par MasterVega » Mar 14 Mar 2006 - 16:45 Sujet:
Chapitre V
Hens cracha une volée de juron lorsque Zia lui faussa compagnie. L'atmosphère tendue du bureau de Boscomb explosa soudainement quand la baie vitrée prit le large avec l'androïde. Le directeur du Joker vociféra un ordre bref que ses larbins exécutèrent avec toute la diligence requise. Comme un seul homme, ils firent feu sur le mercenaire esseulé.
Mais Hens, qui avait flairé le coup une bonne seconde avant, se jeta en arrière et roula sur le sol. Dans son élan, il enfonça ses pieds dans le ventre de l'un des porte-flingue et le projeta quelques mètres plus loin. Le gars s'écrasa dans une vitrine où trônaient en pleine lumière quelques trophées acquis par Boscomb, lors de sa brève carrière de joueur de sabbacc. L'autel clinquant se désagrégea sous le choc et les bibelots rebondirent sur l'épaisse moquette.
Dépourvu d'armes, Hens se saisit d'une sorte de colonnette de jaspe contournée, bondit sur son adversaire le plus proche et cogna de toutes ses forces de bas en haut, à hauteur du poignet. Il ne pensait qu'au blaster.
Celui-là fera l'affaire. Je flingue ces buses et je dégage d'ici aussi sec. Tant pis pour Boscomb.
Le cracheur à gueule d'acier voltigea à plusieurs mètres et l'agent de sécurité poussa un cri rauque lorsque l'arme improvisée de Hens lui fracassa la mâchoire et le mit ko. Un tir percuta le mercenaire en bas du dos et il se jeta en avant pour encaisser le choc. Sa veste renforcée dissipa une partie de l'énergie, ne laissant qu'une légère sensation de brûlure.
Bon investissement cette gunjac !
Une nouvelle salve caressa son genou et il serra les dents comme sous l'effet d'une lame de rasoir. Par chance, son réflexe protecteur l'avait amené droit sur le blaster qu'il convoitait. Il s'en saisit et se jeta derrière le bureau de Boscomb, avant de déchaîner une tempête de feu tous azimuts.
Voilà qui devrait les calmer !
Sans attendre la réaction des deux agents encore sur pied, il bondit hors de son abri en prenant soin de se rapprocher de la sortie. D'un ample plongeon horizontal, il s'écarta du bureau en bois précieux, prenant au dépourvu ses deux adversaires. Puis avec la précision mortelle du tueur d'expérience, il fit feu, et les charges de mort balayèrent la faible opposition. Il paracheva son geste d'orfèvre par une roulade tranquille et se redressa au moment de franchir le seuil du bureau. Avec une pointe de mépris, il considéra quelques secondes les cadavres à la face noircie avant de dévaler les escaliers de service qui menaient à la salle de jeu, délaissant l'ascenseur. Question de prudence.
***
Sans attendre, Zia se remit debout et s’efforça de trouver un chemin dans ce labyrinthe en mouvement. Autour d'elle une masse de chair palpitante vociférait et remplissait l'espace d'un vacarme aigu. L'obscurité était presque totale, hormis la lumière irréelle dispensée par les machines à sous et les tables de jeu. Fauchés par les lames de verre tombées de la coupole, de nombreux corps jonchaient le sol, dépouilles que l’on piétinait, sur lesquelles on trébuchait dans un tumulte effroyable.
Je ne sais pas qui est derrière tout ça mais je crois que la Trêve vient de prendre un sale coup. Ca à tout d’une déclaration de guerre à Morga le Hutt. Terrick va devoir réunir les Seigneurs au plus vite pour mettre les choses au point sinon Nar Shaddaa va ressembler sous peu à un champ de bataille.
Zia ne perdit pas une seconde de plus et tira sans ménagement Ayame par le bras. Elle parvint non sans mal à atteindre un élévateur, bousculant ceux qui lui barraient la route et qui hurlaient à pleins poumons. Le moment était mal choisi pour verser dans la compassion.
Elles descendirent directement vers les étages réservés au personnel de l’établissement. Tenter de s'ouvrir un passage dans le chaos de la grande salle relevait de la démence. Des tirs se firent entendre à travers la cloison pourtant épaisse de l'élévateur. De violentes secousses, consécutives à des détonations assourdies, secouèrent la cabine et ses deux occupantes. Zia jura mais l’élévateur atteignit finalement les sous-sols du casino. Le sas s'ouvrit sur une enfilade de pièces où étaient stockées les réserves du restaurant de luxe qui occupait une aile entière du Joker. Une dizaine de chambres froides s'alignaient sur la droite, révélées par les clignotements de leur console de commande, tandis sur le côté gauche s'ouvraient deux arches plongées dans l'obscurité.
