Bonsoir, comment allez-vous ?
Alors, êtes-vous prêts pour ce gros chapitre sur Alderaan
? Allez, c'est parti
! Les kleenex sont à votre disposition...
Alderaan, capital Aldera, Parc de la Tranquillité Opération RestaurationIl y avait foule ce soir au Parc de la Tranquillité. Cmethai Organa accompagné de son mari Deren, arpentait l’allée principale jusqu’à se retrouver à l’ombre d’un saule, endormi au bord d’un petit ruisseau paisible.
Devant eux, s’étalait un orchestre bith, des aliens recrutés par la Maison Rist qui avait préparé soigneusement cette Fête des Étoiles. Ils étaient installés sur une barge anti-grav, s’occupant de nettoyer leurs instruments de musique. Des centaines de personnes, majoritairement humains, affiliés aux Maisons Vassales des Rist et des Organa, déambulaient autour d’eux en tenue élégante de soirée, des coupes d’apéritif et des mets à la main.
Insouciants des tensions qui agitaient la République, ils se laissaient griser par les liqueurs et par la douceur du vent maternel qui berçaient la faune et la flore autour d’eux. Le Parc de la Tranquillité était une œuvre d’art dont chaque alderaanien pouvait s’enorgueillir. Crée des siècles après le début de la colonisation humaine qui avait précédé la disparition des Killiks, il avait été constitué en losange s’étendant sur plusieurs kilomètres carrés, au cœur de leur capitale.
À chaque entrée, les visiteurs étaient accueillis par les gardes Rist devant une fontaine pour leur souhaiter un bienvenue enchanteur. Ils pouvaient ensuite rejoindre le centre du parc, par la grande allée, là où se trouvait l’orchestre ou bien choisir de déambuler entre les haies, pour flâner et provoquer des rencontres inoubliables, à l’abri des regards indiscrets.
C’était d’ailleurs ainsi que Deren et Cmethai avaient avoué leurs sentiments réciproques et qu’ils avaient fait le vœu de se marier.
Elle y repensa avec nostalgie, en serrant la main de son époux.
- Ça te rappelle des souvenirs ? Lui fit-elle doucement.
Elle l’entendit ricaner.
- Je n’oublierai jamais l’un des plus beaux jours de ma vie, avoua-t-il en croisant son regard malicieux.
- Quels étaient les autres ?
- Tous ceux que j’ai passés avec toi depuis notre première rencontre.
Elle l’embrassa généreusement sur les lèvres, pour le récompenser de ce romantisme spontané. Ils furent rejoints par leurs chérubins, Colin et Trissa, qui les narguèrent.
- Beurk ! Fit la fillette.
- Pourquoi vous faites ça devant tout le monde ? Glapit son frère.
Leur père les gronda.
- Filez les vauriens, papa et maman ont besoin de discuter… en privé.
Ils ne se firent pas prier deux fois et coururent éperdument, avec la légèreté enfantine qui les baignait encore dans une innocence absolue.
Leurs parents s’abandonnèrent à une nouvelle étreinte avant que Cmethai n’interrompit la chaleureuse effusion.
- Les Metasi sont arrivés, annonça-t-elle.
À regret, il s’écarta de sa moitié pour accueillir le clan Mestasi au complet, mené par leur matriarche, Linda Metasi. La corpulente alderaanienne les salua chaleureusement, tendant la main vers Deren qui la lui serra avec une révérence.
- Bonsoir, Duchesse, lui souhaita le couple.
- Deren et Cmethai, vous formez un couple si charmant. Rassurez-moi, vous n’êtes pas venu seuls ? S’enquit-elle avec vivacité.
- Les petits forbans nous accompagnent, fit Cmethai en désignant Colin et Trissa qui subtilisaient des mets sur la grande table de banquet, non loin d’eux. Ainsi que oncle Muren.
Les yeux de la Duchesse envoyaient des éclats de contentement.
- Ah, cette canaille est ici ! Je regrette le bon vieux temps où je faisais partie des conquêtes qu’il culbutait dans les haies ! Si vous voyez ce que je veux dire.
Cmethai se retint de rire tandis que Deren s’éclaircit la gorge.
- Oui, nous saisissons tout à fait l’image.
