Et en version non téléchargeable (sinon, Jagen va me dire que c'est pas bien).
STAR WARS
Dîner dansant
- Kléber Valéra -
Librement inspiré d’un épisode de Robot Chicken spécial Star Wars.
Dark Vador s’adressa à eux.
« Voulez-vous nous faire l’honneur de vous joindre à nous ? »
Boba Fett, jusqu’alors dissimulé derrière un panneau à la gauche du seigneur sith, s’avança lentement afin d’être bien visible. Han supposa que le chasseur de primes voulait leur montrer clairement que c’était lui qui les avait trouvés. Sans doute pour prouver qu’il était plus fort, ou en tout cas plus malin qu’eux. Ou alors, voulait-il par sa présence appuyer le fait qu’aucun des trois ne pouvait en réchapper… Mais ça, Han l’avait déjà compris de toute façon. Il se retourna, ainsi que Leia et Chewbacca. Une vingtaine de stormtroopers prêts à tirer arrivaient dans leur dos.
« Je n’avais pas le choix : ils étaient là avant que vous arriviez, leur dit simplement Lando. Je suis désolé. »
Han regarda brièvement Leia, puis son regard se porta à nouveau vers l’homme en qui il pensait pouvoir avoir confiance :
« Pas autant que moi. »
Chewbacca hurla quelque chose, puis ils se résignèrent. Han, Leia, Chewbacca et Lando pénétrèrent dans la salle à manger, et la porte se referma sur eux.
« Je vous en prie, asseyez-vous.
-Que voulez-vous de nous ?
-Dans un premier temps, que vous vous asseyiez. Ensuite, nous bavarderons, de choses et d’autres. »
De mauvaise grâce, les trois premiers convives prirent place, chacun devant une assiette. Han était assis au plus près de Vador. Non pas qu’il apprécia particulièrement le bonhomme, mais c’était en quelque sorte pour protéger Leia. Ceci-dit, comment aurait-il pu la protéger de cet homme-là ?
Chewbacca s’assit en face de Leia. Lando quant à lui, n’avait pas fait un pas de plus après être entré dans la pièce.
« Que se passe-t-il Calrissian, vous ne venez pas vous asseoir ? Notre compagnie vous poserait-elle problème ? »
Sous sa peau noire, l’industriel était vert. Mais il ne souhaitait pas indisposer un hôte aussi dangereux que celui-là. Aussi se laissa-t-il dicter sa conduite et alla-t-il s’asseoir à côté de Chewbacca, qui le regardait avec des yeux noirs. Enfin, le seigneur sith prit place à son tour, tout au bout de la table.
« Et Fett ? Il ne dîne pas avec nous ? lança Han en regardant par-dessus l’épaule de l’exécuteur impérial. »
Le mandalorien s’apprêta à lancer une réplique cinglante au contrebandier, mais Vador répondit à sa place.
« Le chasseur de primes est là pour surveiller vos moindres faits et gestes, capitaine Solo. Des fois qu’il vous prendrait l’idée de ne pas vous conduire convenablement. »
Bien entendu, tous savaient que c’était faux. Même sans Boba Fett, la réputation de Vador n’était plus à faire : il aurait largement su se défendre tout seul, même si les trois rebelles s’étaient jetés sur lui en même temps. Mais c’était surtout le signe pour le chasseur de primes que s’il était autorisé à rester pour s’assurer que sa cible demeurait en suffisamment bon état pour pouvoir être livrée à Jabba, il n’était pas autorisé à parler pendant cette petite entrevue. Ce qui, d’ailleurs, contenta tout à fait le bonhomme. Assister intégralement au spectacle sans rien demander à personne et sans même avoir besoin de parler avec qui que ce soit : le bonheur.
Vador appuya sur un bouton de la table. Aussitôt, les portes derrière lui s’ouvrirent, laissant entrer des serveurs chargés de plateau. Ils disposèrent le tout devant les convives puis s’éclipsèrent par le même chemin.
