Un petit groupe de personnes attendait les deux Jedi à la sortie de l’Arc de Cristal. Kano fut légèrement déçu de ne pas y voir Alera, mais il patientait. Il discerna quelques soldats républicains, plusieurs non-humains et un petit droïd abîmé. Il s’avança, Teydo à ses côtés. Un ithorien s’adressa à eux.
– Bienvenue messieurs. Nous sommes chargés de vous escorter jusqu’à mademoiselle Sanaka.
C’est ça, songea Kano. Tu es là pour nous surveiller.
Il allait les suivre, et ce fut à ce moment qu’il remarqua le droïd qui roulait à ses côtés. Il était salement amoché, tout cabossé, avec des pièces rafistolées à la va-vite. Il le regarda de plus près, et ouvrit de gros yeux ronds.
– Edo ! Ca alors !
Il voulut prendre le droïd dans ses bras, et réalisa le ridicule qu’aurait la scène. Il se contenta de prendre la tête du robot entre ses mains et de lui sourire. La joie qu’il ressentit en retrouvant le droïd presque en état était telle qu’il en oublia les personnes autour de lui.
– Qu’est-ce que tu deviens, tas de boulons ? Je suis ravi de te voir, je dois l’avouer !
Il fronça les sourcils quand son vieux compagnon lui répondit.
– Bidibip tzeeet pouet !
– Pardon ?
Edo 27 émit encore quelques sons électroniques, avant de secouer sa tête dans un geste désolé. Intrigué, Kano se tourna vers le lieutenant ithorien.
– Kyp Durron l’a récupéré, et a essayé de le réparer. Malheureusement, les dégâts étaient immenses, certaines pièces manquaient et certains systèmes n’ont pas pu être remis en état. En effet, certains composants de ce droïd datent de l'ascension au pouvoir de Palpatine… Je suis désolé.
Edo bipa encore en posant un bras mécanique sur l’épaule de Kano, accroupi et secouant la tête. Teydo essaye de détendre l’atmosphère.
– C’est toi le fameux Edo ? Laisse moi te dire que ton copain vaisseau est une véritable merveille !
Edo siffla de ravissement, et Kano rit en pensant qu’il valait peut-être mieux qu’il ne comprenne pas ce que le droïd disait. Il n’aurait pas à supporter sa fierté débordante et ses sarcasmes de machine. Edo lança une trille en désignant l’Arc de Cristal, et Teydo parut comprendre où il voulait en venir. Il suivit le droïd qui gravissait la rampe avec un sifflement de triomphe. Apparemment, Teydo n’avait pas encore tout découvert et Edo allait lui expliquer encore quelques petites choses bien pratiques.
Kano sourit en voyant partir ses deux amis. Il sentait l’espoir revenir. Il avait retrouvé ses deux compagnons, et verrait enfin Alera dans quelques instants. Il apprécia que Teydo ait la finesse de le laisser seul pour ses retrouvailles avec Alera. Il suivit l’escorte qui se mettait en marche en direction des bâtiments un peu plus loin.

Il arriva, enfin seul, devant la porte où était censée se trouver la jeune femme. Il sonna, et se prépara. La porte s’ouvrit enfin, et il vit Alera, vêtue d’une combinaison légère moulante. Elle le regarda en souriant.
– Alors c’est bien toi.
– C’est moi. Comment vas-tu ?
– Maintenant que tu es là, ça va.
Elle se laissa brusquement aller dans les bras du jeune Jedi, laissant des larmes s’échapper de ses paupières.
– Tu m’as manqué, mon beau…
– Toi aussi.
Ils firent ce qu’il attendaient depuis leur rencontre. Leurs lèvres se retrouvèrent, et ils échangèrent un long baiser, à la fois doux et passionné. Alera serra son Jedi encore plus fort dans ses bras, avant de le faire enfin rentrer.
– Kano, qu’est-ce qui s’est passé ?
– C’est une longue histoire. Je te raconterai une autre fois.
Ils s’assirent sur le grand sofa, et elle le regarda en souriant.
– Tu as appris du nouveau sur ton passé ?
– Un peu, oui. J’ai surtout découvert une nouvelle vie. De nouveaux plaisirs.
Elle ne saisit pas ce qu’il entendait par là. Elle se laissa à nouveau aller dans ses bras musclés, et l’embrassa avidement, heureuse qu’il se laisse enfin aller à ses sentiments, et qu’aucun soldat ou chasseur de primes ne les perturbe.
Elle le regarda droit dans les yeux, ses yeux bruns rencontrant ses yeux verts. Elle murmura :
– Kano… Je t’aime.
– Je n’en ai absolument rien à faire.

