Et zou la 6ème partie avec le début de ce nouveau chapitre! Pas trop tard pour ne pas avoir le ratage d'Alpha sur la conscience!
Bon courage et m... comme on dit
Chapitre 4ème : Rififi sur Metellos
Plus tard la même année, Jace se rendit sur Metellos, la voisine de Coruscant, la Coruscant ratée comme l’appellent certains. Metellos s’était toujours développée dans l’ombre de sa voisine plus riche, plus heureuse et plus étincelante qu’elle, en espérant qu’un jour ses efforts lui permettraient d’atteindre la même renommée. Malheureusement, le manque de routes hyperspatiales, la proximité avec la Capitale Galactique et la surpopulation de la planète jouèrent clairement en sa défaveur. Lorsque la Route Commerciale Perlemienne et la Voie Corellienne devinrent des lieux de passages obligés pour tous les marchands et autres dignitaires, les habitants de Metellos devinrent exclus du nœud commercial de la Galaxie, leur planète ne se situant pas sur ces routes contrairement à Coruscant. Cet isolement eut pour conséquence la paupérisation de la population, beaucoup trop nombreuse comparée aux ressources produites et c’est principalement pour cette raison qu’Ena y amena son fils, pour lui faire réaliser qu’il était privilégié.
Au premier abord, Jace trouva cette planète très impressionnante car aussi urbanisée que Coruscant mais après quelques heures, il se rendit compte qu’elle ne possédait ni le luxe ni le raffinement culturel de cette dernière. Ici, fumées industrielles et surpopulation remplaçaient aisance et stylisme. Les habitants étaient bien conscients que leur planète était une perdante dans les Mondes du Noyau.
Face à ce monde sur-pollué, Jace se demanda quel intérêt sa mère avait à lui faire visiter cet endroit. Il se rappela simplement qu’elle était plus subtile qu’elle n’en avait l’air et la réponse lui vint rapidement à l’esprit. Une vision unilatérale de la Galaxie ne servait à rien, la culture n’était rien si elle n’englobait pas la totalité des choses. En l’amenant ici, sa mère voulait lui montrer que le savoir ne se trouvait pas uniquement dans les musées mais qu’il était partout et devait être couplé d’une certaine ouverture d’esprit pour mener à la sagesse. Se rendre compte que même dans le Noyau des peuples vivaient dans une pauvreté digne de la Bordure Extérieure était troublant mais enrichissant. Non pas que tous les habitants de la Bordure soient des mendiants, mais d’après ce qu’il avait appris, la vie y était beaucoup plus dure surtout après des siècles de guerre. Ses habitants menaient une existence rude loin du luxe et de la facilité du Noyau et Jace s’apercevait que même ici, tout près de Coruscant, il était possible de vivre dans des conditions difficiles, loin du strass et des paillettes.
Ena avait donc enfin compris qu’il ne servait à rien de lui cacher la laideur, la misère et la pauvreté présentes jusque dans le Noyau, surtout si Jace voulait devenir politicien. Il avait besoin de voir de ses propres yeux la réalité du quotidien des citoyens républicains au lieu de rester enfermé dans un cocon de richesse et d’harmonie comme il en avait été témoin sur sa planète, sur Coruscant ou encore Chandrila et Alderaan.
Effectivement le choix de sa mère était réussi, cette planète puait la misère ! Il se trouvait actuellement dans le quartier de Moridebo qu’il avait vu du ciel en atterrissant. De là-haut, ce quartier pauvre ressemblait à un patchwork de toits gris, noirs et verts-sales. Maintenant qu’il en arpentait les rues, le souvenir de la vue du ciel lui semblait une vision de paradis. Les individus qu’il voyait semblaient ne pas parler le Basic, lui préférant un dialecte qui lui était inconnu. Et il en croisait du monde ! Il lui semblait avoir vu plus de personnes en une heure que sur Anaxès en un mois ! Des individus louches, des artistes marginaux, des commerçants à la sauvette et de nombreux mendiants qui lui demandèrent l’aumône alors que suite aux conseils avisés d’Ena, il avait délaissé ses belles robes écarlates Anaxiennes pour des vêtements plus sobres afin de se fondre dans la masse. Les rues grouillaient également de pickpockets qui se servaient directement à la source au lieu de tendre vainement la main. N’ayant rien de valeur sur lui, il n’en avait que faire et marchait seul, horrifié et en même temps émerveillé de traverser tant de bouges ainsi que d’entrepôts et d’usines désaffectées. La Galaxie offrait une telle diversité ! Si près de Coruscant, être le témoin d’un tel échec social était saisissant, même si, d’après les rumeurs qui lui étaient parvenues jusqu’aux oreilles, les bas fonds de Coruscant n’étaient guères mieux lotis. Cette planète paraissait la preuve formelle de l’échec de la politique menée par la République. Même en son sein, même dans un des mondes de son Noyau géographique et historique, un monde ayant fortement contribué à la découverte de l’hyperpropulsion, on pouvait voir que la République ne rendait pas les habitants heureux. La plupart d’entre eux se fichaient même de savoir si les Sith avaient une chance de remporter le conflit en cours, certains n’étant même pas au courant de cette guerre millénaire, si peu de Metellosiens étant autorisés à quitter la planète.
