

C'est donc une nouvelle fan-fiction que je vous présente ici, elle devrait être relativement courte, moins ambitieuse que ce que je fais d'habitude, aussi, j'espère qu'elle vous plaira

Fan-fiction Star Wars de Mitth'raw Nuruodo
Dramatis Personae
Aidan Watts (humain), chasseur de primes
Dakmel Ens (humain), Jedi Noir
Nali Tko'ra (femelle Twi'lek), pirate
Nuro Landa (Rodien), psychologue
Taltiruk (Wookie), esclave
Vatin Tko'ra (Twi'lek), pirate
An -14.
Au commencement de tout, pour lui, il n'y avait plus que la douleur et le désespoir. Le Wookie savait qu'il avait eu une vie avant, une vie dont il lui restait un nom qu'un humain aurait prononcé Taltiruk ; mais tout cela était à présent si loin qu'il aurait tout aussi bien pu l'avoir imaginé. Maintenant, il n'y avait plus que les coups de fouet de ses geôliers, lacérant sa chair et son âme, le transformant en un animal qui ne savait plus rien d'autre que supplier intérieurement pour qu'on le laisse tranquille...
Il entendait les rires reptiliens de ses geôliers, et d'une certaine façon, c'était pire ; c'était pire parce que pour eux, cet animal en lequel ils le transformaient était tout ce qu'il était, il n'avait pas de nom, pas de pensée, pas de passé, il n'était qu'un jouet vivant auquel ils pouvaient infliger tout ce qu'ils ne voudraient pas qu'on leur fasse... Une part du Wookie aspirait à n'être vraiment plus que cela ; un animal souffrait, mais il ne pensait pas pour s'en rendre véritablement compte... Mais bien enfouie sous la douleur et les quolibets, il restait une âme à l'esclave qui voulait hurler son existence dans une colère dont seul un Wookie était capable...
Cela lui aurait fait du bien, clairement, c'était même la seule chose qui puisse encore lui en faire ; mais pour l'heure, il était fermement attaché contre la paroi grisâtre de ce vaisseau, le corps meurtri par les coups de fouet au point que même son esprit vacillait... Alors il fallait admettre qu'il ne pouvait rien faire, et attendre le moment propice pour redevenir un Wookie face à ces brutes.
Mais ce moment arriverait-il ? Ne vaudrait-il pas mieux en finir tout de suite ?
Au bord de l'évanouissement, Taltiruk parvint encore à se dévisser le cou suffisamment pour voir ceux qui le tyrannisaient ainsi, il vit les faces ricanantes des Trandoshans, celui du centre s'agitant avec le fouet... Il y mettait de la force, une force dont un humain n'aurait jamais été capable... Avec d'autres, Taltiruk aurait pu penser qu'il devait survivre le plus longtemps possible pour ne pas leur faire le plaisir de sa faiblesse, mais la fierté disparaissait bien plus vite qu'on ne le croyait sous de tels assauts... même la fierté d'un Wookie. Alors, Taltiruk pensa à autre chose qui lui faisait encore plus mal que les coups de fouet ; il pensa à sa sœur et à ses frères, qui étaient si loin à présent, mais confrontés au même destin... C'était inacceptable, ils étaient si jeunes ! Qu'on le maltraite lui était une chose, mais il ne pouvait se permettre de mourir sans savoir qu'il aurait fait tout son possible pour les tirer de là !
Il sombra finalement dans l'inconscience sous les sarcasmes des esclavagistes, mais il savait au fond de lui-même que ce n'était que partie remise... si l'occasion se présentait, en tout cas. Il ne devrait pas la laisser échapper, si surprenante soit-elle.
L'occasion de Taltiruk vint dès le lendemain, en fin d'après-midi ; le navire des trois Trandoshans, le Monarque des Profondeurs de l'Espace, nom bien pompeux pour ce vieux bout de métal à peine habitable, était alors arrivé à la station spatiale de Canyta pour se ravitailler, le Wookie avait cru comprendre que c'était la dernière étape avant leur destination finale.
