J'ai l'impression de faire de pire en pire au niveau des horaires de publication... Comme un certain Sky de la grande époque de YODA...

Pour ceux qui l'auraient loupée, je conseille la lecture de ma toute récente nouvelle
Au nom des siens à laquelle il y a quelques références dans ce passage.
<<Chapitre précédant<< Sommaire >>Chapitre suivant>>Chapitre 71 Il régnait une impression de déjà-vu dans le hangar de la base d’Heduris, avec ces files de pilotes patientant près de chasseurs à l’arrêt. Celric repensa avec une pointe de nostalgie à cette sélection qui lui avait permis de s’arracher à l’attraction de Polcaphran pour gagner les étoiles…
J’ai l’impression qu’il s’est écoulé une éternité depuis ce moment, et pourtant cela fait moins d’un an ! — Je déteste ça, lui murmura Nash en se retournant. Vraiment.
Son ami était juste devant lui, et s’apprêtait à passer dans la salle annexe où entraient tous les pilotes appelés dans l’ordre alphabétique.
— Ouais, ce n’est pas ce qu’il y a de plus agréable, confirma Celric.
Sa nervosité était telle qu’il frappait incessamment le sol du pied. Quelque chose clochait, il le savait mais n’arrivait pas à déterminer de quoi il s’agissait. Autrefois, il aurait pris cette inquiétude pour du stress malvenu, mais maintenant… Maintenant…
Et Vandrens qui n’arrêtait pas de l’appeler… Depuis la veille au soir, le professeur avait tenté de le joindre une vingtaine de fois au moins sur son comlink. Malheureusement, quand il s’en était aperçu ce matin au réveil, la nouvelle de la convocation de tous les pilotes sur la base planétaire leur était parvenue et il n’avait pas pu rappeler le généticien.
— Tarsin, Nash, annonça le garde de faction devant la porte, d’une voix fatiguée et monotone.
Le jeune capitaine se retourna, leva le pouce avec un sourire de vainqueur et entra dans la pièce.
Celric attendit en tentant de se changer les idées. Mais il était toujours préoccupé par ce qu’il avait découvert sur ses origines. Le fils d’une Jedi. L’enfant de rebelles.
Et, aujourd’hui, un pilote de l’Empire…
Son trouble ne passait pas et il ignorait quoi faire pour l’arrêter.
— Tavill, Celric.
Il prit une grande inspiration et avança d’un pas aussi assuré que possible.
Sans grand succès d’ailleurs. Il était toujours nerveux.
— Par ici, l’interpella un homme au moment où il entra dans la pièce.
Il suivit la voix. Ils étaient trois, à s’affairer autour d’un terminal auquel étaient connectés une multitude de câbles, reliés à deux plaques de cristal.
— Ne vous inquiétez pas, poursuivit celui qui l’avait accueilli. C’est indolore.
Il fit signe à un de ses collègues, qui prit les deux plaques et les orienta vers Celric. Le troisième activa quelques commutateurs, et un rai de lumière cuivrée s’abattit sur le jeune homme.
Il se passa alors un phénomène qui tira les techniciens de leur torpeur. Un hologramme de Celric était apparu autour de la console, entouré d’une aura bleue parcourue de symboles.
— Incroyable… murmura l’un des opérateurs.
— Que se passe-t-il ? s’inquiéta Tavill. Quelque chose ne va pas ?
— Tout va très bien, l’assura le premier homme en tapant quelques codes sur son comlink.
Il se pencha un instant sur son appareil, puis revint vers son interlocuteur.
— Prenez l’ascenseur à droite, lui dit-il en désignant une porte au fond de la pièce. Quatrième étage.
Puis il ajouta :
— Bonne chance.
Pas rassuré le moins du monde, Celric suivit les indications.
Il se retrouva dans un sas de maintenance donnant sur une sortie de secours, laquelle avait sans doute été utilisée par la plupart des autres pilotes – sinon tous. Il fut un instant tenté de les suivre, car un mauvais pressentiment était né dans son esprit. Mais il tourna à droite et prit le turboélévateur.
Quand les portes de la cabine s’ouvrirent, il retint son souffle : il connaissait cette pièce. L’Observatoire. Ses immenses baies vitrées donnant sur la capitale. Ses terminaux permettant de réguler la circulation aérienne au-dessus de tout Polcaphran.
C’était là qu’il avait appris son affectation à bord du
Némésis, de la bouche du colonel Garind.