Ce constat global lui fit définitivement comprendre que le Sénat n’avait finalement qu’un pouvoir symbolique. Il n’avait pas le pouvoir de faire changer les choses, aucune des mesures qu’il mettait en place n’étaient suffisantes pour tirer les autochtones de siècles de pauvreté. Et puis, avec la guerre en cours, ils pensaient sûrement avoir mieux à faire que se soucier du quotidien de quelques pouilleux. Quand bien même il pouvait le comprendre, le bien-être du plus grand nombre étant le plus important, qu’on laisse plus de huit cents milliards d’humains vivre comme des aliens le révulsait.
Satisfait d’avoir enfin un aperçu de ce que pouvait être le quotidien de la plupart des habitants de la Bordure Extérieure, Jace continua à déambuler dans les rues sales de Moridebo. Il se demanda comment les Sith auraient géré ce surplus de population et ce manque de ressources puis s’arrêta dans une boutique à l’air moins insalubre que les autres pour s’acheter quelque chose à manger. Il avait demandé à sa mère de ne pas l’accompagner dans sa promenade pour être seul avec ses pensées. Ainsi, il pouvait analyser à sa guise ce qu’il voyait sans être perturbé par une discussion futile. En outre, il pensait qu’il était moins risqué pour lui de se rendre dans ces quartiers seul qu’accompagné d’une femme. Il en avait croisé peu jusqu’à présent, d’humaines en tout cas. Elles devaient être cloitrées chez elles, se dit-il lorsqu’il acheta la spécialité locale, une combinaison de viande et de crème, assemblées pour ressembler à un fruit. Mastiquant la viande de mauvaise qualité en essayant d’oublier l’espace d’un déjeuner les bons repas que sa mère lui préparait, il sortit de la boutique et reprit son chemin sous un ciel gris et maussade.
Au loin, il apercevait le Stratabloc 7, une des dix-sept tours culminant à plus d’un kilomètre d’altitude, où sa mère et lui avaient élu résidence. Réservée à la petite noblesse de la ville et aux touristes, cette tour s’élevait au dessus de la masse fourmillante de pauvreté telle une montagne dressée pour narguer les nécessiteux. Ces édifices modernes contrastant avec la pauvreté du reste, Jace se dit que c’était comme si on avait pris un morceau de Coruscant et qu’on l’avait posé sur un monde de la Bordure. Cependant, comparé à un de ces mondes, même si la plupart des habitants avaient l’air hostile, Metellos était composée très majoritairement d’humains, ce qui avait le don de le soulager. Il était révulsé à l’idée de devoir se frayer un chemin au milieu d’une foule d’aliens gluants et repoussants.