La journée s'était pourtant déroulée comme les deux précédentes que Taltiruk avait passé en compagnie du trio, à ceci près qu'ils l'avaient cette fois laissé attaché, au cas où les coups de fouet de la veille n'auraient pas été suffisants pour le faire renoncer à son insolence... Les Trandoshans parlaient basic entre eux, sans doute n'avaient-ils aucune de leurs langues natales en commun, et bien que n'ayant jamais voyagé hors de Kashyyyk avant la funeste expédition qui avait mené à sa capture, Taltiruk comprenait à peu près ce qu'ils disaient. Cela n'avait rien d'extraordinaire, et c'était bien cela le plus effrayant : les conversations des trois marchands étaient la plupart du temps tout ce qu'il y avait de plus banales, du même acabit que celles que Taltiruk avait déjà entendu chez des Wookies qu'il respectait ; mais lorsqu'ils lui parlaient, ou qu'ils parlaient de lui entre eux... soudain, ils se transformaient en des monstres avides de pouvoir et de souffrance comme d'autres étaient avides de femmes ou de livres. Il était à eux, leur objet, et ils voulaient en profiter comme un gamin qui se jette sur un nouveau cadeau ; le fait qu'il soit un être pensant au même titre qu'eux, ils en avaient conscience, Taltiruk le voyait passer dans leur regard ou leurs hésitations par moments, mais dès qu'ils étaient en groupe, ils paraissaient oublier cela pour ne plus penser qu'à la joie qu'ils éprouvaient de l'avoir entre leurs griffes... Si la violence réduisait à l'état d'animal, cela ne s'appliquait pas qu'à ceux qui la subissaient.
À ce moment, les deux premiers Trandoshans avaient quitté le petit vaisseau pour pénétrer dans la station, et le troisième, qui avait manifestement besoin de se faire les griffes, lançait au Wookie d'un ton badin :
« Tu sais, je ne pense pas que tu aies vraiment à t'inquiéter... Un costaud avec du courage comme toi, en principe, on en fait un lutteur, on le regarde risquer sa vie contre un autre du même genre, pour les paris et le plaisir du suspense. Ah oui, tu risqueras ta vie ! Mais tu auras la gloire ! Tous les maîtres, si mauvais soient-ils, savent récompenser ceux qui combattent pour eux, tu verras ! Tu sais pourquoi ? Parce qu'ils te voient comme une extension de leur personne, en fait : tu fais ce qu'ils n'ont pas la force de faire, pour leur gloire. Alors forcément, ils s'identifient un peu à toi. Et puis même, c'est une vie trépidante ! Si tu triomphes de tes adversaires, tu pourras en tirer orgueil ! Ça vaut mieux que de crever lentement sur un chantier de l'Empire, non ?
Naturellement, Taltiruk s'empressa de rugir à l'imbécile où il pouvait se mettre sa gloire ; et naturellement, le Trandoshan ne comprit pas, il parut même le prendre comme une approbation, mais le Wookie ne connaissait pas les Trandoshans depuis suffisamment longtemps pour en être sûr.
-Tu avais déjà imaginé que tu deviendrais un champion de lutte, mon pote ? reprit l'impertinent esclavagiste. Tu sais quoi, tu as de la chance d'être tombé sur ces pirates et qu'ils t'aient vendu, sinon tu serais resté avec les autres sauvages sur Kashyyyk et tu serais mort sans rien faire de ta vie !
Cette fois, Taltiruk gronda d'une façon qui ne pouvait laisser aucune ambigüité sur ses intentions, même pour un Trandoshan ; il savait que le geôlier ne cherchait au fond qu'à se défouler un peu et à tester son courage en énervant un Wookie, mais s'entendre traiter de sauvage par un tel être était tout bonnement révoltant...
Heureusement, l'attention du Trandoshan se détourna de lui à ce moment-là, ses deux congénères étant de retour.
-Eh, debout, on a de la visite ! lança le plus grand des trois.
-Comment ça, de la visite ?
-Un Rodien nous a dit qu'il voulait nous voir...
-Ah ? Un chasseur de primes ?
-Apparemment non. Et il dit qu'il veut nous acheter quelqu'un... Donc s'il a l'argent, autant qu'on lui file le Wookie, non ? Je sais que c'est excitant, mais mine de rien, c'est quand même dangereux de garder ces trucs-là à bord...