Mais en lieu et place de l’assistant du Moff de Polcaphran…
C’était Carth Poldrei lui-même qui attendait, observant ces plaines vertes et cette ville qui avaient tant comptées dans sa vie.
Entendant les bruits de pas derrière lui, le Moff se retourna.
— Vous ! s’exclama-t-il, écarquillant les yeux en voyant le jeune homme approcher. Eh bien, pour une surprise…
— On m’a dit de venir ici… bafouilla Celric.
— Effectivement, répondit le Moff en descendant les trois marches qui séparaient le corridor circulaire de l’espace central.
Il approcha d’une petite table que le jeune homme n’avait pas remarquée jusque-là. Avec sa nappe de velours rouge, sa bouteille et ses quelques verres, elle était parfaitement incongrue au milieu de l’univers de travail métallique de l’Observatoire.
— Un verre ? proposa Poldrei. C’est un cocktail aldéranien sans alcool. À vrai dire, je pensais trouver plus de candidats potentiels, mais vous êtes le premier… Et sans doute le seul. Enfin… Vu ce dont nous avons discuté, mieux vaut avoir l’esprit clair.
— Je veux bien, merci, dit Tavill avec circonspection.
Le Moff remplit deux verres du liquide ambré et lui en tendit un avant de goûter à l’autre.
— Délicieux, commenta-t-il.
Celric acquiesça et prit une gorgée. La boisson avait un goût sucré sans être écœurant, avec un parfum de fruits mélangés bien prononcé.
— Alors, comment allez-vous ? demanda Poldrei.
— Euh… Ça va, répondit le pilote, tendu.
— Hmm. Vous vous êtes remis de votre captivité ?
— Oui, oui, sans problème.
Cet échange de banalités provoquait en lui un malaise croissant ; il devait trouver le moyen d’y mettre un terme.
Il rassembla tout son courage et prit l’initiative :
— Excellence… Qu’est-ce que je fais là ?
Le Moff ne répondit pas immédiatement. Il observait le contenu de son verre, le faisant tourner entre les doigts pour jouer avec les variations de lumière que cela provoquait. Enfin, il déclara :
— Vous avez un don, Celric.
Il ressentit un frisson le long de son échine dorsale : ses pires craintes venaient d’être confirmées.
— Je ne vois pas de quoi vous parlez, bredouilla-t-il en cherchant à tout prix une échappatoire.
— Vraiment ? répondit Poldrei en fronçant les sourcils. Il ne s’est jamais passé de choses bizarres, de choses inexplicables, des moments où une sorte de volonté supérieure semblait avoir pris l’ascendant sur la vôtre ?
— Je…
— C’est la manifestation d’un pouvoir émanant de l’univers tout entier ; une essence spirituelle nommée « Force » qui était la source de pouvoir des anciens Jedi.
Vous disposez de ce pouvoir, Celric. C’est un don immense.
— Non… Je n’ai pas la… Ce truc, là…
— Je vous assure que si, assura le Moff, catégorique.
— Non…
— Mais si ! s’énerva-t-il. Bon sang, pourquoi refusez-vous d’admettre…
Il se calma soudainement, ses yeux d’un gris d’acier posés sur son interlocuteur. Tavill eut l’impression qu’une cage de fer venait de se refermer sur lui.
— Vous le saviez, comprit alors Poldrei. Vous le saviez déjà.
Je suis perdu.
— Combien de temps ? demanda-t-il, les yeux emplis d’une dureté nouvelle.
— Quelques jours.
Le Moff ferma les yeux et baissa la tête.
— Votre visite à Vandrens. Bien sûr.
Celric ressentit un nouveau choc en entendant ces mots.
— Vous me suivez ?
— Je garde un œil sur Ardin Vandrens, corrigea Poldrei. Si vous étiez à ma place, ne garderiez-vous pas un œil sur les agents rebelles en faction sur votre planète ?
Le jeune homme paniquait de plus en plus. Le généticien était lui aussi pris dans la toile du Moff, sans même le savoir… Il n’avait plus de porte de sortie…
— Je suppose qu’il vous a dit la vérité au sujet de la mort de vos parents ? ajouta Poldrei avec un calme glacial.
