Après un peu d'attente, le nouveau chapitre !
Comme le chapitre 1, il a été écrit d'une façon un peu particulière, puisqu'il s'agit d'une reprise partielle du chapitre correspondant dans le livre de T. Zahn, adaptée à mon histoire. Ce n'est pas un procédé que j'apprécie particulièrement, et il est difficile à mettre en oeuvre, mais c'était ce qui s'appliquait le mieux ici.
Normalement, c'est la dernière fois qu'un tel passage survient. ^^
<<Chapitre précédant<< Sommaire >>Chapitre suivant>>Chapitre 51 Aussi loin qu’il s’en souvienne, le capitaine Pellaeon avait toujours eu une passion dévorante pour la botanique. Peut-être était-ce par nostalgie de ses origines corelliennes, ou par rejet de ce côté métallique, antinaturel si caractéristique de Coruscant, voire les deux à la fois. L’important est qu’il aimait les fleurs. L’uniforme gris standard des officiers impériaux était devenu comme une seconde peau pour lui, mais il aimait, dès qu’il en avait la possibilité, prendre une paire de gants de cuir, un tablier et plonger les mains dans ses cultures. Il avait installé dans ses appartements à bord du
Chimaera une mini-serre où il aimait passer du temps en-dehors de ses heures de service ; il s’évadait alors de son quotidien si rigide et se prenait à rêver à la paix.
Oui, Gilad Pellaeon adorait les plantes. Mais la faune… C’était une autre affaire.
L’ysalamir à côté de lui était installé sur le support nutritif conçu en un temps record par les ingénieurs impériaux. C’était l’aboutissement – pour moitié – de l’étrange quête dans laquelle s’était lancé Thrawn depuis son retour des Régions Inconnues. Les données rapportées d’Obroa-Skai par l’équipe du major Tierce avaient confirmé les informations dont disposait déjà le Grand Amiral sur la planète Myrkr, dans la Bordure Médiane, où évoluaient ces étranges créatures. Le non-humain avait prétendu qu’elles constituaient d’excellentes armes contre les Jedi… Mais Pellaeon était bien en peine de deviner pourquoi. À part leur odeur méphitique, elles n’avaient rien de bien redoutable.
Le reste des données concernaient un monde oublié de la Galaxie depuis longtemps, et au-dessus duquel le
Chimaera croisait désormais.
Wayland – c’était le nom de cette étrange planète – avait été victime d’une erreur administrative. Peu de temps après la découverte de la planète, un agent du Service d’Exploration Galactique un peu pressé avait malencontreusement effacé la planète des bases de données galactiques. Les colons qui s’y étaient établis se retrouvèrent soudainement coupés du monde, et furent rapidement massacrés par les indigènes. Seules quelques observatoires avaient conservé la mémoire de ce monde, et c’est en explorant les données de l’un d’eux que l’Empereur Palpatine l’avait redécouvert.
Le souverain impérial avait immédiatement compris l’intérêt que pouvait revêtir une planète de ce genre. À grands renforts d’esclaves, il y avait établi une base secrète renfermant ses biens les plus précieux. Les travaux achevés, il avait exécuté – sans doute en personne – les ouvriers pour s’assurer que le secret de l’emplacement de son coffre-fort reste intact. Seuls quelques-uns de ses proches connaissaient l’existence d’un tel lieu, et le Grand Amiral Thrawn en avait fait partie. Mais les informations dont il disposait étaient incomplètes, notamment sur la localisation du monde. Une lacune que les banques d’archives d’Obroa-Skai avaient permises de pallier.
Et à présent, nous allons enfin découvrir ce que le Grand Amiral mijote… Le capitaine était plus curieux qu’il n’osait l’admettre. Il voulait voir si les moyens impliqués dans cette opération avaient été judicieusement dépensés, ou si tout ceci n’était rien de plus qu’une chimère.
Il n’était sans doute pas le seul dans cette position. Assis à côté du Grand Amiral, le Moff Poldrei restait silencieux, les traits tendus. Il était dans cet état depuis son arrivée à bord du
Chimaera cinq jours plus tôt. Pellaeon savait que le polcaphréen avait remis un rapport détaillé à Thrawn, mais il en ignorait la teneur.
Le non-humain était le plus impassible d’entre eux, comme à l’accoutumée.
— Vous êtes inquiet ? demanda-t-il à Poldrei en haussant les sourcils.
— Je réfléchissais juste à ce que vous m’avez dit à propos de ce Karrde, répliqua le Moff. Vous êtes certain qu’il ne risque pas de compromettre vos opérations ?
À leur arrivée sur Myrkr, ils avaient eu la surprise d’être interpellés par cet humain extrêmement bien renseigné qui leur avait été d’une aide précieuse pour la prise en charge des ysalamiris. Mais le capitaine, en acceptant son offre, ignorait encore que Talon Karrde était un chef de la pègre galactique. À sa décharge, avec ses manières nobles et son physique soigné, l’homme ressemblait peu à Jabba le Hutt. Il s’occupait également d’offres moins louches que l’ancien parrain de Tatooine. Mais les Renseignements le rangeaient malgré tout parmi les hommes dangereux – bien qu’il ait toujours pris garde à rester en-dehors du conflit contre la Rébellion.
