Ze suite avec moult anagrames à résoudre
Et toujours le jeu avec la couleur, je n'abandonne pas, je sais que vous pouvez trouver à qui elle renvoie ! ^^
Je soufflais comme un bœuf et transpirais à grandes gouttes dans mon uniforme noir alors que je manquais de déraper et de me fouler la cheville une fois de plus en ayant posé le pied sur une pierre instable. Je m'accordais quelques secondes de repos en m'adossant contre la paroi de la falaise, m'éventant avec ma casquette alors que le reste de la colonne progressait tant bien que mal à travers les rochers. J'allais peut-être couvrir le dos de mon uniforme de poussière de roche mais je m'en moquais complètement.
On comprenait tout à fait pourquoi les résistants avaient choisi le mont Moecuht comme base d'opération. Situé à une bonne dizaine de klicks de Fyr, c'était un amas de rochers et de plateaux, dont le plus haut était puissamment boisé. C'était aussi le refuge d'une bande de résistants que nous traquions depuis plus de trois mois, quelques semaines après l'assassinat du sergent de la CompForce.
Mes menaces avaient porté leurs fruits et moins de vingt-quatre heures après avoir pris dix fyriens en otage, l'assassin s'était rendu. Nous avions alors relâché les otages, sans leur faire le moindre mal.
Après enquête, il s'était avéré que le meurtre n'avait rien de politique ou idéologique. Le sergent avait tout simplement entretenu une liaison avec une femme mariée. L'époux trompé avait décidé de se venger en assassinant l'amant de sa femme. Une simple histoire de mœurs en définitive. Mais ce n'était pas l'image qu'en avait eu Fyr.
La planète avait vu un employé administratif, un simple petit fonctionnaire de rien du tout, rentrer dans un café rempli à ras-bord de soldats et ouvrir le feu sur un sous-officier de l'armée d'occupation. L'homme était passé pour un véritable héros au sein de la résistance fyrienne. Et les héros provoquaient toujours des émules.
Ca avait commencé de manière légère. Des tracts, des réunions secrètes dans des caves. Je devais admettre que j'avais sous-estimé l'ampleur de la chose. Je m'étais persuadé que mon occupation "douce" me prémunirait contre les actes séditieux. J'avais eu tort.
Journaux clandestins, grèves, manifestations, sabotages,...tout ceci s'était rapidement multiplié dans les rues de Fyr. Mais les choses avaient encore empirées avec les premiers attentats. On s'en était pris à mes hommes en pleine rue, par le biais de bombes, quelquefois en les exécutant alors qu'ils patrouillaient dans les rues.
J'avais renforcé notre présence dans la capitale, instaurant un couvre-feu et multipliant les représailles après chaque attentat. Si après une exécution d'otages, la situation se calmait quelques jours, tout recommençait rapidement. Nous savions que tout était dû à un seul réseau de résistance, soutenu par l'Alliance Rebelle. Réseau que nous étions justement en route pour démanteler de façon ferme et définitive.
Nous avions vite compris que les résistants s'étaient repliés en pleine nature, se servant de leur connaissance du terrain pour égarer nos hommes et réussir leurs opérations de guérillas.
Jusqu'à présent, nous n'arrivions pas à leur mettre la main dessus. Mais aujourd'hui, tout allait changer, grâce à la Phalange. C'était une force paramilitaire ultracoopératrice, issue de la population fyrienne, fondée par des volontaires. Reconnaissables à leurs vêtements civils à la coupe très militaire et à leur équipement léger, ce serait aujourd'hui le baptême du feu pour ces hommes. Je jetais un œil derrière moi et vis du coin de l'œil cinq de ses membres, discutant avec des hommes de la CompForce. Leur chef suprême, Jdorph Snaaned ouvrait la marche du petit groupe.
L'armée de la COMPORN envoyée au Mont Moecuht ne comptait que peu de troopers. J'avais préféré me baser sur les soldats de la Phalange, réservant le savoir faire de la CompForce au véhicules et au soutien aérien. Un char TX-130T passa justement à mes côtés, ignorant le terrain accidenté grâce à ses répulseurs. Une fois le véhicule parti un peu plus loin devant, Snaaned s'approcha de moi et me fit un signe de tête respectueux.