« J’ose espérer que vous apprécierez ce repas que j’ai demandé spécialement pour vous. »
Han regarda son assiette, remplie d’un mets qui semblait succulent. Mais tout cela n’était pas cohérent, pas du tout. Cela ressemblait un peu au dernier repas du condamné. Cette attention était plus que douteuse, et son visage exprima rapidement ce doute.
« Oh… Vous me vexez, capitaine. Croyez-vous que j’aurais fait empoisonner cette nourriture, après tout le mal que je me suis donné pour vous retrouver ? Et puis… Fett ici présent ne serait pas très satisfait si je lui livrais votre cadavre…
-C’est très aimable à vous, monseigneur. Mais, je n’ai pas très faim.
-Dommage pour vous. Vous devriez peut-être profiter de ce repas : il pourrait être le dernier ! »
Cet argument fit mouche. De toute façon, le seul autre désagrément qui pouvait être lié à cette collation était un interrogatoire. On avait très bien pu y ajouter des produits qui les forceraient à dire la vérité, sur l’Alliance par exemple. Mais à quoi bon lutter : vu leur position, de tels produits pouvaient bien leur être inoculés par d’autres moyens bien plus déplaisants, alors autant choisir la manière douce. Quant au poison, l’hypothèse était effectivement douteuse. Han avala lentement un morceau de viande, suivi de peu par un Chewbacca qui semblait en être arrivé à la même conclusion que lui. Lando regardait son plat d’un œil vide. Son arrangement avec Vador lui était haïssable, même si, sur le moment, il pensait l’avoir fait pour protéger de nombreuses autres vies. Mais ce dîner ridicule l’obligeait à rester au plus près des amis qu’il avait trahis. Et ça lui coupait tout l’appétit.
Leia non plus ne mangeait pas. Elle regardait Vador avec une lueur de défi dans le fond de la pupille.
« Ce repas n’est sans doute pas assez noble pour une princesse alderaanienne ?
-Je ne saurais vous le dire, Vador, car je n’ai plus de princesse que le nom. Alderaan n’est plus, grâce à l’Empire !
-Qui sème le vent, récolte la tempête.
-Vous m’ôtez les mots de la bouche. L’empire a semé un vent qui a supprimé la liberté des peuples et les a…
-L’EMPIRE, princesse, a ramené l’ordre où il n’y avait que désordre et chaos. Vous êtes bien trop jeune pour comprendre, car vous n’avez pas pu connaître la période noire qui a ravagé toute la galaxie. Mais je puis vous assurer que si l’Empire n’avait pas été là, la discorde aurait continué à mettre la galaxie à feu et à sang.
-Et quand bien même l’empire eut été un jour un mal nécessaire, il a fait son temps ! Votre règne de la terreur doit pren…
-Vous pensez combattre pour un idéal mais vous êtes d’une incroyable naïveté. L’Empire est et sera toujours nécessaire. Je le répète, vous n’étiez pas encore née. Mais si vous aviez pu voir l’état de la galaxie pendant la guerre des clones, vous n’auriez pas de telles convictions.
