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Chapitre 3 : L'Arc de Cristal
 
Quand il pénétra dans la petite cuisine, la jeune femme avait le dos tourné, en train de surveiller ses plats.
– Ma chérie, je te présente Kano, clama son père. Un gentil garçon qui va passer la soirée chez nous !
Elle se retourna en souriant.
– Kano, je vous présente ma fille Alera. La divine présence de cette maison !
Kano n'eut pas de mal à reconnaître que l'adjectif était approprié. Quand elle lui sourit, il eut envie de se cacher. Elle était particulièrement belle. Un peu plus petite que lui, probablement à peu près du même âge, elle était chaleureuse et sympathique. Il lui serra délicatement la main, fine avec une peau douce. Kano eut honte de sa condition : il était sale, mal vêtu et pas rasé. Il faisait peine à voir.
Tout l'inverse de cette merveilleuse créature. Sa peau mate s'accordait avec ses cheveux noirs, qui descendaient dans un désordre organisé jusqu'à son cou. Ses traits fins mettaient en valeur ses yeux marron clair, qui traduisaient son intelligence. Enfin, l'ensemble de son corps, ses douces formes, dissimulées par son tablier, finirent de faire fondre le malheureux jeune homme.
Il était tellement sous le charme qu'il ne parvint pas à articuler un mot. Il finit par se rendre compte qu'il tenait, voire qu'il caressait toujours sa main. Marvic observait la scène, souriant jusqu'aux oreilles.
Quant à Alera, elle souriait gentiment, en fixant Kano dans les yeux. Puis elle se décida à parler, de sa voix claire et douce.
– Kano, j'espère que vous aimez les ysaras farcis. Mon père en raffole.
Kano ignorait parfaitement ce que c'était, mais il hocha la tête comme un enfant. Marvic reprit la parole. Il proposa à Kano de prendre une douche et de se changer avant le repas. Il accepta. Apparemment, il ne devait pas sentir la rose, et ses hôtes s'en rendaient compte.
Marvic le guida jusqu'à l'étage, fouilla dans un placard, et trouva quelques vêtements qu'il espérait à la taille du jeune homme, et qu'il avait certainement arrêté de porter depuis un bon bout de temps. Puis il indiqua la salle d’eau.

Quand Kano redescendit, il se sentait un homme nouveau. Ses cheveux courts étaient enfin propres, il était rasé et habillé convenablement. Un pantalon en tissu synthétique vert très confortable accompagnait un haut orange moulant (un peut trop à son goût), mais il se sentait à l'aise dans des vêtements qui le mettaient en valeur. Son bonheur fut complet quand il passa à table. Alera servit un plat immense, où une viande inconnue baignait dans une sauce alléchante. Il avala des quantités de nourriture dignes d'un Hutt, sous les yeux éberlués de ses hôtes. Marvic n'avait pas menti sur les qualités de cuisinière de sa fille, et Kano fit honneur à ce festin divin (décidément, cet adjectif revenait souvent à l'évocation d'Alera…).
Mais de toute évidence, ils avaient compris que quelque chose ne tournait pas rond, que leur invité d'honneur était un peu perdu, qu'il était sale et qu'il mangeait comme si sa vie en dépendait. La gêne était palpable à table, et Kano comprenait que le couple se posait certaines questions. Et pourtant, ils l'avaient accueilli à bras ouverts.
– Alors Kano, qu'est-ce qui vous amène sur Tabal ? demanda Alera d'un ton léger mais où perçait la curiosité.
– Eh bien, commença Kano, il se trouve que …
– Vous n'êtes pas d'ici ? l'interrompit Marvic. N'est-ce pas ?
– Comment le savez-vous ?
– Kano, dit Marvic en le fixant, il n'y a pas d'étrangers sur Tabal.
– La planète subit un blocus depuis des années, enchaîna sa fille. Tabal a toujours été une planète impériale et marchande. Mais après la mort de l'Empereur, les habitants ont commencé à refuser l'autorité impériale et certains voulurent fuir la planète. Alors le Moff du système a ordonné un blocus de Tabal. Depuis 17 ans, aucun vaisseau civil ne peut arriver ou quitter la planète sans autorisation. Les teebooz vivent en autarcie, et les quelques étrangers, comme nous, qui étaient là à l'époque n'ont jamais pu repartir. Le Traité de Paix a été ignoré sur Tabal, et le Moff ne veut pas nous laisser partir. Un jour ou l’autre, l’Amiral Pellaeon entendra parler de cette planète, et le Moff risque d’avoir de ses nouvelles.
– Je vois, acquiesça Kano. C'est pourquoi vous ne comprenez pas comment j'ai pu arriver en un seul morceau. J'ai dû avoir un accident, c'est la seule explication.
– Exactement, reprit Marvic. Vous êtes là pour nous aider ? C'est la Nouvelle République qui vous envoie? Le Nouvel Empire, peut-être ? Vous êtes un espion chargé de démasquer cet imposteur de Moff Danika ?
– A vrai dire, je n'en sais absolument rien, avoua Kano.