— Comme je vous l’ai déjà dit, Karrde n’est pas une menace pour nous tant qu’il garde ses distances. Il ne vendra pas ces informations à la Rébellion. Rappelez-vous : nous savons où il habite.
— J’espère que vous savez ce que vous faites… grommela Poldrei.
— Toujours.
Un pilote impérial en uniforme fit alors son entrée dans l’habitacle par la rampe d’accès. Il les salua avec une rigidité presque caricaturale.
— Nous sommes prêts à partir, annonça-t-il.
— Allons-y, ordonna Thrawn avec un geste de la main.
— Le général Covell insiste pour que vous preniez une escorte…
— Le général a des instructions précises. Qu’il se contente de les suivre. Installez-vous aux commandes.
— Oui, Amiral.
Il salua une nouvelle fois et rejoignit le poste de pilotage, suivi par Thrawn et son garde du corps noghri, Rukh, sorti de l’obscurité où il se terrait jusque lors.
— Capitaine ? l’interpella alors Poldrei.
— Oui, Excellence ?
— Vous êtes aussi inquiet que moi.
Ce n’était pas une question. Pellaeon se contenta d’acquiescer légèrement et rejoignit son supérieur dans le cockpit.
— Je me demandais si vous alliez vous joindre à nous, dit le Grand Amiral en le voyant arriver.
— Comme le général Covell, j’ai encore quelques doutes, Amiral. Notamment sur les raisons de la présence de cette… créature… dit-il en décochant un regard en direction du support nutritif de l’ysalamir. Si ce Gardien que vous vous attendez à trouver sur Wayland y a été installé par l’Empereur, je ne vois pas pourquoi nous devrions rencontrer des problèmes.
— Capitaine, dit Thrawn en s’installant dans le siège de copilote de la navette et en bouclant ses ceinturons, il est possible d’imaginer que nous ayons quelque mal à le convaincre de notre identité. Et même que nous servons l’Empire. (Il balaya les écrans d’un regard nonchalant et hocha la tête à l’adresse du pilote.) Allez.
Avec un claquement étouffé et une secousse à peine perceptible, la navette quitta la baie du
Chimaera et entama sa descente vers la surface de la planète.
— Ce serait peut-être plus facile de le convaincre avec une escouade d’assaut, marmonna Pellaeon tout en observant l’écran du sondeur à côté de son siège.
— Mais cela pourrait aussi l’irriter, remarqua Thrawn. Il ne faut jamais prendre à la légère l’orgueil et la susceptibilité d’un Jedi Sombre, capitaine.
Il jeta un regard par-dessus son épaule.
— Rukh est là pour ça. Quiconque a été proche de l’Empereur doit être familiarisé avec le rôle glorieux que les Noghri ont joué durant toutes ces années.
Pellaeon porta son regard sur la silhouette cauchemardesque et silencieuse assise de l’autre côté de la travée.
— Amiral, vous semblez persuadé que le Gardien sera un Jedi Sombre.
— Qui d’autre l’Empereur aurait-il pu choisir pour protéger son entrepôt personnel ? Une légion de soldats d’assaut, peut-être, équipés avec des TB-TT et tout cet armement et cette technologie que l’on peut détecter sur orbite les yeux fermés ?…
Pealleon grimaça. Au moins, ils n’auraient pas à se préoccuper de cela. Les sondeurs du
Chimaera n’avaient absolument rien décelé à portée de flèche à la surface de Wayland. Mais ça ne le rassurait pas pour autant.
— Je me demande seulement si l’Empereur n’aurait pas pu le retirer de Wayland pour l’assister contre la Rébellion.
Thrawn haussa les épaules.
— Je ne pense pas, répondit le Moff Poldrei en pénétrant à son tour dans l’habitacle.
Il devait avoir suivi leur discussion depuis le début, songea Pellaeon.
— L’Empereur avait déjà à sa disposition l’Inquisitorius, et il a choisi de ne pas l’utiliser. Pour Palpatine, les utilisateurs de la Force étaient une menace – et Skywalker l’a bien prouvé. S’il était parvenu à en contrôler un, suffisamment pour le rendre fiable et lui confier une base capable de renverser le cours de la guerre, alors il l’a gardé à l’abri pendant tout ce temps et il doit être sous nos pieds en ce moment.
— C’est ce que nous verrons bientôt, conclut Thrawn.
La navette venait de pénétrer dans les hautes couches de l’atmosphère, et ils pouvaient à présent observer un impressionnant panorama. La surface de Wayland était majoritairement occupée par une immense forêt, où l’on distinguait quelques prairies éparses mais peu nombreuses. Dans cette zone, le relief était inexistant à l’exception d’un unique pic isolé.
— On dirait bien que c’est notre destination… murmura Poldrei.
— Oui, Excellence, c’est le mont Tantiss. Nous devrions bientôt voir la cité.
— Et nous pourrons alors nous faire une idée de la situation.
Son regard se porta une fois encore sur Thrawn, parfaitement stoïque. Pellaeon, lui, avait encore quelques doutes et porta sa main à son holster pour vérifier la charge de son arme. Il n’était pas certain qu’une créature primitive – voire même deux, en comptant ce fichu noghri – suffirait à les protéger.
