Nicravin a écrit:Plus on en parle, plus je le veux celui-là
Si tu aimes les vaisseaux lourds, je te conseille
ce site, les images sont vraiment superbes...
Et maintenant, un chapitre tout beau tout chaud, que je viens de finir à l'instant !
Chapitre 21 «On ne peut pas gagner une guerre sans alliés. Il faut prendre toute l’aide disponible, qu’on le veuille ou non. »Destroyer de classe Arrow
Knight’s Blade, en orbite autour de Kuat, 728 jours après la bataille de Géonosis.
Jagen observa d’un air maussade la malle posée devant lui dans le hangar, en attente de chargement.
- Elle est plutôt petite, dit-il d’une voix morne. Je pensais qu’en douze ans tu aurais accumulé plus de choses.
Johun Solo s’approcha de lui et vint se placer sur sa droite.
- Je n’ai pas grand-chose à moi, ici, dit-il avec un sourire.
- Était-ce vraiment indispensable ? demanda une nouvelle fois Jagen.
Solo soupira.
- Ce doit être la trentième fois en deux jours que vous me posez cette question, Jagen. La réponse est oui. Nous manquons d’officiers vétérans, et il fallait bien quelqu’un pour commander ce destroyer. De tous les officiers de pont en poste depuis plus de dix ans, je suis le seul à connaître les Arrow. Le choix a été vite fait. Et puis, un amiral et un colonel sur le même bateau, ça ne le fait pas. Vous vous en remettrez ?
- Difficilement, répondit Eripsa. Ce n’est pas tous les jours que je change d’aide de camp.
- Vous vous en êtes bien sorti au départ de Mell.
- J’avais douze ans de moins, répliqua Jagen, piqué au vif. Et nous n’étions pas en guerre.
- Je suis sûr que vous tomberez sur quelqu’un de presque aussi bien que moi.
- C’est le « presque » qui me fait peur. On pourrait me refourguer un des gars du Département Judiciaire.
- Ou du COMPOR.
- Dans ce cas-là, c’est le sas assuré.
Un transporteur de troupes fit son entrée dans le hangar et se posa à quelques mètres d’eux.
- Ma navette est avancée, dit Solo en voyant le vaisseau déployer sa rampe d’embarquement.
Il prit sa malle et revint vers Jagen.
- Je vous remets les commandes du
Knight’s Blade, amiral. Celles du
Corellian Song m’attendent. Que la Force soit avec vous.
- Et avec vous aussi, mon ami.
Sans esquisser le moindre sourire, Jagen vit l’homme qui lui avait plusieurs fois sauvé la vie et qui avait commandé son vaisseau pendant plus de douze ans monter à bord du transport de troupes. La navette décolla bientôt, emportant Johun Solo vers son nouveau poste.
Et cette fois-ci, je suis le seul à rester à bord.
************
Destroyer de classe Arrow
Knight’s Blade, en orbite autour de Balmorra, 729 jours après la bataille de Géonosis.
- Votre nouvel aide de camp est arrivé, amiral.
Jagen entendit à peine la voix de l’officier de transmission. Il était concentré sur un rapport concernant la situation rendilienne, qui se dégradait apparemment de minute en minute.
- Hmmm… Vous dites ?
- Votre nouvel aide de camp est là, répéta l’homme.
- Très bien, je vais aller dans mon bureau pour l’attendre, dit Jagen en fermant son datapad.
Il se leva et quitta le pont par la grande porte centrale, qui donnait directement sur le couloir principal. Son bureau et sa cabine étaient tous deux situés à une vingtaine de mètres à gauche de la passerelle, dont ils étaient séparés par la salle tactique. Les quartiers de l’officier de pont, similaires, étaient situés de l’autre côté, et jouxtaient la salle des communications, les deux pièces stratégiques étant reliées au pont par des portes latérales qui ne servaient généralement qu’en cas de combat.
Jagen entra dans la pièce et vit que quelqu’un était assis de l’autre côté de son bureau. Lorsqu’il reconnut l’intrus, le choc lui coupa momentanément la parole, remettant en cause de ce qu’il voyait. Mais cette personne avait fait pivoter son siège pour le regarder face-à-face, et il n’eut alors aucun doute sur son identité.