_Les éclaireurs ont déjà pris position sur le haut plateau mon Commandant. D'après eux, les bois regorgent d'activité ennemie. C'est plutôt bon signe, me glissa t-il avec un sourire carnassier.
Snaaned, comme l'essentiel des miliciens de la Phalange n'était rien avant notre arrivée que le chef d'une bande d'extrémistes, spécistes et pro impériaux. Ils avaient gagné en activité après notre arrivée, transformant leur minuscule bureau politique en un organisme voué à développer la coopération sous toutes ses formes.
J'avais fini par accepter de leur donner des armes et un semblant de pouvoir militaire à condition que la Phalange se place sous les ordres immédiats de la CompForce. Aujourd'hui, près de huit cent miliciens marchaient aux côté de nos hommes, dans la bataille qui allait avoir lieu.
_Je peux vous poser une question mon Commandant ? demanda Snaaned en soulevant son béret noir et en se grattant brièvement la tête. Vu la tête du terrain, pourquoi est-ce qu'on utilise pas des TR-TT ? On en a bien en garnison à Fyr non ?
Je renfilai ma casquette et me remis à gravir la route, tout en répondant au phalangiste :
_Les walkers auraient peut-être convenu pour grimper le long de cette route mais c'est tout, expliquais-je en haussant la voix alors que le bruit strident d'un chasseur TIE déchirait les airs. Ils auraient été inutiles sur le plateau. J'ai besoin de chars TX pour faire une expérience.
Snaaned hocha simplement la tête avant de reprendre :
_Ca sera un bon baptême du feu pour mes gars. Vous pouvez pas savoir à quel point ils sont impatients de faire la peau à ces salauds de maquisards ! Et encore merci de vous appuyer sur la Phalange pour cette opération. C'est chic de votre part de nous faire autant confiance.
J'opinai du chef sans ajouter un mot. Inutile de dire à Snaaned que je refusai de voir mes soldats, des hommes de valeur, tomber dans l'escarmouche qui allait débuter. Je préférai mille fois voir des phalangistes déguster pour mes hommes, qui seraient bien à l'abri sous les épaisses plaques de duracier des chars et des chasseurs TIE.
En plus des miliciens de la Phalange et des hommes de la CompForce, la colonne comptait aussi dans ses rang des caméramans et des journalistes qui retransmettraient l'assaut en direct sur l'Holonet.
Notre victoire serait un bon instrument de propagande dans toute la galaxie, renforçant la réputation d'invincibilité des troupes de l'Empire, tout en flattant la gloriole des phalangistes, qui se prendraient pour de véritables stars puisque diffusés jusqu'aux confins de l'univers.
Mes jambes me tiraient mais je me forçai à serrer les dents et à grimper. Il nous fallut encore trente bonnes minutes de marche forcée pour atteindre le haut plateau mais une future victoire valait bien quelques douleurs dans les pieds. Le plateau était très étendu, sur une dizaine de klicks.
Quelques dizaines de mètres de terre nue séparaient l'endroit où nous nous trouvions de l'orée des bois, dont on voyait clairement l'ombre des sapins se détacher dans la lumière du matin. Laissant aux troupes encore quelques minutes pour se déployer, je me retournai et observais le paysage qui servirait de toile de fond à la bataille, tout en ordonnant aux journalistes de faire quelques prises de vue. Fyr était une planète faite de colline et de vallées verdoyantes, avec ici et là des lacs qui semblaient presque noirs à une telle distance. On voyait au loin, Fyr, la capitale et encore plus loin, la mer intérieure dans laquelle mes hommes avaient l'habitude de se baigner. Peut-être que j'y retournerai piquer une tête dans les jours à venir si nous arrivions à nous défaire du maquis aujourd'hui.
Un éclaireur de la CompForce vint me voir et fit le salut impérial. Le mien, bien entendu.
_Mon Commandant, les premières reconnaissances d'électrojumelles confirment la présence des résistants dans cette forêt. Plusieurs centaines. Armés et en position de tir. Ils nous ont vus arriver.