Outre le peu de déférence dont faisait preuve le reptiloïde à son égard, Taltiruk se sentit agacé à l'idée de passer ainsi son temps à changer de main, ce qui lui rappelait encore plus cruellement qu'on ne voyait plus en lui qu'un objet... D'un autre côté, son acheteur ne serait vraisemblablement pas pire que ces trois-là, et s'il ne voyait pas comment il pourrait venir à bout de trois Trandoshans tous aussi grands et forts que lui sinon plus, la chose serait peut-être plus facile avec ce Rodien...
-Je ne sais pas... répondit le premier Trandoshan. En général, les Rodiens ne sont pas très friqués... et pas très fiables. On ne devrait pas attendre une meilleure occasion ?
Le troisième Trandoshan prit la parole d'un ton vicieux :
-En fait, on se disait que c'est peut-être justement une opportunité qu'on ne retrouvera pas... Si on le fait monter et qu'on décolle avec lui à notre bord pour lui faire un peu peur, il devrait être un peu plus coulant sur le prix, sans quoi nous pourrions avoir un accident dont il serait la seule victime...
-Vous voulez vraiment faire ça ? demanda le premier, l'air peu confiant.
-Je ne sais pas, admit le premier, mais il suffit qu'il le croit... En plus, c'est frêle, un Rodien, alors avec trois Trandoshans et un Wookie à bord, il va vite paniquer...
-Pas faux. On le fait monter, alors ?
-Tout de suite !
Le Trandoshan qui avait répondu appuya sur un bouton, et Taltiruk entendit une porte s'ouvrir au loin... Les Trandoshans devaient avoir raison, ces Rodiens étaient des créature bien fluettes, car le pas du visiteur était quasiment inaudible, surtout en comparaison de celui des trois brutes ! Lorsqu'il apparut dans le poste de commande, Taltiruk fut pris d'une envie de rire qu'il refoula à grand peine ; le Rodien était effectivement une créature petite et mince, et son apparence paraissait en outre bien comique au Wookie, une peau bleu-vert vaguement reptilienne qu'on aurait cru en plastique, deux grands yeux noir-bleu globuleux, un long museau fin en lieu et place de la puissante gueule des Wookies et des Trandoshans, sans oublier les deux fragiles antennes surplombant sa tête... Si c'était ça, son nouveau geôlier, il en serait vite débarrassé !
-Bonjour, Messieurs, salua-t-il de sa voix aigüe qui le faisait paraître encore plus étrange au Wookie. Je me présente, je m'appelle Nuro Landa, je souhaiterais faire l'acquisition d'un esclave qui ait une bonne dose de courage et d'endurance...
Il ne jeta pas un seul regard dans la direction où se trouvait le Wookie, pas davantage vers le tableau de bord et l'espace ; il paraissait ne regarder que les Trandoshans, ses grands yeux lui donnant une allure naïve.
-Pourquoi faire ? demanda le Trandoshan qui était resté dans le vaisseau. Pour vous aider, vous êtes chasseur de primes ?
-Non, Messieurs, je suis psychologue.
Les trois Trandoshans s'entreregardèrent d'un air sceptique ; Taltiruk comprenait pourquoi, il lui semblait qu'on lui avait toujours décrit les Rodiens comme très portés sur les activités malhonnêtes et la violence...
-Psychologue ? Et, pourquoi avez-vous besoin d'un esclave, alors ?
Sans un mot, un autre des Trandoshans vint s'installer aux commandes du vaisseau et le fit doucement décoller ; il se retourna hâtivement vers le Rodien, probablement près à lui demander son autorisation pour une petite balade autour de la station, mais celui-ci ne paraissait pas se rendre compte de ce qu'il se passait. Peut-être n'osait-il pas regarder...
-J'aurais besoin, tout d'abord, de sa conversation ; les êtres pensants que l'on réduit à l'état d'objet sont tout à fait fascinants à étudier, l'impact sur le psychisme de l'individu est remarquable, expliqua Landa, qui cachait admirablement bien son appréhension s'il en éprouvait. J'en ai besoin, d'autre part, car j'ai une dette à payer à un vieil ami, or un être fort et courageux m'y serait fort utile...