- Je parie qu’il est en train de conter fleurette à une femme plus jeune que moi. Si vous voulez bien m’excuser… au fait, il faudra parler affaires après cela.
Deren et sa femme échangèrent un regard de connivence. Ils n’aimaient guère les surprises, même de la part de vieux alliés fidèles.
- Nous pouvons commencer à aborder ce sujet. Succinctement, bien sûr, crut-il bon d’ajouter.
- Comment trouvez-vous ma nièce ? Demanda la Duchesse.
Elle désignait de sa main bouffie, une petite fille rousse âgée de moins de dix ans, qui se tenait à l’écart et semblait s’ennuyer.
- Mignonne, commenta Cmethai.
- N’est-ce pas ? Roucoula la Duchesse. C’est dommage qu’elle soit un peu solitaire. La compagnie d’un garçon de son âge, tendre et attentionné lui ferait le plus grand bien, vous ne croyez pas ?
Cmethai ne fut pas dupe des véritables intentions de la matriarche.
- Sommes-nous en train de parler de mariage, Duchesse ?
Linda, un instant déconcertée, parut de nouveau enjouée.
- Ah, très chère, vous êtes d’une perspicacité redoutable ! Vous m’avez percée à jour ! Mais peut-être que ce n’est pas le bon moment…
- Au contraire, fit Deren.
- Nous n’avons jamais prétendu que nous étions opposés à l’idée d’un mariage entre nos héritiers, appuya gravement sa compagne. Et nous sommes disposés à prouver notre bonne volonté en demandant à notre fils Colin de lui tenir compagnie, pour ne pas la laisser seule. Je suis certaine qu’elle appréciera d’avoir Trissa comme amie, suggéra son épouse.
- Comment s’appelle votre nièce ?
- Essola, répondit la Duchesse qui semblait soulagée. Alors c’est donc entendu ? Je ne veux surtout pas vous imposer quoique ce soit, je ne veux pas paraître indélicate.
- Rassurez-vous, Duchesse. Nous sommes ouverts à la perspective de renforcer les liens entre nos deux familles qui sont amies depuis si longtemps. Les Metasi pourront compter sur les Organa, asséna Deren.
- Et nous vous soutiendrons contre ces maudits Thul et ces damnés Ulgo, répliqua la Duchesse. Bien, je vous laisse. Je vais saluer votre chenapan d’oncle. Comme j’ai envie de m’amuser !
Elle les quitta pour se fondre dans la foule et saluer les autres invités tandis que sur un ordre de ses parents, Colin Organa invita Essola Metasi à le rejoindre avec sa sœur Trissa. Leurs parents furent ravis de constater que de premiers interactions solides semblaient naître.
- Je n’ai jamais aimé l’idée de ces mariages arrangés.
- C’est de la politique chérie, fit Deren en la prenant par la taille.
- Je sais, mais ça ne veut pas dire que cela doit rester la norme en permanence. Après tout, nous nous sommes mariés parce que nous le voulions et non parce qu’on nous l’a imposé.
- C’est vrai. Nous avons failli nous brouiller avec les Panteer.
Cmethai se rappela que lorsqu’elle avait rencontré son mari, celui-ci lui avait révélé être promis à la fille aînée du patriarche des Panteer. Leurs noces avaient provoqué un scandale que Tali parvint à calmer en les indemnisant.
Les années avaient passé sans que ces blessures aient vraiment cicatrisé.
- Et si on se rapprochait de l’orchestre ? Proposa Deren.
Elle acquiesça, lui prenant la main. Un homme aristocrate qu’ils avaient déjà croisé, se mit sur leur chemin avec un léger sourire malicieux.
Le Baron Rufus Rist.
- Je suis le premier heureux que vous soyez venu, Deren, fit-il en lui accordant une vigoureuse accolade. Et voici cette charmante Cmethai ! Vous êtes absolument ravissante, au point que certains Panteer en sont encore jaloux.
Elle sourit, bien qu’elle fut offensée par l’allusion au vieux scandale de son passé. S’agissait-il d’une maladresse ou d’un geste calculé ? Avec les Rist, rien n’était certain. Elle opta évidemment pour sauver les apparences.