Teydo Pa’aja racontait à un Edo 27 captivé les exploits effectués sur Aztilar avec l’Arc de Cristal. Le droïd se tourna vers l’ordinateur de bord, et lui fit mille compliments en langage binaire. Flatté, l’ordinateur répondit par quelques bips timides, avant que Teydo n’enchaîne avec le message que l’Arc avait laissé volontairement aux impériaux avant de les asphyxier. Edo, tout excité, ne tenait pas en place.
Des bandes adhésives maintenaient en place certaines pièces du droïd, donnant l’impression qu’Edo était blessé. L’attaque de Kyp Durron avait été désastreuse, et les mécaniciens de la Nouvelle République qui y avaient jeté un œil n’avaient pas dû juger utile de s’occuper correctement d’un robot civil. Ils l’avaient rafistolé en vitesse, sans grand soin. Ces dégâts lui avaient coûté son synthétiseur vocal, la moitié de la puissance de ses répulseurs, son système de visée, et tant d’autres fonctions qui faisaient sa fierté. Edo devait beaucoup en souffrir, si du moins il le pouvait.

– Quoi ? fit Alera en s’écartant.
– J’ai dit que je n’en avais rien à faire. Ca te pose un problème ?
Elle se leva d’un bond, réalisant que le jeune homme n’avait pas l’air de plaisanter. Puis elle vit cette lueur bizarre dans son regard. Quelque chose qu’elle n’avait jamais vu, qui ne ressemblait pas à Kano.
– Tu…
Elle ne vit pas le sabre laser qui se mit en marche, et qui en un éclair s’enfonçait dans son sein droit. Elle poussa un hurlement de douleur, alors qu’un filet de sang s’échappait de sa poitrine. Elle s’effondra sur le sofa en gémissant, alors que le jeune homme la regardait en souriant, tout en rangeant son sabre laser.
Alera le regarda une dernière fois, incrédule, alors qu’un garde forshul, alerté par le cri, surgissait et constatait les dégâts. Il ressortit en vitesse pour aller chercher des renforts. Le tueur en profita pour s’éclipser par la porte de derrière.

Les gardes l’avaient enfin laissé seul, et Kano approchait des appartements d’Alera. Il vit un soldat qui en sortait en courant. Inquiet, il se précipita à l’intérieur, et poussa un cri d'effroi en découvrant la situation.
– Alera !
La jeune femme gisait, ensanglantée, sur un petit sofa. Il la rejoignit en deux enjambées, et appela la Force pour apaiser sa douleur. Elle respirait encore, et l’arrivée de Kano lui fit ouvrir les yeux. Elle le regarda, surprise, luttant pour rester consciente.
– Non, ma belle… S’il te plaît, reste avec moi ! Qui t’a fait ça ?
Alera gémit, tandis que Kano plaçait sa paume pour compresser sa blessure et empêcher le sang de sortir. Elle tendit sa main pleine de sang pour lui toucher la joue, et elle croisa son regard désespéré. Et cette fois elle reconnut Kano, le jeune amnésique séduisant qui l’avait sorti de Tabal. Elle essaya de sourire.
– Je t’aime… parvint-elle à articuler, sachant que cette fois il l’écouterait.
Paniqué, Kano avait le visage maculé du sang d’Alera et de ses propres larmes. Il serra la jeune femme dans ses bras, comme il l’avait tant souhaité. Puis elle sombra.

Teydo entendit les cris. Il sortit du vaisseau, alors qu’Edo s’assurait de son bon entretien. Un soldat arriva, appelant du secours. Les gardes se précipitèrent vers les appartements d’Alera. Teydo, grâce à la Force, les dépassa et se dirigea vers les bâtiments.

La porte de derrière donnait sur la réception du centre. Kahn entra brusquement, et découvrit le gand en train de trier des papiers. En voyant arriver Kahn aussi brusquement, il gronda.
– Qu’est-ce qui se passe ici ? Vous ne pouvez pas frapper comme tout le monde.
– A vos ordres… murmura le Jedi Noir.
D’une simple pression de la Force, il fit voler le gand dans la pièce, et le non-humain retomba lourdement sur son bureau, avant de glisser sur le sol. Kahn fit alors léviter le meuble à deux mètres au-dessus du sol, et le laissa retomber sur le gand, qui hurla avant de succomber sous la charge.
Curieux, d’autres personnes surgirent. En voyant son patron dans cet état, un nikto courut pour l’aider. Kahn appela à nouveau la Force, et l’extraterrestre vola vers le mur, avant de s’y écraser dans un craquement d’os sinistre.
Les autres réagirent, et ceux qui en avaient dégainèrent leurs blasters. D’un seul geste, Kahn fit voler les armes à l’autre bout de la pièce. Il utilisa ses pouvoirs pour étrangler un humain à distance, puis fit jaillir la lame noire de son sabre laser. Un wookie, sûr de sa force, se jeta sur lui pour lui arracher les bras, mais le géant poilu fut tranché en deux par la lame ardente et bourdonnante.
Un bond le mena au milieu de ses adversaires. Il agita souplement son sabre, et les membres du personnel du centre furent taillés en pièces en un clin d’œil, avec une violence et une efficacité terrorisantes.
Cependant, même s’il s’amusait, il devait accomplir ce pour quoi il était venu. Il massacra encore quelques innocents sans défenses, mais prit bien soin d’épargner le bith qui regardait la scène, terrorisé. Puis il sortit et rejoignit sa navette.

