Calameo, PDF et EPUB mis à jour évidemment, pour ceux qui n'aiment pas lire sur forum.
Kro’Moo était bien trop rapide pour n’importe quel autre dragonnal, aussi eut-il été impossible de le rattraper même si cette idée avait effleuré les hommes-serpents. Au bout d’une dizaine de minutes, il se cacha intelligemment au fond d’un canyon en posant délicatement la jeune fille sur un lit de verdure. Puis il alla jusqu’à un torrent tout proche pour prendre de l’eau dans sa gueule et revint pour la laisser s’écouler sur le visage de la jeune fille inconsciente. Le liquide frais rappela Iella à la vie et elle ouvrit péniblement les yeux en se tenant le front.
— Aïe, ma tête, se plaignit-elle en regardant tout autour d’elle pour essayer de bien comprendre sa situation.
Le dragonnal remuait la queue et dodelinait de la tête en poussant de petits cris rauques.
— Calme-toi Kro’Moo… je sais… ils ont dû enlever ta maîtresse.
L’animal gémit tristement comme s’il avait saisi la portée de ses paroles.
— Mais ne t’inquiète pas, reprit-elle aussitôt en lui caressant le bout du museau, je suis certaine qu’ils nous voulaient vivantes. Ils ne lui sera fait aucun mal.
Avec une évidente impatience, le saurien se coucha sur le ventre pour inviter Iella à monter sur lui, visiblement désireux de reprendre la route.
— Oui, tu as raison, il faut aller chercher du secours, prévenir Calem de ce qui vient de se passer.
Elle s’installa sur lui, s’harnacha solidement, se couvrit chaudement avec le vêtement spécial qui se trouvait sous chaque siège et mit son masque pour respirer.
— Allez Kro’Moo, aussi haut et aussi vite que tu peux ! Rentrons à Édinu !
Une demi-douzaine d’enjambées plus tard, les puissantes ailes les arrachaient du sol et l’animal montait en flèche dans le ciel bleu au maximum de l’altitude qu’il pouvait atteindre et qui lui permettrait de donner toute la vitesse dont il était capable.
*
* *
Ficelée comme un saucisson et solidement attachée sur le ventre en travers du siège du milieu, étroitement surveillée par l’homme-serpent qui se tenait derrière elle, Sali eut un voyage pour le moins douloureux et inconfortable qui dura jusqu’à la tombée du jour. Dans les couleurs flamboyantes que jetait l’étoile d’Édéna sur le désert de Sang, le paysage, à l’arrivée sur la sinistre forteresse encastrée dans la montagne en bordure d’un étroit précipice, était sublime. Les dragonnaux amorcèrent un large virage et descendirent pour disparaître comme absorbés par l’imposante construction de métal et de pierre.
À peine étaient-ils posés à l’abri des hautes murailles qu’on la traîna sans ménagement, les mains liées dans le dos, par de longs couloirs et d’étroits escaliers, jusqu’à une grande salle. Au fond de celle-ci, une silhouette encapuchonnée dans un habit noir se tenait debout devant une grande cheminée dans laquelle crépitait un feu, sans doute en prévision de la fraicheur qui emplissait les nuits du désert. L’une des deux créatures qui la tenaient par les bras, la projeta violemment à terre à peine arrivés à quelques pas du maître de céans. Elle gémit en se recevant rudement sur une épaule.
— Sauvages ! grimaça-t-elle en tentant de se remettre d’aplomb.
L’homme se retourna et Sali vit briller ses yeux gris clair.
— Sergent Krrol, où sont les autres ? questionna-t-il à l’adresse d’un des deux hommes-serpents.
— Elles se sont enfuies, Maître, grogna le sous-officier en baissant ses yeux globuleux.
Le Sith serra les poings et les dents.
Comme d’habitude, pensa-t-il rageusement.
— Est-ce bien la princesse, pas son double, que vous me ramenez ?
Le sergent fit oui de la tête.
— Sûr et certain, Maître !
Diva ayant supervisé l’opération, il n’avait pas lieu d’en douter. Il aurait quand même préféré détenir les deux sosies pour donner plus de poids à ses revendications.
— Qu’est-ce que vous me voulez ? demanda avec morgue Sali parvenue à se remettre sur ses jambes. Vous savez que je suis la future reine d’Édéna, je présume donc que vous savez également à quoi vous vous exposez pour m’avoir enlevée et avoir massacré mon escorte ?
— Ne prenez pas ce ton avec moi, ma petite, répondit l’homme d’une voix étonnamment pleine de retenue, ici, vous n’êtes rien qu’une jeune femme sans défense soumise à mon bon vouloir. Sachez que je peux vous écraser d’un seul geste de cette main.
Tout en prononçant ces paroles, il leva un poing qu’il serra dans le vide, et immédiatement elle ressentit une impitoyable étreinte lui écraser la gorge. Instinctivement, elle voulut porter ses mains à son cou mais elles étaient liés dans son dos. Alors qu’elle commençait à étouffer dans un râle, elle se rendit compte que ses pieds ne touchaient plus le sol. Sali se débattit un instant en remuant les jambes dans le vide puis lentement, elle se sentit revenir sur le marbre froid de la pièce et l’étreinte se desserra pour disparaître petit à petit. L’homme ouvrit son poing et laissa son bras retomber le long de son corps. Sali toussa plusieurs fois, le temps de reprendre son souffle, le cœur battant.