-
Van’ika ? C’est bien toi ?
Vanya eut un sourire charmeur.
- Surpris,
ad’ike ? Aurais-tu quelque chose dans ta cabine qu’il ne faut absolument pas que je trouve ?
- Bien sûr que non, se défendit Jagen. Je suis juste surpris de te voir ici. Aux dernières nouvelles, tu étais en compagnie d’Eiran et de mes parents sur Anoth.
- Et moi qui pensais que je te manquais…
On dirait qu’elle va mieux, constata Jagen.
- Chérie, peut-on en discuter plus tard ? J’attends mon nouvel aide de camp d’une minute à l’autre.
Sa femme le regarda droit dans les yeux.
- Je sais, dit-elle simplement avec un sourire entendu.
Oh non, pitié, elle n’a pas osé…- C’est toi ?
Elle approuva d’un signe de tête.
- Ce n’est pas vrai ! s’emporta Jagen. Comment as-tu pu faire une chose pareille ? Comment as-tu simplement imaginé un coup aussi tordu ?
- Je ne vois pas en quoi c’est «
tordu », répliqua-t-elle froidement. La République manque d’officiers, et elle prend tous ceux disponibles. J’ai quand même servi pendant plus de dix ans comme responsable de sécurité, non ?
- Et dire que j’ai craint de voir débarquer un des agents du COMPOR….
- Ne va pas dire que tu préfères une de ces larves à une belle mandalorienne, ta femme qui plus est !
- Mais enfin, comment as-tu pu…
- Jagen Eripsa ! cria-t-elle d’une voix dure.
L’amiral eut l’impression que les yeux de sa femme lançaient des éclairs, et il recula de deux pas, apeuré.
- Dois-je te rappeler que j’ai quitté l’armée pour m’occuper de notre fils ? Que j’ai quitté mon travail et mes responsabilités pour qu’il ait une vie normale ? Que je suis suffisamment compétente pour ce poste, bien plus en tout cas qu’un tas de
shablas dik’uts de
Coruscanta ? Alors,
Ne’johaa !
Jagen resta silencieux, impressionné par la colère de sa femme.
Heureusement qu’elle ne maîtrise pas la Force, elle m’aurait grillé sur place….-
Udesii, ad’ike, dit-il d’une voix conciliante. Je n’avais pas réalisé à quel point cela t’affectait…
- Cela ne m’affecte pas. J’ai simplement envie de revenir au cœur de l’action.
- Eh bien, tu vas être servie, répondit Jagen en soupirant.
- Vraiment ?
- Pas pour l’heure, mais bientôt. Pour le moment, nous devons rejoindre le front de la Bordure Médiane.
- Tu fais une erreur, lança sa femme en se resaisissant.
- Peut-être, dit-il d’un ton triste, mais les ordres sont les ordres. Crois-moi,
ad’ike, je préfèrerai reprendre la Voie Perlemienne.
- Je te dis que c’est une erreur, parce que les séparatistes ne veulent pas attaquer la Bordure.
Jagen se raidit.
- Toi, tu sais quelque chose.
- Des bruits de cantina, des mouvements de troupes…
Il se souvint de la facilité déconcertante avec laquelle Jango avait trouvé ses installations secrètes d’Anoth.
- En somme, tout l’arsenal d’un espion mandalorien.
- Exact.
- Très bien, dit-il en s’enfonçant dans son siège. À quelle catastrophe dois-je m’attendre ?
- Dis,
ad’ike, quelle planète nécessite six cents croiseurs de combat pour s’en emparer ?
Jagen mit quelques secondes pour comprendre.
Et lorsque ce fut le cas, il se leva brusquement et partit en direction du pont. La course contre la montre commençait.
************
Destroyer de classe Arrow
Knight’s Blade, en orbite autour de Kuat, 729 jours après la bataille de Géonosis.
Debout sur le majestueux pont du
Knight’s Blade, Jagen observait les chantiers navals de la planète, qu’il ne s’attendait pas à revoir de sitôt. Les structures étaient aussi effervescentes que d’habitude, inconscientes de la menace qui planait sur la planète.