- Merci de nous inviter à cette fête, je ne l’aurais manqué pour rien au monde, s’écria-t-elle pour faire croire à un enthousiasme qu’elle n’éprouvait pas du tout. Ce geste de mécène envers cet orchestre est tout à votre honneur et je suis déçue que nous n’y ayons pas pensé nous-mêmes.
Il s’inclina de bonne grâce.
- Quel tact et quelle diplomatie, Cmethai. Croyez bien que que ce sont des qualités que je trouve tout à fait honorables.
- C’est bien pour ça que je l’ai épousé, appuya Deren.
- Mais pas que pour ça, répliqua Rufus avec un sous-entendu subtil.
- Oh, Baron, protesta-t-elle. Vous allez me faire rougir.
Ils rirent avec sincérité avant que Rufus Rist ne recouvrit son sérieux.
- Je viens de saluer la Duchesse Metasi et je la soupçonne fort de vouloir chercher votre oncle Muren avec un empressement non négligeable.
- Et nous avons deviné pourquoi, glissa Deren.
Le Baron approuva d’une inclinaison du menton.
- Bien malgré moi et malgré la distance, j’ai saisi quelques brides de votre conversation avec la Duchesse, concernant un renforcement de liens entre vos deux Maisons.
- Et je ne pense pas me tromper en déduisant que vous avez eu la même idée, s’avança Cmethai.
Rufus soutint son regard avec décontraction.
- Je souhaite tout le bonheur possible entre Colin Organa et la Metasi qui lui a été promise par la Duchesse et j’espère qu’il en sera de même entre Trissa Organa et l’un de mes fils cadets que j’ai prochainement l’intention de vous présenter.
- C’est une proposition qui mérite réflexion, tempéra Deren.
- Certes, mon ami, en temps normal. Mais nous vivons, comme vous vous en doutez, une période délicate et incertaine, et il est de mon devoir de préserver les intérêts de mon illustre famille. C’est pourquoi vous ne devez en aucun cas tarder à vous décider, car les Thul et les Ulgo m’ont soumis des propositions très tentantes à ce sujet. Oh, d’ailleurs, en parlant d’eux… les voilà !
Les époux Organa se tournèrent dans la direction indiquée par leur interlocuteur. Escortés par des gardes Rist, les représentants des rivaux farouches et inflexibles des Organa, se massaient vers la foule.
Le Vicomte Thul et le Marquis Ulgo adressaient des regards haineux à Deren et à sa femme qui remarquaient l’absence de leurs gardes.
Le Baron Rist vint les accueillir à bras ouverts comme il l’avait fait peu de temps avec les Organa et les Metasi. Décidément, Rufus se révélait être un hôte appréciable en cette soirée paisible, bercée par la mélodieuse musique des artistes bith.
- Au fait, les Panteer et les Teral manquent à l’appel comme plusieurs de nos vassaux, d’ailleurs.
Deren, averti par son épouse, scruta plus attentivement cette ruche de figures hypocrites emplis de suffisance, convaincus de leur supériorité naturelle sur les ruffians de leur peuple, de par leur descendance noble.
- C’est plutôt incongru, reconnut-il.
- Tu devrais appeler Ilfor.
Il saisit son comlink et encoda une fréquence privée.
- Ilfor, vous me recevez ?
Il répéta l’appel une bonne vingtaine de fois avant de laisser tomber.
- Il ne répond pas, fit-il les dents serrées.
- C’est plutôt étrange, il est toujours disponible. Il est peut-être souffrant.
- Peut-être, approuva-t-il. Pour autant, je suis étonné qu’aucun autre Teral ne nous en ait prévenus. J’irai voir Ilfor après la fête.
- Demain, aux premières lueurs de l’aube. C’est peut-être une fête, mais les Thul et les Ulgo doivent nous guetter. Nous ne devons pas leur laisser croire qu’ils pourraient profiter de notre vulnérabilité, ne serait-ce qu’un instant.
Elle le prit par le coude pour l’entraîner davantage vers l’orchestre, toujours affairé. Plusieurs convives avaient improvisé une piste de danse alors que les bith entonnaient à l’aide de leurs instruments un rythme endiablé.
Deren et Cmethai se laissèrent eux aussi prendre à ce jeu et ils s’enlacèrent pour entamer quelques pas chassés. Il se laissa mener pendant quelques instants avant de prendre l’initiative. Il tournaient l’un autour de l’autre, sans se quitter des yeux, oubliant tout ce qui les entourait. Il n’y avait plus qu’eux deux.
