Bon, vous me decevez vraiment sur le matricule-là...45326 c'est pourtant pas trop dur de savoir à qui ça renvoie, non ?
Anyway, voici la fin du chapitre un
_Qu'est-ce que je suis pour toi Alsh ?
Assise en face de moi, à la table du salon, Dontika avait croisé les bras et me foudroyait du regard. Elle était arrivé il y a quelques minutes à l'appartement, refusant que j'aille la chercher à l'astroport. Elle était rentré par ses propres moyens et à peine avait-elle passé la porte qu'elle s'était assise pour discuter. Son ton était si froid qu'il en devenait brûlant, semblable à la morsure du givre sur la peau nue.
_Qu'est-ce que je suis ? répéta t-elle.
Je n'arrivais pas à formuler mes mots. pourtant, ce ne devait pas être un problème : j'étais avocat de formation, parler était mon métier. Je pouvais discourir des heures sur des sujets au Sénat sans jamais hésiter une seconde, une fois lancé. Mais pourtant, là, la situation était différente. J'avais la tête rentrée dans les épaules, les yeux fixant le plancher, incapable de m'exprimer. Les mots montaient en moi mais refusaient de sortir comme s'ils mouraient au fond de ma gorge. Ce silence dut déplaire à Dontika qui continua sur sa lancée. :
_Est-ce que je suis ta petite amie ? Ta femme ? Celle que tu aimes et avec qui tu veux vivre ou bien est-ce que je suis un genre d'animal exotique ? La petite exception alien que s'offre le grand avocat du Comité entre deux discours spécistes ?
J'entrouvris la bouche pour protester mais je ne dis rien. Seul un chapelet de sons inarticulés franchit la barrière de mes lèvres, comme un filet d'air. Finalement, j'avalais ma salive et tentais une objection.
_Tu comptes beaucoup pour moi Don.
Par les étoiles noires...c'était d'un niveau ! Même un enfant aurait fait mieux que moi.
_Tu ne réponds pas à ma question. Qu'est-ce que je suis ?
C'était en fait une très bonne question. Il y a encore quelques mois, j'aurais répondu qu'elle était la femme de ma vie, sans hésiter. Bon peut-être pas à ce point mais au moins que je l'aimais profondément et que j'en étais amoureux. Mais depuis que j'avais rejoins le COMPORN, je voyais notre relation sous un jour nouveau. Sans même parler des théories raciales.
_Tu es la personne avec qui je vis.
Je n'avais mis aucune chaleur dans cette phrase, je ne faisais qu'énoncer un fait.
_A cet égard, je pense qu'il est logique de considérer que tu dois être fière de moi, de la même manière que moi, je suis fier de ce que tu fais.
Mes yeux quittèrent le sol et remontèrent lentement dans la pièce au fur et à mesure que ma phrase prenait de l'emphase.
_Je suis membre du COMPORN. J'ai un poste à responsabilité là bas et on me paye bien. Je gagne des sommes que je n'aurais eues que des années plus tard si j'avais travaillé pour une boite privée. Et non seulement, je suis bien payé mais en plus, je fais changer les choses.
Je verrouillai mon regard sur Dontika alors que je me grandissais lentement.
_Est-ce que tu as la moindre idée de ce qui gouverne les cabinets d'avocat aujourd'hui ? C'est ceci ! dis-je en sortant un crédit de ma poche et en le montrant à la zabrak. La balance de la Justice penche toujours en faveur des plus riches !
_Et qu'est-ce que tu fais des avocats commis d'office ?
Je manquai de pouffer.
_Mais voyons, réfléchis ! Ca fait partie du système. Tu crois que les meilleurs avocats sont des commis d'office ? On envoie des pauvres types au charbon, des gamins qui sortent à peine de l'école de droit. Ils font de leur mieux mais ils font face à des machines de guerre. C'est aussi équitable qu'un combat entre un rancor et un jawa qui aurait les mains attachées dans le dos. J'ai vu ces gosses de riches à l'Université, attendant la remise des diplômes comme des chiens kaths tournant autour d'une pièce de viande. Tous ce qu'ils attendaient, c'était ce feu vert pour défendre les gros clients, gagner une tonne de crédits et pouvoir en gagner encore plus !
Prenant appui sur la table, je me dressai.
_Il existe des hommes qui pensent comme moi, que ce système est mauvais. Qui pensent qu'il y a des choses qu'il faut changer dans cette galaxie. Et c'est ce que nous faisons, au COMPORN. Nous rendons les choses meilleures. Nos avocats sont tous très bien formés et sont financées en interne. Nous ne demandons donc pas un décicrédit à nos clients. Combien de cabinets peuvent en dire autant ? Nous nous efforçons de faire le bien. Je m'efforce de faire le bien ! Pour toi, pour moi, pour les milliards de gens qui vivent dans cette galaxie !