La porte du pont s’ouvrit derrière lui, et laissa apparaître Filnis Kuat, encadré par deux gardes républicains. Vanya, qui était penchée sur l’un des terminaux de maintenance, releva la tête au moment où il se retournait. Leurs regards se croisèrent brièvement. Chacun sut que l’autre était prêt.
- Amiral Eripsa, dit Kuat en s’approchant, je ne pensais pas vous revoir de sitôt. Que me vaut l’honneur de votre visite ?
- J’aimerais discuter de tout cela en privé, si vous le voulez bien.
- Je vous suis, répondit l’industriel en l’invitant à ouvrir la marche.
Jagen sortit, suivit du kuati et de sa femme. Arrivé à son bureau, il vérifia comme à son habitude qu’aucun micro n’avait été installé en son absence et s’assit. Les autres firent de même.
- Nous pouvons parler librement, annonça-t-il. Cette pièce est totalement insonorisée.
Kuat laissa échapper un soupir audible.
- Tu m’as fait peur, Jagen, dit-il en s’essuyant le front. Si j’avais su qu’il ne s’agissait que d’Aurek Bleu, j’aurais…
- Ce n’est pas d’Aurek Bleu, coupa l’amiral, mais bien de Kuat qu’il s’agit. Au fait, je te présente ma femme.
- Enchanté, madame, dit-il en se tournant vers elle. Je vois que Jagen a la chance de vous avoir à ses côtés au combat.
- Nous n’avons pas encore pu faire nos preuves ensemble, répondit-elle, du moins pas depuis ma démission de l’armée voici dix-neuf ans.
- Vous ne faites pas votre âge, dit l’industriel avec un sourire charmeur.
- Couché, Filnis, dit Jagen en rigolant, tu ne serais pas comme ça si tu la connaissais. Une mandalorienne est bien plus ardue à conquérir qu’une noble kuati.
- Permets-moi d’en douter…
- Soit. Mais revenons plutôt à nos affaires courantes.
- Je t’écoute.
- Vanya a découvert auprès de ses anciens contacts que les séparatistes cherchaient à attaquer les chantiers, si possible pour en prendre possession.
Kuat blêmit instantanément.
- Une invasion ?
- Je le crains, répondit sombrement Jagen. Vanya,
ad’ike, tu veux bien poursuivre, s’il te plaît ?
- Bien sûr,
Jag’ika, dit-elle avec un sourire. Mes contacts, monsieur Kuat, parlent de plusieurs centaines de destroyers Recusant, un des modèles les plus redoutables de la Confédération.
Le teint de l’industriel blanchît un peu plus. Encore un choc dans ce genre et il sera impossible de distinguer sa figure des panneaux blancs du couloir.
- Que savez-vous de ces croiseurs ? demanda-t-il en se tournant vers Jagen.
- Ils sont bien armés pour leur taille, répondit l’amiral. Une bonne puissance de feu, pas extraordinaire puisqu’ils ont un rapport de un à six avec le Venator, mais les séparatistes en font bon usage quand ils le veulent. J’en ai très peu affronté. Stark n’en utilisait pas jusque maintenant.
- En outre, ajouta Vanya, ils sont plutôt rapides. Mais ils ont un défaut qu’il s’agira d’exploiter. L’équipage est très réduit. La plupart des fonctionnalités sont assurées par des cerveaux-droïdes. Une intelligence très limitée, si on en fait mauvais usage. Et les Séparatistes préfèrent le nombre à la finesse.
- Lorsqu’une cible est désignée, expliqua Jagen, le destroyer la vise jusqu’à sa destruction, sans se préoccuper des autres engins en approche. Seuls ses chasseurs constituent une menace pour les vaisseaux alentours.
- Combien les séparatistes prévoient-ils d’en déployer.
Jagen poussa un soupir audible.
- Six cents.
Les yeux de Kuat s’élargirent sous le choc. Il était véritablement sonné.
- Six cents ! répéta-t-il en bredouillant. Quand vous avez dit plusieurs centaines, je m’attendais à trois cents, au pire quatre cents… Mais six cents ! C’est la plus grande opération menée depuis le début de la guerre !
- En effet, dit calmement Jagen.