Ils durent dépasser la montagne pour apercevoir la « cité », qui n’avait de ville que le nom. Des bâtiments en pierre assez bas constituaient l’essentiel des structures visibles ; ils affleuraient le couvert des arbres de l’immense forêt qui les entourait. Il n’y avait qu’une seule place suffisamment grande pour qu’elle s’y pose, au pied d’un édifice monumental qui semblait creusé dans le pied du mont Tantiss. Sur ordre de Thrawn, qui ajustait la structure portative de l’ysalamir sur ses épaules, le pilote tournoya deux fois au-dessus de l’agglomération avant de se poser sur la piste improvisée.
— Intéressant, commenta le Grand Amiral en se penchant vers les hublots tout en assurant la structure de l’ysalamir sur ses épaules. Je distingue au moins trois styles d’architecture différents – un style humain, plus deux autres, étrangers. Ce n’est guère souvent que l’on constate une telle diversité dans la même région d’une planète, et encore moins dans la même cité. En fait, dans ce palais, devant nous, les trois styles ont fusionné.
— Vous pensez donc qu’il n’a pas été bâti par l’Empire, conclut Poldrei.
— Peut-être sur
ordre, mais pas directement. Je pense que ce bâtiment que nous voyons est notre objectif.
— Oui, acquiesça Pellaeon.
Il avait acquiescé distraitement, plutôt préoccupé par les senseurs qui détectaient des signes de vie multiples non loin d’eux. La cité paraissait pourtant déserte.
— Vous ne savez pas si l’une ou l’autre de ces espèces est hostile aux étrangers ?
— Probablement, répondit Thrawn en s’engageant sur la rampe de sortie où Rukh attendait déjà. La plupart des non-humains le sont. Pouvons-nous y aller ?
— Bien sûr.
Sur un signe de tête du capitaine, le pilote libéra la rampe qui s’abaissa dans un sifflement de gaz. Le noghri descendit le premier, vite suivi par le Grand Amiral et le Moff. Avec un léger soupir, Pellaeon se joignit à eux. Ils atteignirent le sol sans aucune réaction de la part de la cité et de ses habitants ; ni son, ni geste, nul signe de vie.
— C’est plus calme que dans le vide, commenta Poldrei avec indifférence.
— Ils sont peut-être timides ? railla le capitaine, qui restait aux aguets, la main prête à décrocher son blaster.
— C’est compréhensible, fit Thrawn. (Il prit le disque mégaphone accroché à sa ceinture.) Voyons si nous pouvons les persuader de se montrer hospitaliers.
Il prit le disque dans sa paume et le porta à ses lèvres. Sa voix tonna sur la place et tous les immeubles en renvoyèrent les échos.
— Je cherche le Gardien de la montagne. Qui peut me conduire à lui ?
Il baissa la main et attendit. Mais les secondes s’écoulèrent sans qu’aucune réponse ne leur parvienne.
— Peut-être qu’ils ne comprennent pas le basic, suggéra Pellaeon sans conviction.
— Non. Ils le comprennent, fit Thrawn avec froideur. Les humains, en tout cas. Ils ont sans doute besoin d’être un peu plus motivés. (Il leva à nouveau le disque.) Je cherche le Gardien de la montagne. Si personne ne me conduit jusqu’à lui, cette cité tout entière va en souffrir.
Il avait à peine fini que, sans avertissement, une flèche jaillit de la droite. Elle toucha Thrawn sur le côté, manquant de peu le tube de l’ysalamir qui était enroulé sur ses épaules et son dos. Elle rebondit sur l’armure cachée sous son uniforme blanc de Grand Amiral et atterrit aux pieds du Moff.
Rukh était déjà près de lui, le blaster au poing.
— Vous l’avez cherché, commenta Poldrei.
Thrawn ne prit même pas la peine de lui répondre.
— Tu as repéré l’origine du tir ? demanda-t-il à son garde du corps.
— Oui, fit le noghri.
Son arme était braquée sur un petit bâtiment trapu à deux étages, sur un côté de la place.
— Bon. (Thrawn reprit son mégaphone.) L’un des vôtres vient de tirer sur nous. Observez les conséquences.
Il abaissa le disque, et regardant Rukh, ordonna :
— Vas-y.
Avec un rictus qui révélait ses dents en aiguille, Rukh – rapidement, méthodiquement, scientifiquement – entreprit de démolir le bâtiment.
— Ce n’est pas ainsi que vous obtiendrez le soutien de cette population, lança alors le Moff en secouant lentement la tête. Les intentions belliqueuses sont rarement de bonnes bases pour les négociations.
— Nous ne cherchons pas à négocier avec ces gens, rappela Thrawn. Seulement avec leur chef.
Il observait Rukh détruisant le bâtiment avec une précision méthodique. En une vingtaine de coups, il était parvenu à n’en faire qu’une ruine fumante qui s’écroula dans un vacarme assourdissant.
Thrawn attendit que les derniers échos soient retombés avant de reprendre le mégaphone.
— Quand on me défie, telles sont les conséquences. Je le demande une fois encore : qui peut me conduire jusqu’au Gardien de la montagne ?
— Moi ! lança une voix sur la gauche.