Quel est donc le pouvoir de cet homme qui peut tuer d’un geste si simple ? pensa-t-elle. Elle se sentit perdue et vulnérable dans cette forteresse, si loin de tout ce qui lui était cher.
— Ce n’est qu’un petit échantillon de mon pouvoir, reprit calmement le Sith avec un léger sourire tout en abaissant sa capuche sur ses épaules, dégageant ainsi l’intégralité de sa tête. Veuillez donc ne pas abuser de ma patience et tout ira bien pour vous.
— Qu’est-ce donc ? De la magie ?
L’homme ricana.
— Allons, nous ne sommes pas dans un conte pour enfant. Il s’agit ici de la Force, celle qui a créé l’univers et qui l’habite. Elle est partout autour de nous et les êtres qui y sont sensibles peuvent la plier à leur volonté. Cela peut leur octroyer des pouvoirs incommensurables. Songez donc… une vague de force invisible qui dévaste tout sur son passage ; une poussée qui propulse dans les airs son ennemi…
Comme quand les hommes-serpents nous ont attaquées Iella et moi, pensa aussitôt la jeune fille qui revoyait les deux créatures s’envoler pour s’écraser sur les rochers.
— Et une personne… sensible… comme vous dites à cette Force, comment doit-elle faire pour apprendre à s’en servir ? s’enquit-elle d’une petite voix intéressée.
Dark Zarek prit l’air satisfait de quelqu’un qui parle à un auditoire éminemment attentif à ses propos.
— Le mieux évidemment, c’est d’avoir un enseignant, un Maître qui enseignera au disciple la voie de la Force, comment intérioriser ses sentiments, les canaliser dans la Force pour pouvoir l’employer. C’est une maîtrise très difficile à acquérir même s’il est des exemples de personnes ayant appris seuls à s’en servir… des autodidactes si j’ose dire.
— Mais en pratique, ça se passe comment ?
— On se concentre et on essaye de sentir la Force vivante autour de soi pour ne plus faire qu’un avec Elle… il faut ressentir son énergie et la canaliser selon ce qu’on veut qu’elle fasse. Quand on est puissant dans la Force, on repousse les limites de l’impossible, on peut voir l’avenir, lire dans les pensées, influencer les esprits faibles, bouger des objets immenses… j’ai envie de dire qu’il n’y a pas de limites à ce qu’on peut faire accomplir à la Force !
Il s’était enflammé tout seul au fil de sa tirade comme un professeur passionné qui répond à des élèves curieux de tout savoir. Mais il s’arrêta, et le silence retomba autour d’eux quelques instants.
— Que voulez-vous de moi ? s’enquit la jeune fille d’une voix qui ne tremblait pas.
— De vous ? Rien ! laissa tomber l’homme avec un rictus sarcastique en s’éloignant pour se rapprocher du repas, qu’une étrange créature bleue était en train de servir dans leur dos sur une grande table.
— Je ne comprends pas alors… pourquoi m’avoir fait enlever ? interrogea la princesse en le suivant mais de l’autre côté de la table.
L’homme ricana sans répondre en s’asseyant, avant d’attraper une coupe dorée pour se servir du vin d’une carafe visiblement en or. Tranquillement, il en but une gorgée qu’il prit soin d’apprécier en le roulant dans sa bouche, avant de reposer délicatement le récipient.
— Le royaume d’Édinu vous a toujours laissé en paix depuis que vous habitez cette…
Sali montra les hauts murs des yeux.
— … forteresse inhospitalière. Pourquoi briser maintenant le statu quo au risque d’inciter le roi à venir avec son armée pour raser ces murailles ?
Dark Zarek se mit à rire en s’essuyant élégamment la commissure des lèvres à l’aide d’une serviette brodée.
— Mais ma petite, le roi voudrait le faire qu’il ne le pourrait pas…
Il s’enfonça dans son fauteuil et croisa négligemment les jambes sur lesquelles il posa ses mains.
— Enfin, je devrais plutôt dire, qu’il ne le pourrait plus, continua-t-il. Il aurait fallu qu’il me déloge de ce caillou il y a plusieurs années… avant que mon armée ne devienne aussi puissante que la sienne. Sans compter que les forces de cette dernière sont éparpillées sur tout le territoire du royaume alors que la mienne est tangible et cohérente, prête à répondre à mes ordres. Aujourd’hui, cette forteresse est inexpugnable et toutes les forces du royaume ne suffiraient pas à la prendre d’assaut. Il se pourrait même qu’un jour ce soit moi qui abatte les murs de votre chère capitale.
— C’est donc la guerre que vous désirez ? demanda Sali sceptique.
— Hum… pour l’instant, non, princesse. Je cherche quelque chose de différent auquel je me suis mis à tenir de plus en plus au fur et à mesure que le temps passait.
— Quelle est donc cette chose ?
Le Sith se mit à rire avec retenue et adressa un geste à Krrol.
— Détachez-la, sergent, qu’elle puisse se joindre à moi pour le repas. Sroot ! lança-t-il à l’adresse de la créature bleue qui apportait les premiers plats aidé par deux esclaves twi’lek, un couvert pour notre charmante invitée !
