par Dollowin Branthor » Mar 21 Sep 2021 - 0:11 Sujet: Re: Fan Fiction - Ben Solo
L'étoile Perdue
Voyage méditatif dans les tourments de l'âme de Ben Solo
Chapitre 12 - Forêt dormante - 27 ap BY
(ce qui enchaine le fils à la mère)
La lune se levait, paisible et froide, plaquant sa clarté livide à la surface de la forêt de glace. Le vent faisait frissonner la cime argentée des arbres. L’air était froid, le givre habillait d’étincelles le sol couvert de feuilles mortes. Les étoiles comme autant de clous scintillants, dessinaient d’indéchiffrables symboles, pâles et glacés, joyaux profonds et immobiles au front sombre du ciel. Perdue dans l’obscurité, une lumière d'opale déformait les ombres, détruisait les couleurs et anéantissait les formes. Sous la brise, la noirceur du ciel s’entachait de nuages, de grisailles.
La lune se noyait dans la brume terne. Les constellations s’effaçaient. Le sifflement d’un oiseau solitaire montait d’un buisson d’épines. Ses notes aigües et claires s’envolaient du buisson aux étoiles, pures et mélancoliques, caressant les cimes nues des arbres, les nuages assombris, le reflet blafard des astres, il saluait la nuit, son ombre et sa clarté. La nuit aux milles ombres noires, aux milles fragiles lueurs, la nuit bercée par le craquement du givre, bercée par le chant de l’oiseau, la nuit endormait la terre.
Le vent soufflait en rafale et réveillait le chant du monde, le chant de toutes inspirations, le chant de l’infini, le chant du ciel, ouvragé par la nuit des temps, sculpté chaque instant contre les troncs noirs, les branches graciles, les feuillages mourants, un chant poignant de sagesse, étrange et paisible qui faisait danser la forêt d’une valse lente et silencieuse, un chant vivant d’une beauté déchirante, invisible et fragile dont la grandeur étreignait l’âme de Ben Solo de sa caresse déchirante. Le chant de la nuit blessait jusqu’au tréfonds de son cœur.
Il voulait tuer, il voulait détruire, il voulait faire souffrir. Ravager. Tout. Brûler, dévorer, arracher, déchirer, écraser… Rien, rien n’aurais pu suffire à calmer ce besoin impérieux de violence brut et totale. Ni colère, ni haine, juste une soif absolue d’anéantir, de s’abreuver de cris, de hurlement, de douleur, de souffrance, une jouissance, une délectation profonde de sang et de torture, lancinante, dévorante, infernale. Son cœur brûlait. La violence incendiait ses veines, embrasait sa tête, tous ses sens, et le réjouissait, le comblait. Une force dévastatrice irradiait son être, une force capable de tout. Dans la nuit froide habillée de clarté son cœur se desséchait. Son désir inconsolable le consumait.
D’un seul geste il pouvait, il voulait détruire, briser, broyer, fracasser, disloquer. La fureur vivait à travers lui, de plus loin que lui, fureur sans âge, éternelle, sans limite, infinie, insondable... depuis toujours elle était en lui, compagne familière et sombre, tapie dans les recoins de son cœur, prête à surgir, à rugir, à détruire. Cette violence sans nom et sans visage qui le dépassait ne l’effrayait plus. De cette insondable ténèbre il s’était fait une inestimable alliée. Elle le réchauffait quand le vent glacé emprisonnait ses sens, elle était sa flamme au plus obscure de la nuit, elle guidait son bras dans les combats, son instinct sauvage et fou, lui donnait la victoire. Au plus intime de son cœur elle l’enserrait, le détruisait, l’enlaçait, le rejoignait inlassablement dans ses méditations les plus profonde. L’oiseau chantait dans les épines.
Parfaitement sûr de sa force, Ben, les yeux fermés, tendit devant lui son poing fermé et l’ouvrit brutalement. Un craquement puissant répondit à son geste. La surface glacée de la mare s’était brisée. Ben ferma sa main, un autre craquement résonna, des branches s’écroulèrent. D’autres gestes brusques, d’autres craquements sinistres suivirent. L’oiseau chantait toujours. La brise caressait les arbres décimés. Les bras tendus, les yeux fermés, le cœur en feu, tout autour de lui Ben détruisait, broyait les roches, arrachait les branches, fracassait les troncs, disloquait les racines. Il sentait avec jubilation la Force le parcourir, le traverser, irradier ses membres et jaillir, indomptable, de ses mains crispées. Il exultait, n’était plus que Force, violence, détresse. Le fracas s’amplifiait, les troncs noirs s’effondraient, labourés de profondes déchirure, et dans l’esprit aveuglé du garçon, seule subsistait la joie folle, insensée de sa violence inépuisable. Lorsque l’oiseau s’arrêta de chanter, la fureur fit place au vide, le feu dans ses veines au vent glacé de l’hiver. Ben sentit brusquement toute vie cesser autour de lui.