Le vaisseau filait vers l'espace, à présent, s'éloignant de la station et des planètes. Taltiruck n'arrivait pas à décider s'il croyait ou non le Rodien, ce qu'il disait paraissait si improbable que cela pouvait tout aussi bien être vrai... Et manifestement, c'était aussi ce que se disaient les Trandoshans...
-Eh bien, nous avons ici un Wookie d'une excellente qualité, assura le Trandoshan, qui paraissait soupeser ses mots face à son étrange visiteur. Vous connaissez les Wookies, n'est-ce pas ? On ne fait pas mieux...
Alors, seulement, le dénommé Nuro Landa se tourna vers Taltiruck ; cependant, il se contenta d'un coup d'œil rapide et froid.
-En effet, un tel spécimen me paraît convenir. Quel est son nom ? C'est important, le nom, pour comprendre le psychisme de quelqu'un.
Une fois de plus, les Trandoshans s'entreregardèrent ; jamais ils n'avaient pensé à retenir le nom du Wookie, il n'avait pas de nom pour eux, donc pas de personnalité, c'était le Wookie, l'esclave, leur chose, et rien d'autre.
-Je ne sais plus, confessa le pilote, en lorgnant d'un regard incrédule son excentrique acheteur. On peut chercher dans l'ordinateur, si vous voulez ?
-Oui, j'en serai enchanté, Messieurs ! s'exclama le Rodien, visiblement ravi. Ensuite, nous pourrons régler le détail du prix, ce n'est pas un problème, ça !
-Très bien, venez...
Landa s'approcha du tableau de bord d'une démarche empressée ; les deux autres Trandoshans ne bougèrent pas, paraissant penser qu'il fallait de tout pour faire une Galaxie, mais assez soulagés tout de même d'apprendre que le prix n'était pas un problème.
-Voilà, les derniers achats sont ici, et...
-Faites voir...
Il y eut un déclic ; les Trandoshans n'avaient semblait-il rien remarqué, ou peut-être le bruit leur avait-il paru anodin, mais Taltiruk était sûr de l'avoir entendu, c'était comme si... Il comprit brusquement : le Rodien avait dû insérer discrètement quelque chose dans l'ordinateur de bord ! Il grogna un avertissement à l'encontre des Trandoshans, car tout esclave qu'il était, tout cela ne lui disait rien qui vaille ! Néanmoins, les esclavagistes ne parurent pas s'en émouvoir...
-Ah oui, voilà, Taltiruk, donc... Fascinant, c'est exactement ce que je cherchais, exactement...
-Attendez, qu'est-ce qui se...
-Y-a-t-il un problème ? questionna Landa en relevant le museau de l'ordinateur.
Le pilote ne lui prêta pas attention et se retourna en direction de ses deux congénères :
-Eh ! Pourquoi est-ce que le vaisseau fonce droit vers le soleil ?
-Je n'ai touché à rien, protesta l'un des deux autres.
-Peut-être pas, mais je n'arrive pas à rétablir la trajectoire et on y va drôlement vite ! Les gars, on discutera de ça plus tard, il faut...
-En effet, il semble qu'il y ait urgence, constata le Rodien. Nous conclurons la vente plus tard, il faudrait savoir quelle est la cause de...
-Le Rodien, tu t'éloignes de cet ordinateur tout de suite ! ordonna l'un des deux autres Trandoshans d'une voix tonitruante tout en dégainant un énorme blaster.
Le Wookie sentit son pouls s'accélérer en voyant l'arme... Les choses prendraient vraiment mauvaise tournure si le mystérieux Rodien était lui aussi armé... Toutefois, il le cachait bien si c'était le cas ; son museau eut une moue étrange qui devait traduire de la surprise, et il s'éloigna prestement de l'ordinateur. Le Trandoshan le tenait toujours en joue.
-Pardonnez-moi, Messieurs, je n'avais pas l'intention de susciter une telle inquiétude chez vous, en vérité ! Vous pouvez ranger cette arme, elle me met mal à l'aise et elle est inutile... Il faut savoir pourquoi votre vaisseau a pris cette trajectoire... Et assez vite, si possible...
