par Khelaym Sekleth » Lun 26 Fév 2007 - 5:21 Sujet:
Mmmh... je me suis avancé, il s'agissait d'un second indice sur la destinée de Monsieur Ordo ! En tout cas, merci pour vos MP, c'était très instructif et très pertinent surtout !
Comme vous avez été sage ( j'espère ! ) et pour combler votre attente ( j'espère aussi ! ) deux chapitres ( v'lan ! ) d'un coup ! La suite arrive, l'histoire prend forme...
Chapitre 4 : Jeu dangereux
« Tout va bien, Monsieur Kelnan ? »
- Contentez-vous de piloter et de me dire où sont les toilettes, grogna ce dernier.
- Monsieur, nous sommes dans une navette militaire, il n’y a pas de… »
Grey Kelnan n’était pas fait pour les voyages. Il n’était pas pilote dans l’âme et encore moins passager endurci. Il courut jusqu’à la passerelle de débarquement, affolé, puis jusqu’au hangar. Il revint enfin s’assoir avec un sourire apaisé. Il détestait l’effet éprouvé en sortant d’hyperespace. En fait, il était a priori le seul à éprouver cet effet, mais il en était toujours saisi avec une violence. Il n’arrivait pas à comprendre qu’on puisse apprécier de piloter d’étoiles en étoiles. Gêné sans doute par les accès de nausée de son passager, le pilote intervint, sur un ton de conversation. « Dites-moi, Monsieur Kelnan, que faites-vous exactement ?
- Je suis compositeur, murmura Grey en se massant le ventre, les sourcils froncés.
- Vous composez quoi ? Des poèmes ? Des chansons ?
- Un peu de deux. Je compose de l’opéra.
- Ah, ma belle-sœur adore ça. J’en ai un peu écouté avec elle, un truc sullustéen, je crois. – Devant le silence de Kelnan, le pilote embraya directement : - Vous écrivez quoi, vous, en ce moment ?
- L’histoire du Léviathan, une créature monstrueuse qui viendra dévorer la vie elle-même jusque dans les tréfonds de l’existence pour ne laisser qu’un abîme noir, un néant gourmand qui sonnera la fin de toutes choses.
- Aaah !… s’exclama avec un intérêt relativement bien feint le pilote. Il n’ajouta rien, décidant qu’il ne comprenait désespérément rien à l’art. « C’est un peu comme la dichotomie entre bien et mal ? »
Grey lorgna par le hublot. Sous lui s’étendaient présentement les sillons lumineux tracés par la cité qui ne dort jamais, la ville qui, couvrant toute une planète, s’arrogeait le droit de toucher aux nuages. Grey adorait observer les subtiles nuances de violet et de bleu, ces reflets de l’espace qui s’étiolaient dans la lumière toujours vive qui embrouillait les rues élevées dans les cieux de Coruscant. « Coruscant en approche » annonça le pilote, qui lança alors le protocole d’atterrissage, scandant à la radio les coordonnées de leur navette. Kelnan eut un soupire de quiétude, s’étirant avec le premier sourire courbant ses lèvres depuis le début du voyage. « C’est la première fois que vous allez sur Coruscant ? Demanda le pilote.
