Il était temps de réparer cette injustice, d'autant plus que j'avais déjà dans mes cartons une ébauche d'OS et une biographie assez complète.
En la relisant, justement, j'ai réalisé que ses aventures méritaient plus qu'une historiette de quatre pages. J'ai en projet deux, peut-être trois cours récits.
Voici la première partie du premier de ces OS.
Ah, un grand merci aux collègues rédacteurs du cadexqdeux et à leur personnage Bibine-Wan Kenobivre: mon weequay s'est largement inspiré de ce Jedi pochtron pour peaufiner ses dialogues.

47 après la bataille de Yavin
Soonjay était un grand sentimental : avant de la céder, il avait tenu à parcourir une dernière fois les corridors de sa Princesse.
- On en a fait des trucs, toi et moi, murmura-t-il en caressant une cloison fraîchement repeinte.
Pour les grandes flottes – Alliance, Empire ou même le Dominion Senex-Juvex -, les frégates Nebulon-B étaient obsolètes et ce, depuis très longtemps. Mais pour un pirate ou pour des insurgés pas trop fauchés, elle restait une aubaine. Le Weequay, qui venait d’étrenner au combat sa nouvelle frégate – l’Impératrice, qu’il surnommait Impy -, avait trouvé de nouveaux maîtres pour sa vieille compagne
À condition de camoufler quelques petits défauts avec de la pâte à reboucher et beaucoup de peinture ! Très utile, la peinture, surtout pour masquer les dernières traces permettant de remonter à l'ancien propriétaire, quand le Normandy arborait les couleurs de l'Amber Star!
À tous égards, l’Impératrice était supérieure à la Princesse : armement, senseurs, boucliers, vitesse...
Surtout la vitesse : les Nebulon-B, conçues pour l’escorte de cargos étaient lentes alors que l’Impératrice pouvait rivaliser avec un croiseur.
Mais tout de même, au moment de conclure, il avait eu comme un pincement au cœur.
- Tu verras ma princesse, ils prendront bien soin de toi ! Ce sont... Peuh, des idéalistes !
Mais parmi eux, des combattants, des officiers aguerris formés à la dure école de le guerre des Vongs, qui sauraient tirer le meilleur parti des « options » non prévues au catalogue du constructeur.
Oui, l’Impératrice était bien supérieure à sa vieille frégate. Mais elle lui avait été quasiment offerte, alors que pour la Princesse….
Alors qu’il cheminait vers le local 173-220, des souvenirs d’un lointain passé ressurgirent.
24 ap Yavin
La pièce sentait le renfermé, la nourriture avariée, l’alcool et le weequay mal lavé. La semi-obscurité camouflait pudiquement un désordre indescriptible d’où émergeaient çà et là quelques bouteilles vides. Le silence régnait, parfois entrecoupé de grognements indistincts et d’un sifflement irrégulier, provenant d’une alcôve tout au fond.
Près de l’entrée, l’intercom bourdonna, grésilla et se tut enfin : le propriétaire, ne recevant personne, l’avait saboté.
- Shuipala, marmonna la forme étendue.
Mais le visiteur insista, cognant sur la porte pourtant résistante
-ypeucogner, fit l’être tapi dans l’alcôve, c’blindé !
Justement, la porte était blindée et isolée ! En principe, on n’aurait rien dû entendre, mais l’information mit un certain temps à parcourir les neurones imbibés de la créature : seul un être doté d’une force colossale pouvait ainsi se faire entendre.
Les coups cessèrent enfin, mais un besoin pressa l’empêcha de se recoucher :
- Soif, moi !
Il restait de quoi remplir un dernier verre… Clac, fit le verre en tombant sur le béton : le weequay venait de prendre conscience qu ‘il n’était plus seul. Une petite silhouette se faufilait vers la commande d’ouverture. Un flot de lumière inonda la cagna, aveuglant le weequay qui tentait stupidement de récupérer quelques gouttes dans le verre brisé.