Je m'étais presque brisé la voix sur la fin. Dontika laissa filer un blanc et battit lentement des mains :
_Bravo. On pourrait envoyer ça tel quel aux journalistes de la Volonté d'Acier. Il n'y aurait qu'à ajouter que le système ploutocrate est aux mains des non-humains mais que le COMPORN s'efforce jour et nuit de réduire ce complot à néant. Enfin, on ajouterait un petit "vive Palpatine", pour finir en beauté et on publierait.
_A quoi tu joues ?
_Simplement te faire remarquer que tu ne plaides pas. Tu n'es pas en train de parler à une foule en délire mais à moi. Alors j'aimerais que tu arrête ton holocinéma et que nous puissions vraiment parler.
Je me rassis en maugréant. J'avais la désagréable impression qu'elle me faisait la leçon.
_Je t'ai vu évoluer dans ce milieu, dit-elle. Au début, je dois bien dire que oui, j'étais contente. Tu avais trouvé un travail qui te plaisait, qui était bien payé...je n'ai rien à redire à ça. Mais là où j'ai un problème, c'est comment toi tu peux fréquenter ce genre de personne ! Des gens qui tiennent des discours haineux en public, qui militent pour que les droits des non-humains soient supprimés, qui brûlent des hololivres qui leur déplaisent...
_Tu pourrais aller au fait ?
_Tu fréquentes des extrémistes, voilà mon problème ! cria t-elle. Tu soutiens des types qui rêvent jour et nuit de nous détruire, nous, les aliens ! Je ne te comprends plus ! lâcha t-elle au bord des larmes. Où est passé l'Alsh que je connais, celui qui voulait travailler dur pour devenir un grand avocat ? Où est passé l'homme dont je suis tombé amoureuse ?
_J'en sais rien, dis-je après une hésitation. Mais moi, je me demande où est passée celle qui a dit m'aimer "quoique que je fasse".
Elle ravala un sanglot. Ce n'était sans doute pas très charitable de ma part de remettre ses propos sur la table comme ça mais j'étais ainsi. Je ne prenais pas de gants quand la situation l'exigeait.
_Alors on fait quoi ? dit-elle d'une voix secouée par le chagrin. On s'arrête là ? Comme ça, après plus de deux ans ensemble ?
Je haussais les épaules. Je ne pouvais pas dire que c'était quelque chose qui me faisait plaisir mais d'un strict point de vue logique, c'était la meilleure chose à faire. En quittant Dontika je n'avais plus rien à cacher au Bureau de Sécurité Impérial et ma carrière au sein du COMPORN pourrait se poursuivre sans entraves.
_Une dernière question Alsh...sanglota Dontika. Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre ?
L'image d'Eleiza s'imposa à moi. Je choisis d'éluder la question.
_Que je dise oui ou non, ça ne changera rien.
Je croisais les mains, plus pour me donner contenance qu'autre chose.
_Je vais te laisser l'appartement. Je prendrais quelques affaires mais c'est tout. La moitié de ce qui est sur le compte est à toi. Si tu as des soucis d'argent, n'hésite pas à me demander, je serais là pour te donner un coup de main.
Je la vis déglutir difficilement alors que je me levais lentement, enfilai mon manteau et rassemblais quelques affaires.
_Je passerais récupérer le reste de mes affaires plus tard. Ou bien j'enverrais un homme les chercher.
Alors que je franchissais la porte de l'appartement, elle s'adressa une dernière fois à moi :
_Tu n'as rien de plus à me dire ?
Je haussais les épaules pour la deuxième fois et m'engouffrai dans le turboélévateur de l'immeuble. Alors que la machine m'emmenait aux niveaux inférieurs, je repensais à ce qui venait de ce passer. Etrange avec quelle facilité j'avais pu mettre un terme à notre liaison. Nous avions eu de bons moments, c'était évident mais ça ne pouvait pas continuer. Elle et moi appartenions à deux mondes différents désormais comme si l'un vivait au 500 Republica et l'autre, dans le plus miteux des studios du Corridor Ecarlate.
Une fois arrivé en bas, je sortis de mon immeuble et fus accueilli par un mauvais crachin qui me fouetta le visage. Le beau soleil de la vieille n'était plus qu'un souvenir et le mauvais temps semblait parti pour durer.
Je hélais un taxi-volant qui me conduisit à mon bureau. J'expliquais rapidement la situation à mon vice-directeur, qui assurait toujours l'intérim depuis l'arrestation de Paesente et l'homme m'assura que je pouvais m'installer dans un des appartements de fonction du COMPORN en attendant de trouver quelque chose. Je passais les prochaines semaines noyé dans le travail, suivant avec intérêt le projet de loi dont j'avais été à l'origine.