Pellaeon pivota sur ses talons, imité par les autres. L’homme qui se tenait devant le palais était grand et mince, avec des cheveux gris en désordre et une barbe qui lui arrivait au milieu de la poitrine. Il portait une robe brune, des sandales lacées jusqu’au tibia. Un médaillon luisait entre les poils de sa barbe. Il avait le visage sombre, ridé, et il les observait avec une expression d’arrogance altière. Il y avait à la fois de la curiosité et du dédain dans ses yeux.
Et il dégageait une aura de puissance qu’il détesta immédiatement.
— Vous êtes des étrangers, déclara-t-il, et sa voix reflétait son expression. (Il leva les yeux vers la navette.) Des étrangers à ce monde.
— Oui, c’est exact, fit Thrawn. Et vous, qui êtes-vous ?
Le regard de l’autre se porta sur l’amas de décombres.
— Vous avez détruit l’un de mes édifices, dit-il. C’était inutile.
— Nous avons été attaqués, répliqua froidement le Grand Amiral. En étiez-vous propriétaire ?
Pellaeon ne put en être certain, mais il lui sembla surprendre un éclair dans les yeux du vieillard.
— Je commande ici, fit-il d’une voix tranquille mais chargée de menace. Tout ce qui est là m’appartient.
L’espace de quelques battements de cœur, Thrawn et lui rivèrent leurs regards. Ce fut Thrawn le premier qui brisa le silence.
— Je suis le Grand Amiral Thrawn, Seigneur de Guerre de l’Empire, serviteur de l’Empereur. Et voici le Moff Carth Poldrei, défenseur de l’Ordre Nouveau, ajouta-t-il en désignant l’intéressé qui ne semblait pas ravi de son nouveau titre. Je cherche le Gardien de la montagne.
Le vieil homme inclina légèrement la tête.
— Je vais vous conduire à lui.
Il se retourna et repartit en direction du palais.
— Restons groupés, murmura Thrawn en se mettant en marche. Attention aux pièges.
— Allons, notre hôte semble tout à fait sympathique, ironisa Poldrei.
Sans être sensible à la Force, Pellaeon pouvait sans peine percevoir le ressentiment latent qui émanait du dirigeant de Polcaphran, en particulier depuis que Thrawn leur avait rapidement expliqué le but de leur visite.
Ils rejoignirent le palais en traversant la place, sans que quiconque se manifeste.
Comme leur guide ouvrait les battants, Thrawn demanda :
— Ainsi, c’est l’entrée de la montagne ?
La porte colossale avait cédé facilement et Pellaeon se fit la réflexion que le vieil homme était plus fort qu’il n’y paraissait.
— Non, fit-il sans se retourner. Le Gardien y habitait autrefois, mais quand j’ai établi mon règne, le peuple de Wayland lui a bâti ceci.
Il s’avança dans la salle d’accueil ornementée, s’arrêta à mi-chemin d’une autre double porte et lança :
— Laissez-nous !
Tout d’abord, Pellaeon crut que le vieil homme s’adressait à lui. Il était sur le point de protester quand, de part et d’autre, deux parties des murs s’ouvrirent, révélant des niches de garde d’où surgirent deux personnages aux muscles noueux. Ils décochèrent des regards hostiles aux hommes de l’Empire avant de passer leur arc sur l’épaule et de se retirer. Le vieil homme attendit qu’ils soient hors de vue avant de continuer en direction des portes.
— Venez, dit-il avec un éclat étrange dans le regard. Le Gardien de l’Empereur vous attend.
Les portes s’ouvrirent en silence sur des centaines de cierges qui éclairaient une salle immense. Pellaeon jeta un bref regard sur le vieil homme avec une prémonition soudaine de peur. Un frisson courut à partir de sa nuque. Inspirant profondément, il suivit Thrawn, Rukh et Poldrei.
Ils étaient dans une crypte.
Aucun doute. À part les cierges à la flamme vacillante, il n’y avait dans la salle qu’un bloc massif et sombre placé au centre.
— Je vois, fit calmement Thrawn. Ainsi, il est mort.
— Il est mort, confirma le vieil homme derrière eux.
— Naturellement ? demanda Poldrei.
— Il est mort, éluda leur hôte. Voyez-vous tous ces cierges, Grand Amiral ?
— Oui, je les vois. Le peuple a dû lui rendre un grand hommage.
— Un hommage ? fit le vieil homme avec mépris. À peine. Non, ces cierges marquent les tombes des étrangers d’autres mondes qui sont venus ici depuis sa mort.
Pellaeon lui fit face tout en braquant instinctivement son blaster. Poldrei, piqué au vif, jeta un regard brûlant en direction du Grand Amiral. Thrawn, lui, attendit encore quelques secondes avant de se détourner lentement.
— Et comment sont-ils morts ? demanda-t-il.
Un sourire effleura les lèvres du vieil homme.
— Je les ai tués, bien entendu. Tout comme j’ai tué le Gardien. (Il leva les mains, paumes vers le haut.) Tout comme je vais vous tuer maintenant.
Des éclairs bleus jaillirent de l’extrémité de ses doigts.
Et disparurent à un mètre de distance sans laisser la moindre trace.
Tout s’était passé tellement vite que Pellaeon n’eut même pas le temps de tressaillir, encore moins de faire feu. Tardivement, il leva son blaster et sentit une onde d’air brûlant passer sur sa main. Poldrei était lui aussi resté stoïque, comme s’il analysait toujours ce qu’il venait de voir.