Kano prit soudainement la résolution de se confier et de mettre son destin entre les mains de ces gens. Il leur raconta tout. Du moins, le peu qu'il savait lui-même. Il narra son réveil, l'attaque, la nuit dans la jungle, et pour finir son arrivée en ville. Enfin, il révéla son amnésie.
Le père écoutait attentivement, tout comme la fille, qui paraissait captivée et impressionnée. Quand Kano eut fini, Marvic fit le bilan.
– J'imagine que votre vaisseau a été abattu en arrivant sur la planète, et que c'est pour cela que les impériaux vous pourchassent. Je suis persuadé que vous n'êtes pas d'ici. Ce qui me surprend, c'est qu'ils aient laissé des chasseurs de primes venir pour vous éliminer. En tout cas, vous pouvez compter sur notre soutien. Mais je doute que vous puissiez quitter la planète. En attendant, restez ici le temps qu'il faudra pour mettre tout cela au clair. Vous êtes le bienvenu.
Les yeux d'Alera s'illuminèrentà ces mots. Kano remercia brièvement l'homme, quand Alera reprit soudainement la parole.
– Si j'ai bien compris, vous ignorez jusqu'à votre vrai nom. Et vous ignorez aussi si ce sabre vous appartient, dit-elle en désignant l'arme.
– Oui, répondit simplement Kano.
– Nous nous en tiendrons donc à Kano pour l'instant, cela vous va très bien, déclara la jeune femme. Comptez sur mon soutien, Kano. Je tiens vraiment à vous aider. Et puis il n'est pas impossible que vous soyez ici en mission pour nous aider.
Kano ne dit rien, mais il doutait de la véracité de cette hypothèse. Il savait par ailleurs que la Nouvelle République n'avait juridiquement pas le droit d'intervenir sur Tabal, qui n'était pas un de ses membres. Ce qui n’était pas le cas des officiels impériaux. Mais si Pellaeon avait voulu stopper Danika, il aurauit déjà envoyé ses troupes. Il devait tout simplement ignorer l'existence de Tabal.