Le décret avait reçu un très mauvais accueil auprès du Sénat, pourtant habituellement docile et bien plus encore auprès des populations aliens de la cité-capitale. De grandes manifestations s'organisaient chaque jour pour protester contre cette réforme qui tournaient souvent à l'affrontement avec les forces de l'ordre.
Pour être honnête, je regardais tout cela un peu de haut. Je considérais que cela ne me regardais pas. Certes j'avais suggéré le décret à l'Empereur mais je n'étais nullement responsable de sa rédaction. Qui devait on blâmer quand la loi était mal reçue auprès du peuple ? La personne qui avait donné la première impulsion ou la main qui l'avait rédigée de bout en bout ?
Deux mois s'écoulèrent au terme desquels la loi allait être présentée et votée au Sénat. Ishin Il-Raz insista personnellement auprès de l'administration impériale pour que je sois celui qui plaide en faveur de la réforme. C'est ainsi qu'en début de soirée je me retrouvais à plaider en faveur de ce décret très impopulaire.
Il n'y avait guère que la Volonté d'Acier pour assurer que l'Assemblée marcherait comme un seul homme dans l'intérêt de tous : j'avais beau être généralement bien considéré à la Chambre, je fus hué quand je pris la parole. Même Pestage avait du mal à calmer le Sénat. Mais je n'étais pas stressé du tout.
Je savais ce qu'il fallait faire lorsque le public était hostile. Il ne fallait surtout pas entrer dans son jeu. Plus l'Assemblée gagnerait en colère, plus je serais calme. Ainsi, elle n'aurait rien pour fixer sa rage qui s'évanouirait d'elle même. J'appliquais cette leçon à la lettre : alors que la Chambre criait et marquait son opposition à la réforme de manière virulente, parfois en m'insultant, j'avais fermé les yeux et je respirais calmement. Je m'efforçais de ressentir le moment précis où leur colère atteindrait le point de rupture. Le moment où ils se fatigueraient physiquement à force de hurler.
Petit à petit, plate-forme après plate-forme, le calme revint au Sénat. J'ouvris alors lentement les yeux, fixai l'Assemblée et déclarai avec calme :
_Mesdames et messieurs les sénateurs, permettez-moi de vous dire que votre attitude me déçoit. Nous sommes ici dans le coeur de notre régime. Que serait l'Empire, notre glorieux Empire galactique sans vous mesdames et messieurs les sénateurs ? Vous devez comprendre que nous ne sommes plus sur les bancs de l'école. Nous sommes des adultes, tous ici pour remplir notre devoir.
Peut-être hypocrite de ma part : les meetings du COMPORN reposaient avant tout sur la politique-spectacle. Mais je ne pouvais pas me lancer dans de grands élans ou pas tant que la salle ne serait prête. Manipuler la masse était aisé, ce n'était qu'une question de timing.
_Vous êtes réunis ici aujourd'hui pour vous prononcer sur une proposition de loi. Je sais que cet décret portant sur les Zones de Protection Alien n'a pas un bon écho dans les rues. Mais je sais aussi que l'important est ce qui se passe entre ces murs et pas au dehors !
Flatter l'auditoire. Incroyable à quel point les êtres sensibles pouvaient être sensibles aux compliments. C'était comme un succulent sucre Yyegar, on pouvait faire avaler n'importe quoi avec, le goûteur ne se souviendrait que du goût du sucre.
_Au fond sur quoi porte cette proposition de loi ? Sur les bases de notre Empire : la sûreté, la sécurité, la justice et la paix !
Le Sénat savait-il que je reprenais mot pour mot une des grandes phrases de Palpatine, lors de la création de l'Empire ? Toujours est-il que quelques sénateurs se mirent à hocher la tête favorablement à l'écoute de ces mots.
_Ce n'est rien d'autre, assurais-je à l'Assemblée. On traite cette loi de spéciste, d'être contre les populations aliens. Rien ne pourrait être plus faux. Est-ce que cette loi dit "tuons tous les non-humains" ? Est-ce qu'elle dit, "jettons-les en prison" ? NON !
Je commençais à acrocher l'auditoire. Maintenant, je pouvais faire un peu de show.
_L'Empire se bat et se battra encore et toujours pour l'avenir de ses enfants, des aalagar aux zylurians !
Je commencais à avoir la sympathie de l'Assemblée. Faible et ténue mais qui était bien là. Il s'agissait de ne pas perdre ce brin d'écho.
_Nous sommes dans une galaxie cosmopolite et Coruscant en tant que capitale n'y fait pas exception. Il y a des milliers et des milliers d'espèces différentes dans notre cité. Cette proximité des espèces crée naturellement des tensions. Ce que nous voulons, pour la sûreté et la sécurité c'est que ces tensions disparaissent. Et pour ce faire, nous avons la solution : il suffit de rassembler les différentes espèces dans une Zone de Protection Alien bien définie, sous la protection permanente de l'Empire galactique. Il ne s'agit pas de dresser les communautés les unes contre les autres. Il s'agit de les protéger.