Le Wookie approuvait silencieusement... S'ils étaient pris par la gravité de l'étoile, là, ils auraient un vrai problème, qu'ils soient esclavagistes, esclaves ou psychologue douteux...
-Tu te tais et tu ne bouges plus, le Rodien, ordonna sèchement le Trandoshan, qui goûtait manifestement peu la plaisanterie. Ah, si, tu nous donnes ton arme sur le champ !
-Je n'ai pas d'arme.
-C'est ça, oui... Retourne tes poches, et tes manches, aussi.
-Monsieur, il me semble qu'il y a une autre urgence... Nous fonçons vers une étoile, je suis ravi que ma personne vous préoccupe à ce point, mais...
-Possible, oui, alors pourquoi ne pas nous dire comment arrêter ce que fait la clé que tu as inséré dans l'ordinateur ? Sinon, on te grille, et on cherchera sans toi.
-Je vous déconseille de faire ça, suggéra le Rodien d'une voix douce, mais bien plus assurée que précédemment.
-Et pourquoi donc ? Ce n'est pas l'envie qui nous en manque, et tu nous en a donné de bonnes raisons !
-C'est possible, reconnut Landa, mais je vous le déconseille parce que si par hasard vous ne trouvez pas comment arrêter ce programme après m'avoir grillé, comme vous dites, mon vaisseau sera le seul à pouvoir venir à votre secours...
Taltiruk était stupéfait de voir le Rodien si calme et si sûr de lui entre trois Trandoshans dont l'un le menaçait d'un blaster...
-Comme c'est pratique... On essaye de nous forcer la main sur le prix ?
-Échange de bons procédés.
Le Trandoshan grogna ; à présent qu'il était clair que le Rodien n'était ni peureux ni aveugle, il pouvait difficilement nier ce qu'ils avaient essayé de faire...
-D'accord, c'est de bonne guerre, admit-il avec son sourire de saurien, en dépit du regard noir que jetaient ses deux associés à Landa. Tu veux quoi ? Et vite, avant qu'on ait tous très chauds...
-Oh, rassurez-vous, je n'abuserai pas de la situation, il est hors de question que je vous demande des frais d'entretien pour le Wookie ou des réparations pour les dommages physiques et psychologiques qu'il a subi ; non, je veux juste lui, on signe la vente pour un montant de zéro crédit, et c'est réglé. Je suis bien sûr désolé de l'opportunité que vous perdez ainsi, mais je suis sûr que les trois cent quatre-vingt-deux autres esclaves aux mains de votre société seront suffisants pour vous faire vivre, le prix n'est pas un problème.
Le Trandoshan poussa un sifflement excédé.
-Tu nous prends pour qui, exactement ? Si c'est comme ça, on fonce tous dans le soleil et c'est réglé !
Le Wookie se demanda brièvement si quelqu'un à la station pourrait venir à leur secours à temps, mais tous les autres paraissaient penser que ce n'était pas le cas, aussi supposa-t-il que les gens de cette station n'étaient pas spécialement attentifs à ce que devenaient leurs clients...
-Je regrette, mais la psychologie, contrairement aux préjugés qui nous permettent de gérer le quotidien sans systématiquement nous perdre dans des abîmes de réflexion, la psychologie nous apprend que chaque être pensant est unique, couvert de poils ou non ; or, l'argent est une chose fongible, tout crédit en vaut un autre, il n'aura donc jamais assez de valeur pour acheter un être unique, quel que soit sa quantité... D'autre part, les êtres pensants sont notoirement difficiles à estimer... Enfin bref, faute de pouvoir fixer un prix, qui serait nécessairement une escroquerie pour l'une ou l'autre des deux parties sinon pour les deux, je pense que la seule solution honnête pour tout le monde serait qu'il n'y en ait pas... ou alors, simplement l'assurance que j'en prendrai soin comme on doit prendre soin d'une chose unique... Vous voyez, je n'abuse pas de la situation.
-Arrête de te foutre de nous ! cria le pilote, dont les doigts griffus s'activaient à toute vitesse à la recherche d'un remède au piratage de l'ordinateur.