— Arrêtez, fit Thrawn avec sérénité. Gardien, comme vous avez pu le constater, nous n’avons rien de visiteurs ordinaires.
— Le Gardien est mort ! aboya le vieil homme, et ce dernier mot fut presque noyé par un nouveau jet d’éclairs.
Qui, une fois encore, disparurent dans le néant.
— Oui, le vieux Gardien est mort, acquiesça Thrawn en criant pour se faire entendre. Et vous êtes le Gardien à présent. C’est vous qui protégez la montagne de l’Empereur.
— Je ne sers aucun Empereur ! rétorqua l’autre en jetant une troisième salve. Mon pouvoir n’appartient qu’à moi !
Et, aussi soudainement qu’elle avait commencé, l’attaque prit fin. Le vieil homme dévisagea Thrawn, les mains encore levées, avec une expression perplexe et étrangement excitée.
— Vous n’êtes pas un Jedi. Comment faites-vous ?
— Soyez des nôtres et vous apprendrez.
Le vieil homme se dressa de toute sa hauteur.
— Je suis un Maître Jedi, grinça-t-il. Je n’ai à me joindre à personne.
Pellaeon avait autrefois côtoyé quelques maîtres Jedi, même si ses souvenirs de cette époque lointaine étaient un peu flous. Il était sûr d’une chose : aucun ne ressemblait à
ça. D’après son expression, Poldrei était exactement du même avis.
— Je vois, fit Thrawn. Dans ce cas, permettez-nous de nous joindre à vous. (Ses yeux ardents se posèrent sur le visage du « Jedi ».) Et permettez-nous de vous montrer que vous pouvez disposer d’un pouvoir que vous n’avez encore jamais imaginé. D’un pouvoir que même un Maître Jedi peut désirer.
Durant un long moment, le vieil homme ne le quitta pas du regard, des expressions complexes jouant sur son visage.
— Très bien, dit-il enfin. Venez. Nous allons parler.
Thrawn inclina brièvement la tête.
— Merci. Puis-je vous demander à qui j’ai l’honneur de m’adresser ?
— Certes.
Le vieil homme avait retrouvé son attitude altière et sa voix résonna dans le silence de la crypte :
— Je suis le Maître Jedi Joruus C’Baoth.
Pellaeon eut un frisson glacé.
— Jorus C’Baoth ? souffla-t-il. Mais…
Il se tut. C’Baoth le toisait comme Pellaeon lui-même l’eût fait avec un officier junior qui aurait parlé sans qu’on l’y invite. S’il avait été étonné par ce nom, Thrawn n’en laissa rien paraître ; quant au Moff Poldrei, son regard grave et pensif resta fixé sur leur hôte.
— Venez, répéta-t-il enfin en se tournant vers Thrawn. Nous allons parler.
Il le précéda hors de la crypte, vers le soleil. Plusieurs groupes de gens s’étaient rassemblés sur la place en leur absence, se tenant à l’écart de la crypte et de la navette. Ils chuchotaient nerveusement.
À une exception près. À quelques mètres de distance, sur leur passage, se tenait un des deux gardes que C’Baoth avait expulsés. On lisait sur son visage une expression de fureur à peine contenue ; et il serrait son arbalète qui était armée.
— C’est sa maison que vous avez détruite, dit C’Baoth, presque sur le ton de la conversation. Il ne fait pas de doute qu’il aimerait se venger.
Il avait à peine prononcé ces paroles que le garde leva son arbalète et tira. Instinctivement, Pellaeon plongea tout en braquant son blaster…
Et, à trois mètres des Impériaux, le carreau fut brusquement stoppé en pleine trajectoire.
Pellaeon regarda un instant le projectile de bois et de métal avant de comprendre lentement ce qui s’était passé.
— Ce sont nos invités ! lança C’Baoth d’une voix visiblement destinée à être entendue de tous. Ils seront traités comme tels.
Avec un craquement, le carreau se fracassa et tomba en miettes sur le sol. Avec réticence, le garde abaissa son arbalète, mais la rage brûlait encore dans son regard. Thrawn l’observa encore une seconde, puis fit un geste à l’adresse de Rukh. Le Noghri pointa son blaster et tira…
Trop vite pour que l’œil pût suivre, une pierre plate fut arrachée au sol et coupa directement le faisceau qui se dissipa de façon spectaculaire.
Thrawn se tourna vers C’Baoth avec surprise et colère.
— C’Baoth !
— Ce sont mes gens, Grand Amiral Thrawn, le coupa l’autre, et sa voix avait la dureté de l’acier. Pas les vôtres. Les miens. Si l’on doit infliger une punition, c’est à moi que cela incombe.
Un instant, les deux hommes s’affrontèrent du regard. Puis, avec un effort visible, Thrawn retrouva son calme.
— Certainement, Maître C’Baoth, dit-il. Veuillez m’excuser.
C’Baoth hocha la tête.
— Mieux. Bien mieux.
Il renvoya le garde d’un mouvement du menton.
— Venez. Nous allons parler.
— Maintenant, fit C’Baoth en les invitant à s’installer sur de grands coussins, vous allez me dire comment vous avez pu repousser mon attaque.