Au bout de quelques minutes, cette musique prit fin sous une pluie d’applaudissements réjouis tandis que tous les danseurs firent une pause pour se désaltérer. Les époux Organa s’étreignirent plus étroitement.
- Ça me rappelle le bon vieux temps, souffla Cmethai.
- Il faudrait que l’on refasse ça plus souvent.
- Excellente idée. Pourquoi pas tout à l’heure, quand les enfant seront couchés ? Ajouta-t-elle avec un clin d’œil coquin.
Il ria, ayant compris le sens de cette proposition.
- Comme tu veux, ma chérie.
Ils se retournèrent pour réaliser qu’ils étaient au cœur de l’attention des autres danseurs. Parmi eux, Rufus Rist qui frappait ses lourdes mains, paume contre paume.
- Bravo ! Bravo ! Leur criait-il bruyamment.
Puis le Baron s’approcha d’eux.
- Votre réputation de danseur n’est pas usurpée, Deren. Et nous avons tous constaté que Cmethai a hérité de vos dons.
- Il s’est montré un professeur dévoué, plaida-t-elle.
- Heureusement que tu étais une élève assidue.
Rufus s’approcha pour murmurer.
- Avez-vous réfléchi à ma proposition ?
- Oui, répondit Cmethai sans hésiter. Nous acceptons mais à une condition.
- Je vous écoute.
- Nous voulons inviter votre fils cadet chez nous au Palais, avec tous les honneurs dus à son rang, cela va de soi.
- Il pourra ainsi approcher notre fille Trissa et nous pourrons juger de ses bonnes dispositions envers elle, martela Deren.
Satisfait, le Baron leur accorda une révérence.
- Voilà une affaire conclue. Les Thul et les Ulgo seront navrés d’apprendre que vous leur avez coupé l’herbe sous le pied.
- Vous nous en voyez fort attristés, répondit Deren avec sarcasme.
- Je vous laisse profiter de la soirée. Je suis certain que le prochain morceau sera digne de votre intérêt.
Il avait ponctué cela d’un rictus énigmatique avant de se fondre dans la foule. Les époux le virent disparaître avant de faire part de leur perplexité.
- Je me demande ce qu’il voulait insinuer, concéda Cmethai.
- Moi aussi.
Peu après, les bith entamèrent une nouvelle partition. Et dans le recueillement de la nuit d’Aldera, des sons s’élevèrent au-dessus d’eux tous, évoquant des sentiments de deuil et de nostalgie d’un âge d’or révolu. Tout cela inspira aux amateurs de musique, une profonde tristesse mélancolique qui leur brisait le cœur et les plus sensibles d’entre eux versèrent même quelques larmes, épris d’une émotion subite.
Ce morceau avait plongé la foule dans un silence respectueux et les danseurs ne s’agitaient plus dans une frénésie endiablée mais se laissèrent glisser dans une apathie contemplative, se contentant de s’enlacer avec pudeur.
Deren et Cmethai avaient reconnu cet air.
- La Complainte des Killiks, murmura-t-il.
- En voilà une surprise. Je me demande si ça fait partie de leur répertoire originel ou bien s’il s’agit d’une initiative du Baron.
- Je pencherais pour la deuxième hypothèse. Et je me pose la question de savoir à quel jeu le Baron Rist se livre.
- C’est bien interprété, je trouve. Mais c’est tout de même déprimant, ajouta son épouse.
- Allons voir ce que nous propose le buffet.
Ils s’éloignèrent de l’orchestre pour se diriger vers la grande table où les attendaient divers mets et plats de choix préparés par les meilleurs pâtissiers d’Alderaan. Cmethai porta sa préférence sur un nougat couronné de crème fraîche tandis que Deren mit la main sur des amandes confites.
- Alors ton avis ? S’enquit sa femme.
- Je ne sais pas trop quoi penser.
La Complainte des Killiks continuait de résonner par intermittence jusqu’à leurs oreilles. La foule émergea de sa torpeur pour se lancer à nouveau dans les conversations mondaines.
- Ma mère n’a jamais cessé de me mettre en garde contre les Rist juste avant son départ pour Coruscant. Toujours est-il que le Baron s’est montré irréprochable jusque-là.