Marvic enchaîna sur d'autres sujets de conversations pour tenter de raviver les souvenirs de l'amnésique. Ils parlèrent politique, sport, et Kano fut soulagé de voir que tout ce qui ne le concernait pas directement n'avait pas été oublié. Son amnésie était étrangement ciblée. Une fois le dessert terminé, Marvic demanda :
– Vous vous intéressez aux vaisseaux jeune homme ?
– J'en ai aucune idée, répondit sincèrement Kano.
–Venez donc. J'ai quelque chose à vous montrer.
Alera se mit à sourire. Les deux hommes se levèrent et se dirigèrent vers le hangar adjacent à la maison, tandis qu'Alera débarrassait la table et s'interrogeait sur le mystérieux Kano. Soudain, Kano revint et s'approcha d'elle. Elle ne l'entendit pas revenir et sursauta au son de sa voix.
– Merci pour ce délicieux repas, mademoiselle Sanaka. J'apprécie beaucoup votre aide. Vraiment.
Alera parvint à reprendre ses esprits et fit un pas vers Kano, décochant un sourire à faire rougir un toydarien.
– Je vous en prie Kano. Et appelez-moi Alera. S'il vous plaît.
Kano sourit à son tour et la regarda droit dans les yeux, parfaitement conscient de l'effet que cela leur ferait à tous les deux.
– Bien sûr… Alera. Merci.
Il repartit alors pour rattraper Marvic, laissant Alera avec ses réflexions.
Elle n'avait jamais eu l'occasion de rencontrer un humain de son âge, tous ses amis étaient des teebooz, dont elle parlait la langue. Elle s'était finalement toujours sentie très seule, et sa jeunesse avait été bercée de rêves où elle découvrait la galaxie. Tabal était une planète perdue de la Bordure Extérieure, et son seul désir était de connaître autre chose qu'une jungle humide et une ville isolée. Elle avait entendu parler des merveilles de certains systèmes, comme la planète Coruscant, Mon Calamari, et d'autres.
Elle était née sur Tabal et sa mère était morte peu après lors des révoltes qui avaient suivi la mort de l'Empereur. Elle ne s'en souvenait pas. Marvic était en voyage d'affaires sur Tabal, et s'était retrouvé coincé par le blocus. Il avait élevé sa fille seul, et on sentait qu'il souffrait qu'elle passe sa vie seule sur cette planète. Mais depuis l'arrivée de ce Kano, elle sentait l'espoir renaître. Kano pourrait lui faire découvrir autre chose. S'il devait quitter la planète, elle lui demanderait de l'emmener. Il avait l'air d'être quelqu'un de bien, et son père l'avait déjà accepté. Elle finit de ranger la table en continuant à rêver. Kano ne l'intéressait pas seulement parce qu'elle ne connaissait personne ou voulait partir : il y avait un petit quelque chose en lui qui ne la laissait pas indifférente.

La maison des Sanaka était plutôt grande. Mais leur hangar personnel était au moins aussi grand. Marvic Sanaka avait en fait racheté la maison du voisin décédé, et l'avait réaménagée en hangar personnel. Ce qui attira surtout l'attention de Kano, ce fut l'engin qui trônait au milieu de la pièce. Il n'avait pas beaucoup de connaissances en vaisseaux spatiaux. Mais il resta tout de même en admiration devant le cargo léger qui se trouvait devant lui. La carlingue de couleur bleu foncé brillait sous la lumière tamisée du hangar. La forme de l'engin était particulière, et Kano fut sûr de n'avoir jamais rien vu de pareil. Le cockpit, à la proue du vaisseau, avait une forme triangulaire. Derrière lui, une longue pièce constituait l'habitacle majeur, avec les propulseurs principaux à l'arrière. Sur les côtés, les larges ailes courbées donnaient au vaisseau une forme d'arc. Kano l'étudia de plus près. Deux canons lasers se trouvaient en dessous du cockpit, alors que deux batteries de lasers semi-automatiques semblaient manœuvrables par des canonniers depuis les ailes. Au bout de ces dernières étaient positionnés les moteurs auxiliaires. On voyait vite que la fonction originelle de cargo avait été oubliée, et l'engin disposait d'un armement digne d'un chasseur.
Le nom que lui avait donné Marvic était significatif.
– Kano, j'ai l'honneur de vous présenter l'Arc de Cristal. En dehors d'Alera, ce coucou est toute ma vie. Je l'ai acheté il y a des décennies, et depuis je n'ai cessé de le chérir et de l'améliorer. Alors, il est pas beau ?
– Je dois bien avouer que … murmura Kano.
Une nouvelle fois, Edo apparut, sortant du vaisseau.
– Il me semble opportun de signaler que j'ai participé à la conception de mon collègue vaisseau, clama le droïd. Et je suis le copilote indispensable !
– C'est vrai, admit Marvic. Mais, mon cher Edo, devine qui t'a conçu toi ?
Le droïd ignora la question, et retourna effectuer des réglages dans le vaisseau.
– Ca vous dirait de le visiter ? A part ma fille et Edo, vous seriez la première personne à en fouler le plancher.