Le sergent saurophale s’empressa d’exécuter les ordres et ôta les entraves de la prisonnière. Celle-ci frotta ses poignets douloureux avant de s’assoir, acceptant implicitement l’invitation silencieuse que lui adressa le Sith en lui désignant d’un geste de la main, le siège situé en face de lui.
Une twi’lek s’approcha d’elle et versa du vin dans la coupe que le serviteur venait de poser devant elle. Sali n’avait rien bu depuis le matin et ne put résister. Une quinte de toux succéda à l’absorption du breuvage qui irrita sa gorge desséchée.
— Ce vin ne vous convient pas ? demanda l’homme en fronçant les sourcils.
Sali toussa encore deux ou trois fois avant de pouvoir répondre.
— Non, il est délicieux… mais fort… je n’ai pas l’habitude.
— Pardonnez-moi, j’en ai un plus doux et plus fruité si vous le désirez.
— Vraiment merci, mais celui-ci fera l’affaire… c’est la première gorgée la plus difficile.
— C’est ce qu’on dit.
La twi’lek posait à présent devant la princesse une assiette de crudités des plus vives couleurs qui semblaient de première fraicheur.
— Je suppose qu’il ne s’agit pas là de légumes de votre jardin ? observa-t-elle en pensant à l’aridité des lieux.
— Détrompez-vous, il y a ici des crevasses au fond desquelles coule de l’eau cristalline et que j’ai fait recouvrir de terre riche pour en faire mon potager… j’adore les légumes frais… de la bonne terre, de l’eau… le soleil et l’humidité font le reste. J’en dispose toute l’année.
— Un tyran jardinier, railla malgré elle Sali, décidément, on gagne à vous connaître. Vous ne m’avez toujours pas dit ce que je faisais ici.
— C’est vrai, je ne vous l’ai pas dit. Mais finissons d’abord notre repas en bavardant comme des gens civilisés. Vous savez ce que Lama Arti’N disait sur les conversation de repas ?
— Qui ?
— Lama Arti’N voyons, le poète universel d’Édéna… il est mort il y a deux mille…
Il calcula en marmonnant de façon inintelligible.
— trois cent cinquante… quatre ans… tous les écoliers connaissent ses poésies… « l’Astre du jour », « le chemin rouge », « la fleur fanée »…
Sali secoua négativement la tête.
— Je suis désolée…
— C’est impensable, une femme de votre rang qui ne connaît pas le grand Lama Arti’N … même moi qui ne suis pas d’Édéna, j’ai appris son existence en étudiant votre histoire littéraire. Vous me voyez surpris.
Sali s’étonna.
— Pas d’Édéna ? Que voulez-vous dire ?
— Ah, c’est vrai, s’exclama Zarek, vous ne connaissez rien de ma petite histoire. Bah, après tout, il faudra bien que vous l’appreniez tôt ou tard… Je ne suis pas né sur Édéna.
— Mais alors, vous venez d’où ?
Il montra le haut avec son index.
— De la proche galaxie.
— Vous voulez dire qu’il y a autre chose au-delà de la grande nébuleuse ?
— Bien entendu… l’univers, ses galaxies innombrables, avec des milliards de milliards de systèmes stellaires, de planètes, d’astéroïdes, de nébuleuses, etc.… des corps astraux en tout genre. Et pas très loin d’ici, si je puis me permettre ce raccourci, ma galaxie de naissance.
— Mais comment êtes-vous arrivé ici ?
— Avec un vaisseau pardi… qui n’a pas apprécié son passage à travers votre nébuleuse. Il s’est écrasé il y a dix ans… et depuis, je suis prisonnier de cette fichue planète sans espoir d’en repartir. Si seulement, vous n’aviez pas abandonné l’ère technologique que vous avez connue il y a des milliers d’années… peut-être aurais-je pu le réparer. Mais non, vous avez, si j’en crois mes lectures, régressé à tout va… quelle stupidité !
Sali ne trouva rien à répondre et resta un moment la bouche entrouverte.
— Alors, je me suis dit qu’il faudrait que je me trouve un petit travail dans le coin… genre, prendre possession de la planète, asseoir mon pouvoir dessus… dans ma galaxie, on connaît les gens de mon espèce sous le nom de « Sith ».
— Sith ? répéta Sali, ça signifie quoi ?
— Ce terme désigne une caste de puissants guerriers qui savent utiliser la Force vivante de l’univers pour en tirer des pouvoirs extraordinaires.
— Et il y a beaucoup de ces personnes qui savent utiliser cette… Force ?
— Trop… si vous voulez mon avis. Évidemment, à l’échelle de la galaxie, ce trop se traduit en un tout petit groupe d’êtres de différentes espèces. Il y a aussi une secte d’empêcheurs de tourner en rond qu’on appelle des chevaliers Jedi.
— Jedi ? Comme des Sith ?
— En moins puissants, je dois bien l’avouer en toute modestie… mais je suppose que vous expliquer la différence entre les uns et les autres prendrait trop de temps. Je dois dire que sur votre petite planète, j’ai bien l’impression d’être le seul à savoir utiliser la Force ce qui me donne par conséquence, un net avantage sur ses habitants.
Il n’était pas encore temps pour lui d’ajouter qu’il avait une apprentie qui avait les mêmes pouvoirs que lui. Chaque pièce du puzzle viendrait en son temps.