- On fait quoi maintenant ? fit Ayame en brandissant son blaster. Au fait, je suis Ayame Ko, capitaine du Nebula Rider.
- Zia, répondit l'androïde avec un petit sourire. Terrick digère assez mal qu'on égare sa cargaison mais, pour une raison qui ne regarde que lui, il semble s'inquiéter sincèrement pour toi.
- Merci, dit simplement Ayame, soulagée de se retrouver en si bonne compagnie. C'est un sacré coup de veine que tu ais réussi à me trouver au milieu de tout ça.
Zia repéra un plan incliné balisé qui semblait s'élever vers une large porte anti-explosion.
- On va essayer de passer par la zone de déstockage pour rejoindre le parking. Si on peut atteindre mon speeder, on sera tirées d'affaire.
- Je te fais confiance, fit Ayame dans un souffle. Je crois que j'ai atteint mes limites pour la journée.
La jeune femme réprima un tremblement mais Zia percevait dans ses prunelles en amandes toute la tension nerveuse accumulée. Elle était proche de la rupture.
J’espère que ces salauds ne lui ont rien fait. Boscomb et ses sales petits jeux pervers ! J’aurais dû arracher la gorge de ce porc il y a longtemps.
Elle fut presque choquée par la violence de sa haine, par ce sentiment porté au rouge comme une lame dans le brasier. Il y avait quelque chose de surhumain dans son aversion, et cette réaction spontanée et extrême fut comme un signal ténu dans l’obscurité où elle se débattait depuis plusieurs mois. Nulle logique, nulle raison ne lui avait chuchoté qu’elle DEVAIT haïr ou détester cet homme mauvais qu’était Boscomb. Non. La haine avait jaillit comme une source vive, déchirant l’écorce de la terre-chair synthétique et se répandant dans les prairies intérieures de l’androïde.
O mon âme ! serait-ce possible… ? est-ce toi que j’entends hurler ?
Un sourire hésitant naissait sur les lèvres de la jeune femme, une timide esquisse.
Non ! Non ! Je ne sais que tuer ! Je ne suis qu’un programme dégénéré, truffé de bugs, une entité cybernétique viciée !
Elle eut un mouvement spasmodique du bras gauche et serra le poing. Ayame se pencha vers elle, l’inquiétude brillant dans ses yeux noirs. Une main légère se posa sur son dos.
- Encore un effort et on pourra souffler un peu, dit Zia pour rassurer sa compagne de fortune. Une fois sur le territoire de Terrick, on sera protégée par la Trêve.
En principe…à moins que ce ne soit déjà la guerre là-bas.
Gênée par la sollicitude d’Ayame, l'androïde échappa au contact de cette main sur sa chair électrique et se précipita vers la porte anti-explosion. Elle utilisa son programme de contre-sécurité avancé pour déverrouiller la serrure magnétique, branchant un câble fin entre son datapad miniature et la console de la porte. L'air lourd et âcre de Nar Shaddaa s'insinua dans les entrailles du casino lorsque les portes s'écartèrent, avec une lenteur frustrante. Derrière, Zia aperçut les quelques milliers de speeders qui encombraient l'invraisemblable esplanade et zooma au maximum pour tenter d'apercevoir le ZC-750 de Garreck.
Elle remarqua alors une des navettes automatisées et lui coupa la route alors qu'elle passait à proximité. Après quelques manipulations hasardeuses, elle désactiva le système de guidage laser et saisit les commandes manuelles destinées au personnel de maintenance. Ayame se jeta sur la banquette arrière avec un soupir de soulagement et parvint à sourire à l’androïde.
Zia guida la barge à répulseurs dans un passage étroit et poussa les moteurs à plein régime, avalant en quelques secondes le demi-kilomètre qui les séparait du speeder tout en frôlant dangereusement la glissière de sécurité. Le parking était bâti en surplomb et jaillissait du bâtiment comme une aile déployée au-dessus d'un vide effrayant que rien n'interrompait, hormis des passerelles couvertes qui reliaient les tours du quartier, et des aires d'atterrissage privées. Seul un double rail équipé d'un champ de force protégeait les véhicules du gouffre béant.
Dans un soubresaut pyrotechnique, le Joker vomit un flot de fuyards éperdus qui courraient en tout sens à la recherche de leurs esquifs, avec l’espoir de s’éloigner au plus vite de ce lieu de mort. De nouvelles explosions se firent entendre, qui éventrèrent les fenêtres des étages supérieurs et ajoutèrent au tumulte. Zèle déplacé ou humour morbide, le Joker d’Enfer semblait prêt à tout pour mériter son nom.