- Non, j’aime les fins de voyage » expliqua Kelnan en plissant les yeux. « Au fait, ajouta-t-il, pensez à vider les scaphandres…
Il ne passa pas prendre sa réservation à l’hôtel où il logeait. Pas encore. Il préféra aller directement à l’exposition où on devait l’attendre. Il n’avait pu s’empêcher d’aller faire un petit tour aux toilettes du spatioport, afin de se jeter un peu d’eau au visage. Son teint avait toujours été pâle, mais là, il atteignait des pointes dans le reflux sanguin. Puis il avait loué un speeder et avait traversé la cité, s’immisçant dans le mouvement passionné des vaisseaux qui parcouraient l’espace entre les tours. Il gagna une infrastructure étrange, toute de cristal plus ou moins opaque, sinueuse, avec des courbes fuyantes qui se repliaient sur elle-même. Une technique d’architecture complexe soutenait l’ensemble, dont l’intérêt était hautement mathématique. La baie d’atterrissage était une circonvolution fugitive où Kelnan s’arrêta pour descendre. Ses pas sur la surface vitrifiée se saisirent d’échos lointains, et bientôt entrèrent en résonnance avec d’autres pas. L’exposition avait lieu dans les retours cambrés des murs. Des invités se pressaient pour apercevoir les derniers chefs-d’œuvre et la luminosité, trempée dans le verre mural, les dessinaient comme de distraites silhouettes sur des fonds immaculés. Le regard de Grey parcourut des projections tridi, dont une l’intéressa plus que les autres. Il s’agissait d’une simple rue de lumière crue où se taillaient des ombres géométriques. « Une œuvre du fils Sekleth, la famille de riches négociants coruscantéens, dit une voix indubitablement féminine en rodien. Le directeur de la galerie m’a dit que c’était basé sur un travail de Pokvidr, le peintre zabrak fou. Elle est sensée être très politisée. Si l’on y regarde à deux fois, on peut imaginer que cette dichromie représente le combat entre l’Empire et la Résistance et que les silhouettes, c’est nous, pauvres hères prises dans une époque qui nous dépassent, sans pouvoir choisir entre le bien ou le mal. Interprétation plutôt provocatrice. Et un peu surestimé, surtout que l’auteur n’a que 8 ans.
- Content de te voir, Zurik, dit Kelnan.
- Enchantée comme toujours, Kelnan. Suis-moi, que je te montre les différentes pièces. » Kelnan lui proposa son bras et la dame l’accepta, y glissant le sien pour l’emmener sans hésitation dans les couloirs torturés de la galerie. Elle portait une magnifique robe d’un bleu foncé, tirant sur le mauve, dont les lumières tamisées reflétaient des rayons argentés. Ses grands yeux d’un jaune sombre sautaient d’une personne à l’autre, d’un tableau à l’autre, sans discontinuer, comme si elle s’attendait constamment à une surprise des plus mauvaises. « Le thème est la dichromie, en fait. Je ne sais pas si elle restera longtemps à l’affiche, cette expo, parce que franchement, elle est très subversive. Le directeur a fait un pari risqué, surtout en ce moment où l’Empire fait ses lettres, expliqua-t-elle.
- Il y a des chances qu’il se fasse arrêter ?
- Oh, je ne sais pas. Il a peut-être encore des contacts qui le couvriront. Je dis juste qu’ils peuvent aussi interdire tout simplement l’expo et fermer la galerie. Je trouve ça dégoûtant qu’il ose prendre des risques pareils alors que nous avons tant besoin de ce lieu. » Grey adressa un regard lointain à son interlocutrice, puis acquiesça sans rien ajouter. « Alors, et toi, tu écris en ce moment ? demanda Zurik.
- Quand j’en ai le temps. Je voudrais préparer une tragédie. J’aime le souffle tragique, cet élan du fatum qui emporte les personnages et les arrache aux êtres aimés pour les précipiter dans le destin. Je pense écrire une pièce prenant pour trait des Jedi.
- Ce n’est plus très populaire.
- J’ai déjà un sujet, une histoire dont j’ai entendu parler et qui remonte à 4000 ans avant notre ère.
- Ca ne se vendra pas, Grey. Trop loin, trop… de Force. Les gens ont appris à abhorrer les Jedi quand l’Empire le leur a dit.
- Je te trouve très partisane, ce soir.
- Je suis apolitique, très cher. Je fais de l’art. Et des affaires, évidemment. Tiens, voilà ce que je voulais te montrer. » Elle lui indiqua un tableau en bidi, une technique ancestrale qui n’était plus très usitée. Les ombres étaient taillées à la serpe sur un fond orangé, donnant un visage baigné de crépuscule, avec une mâchoire carrée, des pommettes saillantes et un nez aquilin. « C’est mon rendez-vous ? demanda Grey.