- Nous n’avons pas assez de vaisseaux pour les repousser, poursuivit le kuati. La bataille est perdue d’avance.
- En effet, pour un rapport à peu près équitable, il faudrait cent vaisseaux lourds. Mais nous ne les avons pas, comme vous dites. Aussi, je pense que le plan mis au point par Vanya pourrait être la clé de la victoire.
- L’intelligence très limitée des cerveaux-droïdes joue en notre avantage, expliqua la mandalorienne. Une flotte surgissant par derrière pourrait les anéantir aisément, du moment qu’ils restent concentrés sur une unique cible.
- A quoi pensez-vous ? demanda l’industriel, perplexe.
Puis il se rendit compte qu’il savait.
- Par la Force, Jagen, vous ne pensez tout de même pas…
- Si.
- Le
Mandator-II.
- Exact.
Lorsque Kuat Drive Yards avait quitté le giron de la Techno Union plusieurs décennies avant la Guerre des Clones, il lui avait fallu assurer sa défense par ses propres moyens. Un nouveau modèle de destroyer, la classe Procurator, avait été mise en chantier. Dotés d’un blindage résistant et d’une bonne puissance de feu, le Procurator était plus ou moins l’équivalent des destroyers Venator, à ceci près que sa portée hyperspatiale était très réduite, puisqu’il était conçu pour voyager uniquement au sein du système kuati. Forts de leurs succès et des améliorations apportées notamment lors de la création du
Knight’s Blade et de la classe Arrow, les ingénieurs de KDY avaient créé un modèle bien plus imposant, le
Mandator, long de huit mille mètres, et bien plus performant, sauf bien sûr en manoeuvrabilité. Et, lorsque la guerre avait éclatée, ce croiseur avait tout de suite été l’objet de la convoitise du chancelier, qui avait ordonné la création d’une nouvelle classe, remise à jour.
La classe Mandator-II.
La surprise de Kuat était compréhensible. Le premier modèle de Mandator-II, nommé d’après la classe elle-même, venait à peine de sortir des chantiers et n’avait subi aucun des tests habituels. Mais ils n’avaient plus le temps pour ça. À présent, l’heure était venue d’exposer le gigantesque croiseur de combat au feu.
Restait à voir s’il y résisterait.
- Si mes souvenirs sont bons, reprit l’amiral, la coque de ce vaisseau dispose de trois couches de duracier renforcé, soit plus que n’importe quel vaisseau de la flotte. Et c’est sans compter son bouclier de nouvelle génération. Si les séparatistes tentaient de le détruire, nous pourrions les prendre à revers. En jargon stratégique, on appelle cela une manœuvre d’enfermement. Celle-ci doit être impérativement de type Marg Sabl, c’est-à-dire totalement non structurée. Ce manque de cohésion apparent ne trompe généralement pas l’adversaire, mais certaines espèces comme les Elomins ne savent pas comment y faire face. Et les droïdes de combat non plus.
- Vous pensez donc qu’il n’y aura pas de stratège.
- Il y en aura sûrement un, mais il ne pourra pas réagir à temps, si vous voulez mon avis.
- Reste à savoir où nous pourrions cacher la flotte de secours.
- Je suggère une nébuleuse, intervint Vanya. Les communications seront difficiles, mais nous serons sûr de ne pas être repérés avant le bon moment.
- Excellente idée,
ad’ike, dit Jagen. Reste à trouver un de ces nuages de poussières pas très éloignés.
- Il y en a une à trente minutes hyperspatiales d’ici, dit Kuat.
- C’est trop long, marmonna Jagen.
- Nous pourrions utiliser ta tactique de Bespin, suggéra Vanya. Des leurres à partir de cargos.
- Il n’est pas question de laisser mes vaisseaux de ravitaillement se faire mettre en pièce ! protesta énergiquement Kuat.
- Il suffit, dit sèchement Jagen. Des vaisseaux vides et non armés n’ont que peu d’intérêt, comparés à des croiseurs de guerre avec tout leur équipage. Oui, les remplir de gaz pourrait s’avérer payant…
- Et cette fois-ci, les séparatistes les détruiraient eux-mêmes, ajouta la mandalorienne.
