Superpingouinthe13th a écrit:Arrêtez de parler de force "utilitariste" alors qu'on est face à un homme piégé dans sa solitude. Avoir la foi n'immunise pas contre les affres de la vie quotidienne qui se répète inlassablement.
Oui, mais là, il faut aussi élargir le spectre et revenir à une question basique mais élémentaire : qui est Obi-Wan, que représente-t-il, quelle est sa fonction dans ce grand récit starwarsien entamé il y a 45 ans ?
Obi-Wan dans l'OT, c'est le sorcier, le mage, la magicien, celui qui va initier Luke à la Force. Un passeur d'entre les mondes : celui du quotidien connu de Luke vers le merveilleux, celui aussi qui fait le lien entre le monde des vivants et le monde des morts. Obi-Wan dans l'OT est donc un être magique. Ce n'est pas ou plus un simple mortel, il a dépassé ce stade.
Et ce qui le fait dépasser ce stade, ce n'est pas sa mort/disparition sur l'Etoile de la Mort. C'est cet acte de foi à la fin de
ROTS lorsqu'il confie Luke aux Lars et s'installe pour une durée indéterminée, à proximité, dans un exil solitaire. C'est ça qui est magique et qui est constitutif de la "magie Star Wars" : que Luke, à 20 ans, par un concours de circonstances (ou ce qui semble l'être), tombe sur un vieux type au fin fond du désert qui lui annonce en gros qu'il l'attend depuis sa naissance pour le guider vers un monde qu'il ignore mais dont il porte l'héritage voire la survie. Et c'est ça qui est beau, qui est merveilleux.
Obi-Wan c'est l'équivalent dans Star Wars de Merlin, de Gandalf ou de Jean le Baptiste.
Et on s'en fout de savoir si Merlin, Gandalf ou Jean le Baptiste ont eu une enfance heureuse, s'ils ont des problèmes de transit intestinal ou s'ils font des cauchemars la nuit. Ce n'est pas leur fonction.
Le Obi-Wan "humain", c'est celui de la prélogie, c'est le général Kenobi, mais qui bascule dans un autre monde à la fin de
ROTS. Il est là le point de bascule. C'est en confiant Luke aux Lars et en devenant ermite dans le désert qu'il devient être merveilleux. Parce que ce n'est pas quelque chose d'accessible aux simples humains, aux simples mortels. Personne ne ferait ça dans le monde réel.
Obi-Wan n'a rien à voir avec l'archétype "arthurien" qu'est Luke, la garçon de ferme qui devient "roi". Et c'est pour ça que j'ai validé, et même survalidé, le choix opéré par Johnson dans
TLJ. Parce que son traitement de Luke s'inscrit dans cette continuité "arthurienne".
Obi-Wan, pour moi, n'a rien à expier. Il n'a pas de remords à avoir. Il a affronté le mal à la fin de
ROTS. Il l'a regardé dans les yeux et l'a (temporairement) vaincu. Même si ce mal a été son apprenti et même son ami. Même si ça a été douloureux. Mais il n'a pas tremblé ni hésité lors du moment de vérité. Il a fait ce qu'il devait faire. Et il n'avait de toute façon pas d'autres choix. L'épisode suivant pour lui, c'est de préparer l'avenir, de se consacrer aux générations futures quitte à sacrifier sa propre existence.
C'est pour ça qu'on peut considérer le traitement d'Obi-Wan dans cette série comme quelque chose de prosaïque et terre-à-terre. Obi-Wan n'est pas Jean-Michel Kenobi, pas plus que Gandalf n'est Jean-Michel Gandalf. Ce sont des gens qui sont passés dans un ailleurs, dans une autre dimension, en surmontant des défis inaccessibles au commun des mortels, en transcendant leur propre condition humaine : pour Obi-Wan, c'est cet exil de 20 ans dans le désert pour répondre présent le jour "J" avec opiniâtreté.
Le traitement d'Obi-Wan ici manque également cruellement d'imagination. On en revient au schéma rédempteur qui est devenu la tarte à la crème de TOUTES les productions "live" de Star Wars depuis le rachat de Disney, où le ou les héros doivent expier leurs fautes et/ou leur trauma :
* c'est Rey, Luke, Finn, Poe, Han et Kylo/Ben dans la postlo.
* c'est Jyn Erso et Cassian Andor dans "Rogue One"
* c'est Han dans "Solo"
* c'est Din Djarin dans "The Mandalorian"
* c'est Boba Fett dans "The Book of Boba Fett"
* et c'est maintenant Obi-Wan dans cette série
Il y a peut-être autre chose à raconter que ça, d'autres schémas et d'autres caractérisations possibles que le héros qui doit surmonter sa culpabilité ou un trauma, non ?