Zia se faufila jusqu’au ZC-750 et les deux jeunes femmes se jetèrent dans l’habitacle, Ayame prenant les commandes avec l’assentiment muet de l’androïde. Celle-ci essaya de ne pas penser à Garreck lorsque le speeder prit de l’altitude, et souhaita avec une ferveur qui la surprit que le mercenaire ait réussi à se glisser hors de cet enfer en puissance. Malgré tout, elle ne regrettait pas d’avoir agi seule et laissé son coéquipier se défaire de Boscomb et de sa clique. Elle avait récupéré Ayame Ko et elle sentait confusément que c’était là le bon choix. Même si Garreck devait alourdir la colonne « pertes et profits ».
Ayame prit de la vitesse et le ZC déposa allégrement les speeders qui décollaient au même moment dans un désordre indescriptible. Ni elle ni Zia ne remarquèrent le lourd remorqueur de fret qui profita du trafic pour se placer dans leur sillage.
***
Prudemment lové derrière une des colonnes qui soutenaient le balcon, Hens assistait à un massacre parfaitement orchestré où les clients affolés du casino servaient de cibles d’entraînements à une escouade de tueurs invisibles. Les hommes de Boscomb tentaient vainement de leur donner la réplique, arrosant la coupole à l’aveuglette avant de tomber à leur tour sous les tirs mortellement précis de leurs adversaires. Les cadavres s’empilaient d’autant plus vite que des explosions à répétitions fragilisaient la structure du bâtiment, provoquant la chute de larges pans de permabéton qui s’écrasaient sur la foule. Et celle-ci se précipitait à l’aveuglette contre des portes trop étroites, dans une pénombre oppressante. Ceux qui ne trouvaient pas le trépas sous les tirs ou les effondrements mourraient piétinés par le troupeau.
C’est dément ! Quel genre de malade peut ordonner une boucherie pareille ?
Il mit la main à sa ceinture et poussa un juron lorsqu’il découvrit que son comlink avait disparu. La foule continuait à se déverser tant bien que mal par la porte principale, en laissant derrière elle une chemin sanglant où pataugeaient avec des râles pitoyables les blessés, mêlés aux morts. L’air sentait la peur. Le sang, l’ozone et le gaz Tibanna s’y mêlaient en doses généreuses et empuantissaient eux aussi l’atmosphère déjà lourde de la grande salle surchauffée.
Hens sentit alors sur sa nuque un souffle froid qu’il connaissait bien et fit volte-face, son blaster pointant vers les ténèbres insondables qui s’ouvraient au-delà de son champ de vision. Il perçut un mouvement et un éclat bref à quelques mètres de lui.
Celui-là a une lame et le pas léger. Il me préparait une surprise mais il a tourné les talons. Est-ce que ça vaut la peine de se risquer dans ce four ? La peste ! Que Vador maudisse ce chien !
Avec précaution, Hens avança dans le passage voûté, tous ses sens en alerte. Après quelques pas, il fut totalement aveugle et se reposa sur son ouie et son instinct de guerrier, qui avait si souvent retardé sa dernière heure. Et les paroles de Sidh Vega sur l’illusion des sens et du monde matériel, et sur la nécessité d’être à l’écoute de son instinct et de ses impressions revinrent flotter dans sa mémoire.
Foutu Jedi ! Faut toujours qu’il essaie de donner des leçons même quand il n’est pas là ! Pourtant j’aimerais bien le savoir à mes côtés maintenant…
La pénombre se fit moins dense alors que les lumières de la cité entraient par une large voûte de verre colorée, révélant les contours de statues et d’arbustes en fleurs dont l’odeur entêtante agaçait les narines de Hens. Le passage était bordée de fresques murales aux motifs érotiques où des groupes de danseuses voletaient nues en des évolutions lascives, au milieu d’hommes aux mines réjouies qui profitaient des merveilles d’un banquet prodigue tout en exhibant des érections démesurées.
Hens reconnut des thèmes d’orgies comme on en pratiquait encore parmi la noblesse de certaines sociétés décadentes des Mondes du Noyau. La rigueur morale imposée par l’Ordre Nouveau n’avait pas encore pénétrée tous les esprits.