— Je ne… comprends pas… balbutia Sali en réfléchissant, vous voulez vous servir de ce pouvoir pour asservir toute une planète ? C’est démentiel ! Il ne peut pas être assez puissant pour vaincre tous les pays, toutes leurs armées, toutes les populations qui se dresseront contre vous ? Quel bénéfice en retireriez-vous ?
Dark Zarek laissa échapper un rire plutôt mondain.
— C’est que vous ne connaissez pas l’ivresse que procure le pouvoir, ma belle. Il n’y a rien de plus… jouissif que d’asservir les êtres faibles à ses désirs. La faiblesse ne mérite qu’une chose : l’esclavage. Moi, Dark Zarek, je deviendrai ainsi le Maître incontesté d’Édéna. L’Empereur Dark Zarek !
Comme il avait dit tout cela sur un ton presque badin, Sali se demanda un instant si somme toute, l’homme ne plaisantait pas. Mais même si ses yeux pétillaient de malice en parlant, il paraissait tout de même sérieux.
Sérieux, il le devint encore plus lorsqu’il reprit.
— Sous mon impulsion, nous reprendrons le développement technologique perdu il y a trop longtemps. Nous construirons des vaisseaux capables de traverser votre nébuleuse et je retournerai sur Korriban avec ma nouvelle puissance… à moins que je ne la détruise avant, et l’Empereur avec, pour mieux prendre sa place. Tout dépend de la réalité de ce que je cherche et de sa puissance réelle.
— Mais enfin, de quoi s’agit-il ? s’inquiéta Sali qui avait du mal à suivre le Sith dans son délire.
Dark Zarek observa minutieusement sa prisonnière avec une curiosité palpable et aussi, un sentiment diffus qu’il ne savait expliquer. Cette jeune femme le fascinait, mais il n’aurait pas su dire pourquoi.
— Vous avez été visiter le Temple en ruines de la vallée des Milles Eaux, n’est-ce pas ?
La princesse hésita un instant avec de répondre.
— Heu… oui… en effet… puisque c’est là que vos sbires nous ont attaqués.
— Vous avez vu la crypte ?
— Bien entendu…
— Vous avez étudié les gravures et les dessins qui en ornent les murs ?
Sali fit oui de la tête en se taisant.
— Rien ne vous a frappé dans ce que vous avez vu ?
Sa prisonnière réfléchissait intensément en se demandant où l’homme voulait en venir. Puis, subitement, elle crut avoir compris et exprima son idée à voix haute.
— Le rayon ? L’artéfact ? C’est ça que vous voulez ?
Le silence qui suivit, jumelé au large sourire de satisfaction que Dark Zarek afficha sur son visage, fut assez éloquent pour qu’elle considère avoir eu sa réponse. Elle reprit dans un souffle.
— Mais voyons, ce ne sont que des dessins, de la mythologie… le symbole d’une création remontant à des temps antiques… ça n’a jamais existé !
Le Sith prit le temps de boire une coupe de vin et d’avaler quelque bouchées d’une viande que Sroot venait de lui servir avant de se décider à reprendre la conversation.
— Si vous saviez tout ce que j’ai pu découvrir comme puissance dans certains artéfacts oubliés… dans certains holocrons… vous seriez surprise ma petite. Si ce que dit cette légende a un fond de vérité, il y aurait quelque part sur cette planète un engin extragalactique dont la puissance ferait frémir l’Empereur Sith lui-même ! Une machine qui utiliserait la Force et les composants d’une nébuleuse pour créer des étoiles et des planètes… ou, pourquoi pas, pour les détruire ! Imaginez le résultat si on projetait de la matière créatrice d’une étoile directement sur une planète habitée.
La princesse pensa que, curieusement, la duchesse de Tamburu avait eu la même réflexion devant les gravures du Temple.
— C’est horrible, gémit Sali en posant une main sur ses lèvres, ce serait un génocide.
— Non pas, mais un renouveau. La vie à la place de la vie. Une nouvelle vie dont je serais le Maître incontesté. Si un tel pouvoir existe, l’Empire Sith, la République Galactique et même Mandalore devront plier le genou devant moi.
Paradoxalement, il n’y avait aucune exaltation dans sa voix alors qu’il énonçait ce qui pour lui était simplement une éventualité. C’était comme un scientifique expliquant un phénomène plausible et ses conséquences logiques. Sali ne décela ni haine, ni colère, ni excitation dans son discours au ton plus que mesuré, presque badin, et elle se fit la remarque qu’il n’en était que plus effrayant.
— Voyez-vous, ma petite, je suis persuadé qu’un tel artéfact ne peut être dissimulé que dans le Temple d’Édin, et je ne parle pas des ruines que nous évoquions il y a un instant, non. Je parle du Temple actuel, celui dont personne ne connait l’emplacement. Celui que les prêtres ont rallié il y a des millénaires lorsqu’ils sont partis de la vallée des Mille Eaux. Et, tenez, je suis également persuadé qu’ils ont quitté ce lieu lorsqu’ils ont découvert cet artéfact… peut-être même, le temple qui abritait cet artéfact, ce qui expliquerait leur décision de déménager subitement sans aucune raison historique… qui justifierait aussi le secret dont a été dès lors entouré l’emplacement du nouveau Temple alors que l’ancien était accessible à tous.
Le silence éloquent de Sali prouvait que les mots du Sith sonnaient juste à ses oreilles et l’expression sidérée de son visage était plus qu’expressive en cela.