-Ah non ? Pourtant mon père (la gorge de Leia se serra à cette évocation) a lui aussi connu cette époque que vous me décrivez. Cela ne l’a pas empêché de décider qu’il n’avait pas d’autre choix que de vous combattre. C’est bien la preuve que toutes vos justifications…
-VOTRE PERE ? ET OU ETAIT-IL PENDANT QUE L’ARMEE DE LA REPUBLIQUE SE BATTAIT AU FRONT, ET SOUFFRAIT ? PENDANT QUE SES ENNEMIS VENAIENT FROIDEMENT EXECUTER DES CITOYENS CIVILS A PLUSIEURS MILLIERS DE PARSECS DE CORUSCANT ? Votre père… Les Mon Mothma, les Fang Zar et consort… Des planqués ! Ils ne se sont jamais battus ! Bien protégés dans leurs bunkers de riches politiciens, loin du peuple, qu’ont-ils su de leurs souffrances ? Votre père, comme les autres qui ont critiqué l’Empire… Ils étaient si loin de ceux qu’ils gouvernaient qu’ils n’avaient pas la moindre idée des conséquences atroces de leurs petits jeux de pouvoirs. L’Empereur, lui seul, a vaincu nos ennemis séparatistes, a ramené l’ordre, a vaincu la corruption qui était la source de tout ; et en proclamant l’Empire, a fait en sorte que jamais elle ne réapparaisse. Pour que des petites filles comme vous puissent continuer à grandir dans le luxe et le confort d’un foyer bien chaud ! »
Han cessa de manger. Leia faisait une tête étrange. Il s’attendait à ce qu’elle ne réponde rien, mais elle le fit pourtant.
« Vous êtes sans doute convaincu par votre prose, Dark Vador. Et je ne doute pas qu’elle parvienne à en convaincre d’autres, de temps à autres. Mais je vous signale simplement que j’ai quitté ce luxe et ce confort pour vous combattre. J’ai quitté ce monde de luxe pour lutter contre la tyrannie de l’empire et les massacreurs d’innocents. Si l’empereur était bien comme vous le dites un mal nécessaire, j’aimerais savoir à quel moment vous décidez qu’un mal devient pire que celui contre lequel il était censé lutter au départ ? »
Vador marqua un temps.
« Encore Alderaan, c’est cela ? Songez que la destruction de votre seule planète a pacifié de nombreuses planètes encore belliqueuses qui se tiendront maintenant à carreau. Nous avons ainsi évité de nombreuses guerres bien plus meurtrières que la simple disparition d’une planète.
-Et une fois encore, je suis sûre que vous en êtes convaincu !
-Alderaan n’est rien en comparaison des morts que la Rébellion laisse dans son sillage lorsqu’elle nous affronte.
-Il n’y a pas qu’Alderaan ! Parlez-moi donc de ce que l’empire fait aux wookies… (Chewbacca grogna son assentiment) Ou aux priapulins, ou encore…
-ASSEZ ! »
Un silence long s’installa. Plus personne ne songeait à manger. Leia pensa un instant qu’elle avait été trop loin dans la provocation. Si elle avait été seule, cela ne l’aurait pas dérangée, de toute façon elle se savait condamnée. Mais il y avait Han, Chewie, et même ce collaborateur de Lando Calrissian, qui aurait pu subir un excès de colère du seigneur noir.
Et après tout ? Han et Chewie savent ce qu’ils risquent. Ils ont mis du temps à se décider, mais ils font partie des rebelles maintenant –même si Han le nie encore. La cause rebelle importe plus que le reste. Et au diable Calrissian !« Palpatine a d’ores et déjà perdu la guerre, Vador.
-Et je suis sûr que vous en êtes convaincue, princesse. »
Nouveau silence. Han termina son plat principal, supposant qu’il n’aurait peut-être plus droit à de la nourriture décente avant longtemps. Lando tenta d’avaler une petite bouchée, qui lui resta dans le fond de la gorge.
« C’est inévitable, Vador. Même si vous parvenez à écraser notre Alliance, une autre rébellion éclatera, puis une autre, et encore une autre, jusqu’à ce que votre gouvernement d’oppresseurs disparaisse définitivement de cette galaxie.
-Qu’importe. Je peux vous assurer que nous ne serons plus là, ni l’un ni l’autre, pour voir ce jour arriver. »
Vador s’imagina pouvoir vivre éternellement. Non, c’était ridicule : il n’y croyait plus du tout à présent. Vivre très longtemps, en régnant avec son enfant sur la galaxie entière, lui suffirait amplement.