- Je vois que tu apprends vite,
Van’ika, dit-il avec un sourire.
- Tu ne te moquerais pas de moi, là, par hasard ? demanda-t-elle en chassant une mèche de ses cheveux qui tombait sur son visage.
- Un peu…
- Donc, tous les deux, vous voulez mes galions stellaires ? reprit Kuat.
- En effet, reprit Jagen. Et comme il serait fort peu judicieux pour toi de me les louer, étant donné le peu de garanties de retour qu’il risque d’y avoir, je te suggère de me les vendre.
- Et je suppose qu’il va falloir te fournir le gaz aussi.
- Si cela ne te dérange pas. Ah, autre chose : je prendrai le commandement du
Mandator.
- Et le
Knight’s Blade ?
- Vanya peut s’en charger.
- C’est risqué.
- Pour moi seulement.
- Insinueriez-vous que je suis incapable de commander un vaisseau, monsieur Kuat ? demanda Vanya avec la moue mécontente qu’elle arborait généralement lorsque Jagen lui faisait remarquer quelque chose qui ne lui plaisait pas.
- Non, pas du tout, répondit l’industriel, qui avait compris le message. Mais comme le croiseur n’a pas été testé, j’ai bien peur qu’il y ait des problèmes…
- N’aie crainte, Filnis, le rassura Jagen. Je sais toujours comment m’en sortir. Et maintenant, allons-y et mettons le plan en marche. D’après les contacts de Vanya, les Seps devraient être là dans moins de quatre jours. Ils s’attendent à ne rencontrer que peu de résistance. Mais ils vont être déçus.
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Croiseur de combat
Mandator-II, en orbite autour de Kuat, 731 jours après la bataille de Géonosis.
Les alarmes de proximités retentirent avant même que le contrôle planétaire ne les informe de l’arrivée de la flotte.
Jagen pesta. Il savait que cela aurait pu se produire à n’importe quel moment de ces deux derniers jours, mais il aurait préféré avoir plus de temps pour se préparer. Il remercia cependant la Force pour lui avoir permis de mettre au point l’essentiel de ses défenses.
- Tous à vos postes de combat ! ordonna-t-il sur le canal général. Je veux tous les canons parés à faire feu !
Il se tenait sur le pont du gigantesque vaisseau de guerre qu’était le
Mandator-II. En d’autres circonstances, les proportions phénoménales du vaisseau n’auraient pas suffi à le convaincre, lui qui préférait l’optimisation à la taille. Cependant, il dut admettre qu’en de pareilles circonstances il était ravi d’avoir un tel engin sous la main.
- Les batteries missiles sont opérationnelles, amiral, répondit l’un des officiers artilleurs. Dois-je ordonner un tir de semonce ?
- Quelle sont les chances de réussite ?
- Actuellement, une sur trois.
- Attendons, dans ce cas.
Il se tourna vers le responsable des communications.
- Envoyez le signal codé au lieutenant Eripsa, ordonna-t-il.
- Monsieur ?
Le lieutenant avait vraisemblablement dut croire à une erreur.
- Au lieutenant Vanya Cadera Eripsa. Ma femme. Et dépêchez-vous, nous n’avons pas une minute à perdre !
- Bien, amiral.
Jagen se tourna vers la baie panoramique et observa son ennemi avec détermination.
Il n’avait que très peu rencontré de ces destroyers depuis le début de la guerre. Il avait mené la majorité de ses combats contre Iaco Stark, et l’ancien pirate préférait de loin l’usage des cuirassés Rejuvenator à celui des Recusant. Mais il connaissait tout de même les avantages et les défauts de ces vaisseaux, grâce notamment aux rapports faits par de nombreux capitaines. Et il savait également comment les accueillir.
- Monsieur, lança un des artilleurs, les chances sont à moitié. Devons-nous ouvrir le feu ?
- Allez-y, répondit Jagen. Il est temps d’apprendre aux séparatistes les bonnes manières.