Au fil de sa balade qui l’éloignait progressivement du centre ville, la foule se fit moins dense et il put presque marcher sans toucher les individus qu’il croisait. L’odeur devenait de plus en plus nauséabonde à mesure qu’il avançait. Au détour d’un immeuble, il arriva devant un tunnel qui s’enfonçait dans les entrailles de la ville vers Ciuray, une mer souterraine dont les eaux stagnantes et noires comme de l’encre servaient de dépotoir à la population locale, en particulier pour les corps des victimes de meurtres. Jace avait d’abord été effrayé de l’apprendre lorsqu’il l’avait lu dans son guide, ce qui n’avait pas empêché le « hasard » de guider ses pas dans cette direction et la curiosité l’avait emporté sur la peur lorsqu’il s’en était rendu compte. Se dirigeant vers l’entrée, il ne vit plus le ciel qui était caché par les constructions abandonnées alentour. La perte de luminosité l’intimida, néanmoins, une intuition le poussa à entrer tout de même. Il ne comprenait pas la nature exacte de son attirance pour cet endroit mais il sentait un murmure à peine audible dans son esprit, qui l’appelait à s’engouffrer dans ce passage. Après quelques minutes de marche dans ce boyau obscur, il déboucha dans une large grotte éclairée seulement par quelques néons miteux fixés aux parois, qui clignotaient dans un grésillement lugubre, menaçant incessamment de s’éteindre. Les stalactites qui constellaient le plafond étaient comme des dents pointues prêtes à se refermer sur lui. Loin du tumulte des rues agitées du quartier de Moridebo, il était soudain complètement seul. Il avait pour unique compagnon le bruit de l’eau suintant le long des murs, gouttant à intervalle régulier des stalactites. Après s’être accoutumé à ce léger bruissement oppressant, il perçut le son caractéristique de minuscules vaguelettes un peu plus loin. Se laissant guider par le clapotis amplifié par la résonnance, il arriva sur le tas d’immondices qui faisait office de plage. Il avait l’impression d’être dans une grotte sous marine comme celle qu’il avait vu dans « Mort sous les eaux Manaan » son Holo d’horreur favori. Il était dans une grotte plus tout à fait naturelle, un souterrain dont les parois étaient faites de permabéton et le plafond de stalactites. Partout, des containeurs d’ordures ménagères débordaient. Ecœuré par l’odeur pestilentielle qui se dégageait de la « plage », ou plus exactement du ramassis de détritus, il jeta le reste de son repas sur un dépôt de cendres fumantes avoisinant.
La noirceur était totale ; Jace sentait confusément que c’était plus qu’une simple pénombre : comme si un voile d’obscurité recouvrait tout. L’atmosphère était lourde et oppressante, lui donnant la chair de poule. Une incroyable puissance semblait reposer dans ces eaux. C'était à la fois attirant et effrayant. Soudain, un bruit de pas derrière lui le tira de sa torpeur. Il se retourna juste à temps pour prendre un coup en plein visage !
Ce formidable crochet lui fit voir autant d’étoiles qu’un voyage hyperspatial et lui rappela la souffrance qu’il avait endurée lors de son combat contre Bata. Tombant à la renverse, il dut attendre de heurter le sol ou plutôt les ordures, avant de réussir à dévisager son agresseur. Il s’agissait du commerçant qui lui avait vendu son repas. Interloqué, Jace s’apprêta à interroger l’individu sur son comportement inexplicable puis se ravisa.
Faisant mine d’être complètement sonné afin d’avoir le loisir de jauger son adversaire et de reprendre ses esprits, il se laissa rouler ventre contre terre en gémissant. D’un œil discret, il vit le commerçant le regarder avec un sourire de prédateur, certain qu’il lui avait déjà réglé son compte grâce à son magistral crochet du droit. Il ne dit rien mais une lueur mauvaise brillait dans son regard. Jace l’avait déjà vu dans les yeux de quelqu’un sans se souvenir de qui, ni ce qu’elle signifiait.
La douleur lui rappelait son impuissance passée. Il avait grandi. Aujourd’hui, si ce gros Hutt voulait sa peau, il allait devoir la payer chère, se dit-il. Grâce à une croissance rapide et au temps passé dans la salle de sport de son Ecole, Jace était bien bâti, doté d’une musculature bien proportionnée sans être exagérée. Les choses n’allaient pas être faciles pour autant. Son adversaire était très imposant et dans la force de l’âge. En outre, il semblait bien plus accoutumé aux combats de rues.
S’essuyant subrepticement du dos de sa manche à l’endroit où sa lèvre avait éclaté, il sentit le goût du sang se répandre dans sa bouche et fut submergé par l’envie d’en découdre. Il sentait son adrénaline monter, son pouls s’accélérer, sa colère s’accentuer, réveillant des souvenirs. La voix. La voix suave qui l’avait mené à la puissance, à la victoire. Il voulait tant la retrouver, depuis. C’était maintenant ou jamais. Comme une drogue à laquelle il avait gouté une fois et dont il désespérait de retrouver l’exquise sensation qu’elle lui avait apportée.