Puis le décor changea et laissa place à une pièce pleine de trophées de chasse, des squelettes reconstitués de formidables prédateurs qu’Hens ne parvenait pas à identifier mais dont la présence menaçante émanait encore de leurs restes exposés. Dans cette clarté froide, les ombres vêtaient les os blanchis d’une chair impalpable tandis que les gueules, béantes comme des grottes de cauchemar, semblaient exhaler des vapeurs de caveau.
- J’ai grande pitié de ces créatures profanées, fit une voix qu’Hens ne parvint pas à situer. De si parfaites œuvres de la nature. Si pleines de force, si dénuées de faiblesses.
Le timbre, grave et profond, à peine étouffé, résonnait des accents d’une passion maîtrisée. Hens se concentra pour essayer de percer les noirs recoins qui s’étendaient devant lui. Dans le même temps, il expira lentement et s’apprêta au combat, relâchant ses muscles afin de ne pas s’épuiser inutilement, thésaurisant avec soin son énergie.
- Même les plus habiles prédateurs ne peuvent pas grand-chose contre un bon blaster, dit Hens en essayant de gagner du temps.
- C’est tristement exact, acquiesça l’autre après une courte pause. Et fort à-propos. Mais pas nécessairement en ce qui me concerne.
Un tir fusa juste au pied de Hens qui bondit sur le côté et riposta au jugé, avec pour seul effet d’arracher une patte au squelette d’une araignée kinrath.
- Sors de ta cachette et offre-moi un vrai combat ! vociféra Hens que ce genre de jeu irritait et qui sentait monter en lui la colère.
- Que c’est vulgaire ce que tu me demandes ! railla la voix mystérieuse. La confrontation en pleine lumière est si facile, si bestiale. Elle n’implique que l’usage de la force brutale. Je n’aime pas ça. C’est indigne d’un véritable artiste.
- Laisse-moi te prouver à quel point tu te plantes mon vieux, grogna Hens
- L’art suprême consiste à tuer sans être vu, à se glisser parmi les ombres pour frapper le coup unique, qui tranche le fil ténu de l’existence. L’art de jouer avec l’obscurité, le silence.
- Tuer dans le dos n’a rien de glorieux, fit Hens. Si c’est l’idée que tu te fais d’un vrai combat, t’as tout faux.
- Je ne suis pas un guerrier, fit l’autre avec mépris. Le guerrier est à peine plus qu’un animal. Il grogne, rue et s’agite stupidement. Tout comme toi.
- C’est Morga qui t’envois ? demanda Hens, lassé par cette discussion étrange. C’est cette limace qui est derrière ce carnage ? Boscomb a tenté de le doubler ?
- Des questions sans intérêt auxquelles nulle réponse ne sera donnée, dit l’autre sans se départir de son calme glacial. Les proies finissent toujours brisées par les crocs. Revenons à nous autres, les prédateurs.
Un nouveau tir atteignit Hens, à l’épaule cette fois-ci, lui arrachant une grimace de douleur. Il fit quelques pas en arrière, passa vivement la main sur la plaie et se rendit compte que le tir avait touché un point faible de son armure. Pas plus large qu’un doigt. Et Hens était pour l’heure incapable de dire d’où sortait cette voix.
Il est très fort. Il n’y a pas beaucoup de gars capables de coups pareils dans cette galaxie et je n’en ai pas rencontré depuis bien des années. Dans quelle galère je me suis fourré ?
Le tir était parti d’un coin différent de la pièce et pourtant Hens n’avait pas perçu le moindre mouvement, le moindre son. Pas même un déplacement d’air.
Soit ils sont plusieurs et bien cachés, soit ce salopard est plus silencieux que le vide intersidéral !
- Tu me frustres, fit l’autre avec une pointe d’ennui dans sa voix désincarnée. Tu n’uses pas de tous tes talents et tu gâches cette rencontre. Méfie-toi, elle n’a déjà presque plus de saveur pour moi…et je déteste l’insipide.
Quoi ! Il ne peut pas savoir ! Est-ce qu’il l’a sentit ? Ou bien on m’a vendu et Vador a lâché ses chasseurs de primes…
- Cesse de te cacher comme un lâche et je te montrerai ce qu’est Hens Garreck, cracha le mercenaire. Viens par ici que et j’ arranges ta sale gueu…
Hens poussa un unique râle lorsqu’il sentit la lame percer son abdomen et se frayer un passage dans ses entrailles, sans rencontrer de résistance. La morsure de l’acier propagea dans tous son corps des ondes de douleur aigues qui rebondirent sur ses os et filèrent jusqu’à son cerveau. Il tomba à genou et sa vue se troubla alors qu’il fixait stupidement l’épée qui saillait hors de son corps. Ses forces s’envolèrent soudain mais une main ferme l’empêchait de choir, maintenant sa tête dans une étreinte reptilienne.