- Oui. La commande est pour ce soir, ajouta-t-elle.
- Oh, mais il y a une représentation que je ne voulais pas manquer.
- On sacrifie tant à l’art, soupira la rodienne, qu’on en oublie parfois de le sacrifier à son tour. » Kelnan médita patiemment cette remarque, songeant à la possibilité qu’elle ait eu du sens, puis lui dit, en lui tendant un databloc : « Avant de partir, j’ai quelque chose à te demander. Pourrais-tu suivre à la lettre les instructions là-dessus ?
- Tu payeras un extra ? – Kelnan lui faisait un « oui » de la tête, elle survola les données – Je n’ai jamais vu quelque chose de si bizarre. Tu prépares une petite surprise ?
- Sacrifice pour sacrifice, je préfère que les autres y passent plutôt que moi. »
Il passa directement après à son hôtel. Ce dernier était un anneau d’un à deux kilomètres de diamètre, tournant autour d’un axe titanesque. La façade extérieur était toute de verre, une immense surface réfléchissante qui répondait à Coruscant son propre horizon. L’intérieur de l’anneau s’échelonnait en une centaine de larges balcons qui se bousculaient autour des corridors vitrifiés menant à l’axe central dont l’on pouvait voir les terrasses, en jardin suspendu.
Le speeder de Kelnan prit place dans la baie prévue à cet effet et un jeune twi’lek en livrée très chic lui proposa même d’aller garer son engin dans le parking prévu pour la clientèle. Ce que Grey accepta non sans un sourire de suffisance, montant les marches immaculées jusqu’au hall d’accueil. Après un court trajet en ascenseur, il put gagner sa chambre. Le sas s’ouvrit avec dolence et il se glissa à l’intérieur, jetant son manteau quelque part sur un fauteuil. Il leva la main vers l’interrupteur et s’arrêta. « J’aime votre style, murmura Grey sans allumer.
- Merci, Monsieur Kelnan. Nous aimons aménager nos rencontres, répondit une voix dans l’obscurité.
- Sans être indiscret, puis-je savoir comment vous m’avez trouvé ?
- Nous avons mis beaucoup en œuvre pour cela. Nous ne lésinons pas sur les moyens, dans ces cas-là. J’ai une question à vous soumettre de même, Monsieur Kelnan. Qu’êtes-vous venu faire sur Coruscant ? » Grey, avant de répondre, ménagea, quant à lui, une petite pause, pour s’assoir sur lit à répulseurs qui flottait à quelques centimètres de la moquette velue. « On m’a envoyé rassurer les vôtres, dit-il d’une voix claire.
- Je suis étonné. Je ne croyais pas que c’était votre fort, les excuses.
- Il n’est pas question d’excuse, Monsieur, mais de solutions.
- Et que proposez-vous ? » Son interlocuteur changea légèrement de position. Grey suivait les fluctuations dans le noir, son regard plongé dans l’écran de ténèbres. « Nous allons simplement nous débarrasser des menus problèmes qui pourraient vous embarrasser, expliqua-t-il. Et par extension, nous embarrasser. L’Empire ne remontera jamais jusqu’à vous.
- C’est peut-être déjà le cas et vous le savez. Si l’Empire a un doute, ils n’utiliseront pas les canaux habituels pour nous abattre et vous le savez. L’Empereur est trop rusé pour ça et ses hommes trop sadiques. S’ils savent, il est déjà trop tard pour nous disculper, nous devons effacer toutes preuves.
- Nous les effacerons. J’ai les moyens de le faire.
- Vous nous aviez dit que vous aviez les moyens d’accomplir ce pour quoi nous avons payé si cher.
- Tout n’est pas perdu » insista Kelnan. La pénombre était bien heureuse, elle cachait à la perfection son sourire de chat. « Vous savez aussi bien que moi que sur la liste de ces preuves, vous et les vôtres figurés en tête. » Kelnan avait du mal à maîtriser son cynisme. Son entraînement lui permit de rester coi, alors que son hôte se levait sans un mot de plus et quittait la pièce, le délaissant sur ces dernières menaces.