-Messieurs, je vous demande de bien vouloir reconsidérer ma proposition, je crains que vous ne vous comportiez comme des reptiloïdes à sang chaud... Je ne prétendrai pas être dans vos têtes, mais il me semble que si vous vouliez vendre ce Wookie, c'était pour obtenir de l'argent, et que si vous voulez de l'argent, c'est pour en profiter... c'est difficile, quand on est mort. Moi, en revanche, vous ignorez ce que je veux, puisque cet humble poilu ne peut à l'évidence constituer un but en soi ; il est donc possible que je sois suffisamment fou ou fanatique pour abandonner ce vaisseau... Réfléchissez bien : vous perdez un esclave, le carburant de l'aller-retour, et c'est tout.
Le Trandoshan qui tenait le blaster regarda tour à tour ses deux congénères, paraissant plongé dans une intense réflexion... Celui qui était à côté de lui lança :
-Et puisque t'es pas armé, pourquoi on ne te torturerait pas jusqu'à ce que tu nous dises comment faire, hein ? Tu vas faire le poids, contre trois Trandos ?
-Non, c'est vrai. Mais vous devez savoir que certaines personnes, certes très rares, ne cèdent pas sous la torture ; et si ce n'est pas le cas, pensez-vous disposer de suffisamment de temps ? Ai-je l'air de quelqu'un qui cède facilement ?
-Peut-être pas, non...
-Par ailleurs, je vous ferai remarquer qu'il n'est pas sûr que je connaisse moi-même un moyen d'arrêter ce programme...
La langue du Trandoshan claqua ; il n'avait pas pensé à cela, supposa Taltiruk.
-OK, laisse tomber, ça n'en vaut pas la peine, grinça le Trandoshan armé. Tu te donnes du mal pour rien avec ce Wookie, mais c'est ton problème... Allez, appelles ton vaisseau.
Il posa son blaster ; les deux autres affichèrent un certain soulagement.
-Fort bien, je suis ravi de vous voir revenu à de meilleurs sentiments... Tenez, vous me signez cet acte de vente ? Le nom du Wookie y est déjà, inutile de vous casser la tête à aller le chercher dans l'ordinateur...
Le Trandoshan se baissa pour signer.
-Voilà, il est à toi.
-Très bien ! Allez, mon vaisseau sera bientôt là, dit Landa après avoir tapé quelque chose sur son comlink. Évitez de toucher à votre blaster avant que je ne sois parti, parce que franchement, vu la façon dont vous le tenez, il pourrait y avoir un accident... Je désactiverai le programme pour que vous puissiez récupérer votre vaisseau en prime...
-OK.
-Ah, et tant qu'on y est, libérez le Wookie, il a l'air de se sentir seul, le pauvre... Nous n'avons pas grand chose à en craindre à quatre.
-Si vous voulez... Ce n'est pas nous qui avons le plus à craindre de lui.
Le pilote appuya sur une touche du tableau de bord, et Taltiruk sentit sans même y croire ses entraves se rétracter, il était libre de ses mouvements !
Il regarda attentivement le Rodien et les Trandoshans... Que devait-il faire pour ne pas gâcher cette opportunité ? Rien, réalisa-t-il... Pas d'initiative précipitée, il aimerait beaucoup se jeter sur les Trandoshans toutes griffes dehors, mais cela n'aurait que peu de chances d'aboutir ; en revanche, une fois à bord du vaisseau du Rodien, il aurait toutes ses chances... Peut-être pas, ceci dit ; calculateur comme il était, ce Nuro Landa avait dû prévoir quelque chose pour maîtriser un Wookie... Cependant, il avait paradoxalement l'impression de pouvoir se fier davantage à ce manipulateur qu'aux trois brutes épaisses... Ça tombait sous le sens : il devait suivre le Rodien, et attendre quelque chose qui lui permette de partir à la recherche de sa fratrie.
-Mon vaisseau est là, annonça le Rodien, son museau dessinant une sorte de sourire. Vous serez gentils d'ouvrir l'écoutille lorsque la passerelle sera en place...