Une grimace à peine perceptible flotta sur les lèvres de Thrawn.
— En fait, c’est très simple.
Il regarda l’ysalamir qu’il portait sur ses épaules et tendit un doigt pour caresser son long cou.
— Ces créatures sont appelées des ysalamaris. Elles vivent de façon sessile dans les arbres, sur une lointaine planète de troisième catégorie. Elles disposent d’un talent très intéressant et sans doute unique – celui de pouvoir repousser la Force.
C’Baoth fronça les sourcils.
— Que voulez-vous dire par « repousser » ?
— D’elles-mêmes, elles rejettent sa présence. Tout comme une bulle remonte vers la surface de l’eau. Un seul ysalamir peut créer une bulle de dix mètres de diamètre ; et en groupe, ils en font de bien plus grandes.
— Je n’avais jamais entendu parler d’une telle chose, fit C’Baoth avec un émerveillement presque enfantin. Comment une pareille créature a-t-elle pu évoluer ?
— Je ne le sais pas vraiment, avoua Thrawn. Je suppose qu’ils ont développé cette faculté pour survivre, mais je ne saurais imaginer de quelle manière. (Il haussa un sourcil.) Mais peu importe. Pour l’heure, ce talent seul est suffisant pour le but que je poursuis.
Le visage de C’Baoth s’assombrit.
— Et ce but est d’abattre mon pouvoir ?
Thrawn haussa les épaules.
— Nous espérions trouver ici le Gardien de l’Empereur. Je voulais m’assurer qu’il nous permettrait de nous identifier et d’expliquer quelle était notre mission. (Une fois encore, il flatta le col de l’ysalamir.) Mais nous protéger du Gardien était un petit extra. Pour nos amis, j’ai un projet bien plus intéressant en tête.
— Et qui est ?
Thrawn sourit.
— Chaque chose en son temps, Maître C’Baoth. Et seulement à condition que nous ayons une chance de visiter l’entrepôt de l’Empereur dans le Mont Tantiss.
C’baoth plissa les lèvres.
— La montagne, c’est donc tout ce que vous voulez.
— Oui, certainement, j’en ai besoin, acquiesça Thrawn. Ou du moins, de ce que j’espère y trouver.
— Et qui est ?…
Thrawn l’étudia un instant.
— Des rumeurs ont couru, juste avant la Bataille d’Endor, selon lesquelles les chercheurs de l’Empereur avaient finalement mis au point un manteau-bouclier authentique. Je le veux.
Et il ajouta, comme après réflexion :
— Il me faudrait aussi un peu de technologie, un rien.
— Et vous croyez que vous allez trouver ces boucliers de protection dans la montagne ?
— J’espère trouver ou bien un modèle expérimental ou, du moins, l’ensemble des données pour le construire. Lorsque l’Empereur a fait installer son entrepôt ici, c’était en partie afin d’être certain que les outils technologiques intéressants ou potentiellement utiles n’allaient pas être perdus.
— Oui, ainsi que les interminables récits de ses glorieuses conquêtes, grinça C’Baoth. Salle après salle, on ne trouve que ça : des roucoulements d’autosatisfaction.
Pellaeon se redressa.
— Vous êtes allé à l’intérieur de la montagne ?
Il avait pensé jusqu’alors que l’entrepôt était fermé par toutes sortes de verrous et de barrières.
C’Baoth lui adressa un regard aussi patient que méprisant.
— Bien sûr que j’y ai pénétré. C’est moi qui ai tué le Gardien, vous ne l’avez pas oublié, non ? Donc, ce sont les petits jouets de l’Empereur que vous voulez ; et vous savez maintenant qu’il vous suffit d’aller dans la montagne, avec ou sans mon aide. Pourquoi restez-vous là, alors ?
— Parce que la montagne n’est que partiellement ce que je désire, lui dit Thrawn. J’ai également besoin de m’attacher un Maître Jedi comme vous.
C’Baoth se laissa aller dans son coussin avec un vague sourire cynique dans sa barbe que Pellaeon n’aima guère. En fait, il n’appréciait pas cette conversation depuis le début, et l’expression sur le visage du Moff lui apprit que Poldrei, étonnamment silencieux, pensait exactement la même chose.
— Ah, nous y voici enfin. Et c’est là, je suppose que vous êtes censé m’offrir tout le pouvoir que même un Maître Jedi tel que moi peut désirer ?
Thrawn lui rendit son sourire.
— C’est exact. Dites-moi, Maître C’Baoth : connaissez-vous bien la désastreuse défaite que l’Empire a subie lors de la Bataille d’Endor, il y a cinq ans ?
— On m’a rapporté des échos. L’un des étrangers qui est venu ici nous en a parlé.
Le regard de C’Baoth se porta vers le palais, de l’autre côté de la place.
— Mais notre conversation fut très brève.
Pellaeon sentit sa gorge se serrer, mais Thrawn, lui, ne parut pas remarquer ce que cela impliquait – ou s’en désintéressait complètement.
— Alors, vous avez dû vous poser la question : comment quelques dizaines de vaisseaux de la Rébellion ont-ils bien pu mettre en déroute une force impériale qui leur était supérieure dans un rapport de dix contre un.