Devant une telle possibilité il sourit et se releva. Il lut de l’étonnement dans le haussement de sourcil de l’homme trapu qui lui faisait face. Il devait être rare que ses souffre-douleurs se relèvent après un tel crochet en guise de présentation ; et plus encore qu’elles le fassent avec le sourire. Grâce à la stupéfaction qu’il avait provoquée, Jace pouvait avoir l’avantage de la surprise, et il l’utilisa pleinement.
La bouche ouverte bêtement, son adversaire essayait toujours de comprendre comment sa proie avait pu se relever alors qu’elle gémissait complètement sonnée face contre terre quelques secondes plut tôt, lorsque sa soi-disant victime se jeta sur lui avec rage. Jace décocha quelques coups de poings bien placés avant que son adversaire contre-attaque. Il ne ressentait pas de peur aujourd’hui ; il avait grandi et se laissa griser par l’excitation du combat. Il se repaissait de la douleur qu’il infligeait à son adversaire et même de celle que ce dernier lui administrait en retour. Elle le faisait se sentir libre, plus fort, plus homme. Il ressentait pleinement la souffrance que ce combat engendrait dans son corps. Parfaitement concentré sur l’affrontement en cours, il la fit passer au second plan, s’en servit d’un moteur pour en infliger davantage.
Le commerçant avait perdu son air fanfaron. Il saignait à de nombreux endroits et affichait désormais une posture déterminée et concentrée. Réalisant qu’il avait sous-estimé sa cible, il bouillonnait de colère. Ce combat qui s’annonçait facile se déroulait plus difficilement que prévu et il avait déjà payé au prix fort son inattention qui lui avait couté un nez cassé. Il repartit à la charge et parvint à faire chuter Jace d’une balayette bien placée. Il se jeta au sol pour l’achever mais eut droit à un coup de pied dans l’entrejambe suite à un reflexe de son adversaire. Tombant au sol, les mains tenant ses parties génitales, il se tordit de douleur en geignant, ce qui permit à Jace de prendre le dessus. Agenouillé au-dessus du commerçant allongé sur le dos, il le frappa de toutes ses forces. Du sang plein les mains, il continuait à taper de plus en plus fort, de plus en plus vite lui éclatant les lèvres et les pommettes et lui fêlant les côtes. Il sentait la chaleur revenir en lui, le bouillonnement familier prendre vie dans ses entrailles. Il était à la limite de l’extase, se sentant tout près du but. Il allait revivre ce sentiment de toute puissance. Pourquoi cela ne venait-il pas ? Où était cette maudite voix ?
Le commerçant profita de cet instant de doute pour faire basculer Jace sur le côté et reprendre l'avantage. Dans une rage folle, il était défiguré et le sang qui coulait sur son visage gouttait sur celui de Jace situé juste en dessous du sien. Les yeux révulsés par une haine quasi démente il hurla :
« Petite bouse de bantha tu ne me laisseras pas passer à côté de ce millier de crédits qu’on m’a promis pour ta peau ! »
Jace comprit alors quelle était la lueur malsaine qui brillait dans les yeux de cet homme : l’appât du gain. Il ne se souvenait toujours pas chez qui il l’avait déjà vu en revanche. Ce devait surement être un souvenir lointain de son père, un grippe-sou comme tous les commerçants, un minable rongé par l’avarice. « Tu vas voir sale mynock je - vais – te – rendre – la - Monnaie – de – ton crédit. » cria l’homme accompagnant chaque mot d’un puissant crochet. Il ne voulait plus seulement tuer sa cible mais la faire souffrir pour l’avoir défiguré. Ainsi, il ne visa pas la tempe mais cogna pour faire mal sans tuer, afin de prolonger l’agonie de sa victime le plus longtemps possible.