Grey n’eût pas à beaucoup étudier la situation pour se douter du piège. Sa chambre était bien exposée, une belle vue sur Coruscant, certes, mais l’hôtel se mouvait perpétuellement en un cycle interminable, ce qui excluait qu’un sniper put l’atteindre. S’il n’avait pas été si grinçant durant la conversation, il se serait presque soupçonné de l’avoir fait exprès pour savoir d’où viendrait le danger et non pour la vue.
Dès que le sas se fut refermé sur son interlocuteur, il se laissa glisser derrière le lit à répulseurs. Ce dernier marmonna doucement, se balançant alors que les répulseurs travaillaient à compenser la soudaine perte de poids. Grey le tira avec lui jusqu’à l’autre côté de la pièce. Le sas n’était pas resté clos très longtemps et déjà deux grenades tombaient sur le sol carrelé. Repoussant le lit vers l’entrée, Kelnan attrapa sa mante et s’en couvrit la tête en bondissant dans la pièce adjacente. Un flash illumina la chambre, et ses oreilles sifflèrent soudainement.
Des hommes entraient en bousculant le lit qui flottait paresseusement. Grey saisit le blaster dans une poche de son manteau et fit feu dans la fenêtre qui vola en éclat. Ils devaient se préparer au dehors et Kelnan profita de l’accalmie pour casser les derniers morceaux de verres qui tenaient encore à l’encadrement de plastacier. Avec aisance, il posa un pied sur l’étroit parapet et feignit la maladresse, voyant une tête sortir de la fenêtre de sa chambre. « Il s’échappe par la salle de bain ! » entendit-il hurler, tout en tirer sur l’importun. Et il lâcha prise. Il songea un instant que Zurik aurait pu le vendre. Le trahir. Ou même ne pas accéder du tout à sa requête.
Il chuta pourtant dans un speeder qu’on avait garé à quelques mètres sous sa salle de bain. Il jeta aussitôt par-dessus bord sa veste, qu’il avait sciemment lesté auparavant pour reproduire une certaine densité. Dans une embardée rapide, il gara son speeder plus bas, à l’abri des regards indiscrets sous la courbe bombée de la façade. Là, il était à l’abri des regards des occupants de son ancienne chambre. Par contre, sa pelisse, d’un rouge couturé d’argent, serait visible encore un moment pour les mercenaires curieux qui passeraient la tête par la fenêtre.
Et Grey savait qu’ils le feraient. Ils ne se contenteraient sans doute pas de ça, mais Grey savait aussi qu’ils n’iraient pas chercher un cadavre dans les étages complexes de Coruscant. Non, ils iraient plutôt dire au patron que la cible était morte. Kelnan se permit de s’allonger un instant en savourant ce moment.
Passer pour mort était vraiment sa spécialité.
Chapitre 5 : Main Basse
On n’en vient jamais à la piraterie par désir. C’est un hasard, un coup du destin. La piraterie vous prend, vous épuise et vous libère, mort et harassé. A moins de savoir se retirer en haut de l’affiche.
Sur Coruscant, la pluie tombait sur une partie de la planète, couvrant d’un manteau gris les étendues immenses de bâtiments qui crevaient les cieux. Le Théâtre Impérial était une structure sphérique, une couronne posée sur un puissant immeuble aux formes effilées. Des cerceaux, par un procédé de poussée électromagnétique, tournaient en de longues et hypnotiques ondulations tout autour. Le théâtre réunissait ce que Coruscant comptait d’huiles importantes pour des spectacles comme on ne pouvait en voir nulle part ailleurs dans la galaxie.