_Ou entendus, commentais-je en voyant les chasseurs TIE décrire de longs cercles au dessus de la plaine, comme un gundark qui tournerait en rond avant de bondir sur sa proie pour la déchiqueter.
Dites aux éclaireurs de repérer précisément les zones ou se concentrent les maquisards. Qu'ils transmettent ces données aux pilotes. Et à partir de là, on pourra lancer la bataille.
Les ordres ne furent pas longs à être suivis. Moins de dix minutes plus tard, j'ordonnais le déclenchement de l'oraguerre. Le nom était peut-être horriblement stupide et discordant mais la tactique, elle, ne l'était pas. Avant tout venaient les chasseurs TIE. Ils allaient noyer les positions ennemies sous un déluge de lasers jusqu'à leur en faire perdre la tête. Extrêmement bref et brutal, ce serait la foudre.
Puis quand les ennemis seraient encore désorientés par ce barrage de feu et de destruction, ils verraient une nuée de chars foncer sur eux en un roulement d'enfer et d'annihilation.
Grondement violent et destructeur, ce serait le tonnerre.
Enfin, une flopée de soldats viendrait terminer le travail, les débusquant et les tuant un à un, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus. Meurtre de masse et massacre sur une large zone, ce serait l'averse.
Foudre, tonnerre, averse.
Les trois composants d'un orage.
Les trois éléments de l'oraguerre.
Pour l'instant, la tactique n'avait été testée que sur le filmplast. Aujourd'hui, bien plus d'une bataille, c'était une stratégie de combat que je testais. Par définition, l'ennemi aurait toutes les peines du monde à se défendre contre les éclairs et le tonnerre. Par contre, comme tout animal mis le dos au mur, il pourrait mordre férocement pour chercher à s'échapper. L'infanterie risquait de payer un lourd tribut dans la troisième phase de l'oraguerre. Voilà pourquoi, par prudence, ce serait la Phalange qui lors de ce test grandeur nature, tiendrait le rôle de la pluie. Au pire, même si les miliciens étaient décimés, on devait pouvoir gagner avec un orage sec, c'est à dire, juste avec les TIE et les chars.
Dans un hurlement strident qui rappelait le cri d'un animal sauvage, les chasseurs TIE se lancèrent à l'attaque. Les premiers tirs de lasers émeraudes frappèrent la frondaison, y boutant le feu.
Des tirs de répliques rouges sang y répondirent, sans doute des batteries antiaériennes placées là pour protéger le maquis. Mais la DCA des résistants était conçue pour abattre des bombardiers qui volaient lentement, pas des chasseurs qui attaquaient en piqué. Aucun tir antiaérien ne toucha les TIE, même quand ces dernières frôlèrent la cime des arbres. Le feu gagna en intensité, commençant à dévorer les bois du mont Moecuht.
A côté de moi, je sentais les phalangistes trembler d'excitation, mourant d'envie de se jeter dans la bataille. Ils devraient encore attendre un peu.
A contrario, mes soldats, sanglés dans les chars TX-130T étaient calmes et presque détendus. Ils savaient qu'eux n'auraient que de peu de chance de mourir dans les minutes qui allaient suivre.
Les caméras étaient braquées sur la forêt et les speakers se lançaient déjà dans des discours enflammés, comme s'ils se trouvaient eux-mêmes au cœur de la bataille. L'escarmouche devrait donner une certaine audience à l'Holonet aujourd'hui.
Les flammes se firent plus puissantes, crachant vers le ciel une épaisse fumée noire.
Dans quelques minutes, les chasseurs n'auraient plus une assez bonne visibilité pour continuer leurs attaques en piqué. Par sécurité, je les fis sortir de la zone de vol tout en faisant signe aux chars de se lancer à l'assaut.
Une centaine de chars TX-130T se jetèrent simultanément en direction des bois, enfonçant la frondaison comme un coup de vibrolame dans de la chair humaine. Je m'adressais d'un petit air triomphal à Snaaned :
_Vous avez compris pourquoi j'ai préféré les TX aux TR-TT ? Les walkers auraient eu du mal à avancer sur un humus de cendres, de braises et de bois coupé. Les répulseurs des chars les épargnent de tous ces problèmes.