Sans plus tarder, les deux hommes gravirent la rampe d'accès, avec l'excitation de deux gosses qui se montrent leurs jouets. A l'intérieur, Kano fut encore plus enthousiaste. Le vaisseau était encore plus confortable que la maison elle-même. L’habitacle principal accueillait une chambre et une cambuse. Kano fut surpris de voir que des couloirs de chaque côté donnaient accès aux ailes, également habitables et dotées chacune d’une chambre et d’un poste d’artilleur pour manœuvrer les tourelles. Des petits hublots un peu partout offraient un bon point de vue en cours de vol. La rampe d'accès débouchait derrière le cockpit, et tout à l'arrière se trouvait le panneau de contrôle des appareils. Enfin, le cockpit était une merveille de technologie et de précision. Une vaste baie de transparacier offrait une bonne visibilité. Une seconde baie, au-dessus des têtes des pilotes, permettait de voir également vers le haut.
En bref, on pouvait très bien vivre à trois dans cet appareil, plus un droïd. Marvic montra le clou du spectacle : un tableau holo ornait le mur en face de la rampe d'accès. Le vieux sourit, pressa un bouton dissimulé dans le mur, et le tableau pivota sur lui-même, révélant un arsenal terrifiant d'armes prêtes à l'emploi.
– N'en parlez pas à ma fille, souffla Marvic. Elle me referait une de ses crises …

Sanaka entreprit une visite guidée, secondé par l'inévitable Edo.
– Ce cargo n'avait rien à voir avec ça quand je l'ai acheté. J'ai commencé par le repeindre. Les ailes étaient des containers à marchandises, je les ai aménagées en chambres. Il n'y avait qu'un seul canon laser standard, c'est moi qui ai rajouté le second, les deux tourelles ainsi que les lance-missiles à protons. J'ai aussi installé un radar acheté au marché noir, un hyperpropulseur dernier cri …
– Un accélérateur de générateur de champ de protection, un nouveau système d'acquisition de cibles, un rayon tracteur,... poursuivait Edo.
Kano n'écoutait plus. Le vieil homme et le droïd citaient les marques du matériel qu'ils avaient ajouté sans relâche pendant des dizaines d'années. Tout laissait à penser qu'il n'y avait que le meilleur. Les boucliers déflecteurs par exemple étaient de pointe. Le vaisseau ne devait pas servir souvent, mais il était remarquablement entretenu. Kano n'en parla pas : il savait qu'Edo viendrait se vanter de ses capacités d'entretien.
– Et vous savez, ce n'est pas évident de se fournir, continuait Sanaka, avec ces foutus impériaux et leur blocus.
– Ouais, mais nous on a nos tuyaux ! confia Edo. Les impériaux sont tous plus stupides les uns que les autres, ce qui n'est pas rare chez les humains …
Puis soudain ils s'arrêtèrent tous les deux. Marvic fixa Kano, qui inspectait minutieusement le navire.
– Et si on allait faire un tour ?
Kano fut surpris et dévisagea le vieil homme.
– Avec le blocus ? objecta Kano. On va se faire descendre …
– Ne vous inquiétez pas. Les Imps me connaissent. J'ai une autorisation spéciale pour survoler le territoire.