Teydo entra le premier dans le petit salon, et trouva Kano, tenant sa bien-aimée ensanglantée dans ses bras.
– Kano… Qu’est-ce qui s’est passé ?
– Je n’y suis pour rien Teydo ! Je te le jure !
Teydo le croyait, mais le garde qui avait fui revint avec les renforts et désigna Kano.
– C’est lui ! C’est l’assassin ! Arrêtez-le !
Il s’emparèrent de leurs armes, alors que Kano regardait toujours le corps d’Alera. Il ferma les yeux quand les soldats ouvrirent le feu, mais ne fut pas touché. Teydo s’était interposé entre lui et les républicains, sabre laser doré au poing, et parait de son mieux les salves mortelles.
– Dégage Kano ! hurla-t-il en essayant de dominer la tourmente. Fous le camp !
Kano hésita, conscient que son ami serait accusé de complicité s’il prenait sa défense. Comme s’il comprenait le problème, Teydo parla à nouveau.
– Je sais que tu n’y es pour rien ! Pars, c’est le seul moyen de retrouver le coupable !
Les tirs devenaient trop intenses, et il peinait à tous les arrêter. Il bondit en arrière pour se retrouver près de Kano, et eut le temps de lui glisser quelques mots.
– C’est cette ordure qui m’a torturé et qui a tué Alera. Fais-lui payer. Maintenant va.

Sans plus attendre, Kano partit à son tour par la porte de derrière, où des gardes l’attendaient. Il les balaya avec la Force, les projetant à terre, et entra dans la réception, où il découvrit le carnage signé Kahn. Il serra les dents en pensant à l’ordure qui allait le faire accuser de ces crimes, comme il l’avait déjà fait auparavant. Il ressortit de l’autre côté, et vit alors la navette qui s’éloignait tranquillement. Il se mit à hurler, son visage couvert de larmes et de sang. Impuissant, il tomba à genoux en poussant un hurlement de rage et de douleur.
– Espèce de salaud ! Tu me le payeras, qui que tu sois ! Un jour ou l’autre…
Conscient qu’il ne pouvait plus l’arrêter, il se releva avec peine et courut jusqu’à l’Arc de Cristal, évitant les gardes que Teydo n’avait pu retenir, et s’engouffra dans le vaisseau. Edo était toujours en train de bidouiller un des systèmes, et Kano déboula en criant.
– Edo, décollage immédiat ! Et ne discute pas !
Le droïd voulut lui reprocher d’être toujours aussi pressé, mais il se rappela que son Maître n’y comprendrait rien. Il ne chercha pas à savoir où étaient Maîtresse Alera et Teydo Pa’aja, et se résigna à préparer le décollage.

Quelques minutes plus tard, l’Arc de Cristal quittait l’orbite de Dantooine et s’apprêtait à passer en hyperespace. Kano avait laissé les commandes à Edo, et se tenait la tête dans les mains, assis dans le siège de copilote.
Il avait tout perdu. Une nouvelle fois, il avait abandonné un ami. Les autorités, furieuses d’avoir laissé partir Kano, allait se rabattre sur Teydo, accusé de l’avoir laissé fuir.
Et Alera… Il ne réalisait pas encore l’horreur de la situation. Alors qu’il devait la retrouver, son amie était assassinée. En outre, il avait trahi le serment fait à Marvic Sanaka mourant : protéger sa fille de son mieux.
Il avait lamentablement échoué. A ses côtés, Edo était silencieux, mais ne tarderait pas à lui demander des explications. Depuis son amnésie, toute sa vie était un échec. Il perdait compagnon après compagnon.

Il se força à se dire que ce n’était pas lui le coupable. Il était prêt à parier que son frère Kahn était derrière tout ça, et il n’allait pas le laisser s’en tirer comme ça. Frère ou non, et quoi que dise le code Jedi, Kano voulait la peau de ce malade qui détruisait méticuleusement son existence.
Il était prêt pour une bataille fratricide sanglante. Kahn s’était encore attaqué à ses proches. D’abord Maran Cahru, puis indirectement Marvic Sanaka, maintenant Alera, et Teydo qui allait se retrouver en prison.
La guerre était déclarée.