Le milicien hocha simplement la tête, trop concentré sur la bataille à venir pour vraiment comprendre mes paroles. Nous perdîmes les chars de vue au fur et à mesure qu'ils enfonçaient les sapins. Des bruits discordants de tirs lasers, d'explosions et de cris parvenaient sporadiquement jusqu'à nous.
C'était la rapidité la clé de l'oraguerre. Il fallait noyer l'ennemi sous le feu et le duracier. Les chars allaient enfoncer les lignes ennemies et les briser, isolant les maquisards en petits groupes démoralisés. Une proie de choix pour les phalangistes.
J'attendis encore dix minutes que les chars brisent au maximum la formation et la foi des résistants.
Puis, je fis un petit signe à Snaaned qui rugissant de plaisir, entraîna ses huit cent miliciens dans la bataille. Les phalangistes n'avaient pas encore posé leurs bottes dans l'orée des bois que déjà, quelques maquisards hagards en sortirent, les vêtements calcinés et le regard fou, le plus souvent blessés et apeurés, cherchant juste un refuge au fracas du tonnerre qu'étaient les TX.
La Phalange ne leur laissa même pas le choix de se rendre : ils braquèrent leurs fusils E-11 et tirèrent sans sommation. Les premiers maquisards s'écroulèrent, d'autres cherchèrent à répliquer ou à s'enfuir. Mais que pouvaient faire de petits groupes d'une demi-douzaine contre huit cent assassins ? Le sang allait couler et tout ça, sous les yeux de milliards d'holospectateurs en galaxiovision. C'était beau la technologie.
Avec un soupir lassé, je détournai le regard de la forêt dévorée par les flammes, les lasers et la mort. Je n'avais plus d'ordre à donner pour l'instant. Autant consulter les premiers rapports en attendant que tout ça se termine enfin.
Je passais les deux heures que dura la bataille à faire du travail de paperasse et à répondre aux questions des journalistes.
_Monsieur le Délégué, diriez vous que c'est une grande victoire pour Fyr aujourd'hui ? me demanda un speaker en me tendant le micro.
_Je pense que c'est avant tout une victoire pour tous les citoyens de l'Empire répondis-je en affichant un sourire de façade. Le nettoyage du plateau du mont Moecuht a eu lieu dans une action d'envergure contre les terroristes de Fyr. De nombreux prisonniers sont faits en ce moment même. Parmi eux se trouvent de nombreuses natures criminelles, responsables de meurtres, de vols, ou d'attentats...ils sont gardés par des membres de la Phalange qui luttent au coude à coude avec les soldats impériaux contre la Rébellion.
Encore une fois, il y avait une façon de présenter les choses. Les spectateurs n'avaient pas à savoir que les phalangistes ne faisaient pas de prisonniers, que les criminels se trouvaient plutôt dans notre camp que chez les maquisards et que le combat avait été aussi égal qu'un star destroyer ouvrant le feu sur un gizka englué par l'action d'une grenade glop.
Je poursuivis ma petite litanie de propagande.
_J'aimerais en profiter pour saluer le courage et l'abnégation de ces hommes, qui chaque jour, risquent leur vie pour garantir celles de milliards d'êtres sensibles qu'ils ne connaissent pas. Merci à eux et ne les oubliez pas.
Je devais être magnifique sur les écrans Holonet de la galaxie entière, dans mon uniforme noir griffé d’argent, posant au sommet d'un plateau devant une forêt détruite par le feu.
Les journalistes et les caméramans me remercièrent et continuèrent leur reportage alors que je m'éloignai d'eux et que les premiers bombardements d'eau avaient lieu sous mes yeux, cherchant à éteindre les foyers d'incendie.