- komenkilérentré ? Zut, m’suis coupé l’main !
La lumière s’atténua, masquée par une silhouette colossale.
- ‘lut, Kendall ! D’solé j’reçois pas ! Et pis pu rien à boire !
Le dénommé Kendall, qui dépassait les deux mètres, le souleva par la chemise et la culotte avec une moue dégoûtée.
Avant d’avoir compris quoique ce soit, le weequay se retrouva immergé dans une eau glaciale. Un truc que sa race détestait ! En se civilisant, il avait appris à se servir d’un purificateur sonique, mais de l’eau...
Luttant pour remonter, il émergea enfin. Le géant, accroupi sur le bord du bassin, l’empêcha de ressortir. Il était accompagné d’un petit humain - celui qui avait ouvert la porte - tenant une chope à la main.
- Kendall ; s’pèce de salaud ! L’eau c’pas bon pour les weequays !
Son tortionnaire se contenta de montrer la chope :
-Bois ! Ce n’est pas de l’eau.
Aucune pitié à attendre de ce type ! Soonjay ingurgita en grimaçant l’horrible breuvage.
Il reconnut enfin le gamin :
- Du poison , fit-il avec espoir. T’as raison Kendall, autant en finir !
Le jeune Jango était l’apprenti de cette empoisonneuse de Naali. Il esquissa un mince sourire :
- Pas cette fois, désolé ! Buvez le reste, ça va vous dessaouler vite fait !
Pressé de sortir, le weequay obtempéra. En récompense, Kendall Horbin le tira hors du bassin.
- Y parait que vous autres humains aimez vous baigner dans ce… Cette chose ! Eh ben, vous savez quoi ? J’vous le laisse ! Eh, mais ca marche ton truc, petit ! J’ai l’esprit clair pour la première fois depuis… On est quel jour déjà ? Bah, pas grave ! T’en as d’autre ? Juste le temps de passer à la taverne pour refaire le plein et j’remets ça !
Le gamin grimaça :
- Oui, il va mieux, maître : il recommence sa logorrhée.
Celui-ci ricana :
- Montre-lui plus de respect, esclave ! C’est un Capitaine. Logorrhée, hein ? Qui t’a appris ça?
- Sans doute un droïde… Ou un programme d’apprentissage intégré… Euh, maître.
Celà faisait près d’un an qu’un compatriote avait confié à Horbin ce garçon étrange et violent, déjà trop vieux pour le conditionnement que les Frères de Belvan imposaient à leurs enfants-soldats. Trop vieux et trop dangereux, mais le géant avait relevé le défi. Après tout, il élevait déjà un louveteau déguisé en enfant humain !
Selon les règles des pirates, le commandeur suprême des Frères était le maître, l’enfant son esclave. Mais le weequay en doutait : les relations entre ces deux-là étaient tout sauf simples.
- ça fait combien de temps qu’il n’a pas essayé de te tuer, demanda-t-il au géant.
- Un bon moment, concéda le pirate, presque avec regret.
- T’en as eu marre de prendre des raclées, petit ?
Le garçon échangea un regard rapide avec son « maître », puis affirma avec impudence :
- Bah, c’est plus si amusant. Et puis, j’apprends plein de trucs avec lui. J’essaierai à nouveau quand je serai grand. Pour devenir le nouveau commandeur suprême.
Grand sourire de Horbin :
- Tu vois, il a tout compris !
- Mouais… Je me demande comment il a pu… Non, laisse tomber !
Évidemment, le gamin était assez mince pour se faufiler à travers l’étroit vasistas – laissé ouvert par négligence - de la cuisine !
- Tu as raison, Jango : il a dessaoulé. Allez viens, Capitaine, il faut qu’on cause !
- Capitaine, releva le Weequay. Capitaine de quoi ? J’ai perdu mon vaisseau et la moitié de mon équipage !