Jace ne pouvait pas se dégager, l’homme était trop lourd. Alors qu’il s’était laissé guider par son adrénaline et par le goût du sang, il était désormais déconcentré par la révélation de son assaillant. Sous le coup de la colère, celui-ci lui avait finalement révélé pourquoi il l’avait agressé sans raison apparente. Même s’il avait décidé de ne pas s’en inquiéter dans un premier temps afin de se concentrer pleinement sur l’instant présent, Jace était à présent troublé par cette révélation déconcertante. Quelqu’un voulait sa mort ? Qui ? Pourquoi ? Il n’avait jamais rien fait de mal et n’était pas encore quelqu’un d’important. Cet effarement rendait impossible toute fuite et c’était à son tour de subir une pluie de coups. Cette pourriture le tabassait juste pour gagner quelques crédits ! Jace était révolté. Facile de comprendre pourquoi son père l’avait abandonné à présent, n’importe quelle promesse de gain facile avait pu le détourner de son foyer ! Il pouvait s’estimer heureux qu’Irce Piejs ne les ait pas tout bonnement vendus au plus offrant, sa mère et lui. Ces être cupides et guidés uniquement par l’argent ne méritaient pas de vivre ; ils ne faisaient que détruire la vie des gens qui les entouraient pour quelques crédits vite dépensés à la cantina du coin. Cette engeance n’avait aucune culture, aucune aspiration noble, seulement l’appât du gain, de la convoitise et de la malhonnêteté.
La colère que Jace expérimentait souvent la nuit contre son père revint. A l’exception près qu’à la lumière de cette confirmation sur le genre d’homme que ce dernier avait été, elle était plus violente encore qu’à l’accoutumée. La douleur accompagnait cette colère : encore une fois, il avait échoué. Il s’était laissé griser par une victoire à portée de main et était désormais voué à une mort certaine A cette idée, la peur s’empara enfin de lui. Mourir !? Non, pas maintenant. Pas si tôt. J’ai encore tant à accomplir, se dit-il. Il était totalement impuissant et une fois encore sentait sa virilité naissante plus que malmenée. C’était la faute de son père ! Oui et celle de sa mère ! Il n’avait pas été là pour l’éduquer comme un homme pendant qu’elle l’avait couvé, empêché de s’affirmer et aujourd’hui encore il mordait la poussière.
Non… Aujourd’hui il triompherait, dans la douleur, mais il triompherait. Oui, il sentait enfin tout ce qu’il avait ressenti la dernière fois. Cette fois-ci, il ne se laissa pas contrôler par la tornade qui l’entourait. Il plongea sans hésiter en son sein et puisa avidement dans toute sa puissance. Alors que sa colère explosait en un mur de flamme il éprouva un fort soulagement, une intense satisfaction de retrouver cette toute puissance. C’est alors qu’il sentit les flammes perdre de leur intensité, il les sentait s’éloigner et s’éteindre comme un feu de brindille ! Nonnnnnnnnnnnn ! Impossible ! Pas maintenant ! Sa colère couplée à son désespoir ravivèrent la chaleur qui se transforma en un torrent de lave déferlant tout autour de lui. Il comprit pour la première fois qu’il devait entretenir sa colère et sa haine, maîtriser sa peur pour avoir accès à ce phénomène, ce pouvoir étrange qui reposait au plus profond de lui.
Redoublant de colère, puisant dans toute la haine qu’il avait accumulée au fil des ans, il attisa le brasier de son cœur et revint petit à petit au monde réel. Il se concentra pour faire disparaitre le flou qu’il avait devant les yeux, l’image de lui-même à l’épicentre de geysers de lave qu’il commandait et vit le commerçant qui continuait à le rouer de coups. Comme détaché, il ne sentait plus la souffrance. Il entendit la voix lui susurrer de prendre une arme pour faire davantage souffrir sa future victime. Elle voulait se repaitre de la douleur de l’homme, elle voulait sa mort, Jace voulait sa mort. La voix était enfin de retour, il maîtrisait de nouveau les choses.
Comme au ralenti, il lui semblait que les coups qui lui étaient portés mettaient de longues secondes avant de l’atteindre. Il entreprit de parer l’attaque de son agresseur d’une main et réalisa qu’une barre de métal était arrivée comme par magie dans son autre main. C’était comme si elle avait volé dans le creux de sa paume lorsqu’il avait ressenti le besoin de trouver une arme. Sans y penser à deux fois, il utilisa sa main libre pour repousser son agresseur de la même façon qu’il l’avait fait pour les amis de Bata. Le résultat fut identique, il fut soudain libéré du poids qui le bloquait, son assaillant partit valdinguer à cinq mètres de là. Jace en profita pour se relever. Il voulait en finir rapidement.