Le détachement ennemi était véritablement impressionnant. Si Jagen n’avait pas su qu’il n’y avait en tout et pour tout que six cents vaisseaux, il aurait cru à une attaque gigantesque de plusieurs milliers de destroyers. La panique, pensa-t-il, ne fait pas qu’engourdir les sens ; elle inhibe aussi les capacités de raisonnement de l’esprit. Et j’ai horreur de la panique. Sauf quand elle est chez l’ennemi.
Les premiers missiles atteignirent la ligne de front des destroyers, qui s’approchaient à toute vitesse des cargos bourrés de gaz qui servaient de leurres. Les projectiles firent des dégâts visibles à si lointaine distance, mais ce ne fut guère suffisant pour ralentir leur progression. Les vaisseaux de tête déchaînèrent leurs batteries laser sur les cargos.
Une alarme brève s’enclencha sur le pont. Vanya avait reçu son message et venait de passer en hyperespace. Le compte à rebours s’enclencha. Il devait tenir encore une demi-heure. Bien peu de choses, en fin de compte, dans la vie d’un homme.
Mais tellement, au cours d’une bataille.
Deux cargos explosèrent simultanément, emportant avec eux quelques destroyers ennemis. Mais Jagen remarqua bien vite que sa technique comportait quelques défauts. Les destroyers stoppèrent leur avancée, conscients du danger auquel ils s’exposaient. Sans doute un des rares membres d’équipage de la flotte avait-il compris leur tactique. Jagen pesta suffisamment fort pour que plusieurs des membres d’équipage se retournent. Il leur fit signe de se remettre au travail. Ce n’était pas le moment de perdre son attention.
Il avait néanmoins prévu ce problème, et avait installé des circuits esclaves sur les vaisseaux de transport. Il avait rechigné à utiliser cette solution, qui risquait de faire beaucoup moins de dommages à l’adversaire, mais il n’avait guère le choix. Il enclencha la commande.
Les cargos restants se dirigèrent l’un après l’autre sur les croiseurs les plus proches. Plusieurs Recusants explosèrent, mais ce ne fut guère suffisant. Les séparatistes n’avaient perdu en tout et pour tout que dix-sept vaisseaux, et restaient en large supériorité face à la flotte de la République.
Jagen tourna la tête de chaque côté de la baie vitrée pour apercevoir les croiseurs de combat de classe Procurator. Tels des modèles réduits du gigantesque
Mandator-II, les destroyers attendaient près des flancs, comme suspendus dans le vide intersidéral. Derrière eux, l’anneau de duracier qui entourait la planète Kuat continuait sa rotation, comme si rien n’avait changé.
Il prit très vite une décision, pour épargner les chantiers navals et le personnel innombrable qui y travaillait. Il se dirigea vers la console de l’opérateur holocom.
- Ordonnez à tous les destroyers de se placer sur le flanc. Nous devons leur couper l’accès aux installations de Kuat Drive Yards.
- Bien, amiral. Dois-je également donner cet ordre à nos machinistes ?
Les croiseurs ennemis se rapprochaient inexorablement. D’ici quelques secondes, les premiers seraient à portée de feu. Il regarda son chrono. Il lui fallait encore tenir vingt-trois minutes.
- Non, répondit-il, résolu. Nous allons leur montrer ce dont nous sommes capables.
Il se rua vers la zone des officiers artilleurs, qui étaient rivés sur leurs cadrans tridimensionnels.
- Messieurs, dit-il d’une voix forte, ordonnez à toutes les batteries de faire feu sur une cible commune. Je pense que la puissance conjuguée sera suffisante pour en détruire un à la fois.
- Bien, amiral.
- Quant aux chasseurs, dit-il en se tournant vers l’officier de liaison, je veux qu’ils soient prêts à prendre l’ennemi à revers.
Sans attendre de réponse, il se précipita vers la baie vitrée, pour observer les premiers résultats de sa tactique.
Le
Mandator-II trembla brutalement.
Puis un déluge de feu sortit simultanément de toutes les batteries pour se diriger vers le vaisseau central de la formation de tête ennemie. Le destroyer, qui n’était pas conçu pour résister à des attaques de cette ampleur, fut réduit en poussière, les plus gros débris s’écrasant sur la coque des croiseurs environnants.
Jagen sourit. Cela fonctionnait.