Un phalangiste vint à moi, fit le salut impérial et m'expliqua que Snaaned et son unité avaient définitivement remporté la victoire, en capturant le quartier général ennemi. J'exprimais mon souhait de me rendre sur place sans attendre. Les miliciens me guidèrent sous la frondaison calcinée et plus d'une fois ma botte s'enfonça dans d'épais tas de cendre. Une odeur atroce de brûlé et de chair carbonisée s'installa dans mes narines pour ne plus les quitter. Alors que nous avancions tant bien que mal, je voyais ici et là des groupes de phalangistes fusiller à tour de bras des maquisards qui avaient rendu les armes, parfois par simple jeu.
J'eus un choc en voyant une escadrille de jeunes résistants, qui devaient à peine avoir vingt ans, fusillés juste au dessus d'une immense fosse commune dans laquelle la gravité entraîna les cadavres. Je ne m'approchai pas. Je savais très bien que la scène devait se répéter dans toute la forêt en ce moment même. Cela me refit penser à Fejor et à l'assassinat des enfants Jedi. Je secouai alors violemment la tête pour chasser ce souvenir. Je ne devais pas penser à ça. Je n'avais pas eu le choix de toute façon, comme ici.
Quelqu'un devait bien faire le sale travail. Et puis on m'avait confié une tâche alors je la remplissais, c'était aussi simple que ça.
Un quart d'heure de progression nauséeuse plus tard, nous atteignîmes le QG des maquisards. C'était un réseau de cabanons retranchés en bois épais, assez résistants pour arrêter un tir d'E-Web. Des copeaux de bois frais souillaient la mousse verte de la forêt. Quelques cadavres encore fumants étaient étendus ici et là. Snaaned entouré de ses hommes, mettait à bas le drapeau de résistants, censé représenter une Fyr libre de notre présence, pour le remplacer par l'étendard impérial et celui de la Phalange. Les miliciens me saluèrent quand ils me virent arriver.
_C'est une victoire totale mon Commandant, s'enchanta Snaaned. Plus de quatre cent tués chez les terroristes. Et le compteur n'a pas fini de grimper, gloussa t-il avec un clin d'œil ravi.
_Vous avez découvert quelque chose d'intéressant ? demandais-je en désignant d'un coup de menton le cabanon principal.
_Qu'ils ont tenu jusqu'au bout, faut bien leur accorder ça à ces salauds, déclara le bras droit de Snaaned. Mais en même temps, à presque deux contre un, y avaient aucune chance. Certains se sont rendus. Ils ont pas dû comprendre qu'on était pas là pour les épargner…on est pas des Jedi, nous.
Eclat de rire gras et général chez les phalangistes. Snaaned se reprit.
Sérieusement mon Commandant, on a peut-être mis la main sur quelque chose. Venez voir.
D'un geste de la main, il m'invita à pénétrer dans le plus grand des cabanons devant lequel flottait à présent les armes de l'Empire. Le quartier général des résistants était assez dépouillé : une table de plastacier sur laquelle était déployée une holocarte d'Etat Major des environs, quelques armes posées contre le mur, une armoire remplie de soins au bacta...la rusticité des lieux tranchait nettement avec le confortable hôtel particulier dans lequel le COMPORN avait pris ses quartiers. Je suivis Snaaned jusqu'à une volée d'escaliers qui s'enfonçait dans une sorte de sous-sol nu, rempli à ras-bord de caisses et de containers. Une caisse avait été éventrée et vomissait littéralement des fusils blasters, des grenades ou encore des morceaux d'armures de combat.
_Il y a un véritable arsenal là dedans, m'expliqua le phalangiste en embrassant d'un geste les réserves des résistants. Une chance qu'ils aient pas eu le temps de s'en servir contre nous. Sinon, on aurait compté bien plus d'une dizaine de pertes.
_Où est-ce qu'ils ont eu tout ça ? m'exclamais-je en découvrant une tourelle lourde en kit.
_Ils ont été livrés, voilà tout, me répondit une voix derrière moi.
Moi et Snaaned se retournèrent d'un même mouvement pour découvrir un homme d'assez grande taille, aux cheveux mi-longs et roux, dans des vêtements à la coupe sobre.
_Mon nom est Kulas Brbaie, expliqua l'inconnu en sortant une carte d'identité afin de prouver ses dires. Je travaille pour l'Inquisitorus.