« En somme, nous sommes tous mortels, c’est ça ? Peu vous importe que l’homme qui nous dirige tous soit un tyran, pourvu qu’il reste au pouvoir tant que VOUS êtes son bras droit, n’est-ce pas ?
-Vous prétendez pouvoir me comprendre, princesse Leia ? Mais que savez-vous de moi, au fond ? Je n’ai ni famille ni attache. Peu vous importe qui je suis. Je ne serai pour vous rien de plus que votre bourreau.
-Ravie que vous reconnaissiez au moins cela…
-Et vous aussi, devez pourtant comprendre qu’il est plus commode d’être du bon côté de la barrière, n’est-ce pas ?
-Même si c’est celui du mal ? »
Vador eut une hésitation. Sans explication, l’image d’une femme passa devant ses yeux. Une femme très belle, brune, avec un grain de beauté sur la joue gauche. Qui était-elle ? Il la connaissait bien pourtant. Il avait pensé à elle il y a deux ans de cela, quand il avait appris l’identité du jeune rebelle qui avait détruit l’Etoile Noire dans le ciel de Yavin. Mais il ne s’était pas rappelé son visage depuis plus de vingt ans.
Il espéra que son hésitation ne s’était pas remarquée.
« Même si c’est celui que VOUS appelez le mal, oui.
-Vous n’avez toujours pas répondu à ma question.
-Laquelle ?
-Celle du traitement réservé par votre empire au peuple wookie. »
Leia avait décidé de ne pas lâcher l’affaire, finalement. Peu importe ce qu’il en résulterait. Chewbacca et Han redevinrent subitement très attentifs.
« Les wookies ont été parmi les premiers peuples à contester l’autorité de l’Empire. Ils ont mérité ce qu’il leur est arrivé. »
A ces mots, Chewbacca oublia la situation, oublia à qui il avait affaire. Il recracha son pilon droit devant lui et se lança sur la table. Renversant tous les plats, il se jeta sur le seigneur sith, probablement dans le but de lui arracher les bras, à la façon traditionnelle des wookies. Lando bondit de sa chaise. Leia s’en voulut de ses paroles : elle aurait dû s’attendre à une telle réaction de la part de Chewie. Han tenta vainement de rattraper son compagnon. Mais ce ne fut pas utile de toute manière : aussitôt que le wookie s’était expulsé de sa chaise, Vador avait simplement levé la main. Le wookie s’était retrouvé à deux mètres au-dessus de la table, pendant dans les airs, se débattant contre la force invisible qui le maintenait ainsi. Han, qui avait agrippé son copilote pour le stopper, était resté accroché à la fourrure du wookie et pendait en l’air lui-aussi. La scène aurait pu être drôle dans d’autres circonstances.
Han lâcha Chewbacca et se laissa retomber à côté de sa chaise.
Tous étaient debout à présent, même Chewbacca, bien que cela ne dépendait en rien de sa volonté.
« Le wookie ne manque pas de vigueur à ce que je vois. C’est une bonne chose, probablement. »
Vador le laissa redescendre. Mais Chewbacca n’était pas calmé le moins du monde. Le wookie furieux tenta à nouveau d’agresser l’exécuteur impérial.
Las, Vador fit un nouveau geste nonchalant de la main, ce qui envoya le grand poilu de l’autre côté de la pièce, frapper la double-porte blanche de l’entrée. Chewie fut assommé sur le coup.
Personne ne bougea pour l’aider –bien que l’envie fut grande. Tous attendaient la réaction de Vador.
« Bien… Je crois qu’il n’est de bonne compagnie qui ne se quitte. Et vous n’avez que trop abusé de mon hospitalité.
-Alors c’est comme ça ? Vous partez ?
-Rassurez-vous, capitaine Solo. Nous nous reverrons plus vite que vous ne l’auriez souhaité, je pense. Mais profitez malgré tout des restes de ce repas. Comme je l’ai dit : ce pourrait très bien être le dernier. »
Dark Vador quitta la pièce.