— J’ai donc juste besoin qu’on me mette dans le secret en me disant comment me rendre jusqu’au Temple, conclut Dark Zarek d’un ton volontairement naïf, qu’il appuya d’un geste en présentant les paumes de ses mains à son invitée forcée.
— Et seul le roi peut vous mettre sur le bon chemin… murmura Sali qui commençait à comprendre les raisons de sa présence dans les lieux.
Zarek avait achevé son assiette que Sroot s’empressa d’enlever. Il observa la princesse en soulevant un sourcil de reproche.
— Vous n’avez guère touché à votre repas… vous n’avez donc pas faim ?
— Je dois dire que vous m’avez plutôt coupé l’appétit, si tant est que le fait de me retrouver prisonnière de quelqu’un comme vous ne me l’ait pas coupé avant ! persifla Sali.
— Oh, je décèle une pointe d’agressivité dans votre jolie voix, releva Dark Zarek d’un ton goguenard, pourtant, comme vous semblez l’avoir compris, il n’y a rien de personnel contre vous dans ma démarche.
— Cela change-t-il quelque chose à ma situation ?
Le Sith se leva de table en laissant tomber négligemment sa serviette à côté de l’assiette après s’être soigneusement essuyé la bouche.
— Évidemment non, j’en ai bien peur. S’il ne s’agissait que de moi, je vous aurais offert une hospitalité à la hauteur de votre rang, mais malheureusement, afin de faire plier votre cher futur époux, je vais devoir prendre des mesures qui vont, à mon grand regret et sans nul doute, vous déplaire.
Il frappa des mains pour attirer l’attention du sergent Krrol qui se tenait à l’entrée de la pièce.
— Oui, Maître ? demanda-t-il en se précipitant dans la salle.
— La princesse a fini de manger. Désormais, elle n’aura plus droit à rien tant que je n’aurai pas obtenu satisfaction. Conduisez-là au puits perdu !
— Bien Maître.
Le premier geste de Sali fut de se débattre lorsque les deux soldats l’attrapèrent par le haut des bras pour l’arracher à sa chaise, mais devant la fermeté de la poigne qui l’enserrait, elle fut vite convaincue de l’inutilité de lutter. Elle lança un dernier regard de défi à ce fameux « Sith » dont elle n’appréhendait pas encore tous les contours, avant d’être poussée vers la sortie. Les gardes lui firent descendre un escalier de pierre en colimaçon et à sa grande surprise, elle se rendit compte que Zarek les suivait.
L’escalier n’en finissait plus de tourner sur lui-même comme s’il avait voulu s’entortiller jusque dans les entrailles de la planète. Il était éclairé à intervalles réguliers par des spots encastrés dans la pierre humide. Puis ils arrivèrent dans une salle d’où partaient trois couloirs. Ils prirent l’un d’eux et marchèrent en silence environ deux cents mètres avant de déboucher dans ce qui semblait être un corps de garde. En passant, Sali aperçut une pièce dans laquelle elle put apercevoir des hommes allongés sur des lits superposés, et d’autres qui jouaient aux cartes autour d’une table. Ce fut ensuite un nouveau couloir, puis encore un escalier et un corridor plus sombre. Leurs pas résonnaient dans le silence qui les accompagnait et Sali pouvait entendre son cœur battre puissamment dans sa poitrine. Plus ils descendaient, plus elle avait l’impression qu’elle ne sortirait jamais vivante de cet endroit. C’était comme un sombre pressentiment qui l’oppressait et qui s’ajoutait au contact mortifiant des mains des deux reptiles qui enserraient ses bras comme des étaux.
Au bout de longues minutes de marche dans les souterrains, ils arrivèrent dans une salle rectangulaire où débouchait un autre escalier. Mais ce ne fut pas vers lui qu’ils continuèrent. Face à eux se trouvait une lourde porte blindée que le sergent Krrol ouvrit par l’intermédiaire d’un levier dans le mur.
— Vous êtes arrivée, dit-il de sa voix éraillée en la poussant dans le dos.
Ils débouchèrent dans une vaste salle ronde au plafond voûté qui devait culminer à plus de vingt mètres de hauteur. Tout en haut sur une petite portion de sa circonférence, deux ouvertures barreaudées donnaient à penser que durant la journée, un peu de lumière pénétrait dans les lieux. C’était l’arrivée de deux conduits d’aération qui débouchaient à l'extérieur à flanc de falaise.
— Nous sommes au fond du donjon primitif de la forteresse, expliqua soudain Dark Zarek qui n’avait pas prononcé une parole durant tout le trajet depuis la salle à manger. Cette partie des fortifications est la plus ancienne, construite vraisemblablement, il y a cinq ou six mille ans lors de la Guerres des Races qui ensanglanta la planète durant plus de trente ans.
