Love It ! a écrit:En fait, tu associes systématiquement le respect des archétypes à la banalité, la niaiserie ou l'ennui...
Pas du tout. Je dis juste que si Star Wars s'en était tenu au strict respect des archétypes posés dans l'OT, il n'y avait rien à raconter puisque tout a déjà été dit dans les deux précédentes trilogies. On aurait juste eu une déclinaison supplémentaire de ce qu'on a vu et de ce qui a déjà été conclu.
n'est-ce pas un peu facile de raisonner toujours contre un extrême ? En gros, selon toi, c'est soit la Petite Maison dans la Prairie, soit un Luke dénaturé par un traitement façon Game Of Thrones...
J'aime beaucoup la Petite Maison dans la Prairie que je redécouvre avec ma fille (la série en plus a une superbe photographie). Et j'apprécie aussi Game Of Thrones. Ce sont deux séries qui ont des choses à raconter, chacune à leur façon.
Pourtant il a déjà été exposé plusieurs fois et par différentes personnes que le respect de l'archétype de Luke ne signifiait en aucun cas une absence d'aspérité, de problème et même de faillibilité.
Donne moi un exemple de "faillibilité" qui serait acceptable che Luke sans que celà remette en cause, à tes yeux, son archétype. Je demande ça sans malice, hein, juste pour alimenter la discussion et la réflexion scénaristique.
J'ai lu des synopsis de Fanfictions qui allaient tellement plus loin que ce que nous propose Disney, tout en respectant les archétypes.
Si tu as un ou des liens, je suis preneur. Je pourrai ainsi savoir exactement à quoi tu fais référence et te donner mon avis.
Donc, après le fameux : "vous voulez un Luke invincible !" qui vise à justifier coûte que coûte le traitement de RIan, il serait bon également de laisser tomber le : "il est impossible d'écrire quelque chose de nouveau, d'intéressant, de surprenant, de passionnant et d'éducatif, en respectant les archétypes..."
Je n'en suis pas aussi convaincu.
...Pas certain que toutes les guerres et les totalitarismes soient vraiment de la responsabilité des peuples auxquels ces fameux contes sont destinés...
Donc c'était la faute d'extraterrestres ?
La musique classique non plus n'a pas empêché les guerres...est-ce que ça signifie pour autant qu'elle n'adoucit pas les mœurs ?
(La musique adoucit les mœurs est un proverbe populaire qui semble trouver ses origines dans les écrits de Platon. Cette expression implique que la musique aurait un effet sur les mœurs par ses vertus éducatives et apaisantes).
L'Allemagne nazie est la démonstration qu'on peut concilier civilisation, raffinement culturel, violence et destruction. Je t'invite à revoir l'oeuvre de Stanley Kubrick qui, fortement marqué par l'expérience nazie, n'a cessé de d'illustrer l'opposition factice entre culture et violence. Dans "Orange Mécanique", Alex s'extasie - même physiquement - sur la musique de Beethoven et se livre à l'ultra-violence
https://www.youtube.com/watch?v=cQCQRLA05AA. Dans "Full Metal Jacket", toute l'instruction et la culture du soldat Jocker lui permet d'adopter une distance critique à l'égard de l'institution militaire et de la guerre. Mais la violence finit quand même par le broyer et le fondre dans la masse.
Dans l'une des scènes les plus célèbres "Apocalypse Now" de Coppola, le lieutenant-colonel Kilgore, joué par Robert Duvall, fait jouer du Wagner pour accompagner le bombardement au napalm des villages vietnamiens.
https://www.youtube.com/watch?v=ueW9NI6xx4M . Toujours chez Coppola, il y a ce final dantesque du "Parrain III" à l'opéra sur Cavalleria Rusticana de Mascagni
https://www.youtube.com/watch?v=hY6BnF7xqVIEt que dire d'Hannibal Lecter dans "Le Silence des Agneaux" qui écoute tranquillement du Bach dans sa cellule avant de massacrer ses gardiens
https://www.youtube.com/watch?v=Jgza7PwUr6kVoilà en tout cas beaucoup de contrepoints... ça ne veut pas dire que la musique est néfaste ou incite avec la violence. Ca veut juste dire que la musique, la culture ne suffisent pas à combattre la violence qui est constitutive de la nature humaine. La culture ne suffit pas à réfréner les bas instincts. Le vernis "civilisationnel" n'est pas suffisamment étanche, les acquis civilisationnels sont fragiles. C'est une réflexion au coeur du cinéma du "Nouvel Hollywood" dans les années 70, dont "Delivrance" (Boorman) et "Les Chiens de Paille" (Peckinpah) constituent deux illustrations assez traumatisantes.