— Je ne consacre guère de temps à de telles supputations, fit C’Baoth d’un ton sec. Je suppose que les Rebelles se sont simplement montrés de meilleurs combattants.
— En un sens, c’est vrai, dit Thrawn. Les Rebelles se sont mieux battus que nous, mais pas à cause d’un entraînement particulier ni de talents spéciaux. Ils se sont mieux battus que la Flotte parce que l’Empereur était mort.
Il se tourna vers Pellaeon.
— Vous y étiez, Capitaine… Vous avez sans doute dû le remarquer. Il y a eu soudain une perte de coordination entre les vaisseaux et les équipages, une perte d’efficacité, de discipline. Cette perte, pour me résumer, de ce que nous appelons l’esprit de combat.
— Il y a eu aussi une certaine confusion, dit Pellaon, très roide.
Il commençait à deviner où Thrawn voulait en venir, et ça ne lui plaisait pas du tout.
— Mais rien qui ne puisse être facilement expliqué par les contraintes normales de toute bataille.
— De tels retournements n’ont rien d’inédit dans l’histoire militaire, approuva Poldrei.
— Vraiment ? La perte de l’
Executor – et la faillite, l’incompétence de dernière minute de ce chasseur Tie qui a provoqué la destruction de l’Étoile Noire elle-même ? La perte de six destroyers stellaires dans des engagements dont ils auraient dû se tirer facilement ? Ce ne sont là que les contraintes normales de la bataille ?
— Ce n’était pas l’Empereur qui commandait la bataille, répliqua Pellaeon avec une ardeur qui le surprit. Pas du tout. J’étais là-bas, Amiral –
et je sais. — Oui, Capitaine, vous y étiez, fit Thrawn d’un ton soudain plus dur. Et il est grand temps que vous ôtiez le bandeau que vous avez sur les yeux et que vous regardiez la vérité en face, aussi amère qu’elle vous paraisse. Vous n’avez plus l’esprit de combat – comme tous ceux de la Flotte Impériale. C’était la volonté de l’Empereur qui vous motivait. C’était l’esprit de l’Empereur qui vous donnait votre force, votre résolution, votre efficacité. Vous étiez aussi dépendants de sa présence que si vous n’étiez que des borgs implantés dans un combat d’ordinateurs.
— Ce n’est pas vrai, rétorqua Pellaeon, l’estomac tordu par la douleur. C’est impossible. Nous avons continué de lutter après sa mort.
— Oui, fit Thrawn, d’un ton paisible et méprisant. Vous avez continué de lutter. Comme des cadets.
C’Baoth se redressa.
— Ainsi, c’est donc ce que vous attendez de moi, Grand Amiral Thrawn ? Que je transforme vos vaisseaux en marionnettes rien que pour vous ?
— Pas du tout, Maître C’Baoth, fit Thrawn en retrouvant un ton détaché. J’ai choisi avec soin ma comparaison avec un combat de borgs implantés. L’erreur fatale de l’Empereur fut de vouloir contrôler à lui seul toute la Flotte Impériale, aussi complètement que possible, et constamment. À la longue, cette volonté explique la défaite. Je souhaiterais simplement que vous amélioriez la coordination entre les vaisseaux et les forces d’attaque – et ce seulement dans les périodes critiques et dans des situations de combat particulièrement sélectionnées.
C’Baoth lança un regard à Pellaeon.
— Dans quelle intention ? grommela-t-il.
— Pour ce dont nous avons déjà discuté. Le pouvoir.
— Quelle sorte de pouvoir ?
Pour la première fois depuis qu’ils avaient débarqué, Thrawn parut pris de court.
— Celui de conquérir les mondes, bien entendu. De vaincre définitivement la Rébellion. De rétablir dans toute sa gloire ce qui fut l’Ordre Nouveau de l’Empire.
C’Baoth secoua la tête.
— Grand Amiral Thrawn, vous ne comprenez pas le pouvoir. Conquérir des mondes où jamais vous ne reviendrez, ça n’est pas le pouvoir. Non plus que de détruire des vaisseaux et des gens, de défaire des rébellions que vous n’avez pas affrontées face à face. (Il balaya l’air de la main avec, dans les yeux, une lueur surnaturelle.) Ceci, Grand Amiral, c’est le pouvoir. Cette cité, cette planète, ces gens. Chaque humain, chaque psadan, chaque Myneyrsh qui vit ici m’appartient. Chacun d’eux est
à moi. (Il regarda la fenêtre.) Je les éduque. Je commande. Je punis. Leur vie et leur mort sont entre mes mains.
— Ce qui est précisément ce que je vous offre, dit Thrawn. Des millions de vies – des milliards, si vous le souhaitez. Toutes les vies que vous voudrez.
Le capitaine jeta un coup d’œil au Moff Poldrei ; il pâlissait à une vitesse effarante.
— Ça n’est pas la même chose, fit C’Baoth avec une note de patience paternelle dans la voix. Je n’ai nul désir d’exercer un pouvoir lointain sur des vies sans visage.
— En ce cas, vous pourriez régner sur une seule cité. Petite ou vaste, comme vous le souhaiterez.
— Mais je règne déjà sur celle-ci.
Le regard de Thrawn s’étrécit.
— J’ai besoin de votre assistance, Maître C’Baoth. Dites-moi votre prix.