Comme quelques années auparavant, son adversaire était désormais effrayé. Il y avait de quoi ; la vision de Jace se relevant le regard enflammé et une barre de métal à la main n’avait rien de rassurante. La voix était à ses côtés et avec elle, la puissance qu’elle lui procurait. Il était prêt à tout pour qu’elle ne le quitte pas. Il chercha donc à la satisfaire et commença à marcher lentement vers le commerçant en levant son arme improvisée pendant que ce dernier se relevait péniblement. En quelques instants, Jace fut sur lui et lui assena un violent coup dans les côtes dont certaines craquèrent sous la violence de l’impact. L’homme fut renvoyé à terre et roula jusque dans les sombres vaguelettes de la mer de Ciuray. Reprenant à peine ses esprits il vit Jace et son sourire carnassier avancer vers lui d’un pas sûr et se préparer à lui assener un coup en plein visage. Il n’eut que le temps de reculer de quelques petits mètres en rampant et leva les mains pour se protéger.
Son adversaire gisait allongé dans l’eau, presque entièrement submergé. Dommage, son geste dérisoire avait empêché le coup d’être fatal. Jace jeta son arme, agrippa le visage de celui qui avait osé lui tenir tête et le maintint fermement sous l’eau. Le Metellosien se débâtit, en vain. L’emprise de Jace était trop forte pour qu’il puisse s’en défaire. La voix conseilla à Jace de jouer avec lui. Il le laissa donc sortir la tête à l’air libre pendant de brèves secondes où il eut juste le temps de supplier. « Non ! Pitié, stop, laissez-moi non ! » Avant d’être replongé dans la noirceur de l’eau. Il se convulsait, essayant de s’en sortir, se battait avec l’énergie du désespoir pendant que Jace et la voix se délectaient de son impuissance. Ses mouvements se firent progressivement moins forts ; il commençait à perdre connaissance et les bulles qui sortaient de sa bouche se firent plus rares. Réalisant qu’il était en train de tuer quelqu’un, Jace revint à la réalité et commença à lâcher prise, ne pouvant se résoudre à commettre pareille atrocité. Ses yeux imbibés de sang reprirent leur bel éclat bleu l’espace d’un instant et son visage dur et sans merci, sa jeune innocence. Il sentit alors tout le mépris de la voix pour sa faiblesse et perçut qu’elle commençait à s’éloigner de lui. Non, pas déjà ! Il ne voulait pas perdre cette douce amante qu’il venait à peine de retrouver, ne voulait pas perdre ce feu sacré qui brûlait en lui et réchauffait son cœur. Un instant, un choix, un destin. Jace ne le réalisait pas encore mais le choix qu’il fit le dirigerait vers les hautes sphères, vers le pouvoir. Il préféra la puissance à la pitié, le pouvoir à la candeur, la grandeur à la faiblesse.
Instantanément son regard reprit son éclat brillant, reflétant la lave déferlante qui l’animait. Ses traits se durcirent et son agresseur comprit en le voyant que ce serait sa dernière vision en ce monde miteux de Metellos : la mort personnifiée. L’homme eut à peine le temps de crier une dernière fois son désespoir avant de replonger malgré lui dans les ténèbres de Ciuray. Jace n’eut pas besoin de ce cri pour ressentir le désespoir et la peur de sa proie ; ils étaient tellement palpables qu’il pouvait presque les toucher. La voix était comblée d’aise, tout comme lui. Il venait de briser les chaines de l’innocence pour une plus grande compréhension vers la puissance, lui souffla-t-elle. L’homme continua à se débattre pour remonter à la surface et remplir ses poumons brulants, de l’air qui lui manquait tant. C’était peine perdue face à l’implacabilité de son assassin. Alors que son dernier souffle s’échappait, son corps devint tout flasque mais Jace ne lâcha pas prise. Il resta ainsi de longues minutes avant de réaliser que c’était fini. La montée d’adrénaline provoquée par son acte commença à se dissiper et il sentit sa haine le quitter lorsqu’il réalisa qu’il venait de commettre un meurtre de sang froid. Il était seul. Un meurtrier. La voix l’avait quitté non sans une dernière caresse ou plutôt une étreinte glacée autour de son cœur. Le feu s’était éteint. Tout n’était plus que glace désormais.