- Sans doute pour mieux endormir notre méfiance, souligna-t-elle.
Il acquiesça tout en acceptant la coupe de champagne local proposée par un droïde serveur. L’automate laissa échapper une voix nasillarde :
- Nous espérons que vous passez une agréable soirée, noble monsieur et gente dame. Mon maître et propriétaire, le Baron Rist, tient à ce que tous les invités voient leur désir satisfait. N’hésitez pas à me solliciter si besoin est.
- Nous y penserons, merci, le congédia Cmethai d’un geste sec.
Le domestique alla offrir ses services ailleurs. L’attention de l’épouse Organa fut attirée bientôt par la présence de gardes Rist qui fendirent la foule pour quadriller plus étroitement le centre du Parc de la Tranquillité.
Quelques uns de leurs officiers allèrent s’enquérir d’ordres auprès du Baron lui-même. Elle l’observait, tentant d’interpréter ses expressions faciales, en vain. Les officiers s’écartèrent ensuite pour transmettre les instructions à leurs hommes. Intriguée par ce manège et mue par une subite intuition, elle tourna la tête pour croiser les regards intenses du Vicomte Thul et du Marquis Ulgo. Les deux patriarches, entourés de leurs plus proches parents, se tenaient groupés à plus de vingt mètres d’eux, à l’écart de la foule.
Ils semblaient à l’affût, prêts à agir. Prêts à faire quoi ?
L’un des Ulgo écarta son manteau large et semblait vérifier quelque chose à ses hanches. Le Marquis le réprimanda d’un regard agacé. Gagné par la gêne, son partisan rabattit son manteau maladroitement sur le flanc.
Une lueur avait brillé dans l’ombre, au niveau de sa ceinture. Oui, ça ressemblait à la garde d’une arme blanche. Une vibrolame ou une dague. Il semblait que les gardes Rist confisquaient pourtant les armes aux entrées du parc.
Étrange que cela leur ait échappé. Rufus Rist avait la réputation d’un homme calculateur et méticuleux à moins que les Thul et les Ulgo aient été assez malins pour déjouer leur surveillance. Ou que le Baron leur ait accordé un passe-droit pour s’attirer leurs faveurs. Et ne pas se contenter de l’alliance des Organa et des Metasi.
La politique rattrapait toujours les réalités et les rêves.
Cmethai regarda la position des gardes Rist. Chacun d’eux ou plus se tenait près d’un groupe de convives. Ces gardes guettaient les Thul et les Ulgo, tout en évitant de croiser soigneusement leurs regards.
Thul et Ulgo qui ne paraissaient pas décidés à participer à la fête, sauf peut-être d’une façon malveillante.
Mais que se passait-il, bon sang ?
- Deren, appela-t-elle.
Inconscient de ce qui se tramait, ce dernier se resservait distraitement.
- Oui, ma chérie ?
- Il se passe quelque chose.
Elle lui résuma tout ce qu’elle avait remarqué, ce qui le fit sourire à son grand désappointement.
- Cela n’a rien de drôle, insista-t-elle. Ni de futile.
- Tu es certaine pour ton Ulgo armé ?
- Cela n’a duré qu’un instant, reconnut-elle.
- Tu as peut-être mal vu, alors. Tu te fais des idées.
- Par les étoiles, Deren ! Tu ne trouves pas leur comportement suspect ? Regarde mieux.
Il les dévisagea à son tour, perplexe.
- Ils se comportent comme des Thul ou des Ulgo. Rien de surprenant à cela. Et puis ils n’ont pas amené leurs gardes.
- Les Metasi et nous non plus, fit-elle remarquer.
Deren reposa la coupe contenant les amandes confites.
- Admettons que les Thul et les Ulgo préparent un mauvais coup contre nous et les Metasi. Les gardes Rist les surveillent, la situation est sous contrôle.
Cmethai lui prit le coude, se forçant à se détendre. Elle n’y parvint pas vraiment, toujours travaillée par cette sensation persistante de malaise. La Complainte des Killiks ne contribuait pas à améliorer son humeur.
- Nous devrions rentrer, dit-elle.
Deren l’étreignit avec chaleur pour la rassurer.
- D’accord, ma chérie, céda-t-il.