- Tu vois que j’avais encore raison, Jo…
Il s’interrompit, se souvenant que son vieil ami, son ancien aide de camp, été parti, et que la nouvelle, sa femme, ne se trouvait pas à ses côtés pour leur première bataille commune. La solitude lui serra un instant le cœur, jusqu’à ce qu’une seconde secousse agite le pont de part et d’autre. De nouvelles salves s’abattirent sur un autre destroyer, qui connut le même sort peu enviable que le premier.
Il se reconcentra sur la bataille. La tactique adoptée par Jagen était courante, mais peu utilisée pour des vaisseaux d’une taille supérieure à celle des frégates, à partir de laquelle ils avaient couramment plusieurs ennemis en face d’eux. Les séparatistes, comprit Jagen, s’étaient attendus à ce que chaque batterie s’efforce de détruire un croiseur à la fois, ce qui leur permettrait de disposer un certain temps de tous leurs vaisseaux pour faire flancher les boucliers du
Mandator-II. L’amiral avait lui-même envisagé cette stratégie, mais il avait compris quels défauts elle comportait, et surtout quel avantage elle donnait à l’ennemi.
- Amiral, appareils ennemis à onze heures ! lança l’officier radar.
- Quel type ? demanda Jagen, alarmé.
- Hyena, apparemment.
L’amiral pesta une nouvelle fois. Ces bombardiers pouvaient sans le moindre problème réduire leur stratégie à néant. Et eux avec.
- Lieutenant, dit-il en se tournant vers l’officier de liaison, nouvelle affectation. Les intercepteurs s’occupent des appareils ennemis. Les chasseurs d’assaut se chargeront seuls de la couverture de nos propres bombardiers.
- Bien, amiral.
Du coin de l’œil, il vit plusieurs des appareils fournis par Kuat changer de trajectoire pour revenir vers le croiseur. Ils étaient évidemment extrêmement petits à cette distance, mais leur couleur rouge aidait à les repérer.
Plusieurs secousses agitèrent le
Mandator-II, et elles n’avaient cette fois-ci rien à voir avec les batteries lasers, qui continuaient évidemment leur pilonnage. Jagen comprit que les bombardiers Hyena venaient de commencer leur besogne. Par chance, son écran tactique intégré juste en-dessous de la baie vitrée – une bonne idée, qu’il pensait intégrer par la suite sur le
Knight’s Blade pour éviter de déranger le pont chaque fois qu’il voulait une information sans prendre la peine de se déplacer – lui indiqua que les boucliers tenaient bon. La coque avait été secouée, certes, mais la structure tenait encore. Il regarda le chrono. Il ne restait plus qu’un quart d’heure avant l’arrivée des renforts. Ou plutôt encore un quart d’heure, dans leur situation présente.
Il remarqua que plusieurs groupes s’étaient détachés du peloton ennemi pour se diriger vers les destroyers de classe Procurator, qui se trouvaient conformément à ses ordres sur les flancs de la ligne de combat républicaine. Mais malgré cela, la plupart des bâtiments ennemis restaient concentrés sur le
Mandator-II. Jagen se promit, s’il s’en sortait, de féliciter Filnis Kuat pour l’efficacité de ses chantiers. Les boucliers du croiseur tenaient bon, et minute après minute les séparatistes essuyaient des pertes, contrairement aux républicains qui semblaient invincibles. Mais Jagen savait que cela ne durerait pas.
Et il avait raison.
À moins d’une minute de l’arrivée de Vanya, les boucliers flanchèrent et s’arrêtèrent net. Les batteries cessèrent également leur ouvrage, et la lumière s’éteignit sur le pont.
- Surcharge ! Surcharge ! hurla l’un des officiers.
Le moral de Jagen flancha.
Non, pas maintenant, pas si près du but…- Relancez la procédure ! ordonna l’amiral !
- Nous devons attendre que…
La lumière revint subitement, mais à faible dose.
- Le générateur de secours… marmonna Jagen.
Mais cela n’était pas suffisant. Le générateur de secours permettait à peine d’alimenter les portes, les lumières et les ordinateurs du pont.
Ce qui les laissait sans armes et sans protections.
Jagen sentit que la situation risquait de mal tourner. Et ce qu’il vit à la pointe du croiseur ne le conforta pas.