Kaj Sowpar faisait parti de ses plus fidèles habitués. Cette image de gentleman qui se rendait à l’opéra le galvanisait dans sa reconversion. La piraterie n’était bien moins à la mode, maintenant que les impériaux avaient bouclé l’espace connu. Enfin, il aurait pu aller traîner ses guêtres du côté des lunes hutt, mais devenir corsaire avait été autrement plus rentable. Il avait dirigé sa flotte avec un mandat de l’Empire, tout en l’étoffant de plusieurs navires et à présent, il avait son propre réseau parfaitement légal, qui rapportait de l’argent tout en se couvrant de l’aval impérial – tant qu’il tiraillerait les positions rebelles qu’il rencontrerait. Et puis, ça lui permettait de rencontrer la haute et cela, il appréciait. Il avait remarqué, au court de ses longues promenades aux côtés des dames d’En-Haut, qu’elles étaient bien plus belles que celles qui circulaient dans les comptoirs bordés de bouges infâmes où il avait accosté, dans le temps.
Sowpar venait tout juste de quitter le Théâtre. Encore une grande représentation. Il réajusta son habit mais ne mit pas sa capuche, malgré les gouttes qui s’écrasait sur sa coiffure. La pluie avait cette faculté qu’elle agaçait plus que tout autre chose les têtes de Coruscant et Kaj, qui demeura sur le trottoir, le visage tendu vers le ciel pleurant, sourit en les regardant gagner leurs airspeeders l’échine courbée, pour amoindrir sans doute la surface blessée par l’eau. Ils semblaient prendre les jours pluvieux comme des insultes non seulement contre leurs tenues parfaitement soignées mais aussi envers leur technologie qui avait asservi la nature. Kaj y voyait un rappel de cette force qui avait construit l’univers et le reprendrait un jour.
Il prit la direction de son prendre engin, se glissa aux commandes. Il détestait délaisser le pilotage à un simple droïde – après tout, on ne passe pas plusieurs années de sa vie comme commandant d’un navire pour abandonner ce genre d’habitude. Parmi les huiles, il n’en connaisait pas beaucoup qui pilotait leur appareil. Si, peut-être Bail Organa, mais cela faisait longtemps qu’il avait quitté le Sénat. Alors qu’il y réfléchissait, son airspeeder, dont la capote était rabattue, s’éleva dans un mouvement courbé, sifflant, pour aller rejoindre le trafic bondé qui formait une toile changeante autour des flèches constellant Coruscant.
Son appartement coiffait un bâtiment. Il l’avait acheté si cher qu’il ne se souvenait plus que du nombre de zéros en surbillance sur le projecteur holographique que lui avait montré le promoteur. Mais qu’importe, tant qu’il y aurait de la guerre, il y aurait de l’argent. Cela revenait à dire, tant qu’il y aurait des êtres pensants dans la galaxie. Ce n’était pas pour lui déplaire.
Le sas d’entrée, au-delà de la baie d’atterrissage, était couverte d’une plante rampante, un lichen alien qu’il avait fait importée et qui, par simple impulsion électrique, changeait de couleur, donnant une décoration murale des plus sophistiquées. Le sas s’ouvrit en un mouvement circulaire alors qu’il entrait. De larges baies vitrées donnaient une vie imprenable sur le tapis de lumière de la ville-planète. Il appréciait la pénombre, à cette altitude. Le ciel, visible au-dessus de lui par une voûte s’ouvrant en dôme de verre, lui rappelait ses longues années à bourlinguer dans l’espace. Lorsque l’on est pirate une fois, on l’est toute sa vie. Il s’interrompit en contemplant les étoiles, poussant un léger soupir. Il n’aperçut qu’au dernier moment l’intrus, alors que ce dernier joua quelques notes du piano, un ancien instrument de musique qu’il avait acheté pour la décoration, d’un noir mât et brillant, derrière lequel il était assis. « Bonsoir, Commandant Sowpar, la représentation fut-elle à votre goût ? dit-il, d’une voix très douce, alors qu’une mélodie diaphane commençait à s’élever.