À l’entendre parler de sa voix calme et dépassionnée, on aurait pu croire à un simple guide commentant une visite historique à quelques touristes venus visiter les lieux. Les yeux de Sali errèrent un instant tout autour d’elle. Ce qui frappait tout d’abord, outre la rotondité de l’immense pièce, c’était le gouffre rond qui en occupait le centre. Il devait bien faire une trentaine de mètres de diamètre. Une masse noire qu’on devinait profonde et peut-être, pour un esprit imaginatif, sans fin. C’était comme un œil gigantesque qui regardait vers le haut. Au centre de ce gouffre, il y avait une colonne de pierre qui s’arrêtait à la même hauteur que le trou béant. Elle avait une largeur qui ne devait pas excéder cinq mètres et aucune rambarde ne la protégeait du vide. Tout autour de la salle s’ouvraient ce qui était visiblement des cellules fermées par des grilles, en renfoncement par rapport au gouffre de deux ou trois mètres, ce qui laissait une sorte de chemin de ronde qui permettait de faire le tour du trou tout en donnant accès aux cellules. Il n’y avait personne à l’intérieur.
— Ce chef-d’œuvre architectural, continua Dark Zarek, est, comme vous pouvez le constater, une prison de forme plutôt originale. Je vous laisse imaginer combien de prisonniers récalcitrants ont pu être précipités dans la noirceur de ce gouffre, dont les profondeurs se perdent dans les soubassements de la montagne contre laquelle est érigée la forteresse. Quelle profondeur a-t-il ? Je n’en sais rien moi-même. On n’entend pas le bruit d’une pierre jetée dedans… c’est tout dire. Vous avez remarqué la plateforme circulaire formée par la section de la colonne qui en occupe le centre. Il s’agit tout bonnement d’une cellule sans barreaux où l’on pouvait sans doute entasser une poignée de prisonniers…
Il se tourna vers la princesse d’Austra pour achever sa phrase.
— Ou une seule.
Sali ne put maîtriser un geste involontaire de recul qui l’amena contre le sergent Krrol.
— Non, fit-elle en secouant la tête, vous n’allez pas…
Sans répondre, Dark Zarek s’approcha d’un autre levier qui saillait d’entre deux pierres à droite de la porte blindée par laquelle ils étaient entrés. Aussitôt, un bruit de métal qui frotte et grince se fit entendre presque sous leurs pieds et une passerelle métallique sortit de la bordure du gouffre, en saccadant, pour s’avancer vers la colonne centrale. Quelques secondes plus tard, elle reliait l’endroit où ils se tenaient avec cette dernière.
— Non, répéta Sali visiblement terrifiée.
Le sergent Krrol la poussa dans le dos d’un geste qui enlevait toute ambiguïté à la situation et qui traduisait les intentions du Sith qui ne put s’empêcher de dire d’un ton sarcastique.
— Si vous avez le vertige, essayez de bien rester au centre.
Sali sentait ses jambes se dérober sous elle en tremblant, mais la main de fer de l’homme-serpent la poussait inexorablement vers le bord du gouffre. De là où elle se trouvait, la passerelle paraissait si étroite qu’elle pensa ne jamais pouvoir la traverser sans tomber. Sa résistance fut vaine et sous la poigne impérieuse du soldat, ses pieds finirent par se poser sur le métal qui oscilla légèrement sous son poids.
— Pitié, lança-t-elle en tournant son visage ravagé par la peur vers le Sith.
Dark Zarek lui adressa un petit geste d’encouragement avec la main.
— Allez-y, vous ne risquez rien. Ça paraît fragile comme ça, mais en fait c’est suffisamment solide. Ça ne s’écroulera pas. Restez bien au centre et ne regardez pas en bas… surtout ne regardez pas en bas.
Sali inspira profondément pour puiser en son for intérieur les forces suffisantes pour faire front. Ne cède pas à la peur, se dit-elle en avança une jambe. La peur occulte l’esprit et empêche de raisonner. Laisse tes sentiments de côté et va de l’avant. Pour le reste, on verra plus tard.
Lentement, en fixant ses yeux au centre de la plateforme à atteindre, elle avança presque comme un automate, le cœur et la respiration à l’arrêt, pour traverser le vide noir qui semblait vouloir l’aspirer. Ce n’est que lorsqu’elle fut parvenue de l’autre côté qu’elle sentit de nouveau son cœur battre dans sa poitrine et elle exhala longuement en s’asseyant, les jambes flageolantes, au centre de sa prison sans barreaux.
Aussitôt, accompagnée de son bruit métallique, la passerelle se rétracta pour disparaître dans la pierre de l’autre côté du précipice, rappelée par le sergent Krrol qui venait d’abaisser le levier.
— Vous vous sentirez ici comme chez vous, lança Dark Zarek d’une voix puissante pour être sûr qu’elle entende bien ses paroles. Mais cet endroit recèle d’autres surprises. Voulez-vous que je vous montre ?
Si les yeux pouvaient tuer, il serait sans doute tombé raide mort, foudroyé par le regard que lui lança sa prisonnière. Mais aussi durs que furent ses yeux, il continua d’un ton léger.
— Voyez-vous ces quatre boules suspendues autour de l’endroit où vous vous tenez, très chère ? Elles ont une fonction très particulière. Je vais vous montrer.
— Ce n’est pas la peine, répondit Sali, je vous crois sur parole.
— Oh, mais vous semblez ne pas avoir perdu votre sens de l’humour… ou est-ce de la morgue que je sens dans votre voix ? Je sais que vous êtes une personne curieuse… même si vous ne connaissez pas Lama Arti’N, railla-t-il avec un sourire moqueur. Une personne de votre rang, de votre classe, se doit de connaître les choses, aussi ne voudrais-je pas vous laisser sans vous offrir la lumière de la connaissance.
