vibrante et barbare.
Xim, en revanche, était un jeune homme sérieux, accablé par un lourd fardeau. Tout comme Jaminere.
— L’encerclement n’est peut-être pas la meilleure option, proposa Jaminere. Peut-être pourrions-nous concentrer nos forces en un ou deux points pour effectuer des percées critiques vers le centre de la ville. Cela créerait des trous dans notre ligne, et certains ennemis pourraient s’échapper, mais si nous prenons le centre, nous prendrons la ville.
— Ce ne serait pas une victoire suffisante.
Xim secoua la tête.
— Nous ne pouvons pas laisser les dirigeants de Corlax s’échapper. Mon père a proposé une alliance aux Liviens, tout comme il l’a fait avec votre peuple. Leur refus a été très… offensant. Notre victoire ici doit être totale.
— Mais si nous prenons la ville...
— Ils ont mutilé nos ambassadeurs, gronda Xim, le visage déformé par la colère.
C’était la première émotion que Jaminere voyait chez lui.
— Ils leur ont coupé les mains, continua-t-il. Puis les pieds. Ensuite, ils les ont enfermés dans des combinaisons spatiales, ramenés à Argai, et les ont jetés dans le vide. Ils les ont intentionnellement laissés tomber dans le puits gravitationnel, trop loin de nos patrouilles orbitales pour qu’on puisse les récupérer. Mais ils se sont assurés que leurs comlinks fonctionnent, pour que nos hommes puissent tout nous raconter avant de brûler dans l’atmosphère.
Jaminere se sentit écœuré, mais pas surpris. Les récits de Sorasca regorgeaient de témoignages sur la brutalité des Corlaxiens et de leurs alliés Liviens. Leurs propres archives étaient-elles pleines de péchés commis par Sorasca ? C’était probable. La violence répondant à la violence, l’atrocité répondant à l’atrocité, était une loi universelle depuis la chute des Tyrans, cette espèce devenue mythique. Du moins, c’est ce que disaient les histoires.
— Les Liviens sont des ennemis redoutables, déclara Xim, la voix vibrante de colère. Nous devons remporter une victoire ici, et elle doit être totale. Mon père ne pardonnera rien de moins.
De la colère, mais aussi autre chose. Était-ce de la peur de la réaction de son père ? Peut-être. Jaminere n’avait pas peur de son propre père, mais Coros IX était un homme très différent de Xer. Le souverain de Sorasca avait de la dignité, de l’élégance et de la prétention. Si Jaminere échouait à soumettre les Corlaxiens ici, il savait que son père le punirait par ce qu’il avait toujours reçu : de l’indifférence froide et un mépris silencieux.
— Comment pouvons-nous gagner ? demanda Jaminere, la voix tremblante.
Xim inspira profondément.
— Il existe une méthode, mais je ne voulais pas l’utiliser. J’espérais que vos renforts seraient plus importants.
— Nous avons fait tout ce que nous pouvions.
— Je sais.
Xim fixa durement la carte. Il traça une large marque près du centre-ville avec son crayon.
— Nous avons identifié cet endroit comme leur principal arsenal. Je suis sûr qu’ils ont déjà distribué une bonne partie de leurs stocks, mais il devrait en rester suffisamment pour provoquer une explosion très satisfaisante si nous le frappons.
Jaminere fronça les sourcils.
— C’est en plein cœur de leurs lignes, et je suppose que c’est protégé contre des frappes de missiles.
— Nous aurons besoin de quelque chose plus puissant qu’un missile. C’est pourquoi j’ai préparé trois Oiseaux de Bataille pour effectuer cette attaque.
— Ce ne sera pas suffisant...
— Sauf si nous sacrifions les Oiseaux eux-mêmes, corrigea Xim.
Il tourna légèrement la tête, et pendant une seconde, un reflet de lumière fit à nouveau briller ses yeux.
— Ils seront, bien sûr, chargés de bombes. Lorsqu’ils percuteront leur cible à pleine vitesse, la force de l’impact combinée aux explosifs suffira à percer le blindage de l’arsenal. En fait, un seul impact direct devrait suffire à vaporiser tout ce qui se trouve dans un rayon d’un kilomètre.
Jaminere comprenait ce que Xim disait, mais il avait du mal à accepter l’idée.
— L’onde de choc d’une telle attaque…
— Sera effectivement beaucoup plus large, confirma Xim.
— Et les Oiseaux de Bataille… auront-ils un équipage ?
— Nos meilleurs Lanciers de Duinarbulon.
— Et ils accepteraient de faire ce sacrifice ?
— Ils le devront.
Xim retourna à la carte et traça un large cercle avec son pouce.
— Toutes nos unités dans cette zone devront être considérées comme sacrifiables. Pour que les Oiseaux de Bataille atteignent leur cible, nous devrons nous approcher suffisamment de l’arsenal pour attirer un maximum de tirs ennemis et dégager les airs.
Jaminere comprit parfaitement ce que cela impliquait. Pendant des années, il avait entendu parler des tactiques radicales et impitoyables du Roi-Pirate : victoire après victoire obtenue sur des monceaux de cadavres calcinés.
Pourquoi avait-il espéré que la bataille de Corlax se terminerait autrement ?
— Pour des raisons de sécurité opérationnelle, nos unités au sol ne peuvent pas connaître le plan de bataille, ajouta Xim. J’avais prévu que les forces de diversion soient entièrement cronaises… mais maintenant que vos Sorasciens sont ici, toute contribution est la bienvenue.
Jaminere regarda Xim dans les yeux, ces yeux sombres comme un océan, sans éclat cette fois. Il comprit exactement ce que l’autre homme — un jeune adulte, comme lui — lui demandait. Et il savait que, sauf si leurs forces participaient ensemble à cette frappe brutale, suicidaire, mais décisive, l’alliance entre Xer et Sorasca ne tiendrait jamais.
— N’y a-t-il vraiment pas d’autre solution ? demanda-t-il.
Xim secoua la tête.
— Chaque heure que nous perdons donne à l’ennemi une chance de renforcer ses positions ou de briser le siège. Si nous voulons gagner, c’est maintenant ou jamais.
Il rendait cela simple, mais sa voix portait le poids de la décision. Tant de vies ; tant de morts. Tant de façons dont cette bataille pouvait se terminer, mais une seule pouvait signifier une véritable victoire pour Xim et Jaminere.
Le Prince Mineur de Sorasca prit un crayon rouge et traça trois marques dans la zone d’explosion.
— Je peux envoyer des unités à ces emplacements.
Le fils de Xer hocha la tête.
— C’est parfait.