C’Baoth sourit.
— Mon prix ? Le prix de mes services ?
Brutalement, son sourire s’effaça.
— Grand Amiral Thrawn, je suis un Maître Jedi. Et non pas un mercenaire à votre solde comme votre noghri.
La menace était brûlante dans sa voix.
Il jeta un regard méprisant à Rukh, qui se tenait de côté, silencieux.
— Oh, oui, noghri, ajouta-t-il. Je te connais, toi et ton peuple. Les Commandos de la Mort privés de l’Empereur ; vous assassinez et vous mourez selon les caprices d’hommes tels que Dark Vador ou le Grand Amiral ici présent.
— Dark Vador servait l’Empereur et son Empire, répondit Rukh dont les yeux sombres s’étaient posés sans ciller sur le Jedi. De même que moi.
— Peut-être.
C’Baoth revint à Thrawn.
— Je dispose de tout ce que je désire ou dont je peux avoir besoin, Grand Amiral Thrawn. À présent, vous allez quitter Wayland.
Thrawn n’esquissa pas un mouvement.
— Maître C’Baoth, répéta-t-il calmement, j’ai besoin de votre assistance. Et je l’aurai.
— Sinon, que ferez-vous ? grinça C’Baoth. Vous demanderez à votre Noghri d’essayer de me tuer ? Ce serait assez amusant.
Il regarda Poldrei.
— Lancerez-vous un débarquement de vos stormtroopers, Moff ? demanda-t-il à l’intéressé qui se contentait de l’observer d’un air sombre.
Il se tourna vers Pellaeon.
— À moins que ce brave commandant de destroyer ne tente d’effacer ma cité de la planète depuis son vaisseau en orbite. Mais vous risqueriez de causer des dégâts à la montagne, non ?
— Mes artilleurs pourraient détruire cette cité sans même griller l’herbe du Mont Tantiss, répliqua Pellaeon. Et s’il vous faut une démonstration…
— Du calme, Capitaine ! fit Thrawn. Donc, Maître C’Baoth, c’est le pouvoir face à face que vous préférez ? Je puis comprendre cela. Bien que dans ce cas vous n’ayez plus de véritable adversaire.
Il regarda songeusement par la fenêtre.
— Mais c’est peut-être le fond du problème. Je me suis toujours dit que même les Maîtres Jedi devenaient un jour trop vieux pour ne plus passer leurs jours qu’à paresser au soleil.
C’Baoth se rembrunit.
— Prenez-garde, Grand Amiral Thrawn. Ou je pourrais bien prendre le risque de vous détruire malgré tout.
— Ce ne serait pas un très grand risque pour un homme de votre talent et de votre force, le contra Thrawn. Mais vous avez probablement déjà un autre Jedi sous votre commandement.
C’Baoth fronça les sourcils, à l’évidence décontenancé par ce soudain changement de sujet.
— Un autre Jedi ?
— Bien sûr. Il convient tout à fait à un Jedi d’avoir un autre Jedi de rang inférieur qui le serve. Un Jedi qu’il puisse former, dominer et châtier à volonté.
Une ombre passa sur le visage de C’Baoth.
— Il ne reste pas d’autre Jedi, murmura-t-il. L’Empereur et Vador les ont pourchassés et détruits.
— Pas tous, fit doucement Thrawn. Deux nouveaux Jedi sont apparus dans les cinq dernières années : Luke Skywalker et sa sœur, Leia Organa Solo.
— Et qu’en ai-je à faire ?
— Je peux vous les livrer.
Durant une longue minute, C’Baoth le dévisagea, partagé entre l’incrédulité et la soif du pouvoir absolu. Et la soif l’emporta :
— Tous les deux ?
— Tous les deux, confirma Thrawn. Réfléchissez à ce qu’un homme de votre talent pourrait faire avec de nouveaux Jedi. Les modeler, les transformer, les recréer selon l’image que vous souhaitez. Et, en plus, il y a une prime… car Leia Organa Solo est enceinte. De jumeaux.
C’baoth en eut le souffle coupé, tandis que le Moff se mordit les lèvres.
—
Des jumeaux Jedi ? — Ils en ont le potentiel, du moins si j’en crois mes sources, fit Thrawn avec un sourire. Mais, bien entendu, ce qu’ils deviendront à terme sera de votre seul ressort.
C’Baoth observa Pellaeon avant de revenir à Thrawn.
Lentement, il se leva.
— Très bien, Grand Amiral Thrawn. En contrepartie des Jedi, je me joindrai à vos forces. Prenez-moi à votre bord.
— Le moment venu, Maître C’Baoth, fit Thrawn en se redressant à son tour. Tout d’abord, nous devons aller jusqu’à la montagne de l’Empereur. Notre marché dépend du fait que j’y trouve ce que je cherche.
Les yeux de C’Baoth lancèrent un éclair.
— Certes. Espérons donc tous deux que tel sera le cas.
Il y avait une mise en garde dans sa voix.
Il leur fallut sept heures de quête dans la forteresse qui était bien plus vaste que Pellaeon ne l’avait imaginé. Mais, à la fin, ils trouvèrent les trésors que Thrawn avait espéré. Le manteau-bouclier… Ainsi que ces quelques petits outils technologiques presque ordinaires.