- Parfaite, marmonna Kaj, qui décida d’entrer dans son jeu pour gagner du temps, ne dégainant pas son pistolet blaster passé à sa ceinture.
- L’Empire a beaucoup donné pour conserver des spectacles magnifiques. Je regrette de ne pouvoir moi-même m’y rendre plus souvent. J’aime tant écouter.
- Il y a plus à voir qu’à écouter, à vrai dire, fit Kaj, qui essayait de discerner son interlocuteur. La voix était claire, on eût dit une voix de femme, ou d’adolescent. Il voulait ardemment allumer la lumière mais avait peur que cela ne fasse éclater les hostilités.
- Je ne suis pas ici pour parler de cela, mais je rencontre si peu d’amateur que je me permets de vous en entretenir. Qu’est-ce qui fut joué, ce soir ?
- Une pièce d’Olmott Barown.
- Le « Navire Désolé » ?
- Oui, celui-là même, confirma Kaj, dont le souvenir n’était plus très clair alors même que la représentation était toute récente d’une heure ou deux toute au plus. Mais il avait surtout observé une demoiselle d’un balcon face au sien.
- Elle est très belle. Son action se situe durant la Grande Guerre de l’Hyperespace, le saviez-vous ? Il a romancé l’entrée dans notre espace des Forces Sith. Une œuvre particulièrement intéressante, bien qu’elle ait été en partie réécrite à des fins propagandistes par l’administration impériale.
- Bon, que voulez-vous, à la fin ? » lança Kaj, qui craquait, glissant subrepticement une main à sa ceinture. Pour toute réponse, il vit une lame rouge crever l’obscurité. « Bon sang, j’aurais dû m’en douter. » Il dégaina et fit feu sans trop regarder, plongeant derrière son canapé sans attendre. Il eût raison, son tir vint percuter le cuir du meuble dans un sifflement qui lui fit mal au porte-feuille. Son seul moyen de s’en sortir était cette console sur sa table basse. « Qu’est-ce qui vous prend ? N’ai-je pas été votre meilleur soutien ? hurla-t-il, pour temporiser.
- Mes maîtres ne semblent pas voir cela de la même manière, dirai-je.
- C’est… pour l’acolyte Darryn ? C’est pour ça qu’ils veulent me tuer ? Ils pensent qu’on pourra remonter jusqu’à vous par moi ?
- On ne peut rien vous cacher, Commandant Sowpar.
- J’aimerai tellement, pourtant ! » Il s’était levé pour faire face au Sith, le regardant tout en conservant un sang froid exemplaire et, soudainement, fit feu sur le magnifique lustre de cristal correllien avec un grincement de dents pénible. Ce dernier ondula et chuta sur son agresseur, lui laissant le temps de bondir sur sa table basse et d’activer les droïdes de guerre. Des alcôves s’ouvrirent, laissant rouler les boules de métal alors que le Sith, d’une pression de sa volonté, repoussait le lustre vers la baie vitrée. « Main levée » murmura-t-il et sur ses traits diaphanes, Kaj eut presque l’impression de lire un sourire.
Il sauta dans son ascenseur tout en entendant le bruit rassurant d’un mur de lumière incandescente jaillissant sur le Sith et appuya sur le bouton pour descendre et se mettre à l’abri.
La silhouette du Sith sembla soudainement s’arracher à la gravité, s’élevant souplement jusqu’au jeu de poutres métalliques soutenant le dôme de verre qui se constellait d’impacts bouillonnant de blaster. D’un coup de sabre-laser, il se fit une sortie et s’y engouffra sans attendre, la Force l’environnant le faisant presque voler sous les vents violents qui soufflaient entre les tours. Une fois à l’abri, il murmura, avec un sourire « main basse ». Il pressa un bouton.
L’ascenseur de Kaj s’ébranla soudainement. Il comprit alors qu’il était tombé dans un piège.
Le rez-de-chaussée s’emplit alors de flammes. Tout le bâtiment trembla sous l’explosion.
( A suivre... )