Les arbres de la jungle filaient à toute allure en dessous de l'Arc de Cristal. Kano ne se serait jamais douté qu'un vaisseau de cette taille puisse atteindre une telle vitesse.
– J'ai le droit de voler jusqu'à un kilomètre de hauteur, au-delà les Imps ouvriraient le feu. Mais je doute qu'ils arrivent de toute façon à m'atteindre … Vous savez que l'Empire ne tolère pas les non-humains. C'est pourquoi ici, ils apprécient de voir des humains, et j'ai réussi à obtenir une autorisation pour pouvoir tester les améliorations que j'apporte à mon vaisseau. Mais je ne peux dépasser un kilomètre de hauteur, ni tester mon armement. Pour assurer leur blocus, les Imps ont installé des batteries de turbolasers à longue portée un peu partout dans la jungle. Ils ont aussi quelques chasseurs en réserve. A mon avis, ce sont les turbolasers qui vous ont abattu quand vous vous êtes approché de la planète.
Kano resta perplexe.
– Marvic …
– Oui gamin ?
– Avec un engin pareil … Vous n'avez jamais songé à quitter cette triste planète? Vous pourriez semer les Imps sans problème… Les turbolasers seraient trop lents pour votre appareil, et vous pourriez mater les chasseurs sans problèmes… Et puis vous iriez prévenir Pellaeon, qui accourrait pour récupérer la planète, libérant les habitants… Et puis vous pourriez offrir à votre fille la vie dont elle rêve.
– Mouais, répondit Marvic, songeur. Mais vous savez, je suis un vieillard, j'ai passé l'âge de faire des cabrioles. Et puis, je ne sais ce que l'Empire a comme défenses au-dessus de la planète. Je tiens trop à ma fille pour risquer sa vie inutilement. Enfin, ce vaisseau m'est trop précieux pour que je le voie encaisser les tirs des turbolasers. Non, je préfère supporter la vie ici. Même si ce doit être encore plus pénible pour Alera. A propos, ajouta-t-il avec un regard amusé, depuis quand vous souciez vous du sort de ma fille ?
– Depuis qu'elle se soucie du mien, répondait Kano, songeur.

Le coup de botte dans le ventre fit rouler le teebooz à terre. L’extraterrestre brailla dans sa langue, alors que l’officier impérial faisait signe à ses hommes de se déployer.
– Tu es sûr que tu ne caches pas d’étranger ? Réponds, saleté de non-humain !
Le teebooz agita la tête pour exprimer qu’il ne savait rien. Le sergent Tiliar le fixa avec mépris. L’Empire avait toujours fait preuve de racisme envers les races non-humaines, et Tiliar était l’exemple type d’officier qui les considérait comme des moins que rien. Ses hommes fouillèrent la maison, mais ne trouvèrent aucune trace de Kano. Le teebooz gisait toujours à terre, crachant du sang sous le regard effrayé de sa famille.
Les impériaux étaient bredouilles. Ils avaient déjà visité toutes les demeures de teebooz du quartier, sans rien trouver. Fou de rage, Tiliar frappa à nouveau l’infortuné père de famille, qui hurla. Puis les soldats quittèrent la maison.
Tiliar n’avait plus qu’une maison à fouiller, mais il répugnait à le faire. En effet, il s’agissait d’une des rares demeures d’humains sur Tabal, et il doutait qu’un humain puisse cacher le fugitif. Les Sanaka étaient tout ce qu’il y avait de plus respectable. Mais il se résigna, et ordonna à un de ses soldats de frapper à la porte.
– Tiens, se dit Tiliar, Sanaka a une porte toute neuve. C’est curieux.
La porte s’ouvrit lentement, et un droïd de ménage apparut sur le seuil.
– Sergent Tiliar, que puis-je faire pour vous ? Mon maître est absent.
– Alors je désire voir mademoiselle Alera immédiatement.
– Bien sûr.
– Non attendez !
Tiliar réfléchit. Si les Sanaka avaient quelque chose à cacher, Alera lui mentirait. Mais les droïds ne savaient pas mentir.
– Droïd, tu pourras certainement me renseigner. Avez-vous eu des visiteurs récemment ?
– Ho ne m’en parlez pas ! geignit le droïd.
– Quelqu’un s’est introduit chez vous ? demanda Tiliar, palpitant.
– Par le Grand Créateur, oui ! Un vrai cauchemar !
– Voulez-vous que je l’en chasse ?
– Ah mon bon sergent, déclara Edo, je doute que vous puissiez faire quoi que ce soit !
– Explique-toi, droïd ! s’énerva le sergent.
– Ces dikiz sont une vraie plaie ! Ces espèces de mites s’attaquent aux composants électroniques, une horreur pour mes délicats circuits !
Fou de déception, Tiliar faillit dégainer son blaster pour occire le droïd. Mais il se calma.
– Rien d’autre à signaler ? maugréa-t-il. Qu’est-il arrivé à votre porte ?
– Oh, mon maître a eu un petit accident avec son speeder. Disons qu’il ne supporte pas aussi bien l’alcool que ses copains teebooz. Ah ces humains !
Exaspéré, Tiliar fit demi-tour pour aller inspecter un autre quartier, sans même visiter la maison des Sanaka. A cet instant, l’Arc de Cristal survolait la maison, avec Kano à son bord.
– Crétins d’humains, marmonna Edo en refermant la porte. On leur fait vraiment gober n’importe quoi…