- Je vais chercher les enfants. Tu devrais prévenir ton oncle et saluer les Metasi.
- Je m’en charge.
Ils s’écartèrent l’un de l’autre pour remplir leurs tâches respectives. Deren chercha fiévreusement son oncle Muren et le remarqua finalement en compagnie de la Duchesse Metasi qui lui avait pris l’avant-bras. Il entendit le rire strident de celle-ci, preuve que certains réussissaient à s’amuser.
Il se dirigea vers Muren Organa, jouant des coudes.
Au bout de cinq mètres, un garde Rist apparut pour lui barrer le passage.
- Soyez bénis, lança celui-ci.
Déconcerté, Deren ne trouva rien d’autre à lui répondre que :
- Je vous demande pardon ?
Le garde lui adressa un sourire surprenant avant de se fendre subitement en avant, une vibrolame à la main. Deren tituba en reculant, l’arme enfoncée dans ses tripes. Sous les yeux de Cmethai, qui avait rejoint ses enfants.
- Deren ! Glapit-elle.
Elle s’élança mais fut agrippée par deux Rist qui l’empalèrent aux reins, plongeant leurs vibrolames dans son corps, trois fois.
- Capturez les enfants, vite ! Ordonna le Baron.
Aussitôt, ses partisans se saisirent des petits innocents, Colin Organa, sa sœur Trissa et Essola Metasi. Leurs cris aigus de détresse glaçaient le sang de ceux ou celles qui assistaient à la scène, sans réagir.
- Maman ! Papa !
Ils furent emmenés alors que le Vicomte Ernas Thul brandissait tout haut un blaster, canon pointé vers les cieux nocturnes.
- À mort, les Organa ! À mort, les Metasi ! Tuez ces traîtres !
Ce fut le début du carnage. Alors que l’orchestre bith s’interrompit en plein refrain, ses musiciens extraterrestres ne sachant comment réagir, les gardes Rist se jetèrent tout à coup sur leurs victimes qu’ils étaient chargés d’exécuter sans remords.
Un affolement général s’empara des malheureux et des cris de terreur, de désespoir dérangèrent à jamais l’harmonie du Parc de la Tranquillité. Les poignards brillaient dans les paumes, les yeux étincelaient de froideur déterminée. Muren Organa et Linda Metasi succombèrent dans les bras l’un de l’autre, percés par les coups des Ulgo.
Le Marquis qui les menait, renchérissait, la lame rougie du sang d’un Metasi qu’il venait d’égorger.
- Tuez-les tous ! Pour Alderaan !
Les nobles des Maisons Vassales des Organa et des Metasi ne furent pas davantage épargnés. Les vibrolames fouillaient leur chair, les tirs de blaster claquaient en une symphonie d’échos pétaradants lorsque leurs ennemis les abattaient à bout portant, ne leur laissant aucune échappatoire.
Les Thul et les Ulgo passaient d’une victime à l’autre, laissant les Rist achever le travail sanglant. Autour de Deren Organa, plié en deux par la blessure au ventre et rampant vers Cmethai agonisante qui tendait les bras, des corps ne cessaient de s’écrouler.
Il se concentra, n’entendant pas les supplications de ceux qui imploraient la pitié de leurs bourreaux.
Il parvint enfin à la rejoindre puis à la prendre dans ses bras, agenouillé contre elle. Celle-ci le fixa avec regret, résignée, le sang coulant de ses plaies et de sa bouche.
- Deren… va-t-en…
- Je ne t’abandonnerai pas, pleurait son mari.
Il l’embrassa sur les lèvres, avec passion, pour la dernière fois. Rufus Rist qui observait la scène émouvante, arrêta un de ses partisans qui s’apprêtait à l’achever. Puis il ordonna aux bith, en leur jetant une poignée de crédits.
- Continuez de jouer.
Et les aliens reprirent leur mission, faisant résonner la Complainte des Killiks dans la nuit endeuillée d’Aldera. Les comploteurs patrouillèrent dans tout le parc, achevant les blessés et les agonisants.
Rufus Rist s’accroupit face à Deren, qu’il empoigna par le col. Ce dernier qui tenait le cadavre de sa femme dont il avait fermé les paupières, souffla :
- Pourquoi, Rufus ? Nous avions un accord… pourquoi ?