- Que je suis déçu Hens Garreck, murmura la voix à son oreille avec une étonnante sincérité. Je m’attendais à tant de la part d’un compagnon du grand Sidh Vega. C’était donc cela le fameux loup de guerre du Côté Obscur ? Bonne nuit, doux prince !
Hens bascula en avant et sa tête heurta le sol mais il ne sentait déjà plus rien. Et il ne comprenait plus rien. Avec la Force, il aurait pu offrir une vraie résistance et même faire payer cher son arrogance à ce fantôme, mais il avait choisit de n’en rien faire, fidèle à un serment qui lui semblait maintenant ridicule.
Un peu tard pour les regrets mon vieux…un peu tard.
***
Dahz Thulaka ne savait trop que penser de la jeune fille assise de l’autre côté du comptoir et qui le fixait sans se départir de son flegme agaçant. La moitié supérieure de son visage disparaissait sous un capuchon-voile, mettant en valeur une bouche au dessin encore juvénile qui démentait les formes féminines qui pourtant s’affirmaient sous la robe d’un rouge profond.
La voix de la jeune fille était assurée et claire, d’une douceur caressante qui appelait la confidence sans éveiller de soupçons. Et Dahz Thulaka sentait qu’à chaque seconde qui passait, les raisons qu’il avait de ne pas livrer les réponses qu’elle attendait lui paraissaient saugrenues. De plus, l’attitude de la jeune fille dénotait une expérience martiale qui n’avait pas échappée à l’œil avisé d’un homme qui avait vu des milliers de combats.
- D’accord, d’accord, fit le gérant de L’Antre Barbare. Zia s’est battue ce soir et elle a quitté l’arène il y a deux bonnes heures environ, sans encaisser sa paie. Je sais simplement qu’ Hens Garreck l’attendait à la sortie, derrière. Soit elle est rentrée recharger ses batteries, soit son patron l’a sifflée et dans ce cas, c’est à M. Terrick lui-même qu’il faut s’adresser.
- Je vous remercie, fit simplement la jeune fille en tournant les talons.
Dahz la regarda franchir l’entrée et disparaître dans la rue pluvieuse, forme incertaine dans le halo des néons. Il secoua la tête et jeta un regard à son barman qui lui répondit par un haussement d’épaule désabusé.
- Etrange donzelle, patron, fit le barman. Mignonne mais étrange.
***
Damaya remonta la rue encombrée où se pressait la faune nocturne des dealers à la sauvette, des fourgueurs d’armes et des prostituées de seconde main. Elle s’engouffra dans une ruelle perpendiculaire et enfourcha le swoop de location qu’elle avait dissimulé derrière un collecteur anti-grav.
Le swoop s’éleva dans le souffle rauque de ses deux tuyères d’échappement et se posa sur une aire d’atterrissage étroite qui surplombait le quartier. Son maître l’y attendait, immobile sous le vent furieux qui lavait Nar Shaddaa de ses miasmes. Damaya le trouvait quelque peu déplacé, bien qu’élégant, avec ce long manteau de velours noir très ajusté qui rendait presque lumineuse sa chevelure argentée. Lorsqu’elle fermait les yeux, elle ne voyait que l’inusable bure marron. Et n’entendait que le silence de la méditation. Mais depuis plusieurs mois maintenant, l’ancien membre du Conseil Jedi semblait agité comme les océans de Kamino.
- Vous aviez vu juste, Maître, fit la Miraluka avec déférence. Zia combat ici plusieurs fois par semaine et elle a quitté l’endroit il y a environ deux heures. Le directeur s’est montré prudent mais j’ai réussi à obtenir ce que je voulais.
- Je te félicite, Damaya, dit Sidh Vega. Il n’est jamais simple de traiter avec ce genre d’individus. Zia pourrait nous être d’une aide inestimable dans notre tâche.
Il se leva et fixa le ciel gris de Nar Shaddaa avec intensité, comme s’il cherchait à écarter les nuées de sa seule volonté.
- Il est temps maintenant de commencer notre chasse, Damaya, fit-il avec sur le visage cette détermination farouche qui, l’animait depuis leur départ du Praxeum. Il voulait trouver les Jedis mais un Jedi va le trouver. Nous verrons alors ce qu’il cache derrière son masque.
- Oui, Maître, souffla Damaya avec conviction.
"Les Siths n'étaient pas des bâtisseurs. Ils ne savaient qu'anéantir.
Leurs oeuvres ne furent que vent et poussière."
Maître Sidh Vega à son élève Damaya