Il sentit ses jambes le trahir et tomba à genoux dans l’eau qui, impassiblement, continuait d’aller et venir, se cassant faiblement contre la plage d’ordure. Autrefois il avait été submergé par la douleur au point d’en perdre connaissance, il ne la ressentait pas aujourd’hui ; pas physiquement en tout cas. La douleur intérieure en revanche, celle glacée qui menaçait de faire exploser son cœur, lui semblait bien pire et le fit fondre en larme. Il ne pouvait esquisser un mouvement. Agenouillé dans l’eau, il resta là à pleurer pendant que le corps de sa victime allait et venait contre lui au gré du ressac, lui rappelant sans cesse l’acte qu’il venait d’accomplir ; c’en était horripilant ! Même à l’état de cadavre, ce fils de Hutt venait l’importuner. L’importuner… Oui, après tout, c’était lui qui l’avait agressé, lui qui avait cherché à le tuer, lui qui l’avait suivi jusqu’ici pour quelques crédits ! Il n’avait que ce qu’il méritait ! Sa colère refit surface contre ce commerçant qui, comme Irce Piejs de par son abandon, venait de lui voler une partie de son innocence. En proie à l’abandon le plus total, Jace sentit la tête sans vie le heurter une nouvelle fois. De rage, il se releva pour envoyer ce maudit corps loin, très loin, là où il ne pourrait plus le voir, l’effacer de son souvenir. Il rêvait souvent de Bata et ne voulait pas que les cauchemars s’intensifient avec le souvenir de ce visage sans vie, ce regard vide et accusateur qui le fixait. Ces maudits commerçants s’étaient décidemment ligués pour gâcher sa vie ! Peut-être était ce même son père qui avait promis une récompense à cette homme afin qu’il le débarrasse d’un souvenir embarrassant. Non, impossible, cela aurait trop couté à ce radin de Jawa. Sa haine pour son père et le commerçant sans nom s’entremêlèrent et lorsqu’il prit entre ses mains la tête de ce dernier, il vit le visage fin mais fatigué de son père remplacer les traits rugueux de l’homme qu’il venait de noyer.
L’homme qui l’avait conçu le regardait désormais avec mépris, plus vivant que nature. Sur son visage s’affichait du dédain et un air goguenard plein de défi. Pris d’une colère bordant sur la folie, Jace s’empara fermement de « son père » et le jeta sur la rive. Il reprit la barre de métal en main et se mit à frapper de toutes ses forces sur ce visage honni. Il allait effacer ce sourire prétentieux, détruire cette sale trogne à tout jamais.
Dès le premier coup le visage se déforma littéralement et une gerbe de sang gicla sur lui, ne faisant qu’exciter davantage sa frénésie destructrice. Lorsqu’il releva la barre pour frapper à nouveau, il vit la figure de son père intacte, qui souriait narquoisement comme s’il n’avait rien ressenti. Frappant encore plus fort, Jace entendit nettement des os craquer. Pourtant, encore une fois, il vit ce visage sans aucun dégât apparent qui se riait de son impuissance à l’atteindre. Ne faisant qu’un avec sa folie meurtrière Jace assena un tel coup qu’il fut aspergé par des éclats de cervelle. C’était un spectacle effroyable pour n’importe qui aurait été témoin de la scène et malheureusement pour Jace, il y en eut.
L’atmosphère oppressante qu’il avait ressentie ne s’était pas dissipée à la mort de son agresseur mais se faisait plus diffuse à présent, comme si l’obscurité avait apprécié le spectacle de violence pure qui venait de lui être offert et pouvait désormais s’en aller. Le sombre voile qui pesait sur cet endroit se levant progressivement, Jace aperçut le résultat de sa rage folle. Il ne restait plus grand-chose de ce qui avait été un visage humain quelques minutes plus tôt. A peine reconnaissable parmi les pans de peau décollés et les os broyés, Jace parvint toutefois à difficilement identifier la tête bourrue du commerçant qui l’avait agressé… Aucun doute possible, ce n’était pas celle de son père. Que lui était-il arrivé ?! Non seulement il avait tué cet homme, mais en plus il avait poussé la barbarie jusqu’à mutiler son corps sans vie. De quelle illusion avait-il été victime ? Non content d’être un meurtrier était-il en train de devenir fou !?
Toutes ces pensées traversèrent son esprit jusqu’à ce qu’il réalise qu’il n’était pas seul. Trois mendiants, des charognards qui cherchaient dans les ordures de quoi se sustenter, avaient été attirés par le bruit d’enfer du craquement d’os accompagné des cris à glacer le sang qu’avait poussés Jace. Ces sons effrayants qui avaient résonné dans le silence lugubre n’avaient apparemment pas rebuté ces exclus parmi les exclus, ces pauvres parmi les pauvres de Metellos : aucun d’entre eux n’était humain.