- Parce que votre complot n’est plus un secret pour ceux que vous visez. Croyez bien que je suis désolé d’en arriver là.
- Vous signez un pacte avec un démon qui vous trahira et vous remplacera par quelqu’un de plus malléable.
- Peut-être, mais ce démon est l’homme le plus puissant de la galaxie et il détiendra bientôt le pouvoir absolu. Je dois veiller aux intérêts de ma maison comme je l’ai toujours fait. Comme vous auriez dû le faire.
Deren inspira et serra les dents, sa blessure à l’abdomen l’élançant de nouveau.
- Laissez-moi partir, emmener ma femme et l’enterrer.
- Deren, vous et votre femme ne faites pas partie du marché que j’ai passé avec le Chancelier Suprême. Contrairement à vos enfants dont nous prendrons soin.
- Ce sont des Organa, vous ne parviendrez jamais à changer cela. Le peuple ne l’oubliera pas.
Rufus appliqua la pointe de la vibrolame sur la poitrine de sa victime.
- Les Contispex vous saluent, conclut-il finalement.
Il enfonça l’arme jusqu’à la garde, en plein cœur puis la retira. Deren expira dans les secondes suivantes, s’affaissant sur le corps de son épouse qu’il avait rejoint dans un sommeil éternel. Jusqu’à la fin du massacre, les musiciens n’interrompirent pas un seul instant la Complainte des Killiks.
Après tout, les victimes de cette Triste Nuit avaient bien droit à cet éloge funèbre.
[…
beaucoup de sources et d’archives originelles disparurent dans la Destruction d’Alderaan, perpétrée par l’Empire de Palpatine. Néanmoins, j’ai pu mettre la main sur des récits de cette noire tragédie qui avait marqué l’une des périodes les plus sombres de l’histoire galactique. Les Teral, les Alde et les Panteer n’avaient pas participé à ce complot, parce qu’ils avaient hérité des domaines des Organa et des Metasi, ainsi que de leurs possessions et privilèges. Dans une moindre proportion que les Thul, les Ulgo et les Rist, certes.
Toujours est-il que la Triste Nuit vit la disparition définitive et irrémédiable de la Prestigieuse Maison Metasi. Essola Metasi mourut à cause des privations peu de temps après cette tragédie, tandis que Colin et Trissa Organa furent mariés respectivement à une Rist et un Thul. À l’âge adulte, ils s’évadèrent de leur cage dorée et trouvèrent asile à l’Enclave Jedi d’Ossus. De là, ils perpétuèrent le souvenir de leur Maison auprès de leurs compatriotes, ce qui permit à leurs lointains descendants de rentrer triomphalement à la fin de la Septième Guerre Alsakan qui vit la Chute de Contispex XIX et du Pius Dea… ]
[…
lors de cette nuit funeste, une partie d’Aldera fut livrée au pillage des partisans de ceux qui avaient abattu les Organa et les Metasi. Le Musée fut notamment attaqué et saccagé par des éléments humanocentristes non identifiés qui détruisirent des œuvres d’art inestimables faites par des non humains et/ou représentant des non humains. Ce fut le cas de la première version du Crépuscule des Killiks peinte par Jantheus Khaddar… ]
Extraits du livre Apogée et Chute des Dynasties Galactiques par l’historien Anthois Fyol, paru bien des années après la Chute de Dark Krayt […
la galaxie a déjà connu des heures sombres, bien avant celles-ci. Bien avant même l’apparition des Sith. La Triste Nuit fait partie de l’histoire de notre famille, cela fait partie de notre héritage, de ton héritage.
Ne l’oublie pas quand tu reviendras au Centre Impérial, lorsque tu siégeras au Sénat parmi tes pairs. Ne l’oublie pas si jamais tu as le malheur de croiser l’Empereur, si jamais il tente de t’humilier, de t’intimider et de te rabaisser.
Souviens-toi des sacrifices que nous consentons car nous ne nous battrons jamais assez pour nos idéaux… ]
Extrait du message de Bail Organa à sa fille Leia, peu de temps avant la Destruction d’Alderaan
Voilà, j'espère que cela vous aura intéressé ! N'hésitez pas à me faire part de vos retours
!
Et à la prochaine pour savoir qui d'autre va y passer
!!