Les souvenirs qu’il s’était efforcé d’enfouir au plus profond de sa mémoire revinrent le hanter. Plus que l’humiliante défaite, c’est la perte de nombreux amis qui était douloureuse, insupportable. Pour l’oublier, il avait bu, croqué, fumé, sniffé toutes les substances qu’il avait pu rafler dans un astroport où elles abondaient.
Il avait pourtant dégotté des renseignements de première bourre ; Dorsa, Barak et lui avaient peaufiné leur plan, trouvé des acheteurs pour la cargaison, envisagé toutes les possibilités… Sauf une !
Comme prévu, sa canonnière et les patrouilleurs de ses associés s’étaient embusqués derrière la troisième lune de Toopor, attendant deux beaux cargos bourrés de marchandises et faiblement escortés.
Comme prévu, ils étaient sortis de l’hyperespace au lieu et au moment attendus, rejoignant lentement la planète sur une trajectoire qui les mettrait bientôt à portée de tir. Il leur suffisait d’être patients et discrets.
Comme prévu, l’escorte se limitait à deux engins légers corelliens de type VCX que la puissance de feu du trio neutraliserait sans peine.
Mais, en approchant les escorteurs avaient modifié leur formation, les cargo légèrement changé de trajectoire. Et ça, c’était pas prévu !
Pas prévu non plus, l’immense croiseur qui avait surgi de l’hyperespace en vomissant une douzaine de chasseurs. Quand ils l’avaient identifié, même Soonjay avait paniqué : le Hun, vaisseau amiral de l’Amber Star ! Son capitaine - par ailleurs directeur de la compagnie – menait une guerre sans merci aux pirates attaquant ses cargos.
- Mais ils n’étaient pas à lui, ces cargos, s’exclama-t-il soudain.
Horbin, qui semblait avoir saisi le cheminement de ses pensées, répliqua :
- En fait si : j’ai appris il y a peu qu’il venait juste de racheter les actifs d’On-Ah-Six. Vous ne pouviez pas le savoir !
- N’empêche ! Ils nous ont coincés tout près de la planète. Bratak et Dorsa ont réussi à plonger , puis à semer les chasseurs en se faufilant entre les montagnes, mais mon « Gadderfi » était trop grand pour faire de même. J’ai essayé d’échapper à ce monstre en frôlant l’atmosphère, mais...
Mais la canonnière avait encaissé plusieurs tirs de turbolaser, perdu ses boucliers, puis une tourelle, un réacteur…
- On allait passer au-dessus de Toopor City, alors j’ai ordonné l’évacuation.
Il avait pensé que le croiseur n’oserait pas tirer à ce moment, au risque de toucher l’agglomération tentaculaire.
- ça a marché, mais certains n’ont pu rejoindre une capsule.
- Ta manœuvre en a sauvé bien plus de la moitié. Ils attendent avec impatience que tu te reprennes. Ils veulent une revanche.
- Contre moi ? Qu’ils se gênent pas !
- Contre l’Amber Star. Des canonnières, la compagnie en a des dizaines.
- Pfft ! Autant leur fournir la corde pour se pendre. C’est le sort qu’il réserve aux pirates, le Herrion !
- Pas si sûr : j’ai des infos qui pourraient t’intéresser et quelques bijoux technologiques très utiles pour surprendre un capitaine trop sûr de lui.
L’espoir revint sur le visage du Weequay. L’espoir et un sourire rusé ! Seul un coup d’éclat pouvait restaurer une réputation en miette.
- Peuh, dans ce cas, autant viser plus haut.
- Le Hun ? Tu n’y penses…
- Ils ont aussi des frégates ! J’en connais justement une qui m’a causé quelques soucis.
Lorsqu’il repensait au plan qu’il avait concocté à l’époque, Soonjay secouait la tête dans le vain espoir de chasser ces élucubrations de sa mémoire. Il l’avait alors jugé audacieux, mais le mot qui lui venait maintenant était plutôt : suicidaire.
Suicidaire, inconscient, fou… Il avait le choix.
Mais à l’époque, il était beaucoup plus jeune et totalement désespéré.
à suivre