Il reconnut les espèces auxquelles ils appartenaient grâce à ce qu’il avait appris en cours : un Rodien, un Jawa et un Aqualish qui avaient l’air beaucoup plus menaçants que tout ce à quoi il avait pu faire face jusqu’à présent. Ils apparaissaient bien mieux armés que lui et la barre de métal qu’il tenait encore de façon lâche dans la main. Le Rodien tenait une matraque étourdissante et la tapait de façon inquiétante dans une de ses paumes. L’énorme et repoussant Aqualish dont un filet de bave coulait entre ses deux énormes dents, portait quant à lui un fouet neuronique à sa ceinture. Enfin, la petite vermine Jawa à l’apparence innocente était loin de l’être si on s’en référait au pistolet blaster d’un autre âge qui trônait dans ses mains minuscules.
Face à un tel arsenal, Jace savait très bien qu’il n’avait absolument aucune chance de s’en tirer et lâcha son arme de fortune. Comprenant que toute fuite était impossible, il n’essaya même pas de s’éclipser et resta immobile. Il vit les trois aliens s’entretenir dans un dialecte qu’il ne comprit pas et se diriger vers lui en bloquant clairement le passage. Jace était fatigué, il avait perdu la force et la volonté de se battre. Il peinait à évaluer la dangerosité de cette menace tant il était bouleversé par ce qui venait de se passer. Son monde était sens dessus dessous, il ne savait plus quoi penser, à quoi se raccrocher. Avait-il eu raison de se défendre ? N’était-il qu’un monstre sanguinaire ? Peut-être méritait-il de mourir après ce qu’il avait fait ? se dit-il alors que le Rodien lui adressa la parole dans un Basic approximatif :
« Toi aimer jouer humain ? Nous jouer avec toi. Nous aussi aimer jouer. Puis voler toi. Mais toi pas inquiet toi sera zigouillé à ce moment-là ! Ahahahahaaaaaaaah ! » Ses compagnons se joignirent à lui dans une cacophonie de rires cruels pendant que Jace, bien qu’abattu et totalement amorphe, ressentit clairement que l’atmosphère oppressante qui s’était quelque peu dissipée était de retour, plus lourde que jamais. Il sentait des ondes sombres, un pouvoir maléfique reposer dans la mer de Ciuray et il détourna son regard du trio pour regarder les eaux vers lesquelles il était irrésistiblement attiré. Soudain, elles se mirent à s’agiter, bouillonner puis tourbillonner sur elles-mêmes jusqu’à former un cyclone. Ebahis devant un tel phénomène les quatre spectateurs ne bougèrent pas d’un pouce, complètement bouches-bées devant ce spectacle qui éveillait chez eux une crainte révérencielle. Alors qu’ils restaient là hébétés devant cette monstruosité liquide qui grossissait de seconde en seconde, la tornade se mit en mouvement.
Jace, qui se voyait déjà mort depuis l’apparition des aliens, ne ressentit aucune peur. Emerveillé par le tourbillon liquide qui lui rappelait celui de flamme qui s’était formé en lui par deux fois au cours de sa vie, il admira cette démonstration de puissance de la nature. Bien qu’il fût étonnant qu’un tel phénomène ait lieu dans une mer souterraine, le jeune homme ne s’en soucia guère et resta les yeux rivés sur cette montagne liquide de plus de dix mètres. Miraculeusement, le cyclone passa suffisamment loin de lui pour qu’il ne soit pas aspiré dans son sillage. En revanche, ce ne fut pas le cas du trio de délinquants qui fut happé dans la tourmente et pris en plein cœur du liquide tourbillonnant. Ils étaient tellement terrorisés qu’on pouvait entendre leurs cris de désespoir malgré le vacarme assourdissant de ce tonnerre d’eau. Chose incroyable, la déferlante liquide fit alors demi tour et, toujours sans s’approcher de Jace, revint à sa place naturelle, engloutissant à jamais ses trois victimes. En quelques instants, tout était fini ; l’eau était redevenue calme et les corps qu’elle avait engloutis avec elle ne remontèrent pas, emportés dans les profondeurs.
Next Week : Soutien inattendu