— Par pitié, grinça Sali, vous êtes désespérant. Finissons-en avec ce petit jeu et épargnez-moi vos sarcasmes. Plus vite vous en aurez fini, plus vite je serai débarrassée de votre pitoyable présence.
Le Sith émit un petit rire.
— Pitoyable ? Ce n’est pas très gentil tout ça… Bon, je suis sûr que ça va vous plaire.
Il s’était rapproché d’un autre levier qui cette fois, se trouvait à gauche de la porte d’entrée.
— Êtes-vous prête, ma jolie ? lança-t-il avant d’abaisser légèrement ce dernier.
Aussitôt, des éclairs jaillirent des quatre sphères en direction de la plateforme sur laquelle se tenait Sali. Elle ondulèrent dans l’air, se tortillèrent en progressant jusqu’à la jeune fille sur laquelle elle se rejoignirent. Un hurlement de douleur retentit dans la prison comme la prisonnière était traversée par les champs électriques. Elle sentit ses muscles se tétaniser douloureusement et une onde la ravager de l’intérieur. Son corps fut pris de convulsions incontrôlables et il lui sembla que ses yeux allaient être éjectés de leur orbite. Puis soudain tout se calma et elle se retrouva étendue à terre, les bras en croix.
Dark Zarek avait relevé le levier et était revenu vers le bord du précipice.
— Ce n’était là qu’une petite décharge de démonstration. On peut aller beaucoup plus loin… mais tout le monde ne le supporte pas. Nos ancêtres étaient imaginatifs, n’est-ce pas ?
Il se tut quelques secondes comme on attend une réponse de politesse dans une conversation courtoise. Mais rien ne vint, hormis le regard haineux que lui adressa sa victime après s’être rassise de nouveau.
— Bon, reprit-il, fin de la conversation je présume ? Je reviendrai vous voir sous peu… il ne faudrait pas que votre fiancé… ou presque fiancé, ne puisse jouir du spectacle. J’imagine qu’il se montrera plus loquace que vous lorsque je lui aurai fait ma petite démonstration avec sa promise comme vedette du spectacle.
Sans rien ajouter de plus, il quitta les lieux suivi des deux sauriens bipèdes et la lourde porte se referma dans un écho sinistre.
Complètement choquée, Sali se recroquevilla sur elle, passant ses bras autour de ses genoux fléchis contre sa poitrine et demeura là, prostrée et perdue au centre de cette étrange prison, en frissonnant à cause du courant d’air frais qui remontait du puits sans fin.
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* *
Les trois breeay mantas se posèrent lourdement sur l’endroit le plus dégagé du plateau, alors que le crépuscule pointait à l’horizon. Un groupe de personnes descendit de la première pendant que de la seconde jaillissaient une vingtaine de commandos de la Garde royale lourdement armés qui sécurisèrent immédiatement le site. La troisième, configurée en centre de soins mobile, était vide et attendait de recevoir les corps des soldats tués le matin même à défaut de survivants à soigner.
L’alerte avait été donnée à peine Kro’Moo posé dans les jardins du palais. Un garde qui l’avait aperçu avait aussitôt été prévenir le monarque que quelque chose d’anormal se passait : le dragonnal de la princesse Sali revenait sans escorte. Iella avait alors sauté de l’animal et couru à la rencontre d’un petit groupe qui arrivait vers elle. S’écroulant dans les bras du roi, elle put faire un bref récit de ce qu’elle avait cru comprendre : comment le campement avait été attaqué par des hommes-serpents qui, après avoir massacré leur escorte, lui avaient tiré dessus alors qu’elle courait vers les dragonnaux, et comment Kro’Moo lui avait vraisemblablement sauvé la vie ou du moins épargné d’être elle-même enlevée.
Jarval n’avait pas perdu de temps. Il avait aussitôt fait préparer trois breeay mantas dont une sanitaire, et une escorte armée pour partir le plus rapidement possible sur les lieux du drame, pendant que Iella recevait quelques soins légers pour panser les plaies qu’elle s’était faites en tombant. Alors que l’expédition de secours allait s’envoler pour l’aéroport de la ville où attendaient les mantas, un autre dragonnal en approche fut cause d’un nouveau remue-ménage. Cette fois, c’était la duchesse de Tamburu qui arrivait, le visage ensanglanté par du sang coagulé. Elle était visiblement mal en point. Elle raconta comment elle avait été frappée par ses agresseurs et laissée inanimée, et comment lorsqu’elle avait repris ses esprits, il n’y avait plus personne sur les lieux. On l’emmena à l’hôpital du palais pour la soigner, et l’expédition partit rejoindre les breeay mantas, avant de prendre l’air à bord des immenses créatures volantes qui firent le trajet en haute altitude bien plus rapidement que des dragonnaux.
Jarval progressa rapidement vers le campement qu’on apercevait à une bonne centaine de mètres, suivi du roi et du détachement composé d’enquêteurs et de médecins légistes. Lorsqu’ils furent arrivés à l’aplomb des tentes, le capitaine de la Garde porta une main à sa bouche.
— Quelle horreur ! laissa-t-il échapper en contemplant quatre corps mutilés, taillés en pièces.
— Capitaine, le lieutenant Lyynx est ici ! cria une femme en combinaison blanche intégrale qui transportait une trousse médicale.
Aussitôt, Calem et Jarval convergèrent vers l’endroit où le corps du lieutenant gisait dans la pâleur de la mort.