Le pilote attendit quelques secondes qu'un voyant clignote, puis s'exécuta de mauvaise grâce ; l'éclat rougeoyant de l'étoile occupait une place inquiétante dans la verrière...
-Merci beaucoup ! Tu peux y aller, mon brave Wookie, je te suis... J'imagine que tu sais où est l'écoutille, ces messieurs t'ont peut-être gardé attaché, mais le vaisseau n'est pas grand, supposa Landa avec un petit rire. Quant à vous trois, faites comme si vous vouliez programmer des coordonnées de saut hyperspatiale, et écrivez 849-1138 ; ça ne lancera évidemment pas le saut, mais le programme se désactivera...
Le Wookie s'engouffra dans la coursive qui l'éloignait du poste de commandement, l'écoutille était juste au bout... Il entendit encore :
-Vous avez ma promesse que sauf action très irréfléchie de votre part, il n'arrivera rien de plus à ce vaisseau... Je vous laisse, Messieurs. Vous ne m'en voudrez pas, j'espère, si je sors à reculons...
Taltiruc passa son imposante tête poilue à travers l'écoutille, et se hissa dans une passerelle beige... Le vaisseau de Landa paraissait plus chaleureux que la casserole des Trandoshans, c'était toujours ça de pris... Il déboucha sur un autre couloir fait de la même couleur.
-Le poste de commandement est à gauche, mon grand, tu peux aller t'installer dans un fauteuil ! entendit-il derrière lui.
Le Wookie n'émit pas de commentaire sur le « mon grand » et se contenta de rejoindre le poste de pilotage ; celui-ci était moins spacieux que celui du vaisseau des Trandoshans, mais c'était parce que le leur servait également de salon, il n'y avait ici réellement que les commandes et deux sièges qui paraissaient relativement confortables en face, presque assez grands pour qu'un Wookie s'y sente à l'aise. Il se demanda à quoi jouait le Rodien pour le laisser si libre, mais ayant besoin de repos, il s'installa sans se poser davantage de questions ; son nouveau maître entra à sa suite et commença à pianoter sur l'ordinateur.
-Je rétracte la passerelle... Voilà. On y va !
Le vaisseau se détacha effectivement de l'amande grise à bord de laquelle étaient restés les Trandoshans.
-Au fait, même si je ne le parle évidemment pas, je comprends très bien le Shyriiwook, nous n'aurons donc pas de difficulté à communiquer.
-Merci de m'avoir sauvé d'eux, grogna Taltiruk en conséquence, espérant que Landa était effectivement mieux disposé à son égard. Mais où m'emmenez-vous ?
-Un instant... Nos amis sont un peu mauvais joueurs...
Le mot était faible : non sans une certaine inquiétude, Taltiruk vit le Monarque des Profondeurs de l'Espace changer de trajectoire pour se lancer à leur poursuite... La tourelle blaster du haut, la seule dont était équipé le vaisseau, pivotait avec une lenteur de mauvais augure... Le Wookie fut soudain saisi d'une crainte : le vaisseau de Landa était-il suffisamment équipé pour faire face à l'attaque ? Avait-il pensé à cela ? La gravité n'était pas vraiment opportune pour un passage en hyperespace... Le vaisseau se rapprochait, les canons lasers cessaient de bouger ; mais la rafale ne jaillit pas. Ce qui jaillit, ce fut une explosion éclatante au niveau des propulseurs, déséquilibrant soudain le vaisseau ennemi... Le propulseur restant s'éteignit alors que le feu commençait à dévorer le vaisseau... Taltiruk imagina la panique et la rage impuissante des Trandoshans à bord... Avec une lenteur irréelle, le Monarque des Profondeurs de l'Espace décrocha entièrement de sa trajectoire, paraissant tomber peu à peu dans l'espace, épave enflammée...
-Les inconscients... murmurait Landa. Je leur avais pourtant dit ce qui leur arriverait en cas d'action irréfléchie... Mais il faut croire qu'ils ont compris ce qu'ils voulaient entendre...
Taltiruk n'eut pas à chercher bien loin pour comprendre ; ce que Landa n'avait pas dit aux esclavagistes, c'était probablement qu'un second virus était à l'œuvre, qui neutraliserait leur vaisseau s'ils essayaient de tirer...