Dans le silence assourdissant, terrassé, privé de sa force, il tomba à genou. L’obscurité l’écrasait de toute son immensité. Il n’y avait plus en lui qu'un cœur de cendre, un souffle épuisé, et les ténèbres, souveraines. Les étoiles n’en finissaient plus de mourir, le vent même avait ralenti sa course folle. La puissance du côté obscure se déchainait en lui, autour de lui, à travers lui, l’horrifiant et l’émerveillant tout à la fois. Plus aucune force ne le soutenait, plus aucune lueur ne le guidait. Cloué au sol, il contemplait le spectacle ahurissant d’une noirceur sans mesure, le spectacle d’un pouvoir absolu capable de tout détruire, de fissurer la vie jusqu’au cœur de la planète. Il était capable de cette Force monstrueuse. Il le savait. L’appel n’avait jamais été si insurmontable, si envoûtant, si implacable. Et Ben ne désirait plus que cela, ce pouvoir enivrant, foudroyant et total, le pouvoir de tenir dans sa main la vie et la mort. Il n’avait qu’un pas à faire. Qu’un pas. Un pas qui l’arracherait à la lumière, qui l’enchainerait pour toujours à la nuit.
Du plus profond des ténèbres, au plus obscur de son cœur, un murmure plus tendre qu’un baiser déchira le silence.
_Ben !
Le nom du fils résonna dans l’univers, infiniment répété par l’écho des étoiles. A cet appel plus fatal qu’une aurore, Ben senti son cœur se fendre, se fragmenter, éclater. Un hurlement de douleur lacéra sa gorge. Des larmes montèrent à ses yeux, écorchaient ses joues, labouraient sa peau, inondaient son visage. Anéanti il s’abandonna à la brûlure de leurs caresses. La nuit finissait.
L’aube montait derrière la colline et sa longue chevelure de nuage écharpait de neige les lueurs diaprées de l’aurore. Dans le lointain paraissait la rumeur du jour, un jour enflammée de soleil qui froissait le silence de la nuit. La mare, flaque de ciel gelée posée dans l’herbe, scintillait, lumineuse. Dans l’air pur et glacé du matin, dans l’air grisé de gel et de vent, dans la forêt dévastée, enveloppée de brumes, sur les troncs noirs déchiquetés, les branches écroulées, le givre s’était répandu, habillant les décombre de poudre de diamant où le soleil posait des flaques de lumière.
L’aurore perçait les nuages blafards, frangeait d’or la campagne froide, faisait flamboyer la poussière de nacre posée dans l’herbe par la nuit. Quelques rayons de soleil caressaient les étoiles de givres posées sur le tapis des feuilles mortes. Des milliers de flammèches de couleurs s’élevaient des milliers de cristaux scintillant, des arcs-en-ciel tremblaient dans la rosée de glace accrochée aux brindilles noircies par le froid avant de tomber en glissant vers le sol, emportant dans leur chute des irisations solaires infinies. Dans cette aube de lumière, l’oiseau revint, seul, posé sur une branche noire, et lança au matin son beau chant aigu, ses mélodieuses trilles vives et claires, fragments de joie perdus dans la brise. Il défiait le gel, chantant au soleil le chant du jour. Les fleurs du ciel s’étaient ouvertes à la caresse du vent, étirant des rubans d’azurs contres la blancheur des nuages. Le soleil éclatait dans toute sa puissance.
Ben se leva, encore tremblant. Autour de lui la forêt n’était plus qu’une ruine sombre et désolée, illuminée de givre et d’or. Il leva les yeux et vit le ciel renaissant dont les couleurs changeantes éveillaient l’azur. Il se fraya un chemin entre les troncs écroulé. Il frissonnait. Le vent faisait voler sa cape. Il fallait rentrer au temple. Luke l’attendrait. Il serait déçu, une fois de plus, déçu et inquiet. Il ne dirait rien. Il se tairait comme on se tait dans le silence de la nuit. Comme on se tait devant la défaite. Et lui, l’enfant prince, se soumettrait. Le cœur de Ben s’alourdissait d’une profonde détresse. La détresse d’un funambule accroché dans le vide, suspendu entre le gouffre et le ciel, incapable de tomber, incapable d’avancer, prisonnier. L’ombre avait fui, la lumière gagnait du terrain. Cette déchirure ouverte en lui, plus béante que la nuit des temps, ne se refermait pas.
Perdu dans ses pensées, les yeux rivés sur sol gelé, il marchait vers le temple, sans rien voir autour de lui, ni le ciel trop plein d’azur, ni la forêt en débâcle. Le chemin était long et la marche ne le réchauffait pas. Quand il fut sorti de la forêt, au pied la colline où le temple était construit, surplombant toute la vallée, il releva les yeux et la lumière baigna son front pâle. Il sut que Leia était au temple et qu’elle l’attendait. Il avança plus rapidement vers le sommet. Il était lumière, fils de la Lumière, Skywalker fils de Skywalker, son destin serait toujours dominé par la Lumière. Il ne pourrait pas céder à l’appel des ténèbres plantées en lui comme une écharde. Son cœur déchiré ne cèderait jamais. Cet appel vers l’obscurité qui avait accompagné sa naissance, cet appel qui le menait si souvent au plus sombre de son âme, au faîte de sa puissance serait toujours plus violent, plus pressant, insurmontable, mais ces derniers pas vers la nuit, il ne les franchirait jamais si Leia veillait sur son cœur.
"La Force est avec toi jeune Skywalker. Mais tu n'es pas encore un Jedi" Dark Vador - L'Empire contre-attaque