L'Inquisition maintenant...comme si nous n'avions déjà pas assez de problèmes dans nos relations avec l'armée régulière. Avions-nous vraiment besoin de nous récupérer les chiens religieux des Renseignements Impériaux ?
Brbaie progressa doucement jusqu'à nous, tenant à nous serrer la main, ce que je fis non sans déplaisir.
_Et livrés par qui ? demanda Snaaned. Et comment puisque nous avons le contrôle du ciel ?
Brbaie eut un petit rire :
_Par l'Alliance Rebelle, cette question. Ils sont plus malins que vous ne le pensez, milicien. Et puis, corrompre un soldat ou deux pour qu'il ferme les yeux sur certaines zones de vol, c'est à la portée du premier venu.
_Et pourrais-je au moins savoir la raison de votre présence aussi agréable soit-elle parmi-nous, Inquisiteur ?
_Si ça ne vous gène pas, grimaça le religieux avec un air ennuyé, je préférerais en parler dans votre bureau en ville. Les caves des maquisards ne sont pas le meilleur endroit pour parler de ça.
_Comme vous voudrez, répondis-je en le suivant à l'extérieur jusqu'à une navette lambda qui s'était posée dans une clairière calcinée.
Je laissai Snaaned et ses phalangistes régler les derniers détails de "nettoyage" tandis que l'appareil décollait et mettait le cap vers l'astroport de Fyr.
C’est en prenant de la hauteur que je me rendis compte de l’ampleur des dégâts : même si le feu avait été globalement maîtrisé, de lourdes vapeurs grises et noires s’élevaient toujours vers le ciel bleu de Fyr.
Le mont Moecuht serait défiguré pour des années, avant que la nature ne reprenne ses droits. Impressionnant : par l’oraguerre, j’avais frappé les bois assez durement pour des dizaines de mois. Tout ceci en ne laissant que très peu d’hommes sur le carreau. Brbaie ne desserra pas les dents de tout le trajet, même lorsque une fois descendus à l’astroport, nous prîmes l'airspeeder pour rejoindre le QG du Comité. Ce ne fut qu'une fois les portes de mon bureau refermées derrière lui qu'il daigna ouvrir la bouche.
_Je cherche cet homme, dit Brbaie en sortant un portait holographique de sa poche d'un homme d'une quarantaine d'années, aux cheveux noirs, portant écharpe et chapeau mou. Je vous présente l'ex sénateur Jlei Namoun, natif de Kuat. Ou Xam, si vous préférez son nom de code au sein de l'Alliance Rebelle.
Je me passais la main sur les yeux d’un geste las. Après les évènements de ce matin, j’avais mieux à penser qu’à un obscur rebelle, traqué par l’Inquisitorus.
_Et vous pensez que ce Namoun est ici ?
_Je le traque depuis des mois, s'exclama le religieux en se mettant à faire les cent pas. A chaque fois, il me passe sous le nez. Je suis sûr qu'hier à la même heure, il était au mont Moecuht, en train de former les autres terroristes.
_Les former ? répétais-je en levant un sourcil.
_C'est le travail que lui a confié Bel Iblis et les autres chefs rebelles : fédérer les mouvements de résistance partout dans la galaxie en une véritable armée. Vous avez vu l'équipement qu'il leur a apporté..par chance, vous avez attaqué avant qu'ils ne sachent vraiment s'en servir.
_Peut-être que Namoun est mort dans l'assaut ? hésitais-je.
_J'en doute. C'est un salopard intelligent et résigné. Un politique. Pas le genre d'homme à mourir sur le champ de bataille.
Parce que le mont Moecuht avait été une bataille ? Personnellement, j'avais plus eu l'impression de visiter les abattoirs de nerfs de Coruscant...
En soupirant, j’ôtais ma casquette et desserrais le col de mon uniforme. Je posais mon couvre chef à même le bureau et allais jusqu’à jeter ma veste noire sur le dossier de ma chaise avant de m’y affaler. Brbaie lui, resta immobile, dédaignant même le siège que je lui offris.
_Et en quoi puis-je vous aider Inquisiteur ?