Kano resta un moment à penser. Quel dommage… Qu'un aussi beau vaisseau et une aussi jolie fille restent coincés dans cette jungle loin de tout…
– En fait, reprit Marvic, vous risquez aussi de rester bloqué ici. C'est pourquoi ça me ferait plaisir que vous restiez chez moi. Au moins le temps de régler vos problèmes. Et puis les autres hommes sont tellement inintéressants pour ma pauvre fille. Allez, si vous restez, je vous apprends à piloter mon bijou. Marché conclu ?
Le jeune homme ne put refuser. En quelques heures, il s'était déjà attaché à Marvic, à son vaisseau, à son droïd… et à Alera. L'Arc de Cristal fit demi-tour, et regagna le hangar de Marvic.

La nuit que passa Kano chez les Sanaka fut un véritable bonheur. La chambre d'amis se trouvait à l'étage, près de celle d'Alera. Quant à Marvic, il dormait… dans son vaisseau ! Edo, lui, se prélassait dans un bain d'huile.
Par prudence, Kano resta quelques jours dans la maison, sans jamais sortir en ville. Il avait trouvé en Marvic, en son droïd et en sa fille des alliés et des amis fidèles, qui l'acceptèrent vite comme l'un des leurs. La vie dans cette famille était agréable, même s'il commençait à s'ennuyer, à ne jamais sortir. Et à ne pas parvenir à éclairer sa propre vie.

Les jours passaient calmement, et Kano prenait de plus en plus de plaisir à piloter l'Arc de Cristal. Son instructeur, Marvic, affirmait que le jeune homme avait déjà piloté dans le passé. A plusieurs reprises, Kano fut tenté, en plein vol, de tirer sur le manche et de filer vers les étoiles. Mais il se souvenait des réticences de Marvic, et l'idée d'abandonner Alera sur cette planète lui était insupportable. Alors il prenait son mal en patience.
Par ailleurs, Kano continuait à s'interroger sur ses capacités à maîtriser la Force. Encore une fois, Marvic soutenait que son invité était un Jedi, et que le fameux sabre laser était le sien. Il prétendait que c'était indéniable lorsqu'on le voyait la façon dont il le maniait au combat. Marvic essayait de le convaincre de le laisser l'entraîner. Il prétendait connaître les méthodes Jedi, pour en avoir fréquenté un. Mais Kano préférait s'abstenir : il savait qu’un Jedi se reposait avant tout sur sa compréhension de la Force, pas sur son aptitude au combat. Se précipiter avec son sabre laser était une mauvaise idée.

Plus le temps passait, plus Alera et Kano devenaient proches pour le plus grand bonheur de Marvic. Ensemble, les deux jeunes gens évoquaient souvent les possibilités de fuite de l'Arc de Cristal. Il n'était pas difficile de voir qu'Alera mourait d'envie de partir de ce qu'elle appelait "le point le plus éloigné du centre de l'univers". La haine qu'elle vouait à l'Empire était encore plus farouche que celle de son père. La jeune femme travaillait dans une pépinière de fruits, mais son salaire ne faisait que compléter la somme rondelette que Marvic avait amassée de façon inconnue au cours de sa vie.