- Le réacteur principal sera rétabli d’ici une minute, dit l’un des lieutenants.
- Trop tard, répondit Jagen. Évacuez le pont.
- Monsieur ? demanda l’officier, qui croyait sûrement halluciner.
- Évacuez le pont ! hurla Jagen alors que les bombardiers se rapprochaient. Transmettez les fonctions de commandement au pont secondaire ! Vite !
Il se dirigea vers la sortie, comme le reste des officiers présents. Les bombardiers n’étaient plus qu’à deux mille mètres. Dans un instant, ils lâcheraient leurs charges. Jagen fut le dernier à sortir, et il verrouilla les portes derrière lui, en pensant à Vanya.
Il avait à peine fini que l’explosion ébranla la structure même du croiseur.
Remerciant la Force, car les portes avaient tenues, il commença à marcher vers les ascenseurs. Et il comprit très vite que quelque chose n’allait pas.
Il flottait.
Le générateur de gravité artificiel du croiseur était toujours géré par un réacteur auxiliaire, de petite taille mais d’importance capitale. C’était mauvais signe.
Les autres officiers étaient dans son cas. Il repéra l’officier de pont et flotta vers lui.
- Nous devons atteindre les capsules de sauvetage, dit-il sans détour. J’ai bien peur qu’ils aient visé un point essentiel.
- Peut-être qu’avec le hangar… Le vaisseau n’est pas perdu, après tout.
- Si le verrouillage de sécurité n’a pas eu lieu avant la coupure, les vaisseaux et les techniciens doivent flotter dans le vide, à présent. Si le générateur de gravité est coupé, alors les champs de force le sont aussi.
S’accrochant aux murs, il s’approcha lentement d’un bouton d’alarme. Il inséra sa tige mémorielle – celle qui servait à l’identifier dans tous les ordinateurs de la flotte – et lança le signal code d’évactuation.
Les alarmes retentirent tout autour d’eux. Jagen remarqua que les secousses avaient baissées en intensité, soit à cause du manque de gravité, soit parce que la flotte Loyalty s’occupait à présent des destroyers Recusant. Vanya devait en effet être arrivée, à présent. Jagen pria pour qu’il ne lui arrive rien.
Utilisant les plaques lumineuses en relief du plafond pour avancer, il atteignit une des capsules de sauvetage. Il attendit que tous les sièges soient occupés, puis il déclencha le lancement.
Alors qu’ils s’éloignaient du Mandator-II en flammes, Jagen se demanda si la Force avait vraiment une volonté.
Si tel était le cas, alors elle n’aimait pas le voir commander un vaisseau autre le
Knight’s Blade. Heureusement, songea-t-il pour se consoler, cette fois la planète est intacte.
C’est déjà ça…************
Kuat était assis à son bureau et épluchait le rapport des évènements. Lorsqu’il eut fini, il releva la tête.
- Du beau boulot, vous deux, dit-il à l’intention des Eripsa. Nous n’avons perdu que deux croiseurs de classe Procurator dans l’opération.
- Et le
Mandator-II, rappela l’amiral.
- Il sera réparable, affirma Filnis. Mes équipes sont déjà pied d’œuvre.
- C’est l’avantage quand on se bat près des chantiers navals, dit Vanya. Peut-être devrait-on fixer rendez-vous aux Seps ici, à l’avenir.
- Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je préfèrerai que nous évitions, répondit l’industriel. Vous avez besoin d’autre chose ?
- Non merci, dit Jagen. Nous devons nous mettre en route pour la Bordure. Nous n’avons que trop perdu de temps.
Ils prirent congé de leur ami et sortirent vite pour rejoindre le Knight’s Blade, amarré à l’anneau des chantiers. Alors qu’ils se trouvaient devant une des baies vitrées, qui offraient une vue plongeante sur les vaisseaux en assemblage, Jagen prit soudain une brusque inspiration.
- Vanya ?
Sa femme se tourna vers lui.
- Oui, Jag ?
- Je t’aime.
Elle sourit.
- Je sais, répondit-elle tout simplement.
Ainsi se termine l'an 2 de la Guerre des Clones...