_J’ai besoin que vous mettiez les unités militaires de Fyr à ma disposition pour traquer et éliminer Xam.
Je croisai les mains devant moi et formulai la question qui me brûlait les lèvres :
_Et pourquoi est-ce que vous ne faites pas tout votre travail dès maintenant ? Vous n’allez pas me faire croire que l’Inquisition est sans moyen ?
Un sourire en coin passa sur le visage du religieux.
_Je ne suis pas plus enchanté de traiter avec le Comité que le COMPORN doit l’être de travailler avec l’Inquisitorus. Mais mes ordres sont de m’entretenir avec le gouverneur impérial local, autrement dit, vous.
_Je ne suis pas « gouverneur », persiflais-je. Je ne suis que le représentant du Comité pour la Préservation de l’Ordre Nouveau. Ce poste est occupé par des milliers de semblables à travers toute la galaxie.
_Jouez sur les mots si ça vous plaît, il n’empêche que vous représentez l’Empire ici. Pour moi, vous êtes gouverneur.
_Très bien, soufflais-je en abandonnant la partie, peu désireux de me disputer avec un membre de l'Inquisition. Vous serez présenté aux troupes ce soir, lors de la réception qu'on donnera pour fêter la...enfin, l'écrasement du maquis.
_Vous m'en voyez ravi, lâcha le religieux avec un petit sourire.
_Maintenant, si ça ne vous ennuie pas, j'ai encore du travail. Alors si vous voulez bien sortir de mon bureau...un de mes aides de camp vous trouvera bien une pièce où vous pourrez vous installer.
Brbaie fit une petite courbette :
_Je vous remercie de votre accueil monsieur le Délégué. A ce soir, donc.
Je ne répondis pas alors qu'il sortait enfin de mon bureau. Resté seul, je lâchais un long soupir en observant la foule de messages électroniques qui s'empilaient sur mon datapad. Des dizaines de rapports sur l'équipement ennemi, des extraits d'interrogatoires faits avant qu'on n'exécute les maquisards sur place, des statistiques, ce genre de chose. J'avais de quoi m'occuper pour un bout de temps...
Un serveur, impeccable dans sa livrée blanche, passa près de nous en nous proposant du champagne. J'en pris une coupe, imité par mon Etat-Major. La salle de bal où se tenait la réception faisait salle comble et croulait sous les officiers de la CompForce, les dirigeants fyriens ou encore quelques rares phalangistes.
Tous fêtaient la victoire de ce matin, me félicitant pour ma brillante tactique. Je devais être le seul à vraiment me rendre compte que nous avions assassiné quatre cent personnes et détruit une forêt séculaire. Mais en tant que chef de l'armée d'occupation, je me devais de bien paraître et de multiplier sourires, poignées de main et mots de reconnaissance même si j'avais plus le goût de la bile dans la gorge que celui des petits fours.
Nous étions tous en costume ou en smoking. J'avais remis mes habits ocres, content de porter autre chose que mon uniforme noir de Commandant. J'échangeais quelques mots avec mes hommes quand le Premier Pair vint à nous en clopinant presque, tant il semblait mal à l'aise dans son costume de soirée ridicule.
Il fit le salut impérial et se lança dans un discours sans fin d'au moins dix minutes dans lequel il vanta les mérites de la coopération. Cherchant désespérément des yeux quelque chose qui pourrait me tirer de là, je vis Brbaie à quelques mètres de moi, en train de s'entretenir avec Snaaned. Je m'excusai auprès du Premier Pair et me précipitais presque sur les deux hommes. Je préférais encore parler avec des extrémistes qu'avec un être aussi lâche que le Premier Pair.
_Belle fête mon Commandant, commenta le phalangiste en levant sa coupe de champagne. Comme je le dis toujours, faut se détendre après une bonne bagarre. Et on peut dire qu'on s'est bien mis sur la gueule ce matin, hein ?
Sa grossièreté me choquait mais j'étais peut-être trop sensible. On ne remplissait pas une organisation paramilitaire avec des gens un tant soit peu intelligents et qui choisissaient un minimum leurs mots.