— Pauvre Jim, murmura le capitaine, qu’est-ce qui a pu le terrasser ainsi ?
La femme examina soigneusement le corps sans vie, le retournant précautionneusement avant de répondre prudemment.
— À première vue, je dirais qu’on lui a transpercé l’abdomen avec… je ne sais pas trop quoi… une lame brûlante qui aurait cautérisé la plaie ? Mais… pas une lame… en tout cas, pas quelque chose de tranchant comme une épée… c’est autre chose… je n’ai jamais rien vu de tel comme blessure.
— C’est peu ou prou le discours qu’a tenu le légiste qui a examiné le corps des gardes du Comte de Fartia, observa Jarval qui décidément se tenait informé de bien plus de choses que ne l’exigeait son poste.
— Ah oui ? fit le roi pensivement. Ce pourrait-il que ce soit le même assassin ?
Jarval esquissa un geste d’ignorance pendant que le légiste se relevait pour aller examiner les autres cadavres. Calem et le capitaine suivirent.
— C’est pareil pour les autres… d’évidence c’est la même… arme… chose… qui les a tués. Quelque chose dégageant une énergie redoutable, comme un laser… ou du plasma… capable de découper un corps sans effort en brûlant tout sur son passage… regardez ces chairs calcinées au niveau de la découpe… et celle-ci est droite, elle n’a pas failli en buttant sur les os, non, tout est découpé de façon rectiligne.
Jarval maîtrisa un haut-le-cœur et détourna son regard en cherchant un peu plus loin une profonde inspiration d’air non vicié.
— Ou les assassins utilisaient tous le même modèle d’arme, ou il n’y avait qu’un seul tueur, observa Calem en le rejoignant.
— Pourtant, mademoiselle Budhaasio a précisé que les hommes-serpents qui les ont attaquées utilisaient des lances à énergie comme nous en possédons, objecta le chef des enquêteurs qui centralisait les informations que ses hommes venaient lui transmettre au fur et à mesure de leurs découvertes. Ce ne sont donc pas eux qui ont tué ces soldats.
— D’autres agresseurs ? Bizarre, remarqua Jarval. Pourquoi d’abord un groupe d’assaillants aurait-il neutralisé les gardes pour qu’ensuite un autre groupe s’en prenne à trois jeunes femmes non armées ? Ça ne tient pas debout.
— Je suis de votre avis, Capitaine, reprit le chef enquêteur. Il n’y avait peut-être qu’une seule personne parmi les assaillants qui utilisait ce… cette arme à plasma ou à quoi qu’elle soit…
— Quelqu’un de bien redoutable si à lui tout seul il a pu tuer treize soldats de la Garde royale pourtant bien entraînés, objecta le roi en jetant un regard de biais vers son ami. Qu’en penses-tu Jarval ?
— Il a pu les avoir par traîtrise… peut-être que les hommes le connaissaient et ne se sont pas méfiés jusqu’au moment où il a été trop tard ?
La circonspection se lisait sur leur visage et chacun savait bien qu’ils conjecturaient en vain en l’absence d’éléments tangibles à se mettre sous la dent.
La nuit commençait à tomber, et les corps furent ramenés vers la troisième manta à la lueur de puissants projecteurs qui inondaient les lieux de leur lumière crue.
— Aucune trace de la princesse Sali, Sire, commenta le chef enquêteur alors qu’ils se dirigeaient vers les énormes animaux. Il est évident que c’était elle l’objectif de leur mission.
— Venus pour l’enlever ? Mais dans quel but et qui sont ces créatures ?
— Peut-être pour obtenir une rançon, Votre Majesté… c’est votre future épouse après tout… Quant à savoir qui ils sont, il va nous falloir attendre qu’ils se manifestent… et ils se manifesteront, vous pouvez en être certain, Sire…
— Est-ce un coup de la forteresse du Désert de Sang ? On dit qu’il y a une forte concentration de ces créatures là-bas et qu’un mystérieux magicien est à leur tête.
— Je ne sais pas, Sire, si tel est le cas, nous avons affaire à un fou, car enfin, il se doute bien que nous n’allons pas rester les bras croisés sans rien faire.
— Oui mais encore faudrait-il avoir des certitudes pour pouvoir agir. Il y a longtemps que j’aurais dû me rendre là-bas pour voir à qui nous avions affaire. Peut-être n’est-il pas trop tard ?
— Ça pourrait être dangereux, intervint Jarval, si cet homme est derrière ce qui vient de se passer… ce serait se jeter dans la gueule du loup.
— Mais enfin, que se passe-t-il ? explosa Calem. Cela fait des siècles sinon plus que nous sommes en paix et que l’harmonie règne sur le royaume !
— Il s’en faut des bandes de Kiathes qui mettent certaines contrées en coupe réglée, objecta le capitaine.
— Ils n’en ont plus pour longtemps, répliqua le roi. Ils doivent à mon père d’avoir pu se renforcer, mais à partir de maintenant, nous allons les traquer jusqu’à les exterminer ! S’il faut mener une guerre, je la mènerai, quoiqu’en pense les autres chefs d’états du Conseil planétaire ! Rentrons à présent, il y a des décisions à prendre et peut-être aurons-nous des nouvelles de ces mystérieux agresseurs une fois revenus à Édinu.