-Peut-être que quelqu'un à bord de la station pourra les secourir s'ils arrivent à éteindre l'incendie, mais je doute que qui ce soit s'en soucie ici, ajouta le Rodien. C'était vraiment un risque inconsidéré de leur part, ils auraient très bien pu s'en tirer... Ah, ces Trandoshans... Si je n'étais pas déjà spéciste, je le serais devenu !
Il se tourna vers le Wookie, qui le dévisageait d'un air incrédule.
-Tu n'as pas pitié d'eux, j'espère ? Parce que si oui, dis-toi que ce qu'ils ont subi, c'est exactement ce qu'ils voulaient nous faire, ça revenait pour eux à accepter de le subir... Et puis, rappelle-toi ce qu'ils t'ont fait ; outre qu'ils t'ont acheté comme une vulgaire marchandise, ce que je n'ai pas réellement fait, je suis sûr qu'ils n'ont pas dû être bien commodes... C'est ce que tu voulais leur faire, non ?
Le Wookie chercha un instant quelque chose à répondre... Il y avait un gouffre entre avoir voulu les tuer et le faire pour de bon, il s'en rendait compte à présent...
-J'aurais préféré le faire moi-même, dit-il pour ne pas perdre la face.
-Non, tu n'aurais pas préféré, parce que tu aurais alors eu du sang sur les mains, comme eux ; peu importe la quantité, peu importe les circonstances... Moi, j'en ai déjà suffisamment pour ne pas me sentir plus compromis... D'autant qu'en fin de compte, ce n'est pas moi qui les ai tués, ils se sont tués eux-mêmes.
-Vous n'êtes pas vraiment psychologue, n'est-ce pas ?
-Non, je suis chasseur de primes, bien sûr, comme tous les Rodiens.
Taltiruk se demanda un instant si l'individu plaisantait, mais cela ne paraissait pas être le cas.
-Et... pourquoi avez-vous vraiment besoin de moi ?
-Qu'est-ce qui te fait croire que les deux réponses que j'ai données aux Trandoshans étaient fausses ?
-Vous n'êtes pas psychologue, et vous ne me paraissez pas davantage disposé à me vendre comme esclave puisque vous dites ne pas m'avoir pas réellement acheté...
-Non, tu as raison. Je suis venu te chercher pour la même raison que tu vas me suivre de ton plein gré : je cherche quelqu'un, quelqu'un qui a de fortes chances de se trouver auprès de ta sœur et de tes frères...
À ce stade, le Wookie ne s'étonna même pas que Landa connaisse leur existence...
-Les pirates qui nous ont capturés ?
-Tout à fait, leurs chefs, plus précisément... Un homme et une femme Twi'lek tout le temps collés l'un à l'autre, tu vois de qui je parle ?
Le Wookie hocha la tête avec un petit rugissement douloureux ; il ne se souvenait que trop bien de ces deux-là...
-Bien sûr... Les Tko'ra.
-Voilà. Ils t'ont vendu aux Trandos pour se débarrasser de toi parce que tu étais trop dangereux, n'est-ce pas ? Tu devrais pouvoir m'aider à les trouver... et un costaud comme toi ne sera pas de trop.
Le Wookie hocha la tête avec véhémence ; il n'avait jamais été un combattant, même s'il avait une force naturelle qui en faisait un adversaire terrifiant pour la plupart des espèces de la Galaxie, mais il était tout à fait prêt à le devenir s'il le fallait... Mieux, il en avait envie.
-Pas de problème, je suis avec vous... Mais il nous faudra traverser des zones de guerre, une rébellion particulièrement redoutable sévit dans cette zone...
-C'est bien ce qui me semblait... Mais on a une petite chance à nous deux, une petite, mais elle existe et les Tko'ra devront compter avec ; et si ça peut te rassurer, ce vaisseau est taillé pour le combat, contrairement à feu le Monarque...
-Pourquoi avoir saboté le vaisseau des Trandoshans, alors ? N'aurions-nous pas pu nous enfuir sans cela ?
-Parce que j'ai horreur de la violence. » lâcha Nuro Landa avant de déclencher le passage en hyperespace.