Je marquais une pause, laissant le temps à l'Assemblée de digérer mes propos.
_Il ne s'agit pas de diviser mais de rassembler. En votant en faveur de cette loi, vous votez pour l'avenir. Vous votez pour les communautés aliens. Vous votez pour l'Empire. Vous votez pour vous !
Un long silence suivit ma déclaration. Puis un applaudissement discret, d'une des plate-formes. Un autre s'éleva d'un autre endroit du Sénat et ce fut l'effet domino. En moins d'une minute, plus de la moitié du Sénat - en majorité des humains - s'était ralliée à moi. Le reste de la Chambre, elle, restait plutôt froide.
Je quittais la tribune satisfait. J'avais réussi à littéralement retourner la moitié des sénateurs. Maintenant, la réforme avait une chance de passer. Et effectivement, la réforme fut adoptée, à un peu plus de cinquante-deux pourcent. Je ne pus m'empêcher de sourire en songeant au fait que j'étais directement responsable de la victoire du décret. En quittant la rotonde, je fus interviewé longuement par de nombreux journalistes. Mon nom resterait à jamais attaché à cette loi, je marquerais l'Histoire.
Après la conférence de presse, je sortis sur le parvis du Sénat où les manifestants opposés au projet de loi venaient juste d'apprendre la nouvelle. Un cri de rare bestial parcourut la foule qui fut difficilement maîtrisée par la Garde du Sénat. Je me détournais de ce triste spectacle et cherchais des yeux un taxi qui pourrait me ramener chez moi.
C'est alors qu'un abyssin franchit le cordon de sécurité des soldats et se dirigea vers moi à grandes enjambées.
Je ne compris pas tout de suite la situation avant de voir le minuscule blaster qu'il brandissait devant lui. Je tentais de m'écarter de lui mais je n'eus aucun moyen de l'arrêter. Quand il pressa la gâchette, je fus aveuglé par un flash rouge et une douleur fulgurante, bien plus importante que tout ce que j'avais connu me saisit à la poitrine. Par réflexe, j'y plaquais ma main, sentant le tissu précieux de mon costume se consumer sous la chaleur de l'impact. L'air me manqua.
Je tentais de respirer à grandes goulées alors que ma vision se brouillait et que je distinguait difficilement un groupe de gardes se jeter sur le tireur pour le neutraliser tandis que d'autres s'approchaient de moi pour me porter secours. J'avais l'impression que mes poumons étaient en feu et que chaque inspiration attisait le brasier.
Je tombais lourdement au sol sans vraiment m'en rendre compte, trop obnubilé par ma blessure à la poitrine. Je me sentais mourir.
Des mains me saisirent, tentèrent de me donner les premiers soins mais je ne voyais rien de tout ça. Un voile noir commençait à tomber sur mes yeux alors que la douleur allait croissante. Etait-ce comme cela que j'étais destiné à mourir ?
Je sentis une nouvelle douleur dans ma poitrine, semblable à une piqûre et aussitôt, le voile s'en alla et la douleur diminua en intensité. Je relevais difficilement la tête et vit qu'un des soldats, appartenant au corps médical m'avait fait une injection de bacta directement dans la blessure. Il m'assura que tout irait bien et que je serais transporté sans tarder à l'Hôpital de Coruscant. Je voulus répondre quelque chose mais parler m'épuisa et je tombai presque immédiatement évanoui.
La tentative d'assassinat sur ma personne choqua profondément la bonne opinion coruscanti et le COMPORN décida qu'une punition exemplaire devait avoir lieu pour venger son jeune avocat général.
Dans la nuit où j'étais opéré en urgence, des milliers de miliciens SA encadrés par des militaires de la CompForce organisèrent un pogrom dans les quartiers abyssins de la ville. Des magasins furent saccagés, des centaines d'aliens furent rossés ou massacrés dans les rues et des milliers d'entre eux furent arrêtés.
Les violences nocturnes furent appelées "Evènements de la Nuit du Verre Brisé" et donnèrent l'impulsion à de nombreuses autres dans les jours qui suivirent.
Nous étions le lendemain du quatrième anniversaire de l'Empire et le jour où la première loi sur les Zones de Protection Alien avait été adoptée. Le jour où je survécus à une première tentative de meurtre, gardant des séquelles jusqu'à la fin de ma vie.
Nous étions aussi le jour où dans mon délire semi-conscient, abruti par les médicaments, je jurais que tous les aliens ennemis de l'Empire allaient découvrir mon nom et le craindre.
Et l'avenir allait me donner raison.