Je t'épargnerais enfin les réflexions bourdieusiennes sur le concept de "culture légitime", qui envisage la culture sous le prisme de la domination de classe, donc une certaine forme de violence... mais là on s'éloigne du sujet.
Conclure que les contes n'ont pas une influence profonde positive sous prétexte qu'ils n'ont pas préservé l'humanité des guerres me paraît un peu léger comme raisonnement. Et comment connaître l'influence de ces contes et autres récits legendaires au fil des siècles, qui nous dit qu'ils n'ont pas contribué à améliorer l'humanité, et que sans eux, ce serait peut-être pire ?
Je n'ai pas la réponse. Les contes ont une vocation éducative, structurante. Ils ont une double dimension cathartique et conservatrice, libératrice et castratrice (inculcation des interdits). Maintenant, un individu ne se résume pas à son éducation. On peut adhérer à la morale du conte comme on peut aussi la rejeter. Tu peux aussi avoir différentes lectures. L'amour impossible de la Petite Sirène avec son prince, dans le conte d'Andersen, relève du conservatisme social, d'une certaine idéologie de caste. Le conte n'est pas vertu.
-- Edit (Jeu 25 Jan 2018 - 12:20) :
xximus a écrit:J'avoue c'est du tout cuit.

Là-dessus j'ai envie de dire heureusement qu'elle a de la ressource, et de l'optimisme, sans quoi ce serait mission impossible.
À ce titre quand elle découvre la verdoyance de Takonada, on comprend qu'elle a la faculté d'émerveillement d'un enfant, sans crainte d'être jugée. Espérons que le IX fasse le boulot pour lui rendre honneur.
Rey est un personnage rousseauiste en fait. "Le principe de toute morale est que l'homme est un être naturellement bon, aimant la justice et l'ordre ; qu'il n'y a point de perversité originelle dans le cœur humain, et que les premiers mouvements de la nature sont toujours droits, tous les vices qu'on impute au cœur humain ne lui sont point naturels."
Ca pouvait aussi s'appliquer à Anakin dans
TPM.
-- Edit (Jeu 25 Jan 2018 - 12:43) :
xximus a écrit:C'est ce qu'on dénonçait (enfin Love it ! en premier sur ce topic) comme la solution de l'auto-justification, qui ne doit pas à elle seule tout valider si cette justification ne tient pas : si Luke avait dit "désormais je suis une licorne, parce qu'en fait j'ai appris un truc sur la Force dans les livres dans l'arbre qui vous change en licorne" et qu'une corne lui poussait sur la tête, on voit la limite de l'auto-justification : si le film justifie quelque chose, ladite chose ET sa justification ne sont pas nécessairement acceptables.
Tout dépend du sens en fait, de l'idée que tu veux faire passer. On ne peut pas faire l'économie d'une réflexion sur ce que Johnson et
TLJ veulent nous dire à travers le personnage de Luke. Et je trouve qu'ils nous disent beaucoup de choses sur les désillusions, le désenchantement, les échecs, le vieillissement, le crépuscule et le bilan d'une génération "dorée". Et ça me paraît bien plus intéressant et profond que la reproduction d'archétypes figés, issus d'un récit initiatique originel.
Oui, l'expérience de la vie peut nous changer. On n'est pas forcément le même à 60 ans qu'à 20 ans. On ne porte pas le même regard sur l'existence. A partir de là, rien, absolument rien, n'interdit à
TLJ de nous présenter un Luke différent de celui de l'OT. D'autant que le Luke de
TLJ est le contrepoint du Han de
TFA qui, lui, pour le coup, n'a pas vraiment changé. Han, c'est le type qui a refusé de grandir, de vieillir, mais qui n'a pas avancé d'un pouce, et qui a même régressé. La fuite en avant permanente l'a ramené en arrière. Il en est conscient et en souffre.