Alera avait parlé de la ville à Kano, et pas vraiment en bien. Elle paraissait s'y ennuyer au plus haut point. D'après elle, la seule animation de la ville était l'exécution hebdomadaire des opposants à l'Empire. Elle était atterrée qu'un Empire qui avait tant perdu ces vingt dernières années puisse continuer à dicter sa loi de la sorte. Elle restait persuadée que la Nouvelle République finirait par intervenir, mais Kano restait plus sceptique. Il savait que la Nouvelle République ne cessait d'essayer de démêler ses conflits intérieurs ; le cas de la planète Tabal devait être le cadet de ses soucis.
– Vous savez, disait Alera, vous avez de la chance d'avoir vécu ailleurs. Vous ne voulez pas me raconter ?
– Je crains de ne pas en être capable. Je ne me souviens de rien, même pas de là où je suis né. Mais faites-moi confiance, Alera, un jour vous partirez avec moi loin d'ici. Je vous le promets. Une fille comme vous est promise à un bel avenir. Il nous faut convaincre votre père de profiter des capacités de l'Arc de Cristal. Il ne l'a quand même pas bichonné vingt ans pour rien !

Les impériaux avaient certes recherché Kano un temps. Au cours de leurs fouilles méthodiques, ils avaient bien failli visiter la maison des Sanaka, mais Edo les avait embobinés avec brio. Les dégâts n'étaient plus visibles dans le hall, et ils avaient continué leurs fouilles dans le quartier. Ils soupçonnaient plus facilement les teebooz. A présent, il semblait qu'ils se soient calmés. Un bruit courait en ville qu'un Chevalier Jedi était arrivé pour sauver le peuple et cela mettait Kano mal à l'aise, d’autant plus qu’il se sentait responsable des persécutions à l’encontre des teebooz. Cela faisait mal au cœur du jeune homme, qui savait qu'il ne leur serait d'aucun secours. Cependant, il était maintenant décidé à faire un petit tour en ville pour se faire sa propre idée de la situation.

Finalement, il avait commencé à essayer de maîtriser la Force et le sabre laser. Edo s'était porté volontaire pour tirer des lasers à charge minimale sur Kano, et il devait les parer avec son sabre s'il ne voulait pas recevoir une bonne décharge. De plus, il fut forcé de reconnaître que le droïd visait plutôt bien.
– Monsieur Kano, je vous ai déjà parlé de ma programmation multifonctions, qui inclut un module de défense, entre autres. Je suis ravi de pouvoir vous aider. En garde, Jedi, je continue l'exercice.
Marvic était le premier à se réjouir des progrès de son jeune protégé. Alera était plus discrète, mais Kano percevait ses pensées : elle espérait avoir un Chevalier Jedi à ses côtés pour pouvoir fuir un jour… Et les heures qu'elles passaient à le regarder s'entraîner l'embarrassait, mais il se sentait flatté par son attention et ses encouragements.
Mais Kano restait inquiet. En effet, il était très probable qu’il ait un jour reçu une formation de Chevalier Jedi, plus ou moins complète. Même s’il sentait qu’il n’avait pas perdu ses pouvoirs en même temps que sa mémoire, sa connaissance elle s’était totalement évaporée. Il pouvait se servir de la Force, mais sans la comprendre. Or il n’ignorait pas le danger que cela pourrait représenter. Il risquait de prendre l’habitude d’utiliser la Force à ses fins personnelles, ce qui le mènerait irrémédiablement et inconsciemment vers le Côté Obscur. Avant toute chose, il devait se souvenir de ses enseignements et comprendre la Force, pour entrer en harmonie avec elle, pas seulement dans son corps mais aussi dans son esprit. Un Jedi ne recherchait pas la gloire, mais la connaissance et la sagesse. Ce à quoi il n’arriverait pas en s’entraînant seulement avec son sabre.
Le sabre laser n’était pas seulement une arme, il était le symbole des Jedi, une extension de leur corps qui leur servait à se défendre et à faire la justice quand ils estimaient cela nécessaire. Kano devait être prudent ; les Jedi n’étaient pas la police galactique, et leurs décisions pouvaient être contestées. Il devait faire attention au moindre de ses gestes, et ne pas utiliser ses pouvoirs pour s’élever au-dessus des autres. Uniquement pour servir la justice.
Finalement, il décida que ce n’était pas à lui de décider s’il devait ou non faire quelque chose pour Tabal. Il quitterait la planète, aviserait les autorités républicaines ou impériales du problème, et les laisserait agir. En outre, il décida de contacter au plus vite un Maître Jedi confirmé, pour que celui-ci l’aide à ne pas faire de faux pas dans son usage de la Force.