_Inquisiteur, dis-je à l'attention de Brbaie. Je vois que vous avez déjà fait la connaissance du lieutenant Snaaned. C'est à lui que je vous confie. Il saura vous aider pour la traque de Xam.
Autant refiler le travail à la Phalange. Ca devait les occuper et libérer mes hommes du poids que serait l'envoyé de l'Inquisitorus.
_Je n'en attendais pas moins de vous, répliqua Brbaie avec un sourire si fin qu'on aurait pu le croire sincère. Je verrai donc avec le lieutenant comment est-ce que nous nous organiserons. Bien sûr, en tant que personne la plus haute gradée de Fyr, vous serez tenu au courant.
Je me bornai à un simple geste du menton. Il ne fallait pas trop en demander non plus. Que Brabaie et la Phalange mettent Fyr sans dessus dessous pour retrouver Nemoun, ça ne me gênait pas. L'important était de protéger mes hommes de toute retombée négative.
Au fur et à mesure que la soirée s'avançait, je sentais la fatigue envahir mon corps. Je dormais déjà très peu en temps normal et mal. Je cauchemardais beaucoup. Généralement, j'essayais de tenir le coup par de petites siestes l'après-midi mais là...
J'étouffais un bâillement avec difficulté. Non, je ne pouvais quand même pas être un des premiers à quitter la fête. J'étais plus ou moins l'hôte après tout. Du coin de l'oeil, je vis le Premier Pair qui enfilai son lourd manteau fourré, se préparant à rejoindre sa voiture. Autant le raccompagner, cela me ferait prendre le frais.
J'emboitais donc le pas du politicien, échangeant quelques banalités avec lui. L'air froid de la nuit fyrienne me fit le plus grand bien, comme une minuscule décharge électrique. J'arriverais peut-être à tenir cette nuit à la réflexion. Je me tenais à côté du Premier Pair qui grimpait dans son speeder quand un soldat surgit de l'intérieur du bâtiment en m'apostrophant, m'expliquant qu'on avait besoin de moi à l'intérieur. En maugréant, je fis quelques pas vers le perron, ce qui me sauva la vie. En effet, au même moment, l'airspeeder du Premier Pair explosa soudainement à moins d'un mètre de moi.
Le souffle de l'explosion me projeta violemment en avant contre les marches de l'escalier. Surpris, j'eus à peine le temps de protéger mon visage. Mes oreilles bourdonnaient, mes avant-bras me faisaient un mal de chien et je crus m'être cassé quelque chose en tombant, ce qui en définitive était bien le cas. Mais surtout, le stress me provoqua une nouvelle crise respiratoire. Mes poumons eurent plus de mal que d'habitude à fonctionner et mon cerveau paniqua. Il eut l'impression que je n'avais plus d'air et que j'allais mourir. Toussant et crachotant, je le crus pendant un ou deux battements de cœur.
Je me repris plus ou moins quand on m'entoura et on m'examina à la va-vite avant de me porter à l'intérieur pour un examen plus approfondi. Mes oreilles me sifflaient et j'entendais mal. Des voix multiples, des ordres, donnés par...par Brbaie. Lorsque je vis le religieux prendre l'ascendant sur mon Etat Major je voulus protester mais je ne pus émettre qu'un sifflement court. On m'injecta un produit tranquillisant alors qu'on me portait vers ma chambre. Une demi-seconde avant que mes yeux ne se ferment, je vis distinctement Brbaie et Saaned ordonner une répression immédiate en prenant mille fyriens en otages. J'essayais de me débattre mais formuler un contre-ordre fut au dessus de mes forces et anesthésié par le produit, je m'endormis.
Cette nuit-là, après le massacre de Moecuht, un message clair fut bien relayé par mes services de propagande : un représentant de l'Empire était intouchable, en particulier quand c'était le Petit Avocat. Cette leçon coûterait mille âmes à la galaxie. En quelques heures, mille personnes étaient assassinées, mille familles endeuillées parce que j'avais été légèrement blessé dans un attentat. Attentat dont je n'étais même pas la cible.
Mais après tout, comme le repétait si souvent le GSA Education, un bon enseignement n'avait pas de prix...n'est-ce pas ?