Celric ne savait même plus quoi répondre ; voyant son état, le Moff reprit :
— Je suppose que nous aurions dû avoir cette conversation depuis bien longtemps, dit-il en soupirant. Mais nous la poursuivrons dans mon bureau, ajouta-t-il en consultant son comlink. Les tests sont achevés ; vous êtes officiellement le seul pilote polcaphréen disposant du don des Jedi…
Celric laissa partir sa tête en arrière, implorant silencieusement le ciel de trouver une solution à son problème.
* *
*
— Cela fait longtemps que je garde un œil sur vous, Celric, commença Poldrei quand il fut installé dans son fauteuil. Très longtemps, même.
Le jeune homme mit quelques instants avant de répondre. Avant ce jour, il n’avait jamais mis les pieds dans le cœur du gouvernement impérial de Polcaphran ; aussi l’architecture majestueuse du palais de pierres volcaniques, ses ornements métalliques et ses teintures bleues l’impressionnaient-ils tout particulièrement.
— Je l’ignorais, dit-il finalement.
— Je m’en doute bien. Votre père vous a-t-il parlé de sa jeunesse ? Avant la guerre ?
— Rarement.
Il s’ingénia à imprimer une dureté particulièrement visible sur ses traits.
— Il est mort trop tôt pour ça.
— Comme vous le savez déjà, reprit le Moff sans se laisser démonter, il était déjà ami avec Ardin Vandrens. Mais dans leur groupe, il y avait un troisième garçon, un ado de leur âge nommé Jeyran.
— Jamais entendu parler.
— C’est un souvenir douloureux. Il est mort lors du massacre de la Marche d’Heduris.
Puis, après quelques instants, Poldrei ajouta :
— C’était mon frère.
Celric prit une grande inspiration. Le comportement passif du docteur s’expliquait mieux…
— Je suis désolé, dit-il sincèrement.
— C’était il y a longtemps, expliqua le Moff, le regard perdu dans le lointain. Trente ans… Peu ou prou l’âge que j’avais à l’époque. Mon frère avait insisté pour m’accompagner à la Marche. J’ai accepté. Il y est mort.
Il eut un rire sans joie.
— Cela ne lui a peut-être coûté que quelques heures de vie, ajouta-t-il avec dureté. Si je n’avais pas accepté qu’il vienne, il serait sans doute rentré à la maison, après les cours… Le soir même, les Séparatistes massacrèrent toute ma famille ; en fait, tout un quartier d’Heduris. Et moi, blessé dans ma chair et dans mon âme, je rejoignais la Résistance de Thalas Garind. Votre père et Vandrens l’ont fait quelques temps plus tard… Ils étaient à la Marche, eux aussi, mais suivaient le cortège sur les toits. C’est Edwin qui nous a rapporté les images du massacre, permettant de révéler la vérité sur les agissements de Palder Jaderan.
Les coudes posés sur le bureau, il joignit ses mains devant son menton et poursuivit :
— Quand je suis revenu sur Polcaphran, il y a dix ans, j’ai décidé de les garder à l’œil pour les aider en cas d’ennui… En mémoire de mon frère. Malheureusement, vos parents sont quand même morts, loin d’ici.
— Tués par l’Empire.
— Oui.
Celric acquiesça lentement ; le Moff avait au moins l’honnêteté de confirmer la version de Vandrens.
— Vous le saviez. Comment ?
— La version officielle des Rebelles. Le couple Tavill, pris dans une foule de fuyards impériaux, les deux époux tués par des non-humains en révolte… Ça ne collait pas. Votre père était agoraphobe.
— Comment…
— La Marche. Encore elle… Il était aux premières loges pour voir des milliers de personnes agglutinées se faire massacrer comme des nerfs à l’abattoir. C’est le genre de choses qui laissent des cicatrices. C’est le détail qui m’a mis la puce à l’oreille, et d’autres ont suivi : qu’auraient-ils fait dans les bas-fonds de Coruscant, par exemple ? Ensuite, ce n’était qu’un travail de déduction.
— Qui est le responsable ?
—
La responsable. Ysanne Isard. Psychopathe sociopathe devenue légèrement monomaniaque sur les bords avec le temps. Pas très sympathique. J’ai eu quelques démêlés avec elle par le passé… Et cela a failli me coûter la vie.
— De la pure politique impériale, lança Celric avec dédain.
À son grand étonnement, la remarque arracha un bref rire au Moff Poldrei.
— Il y a un peu de ça, admit-il. Mais ça tient aussi à son caractère. Elle a fait exécuter son propre père pour prendre sa place… Bref, la coupable idéale. Et pourquoi les Rebelles auraient-ils camouflé l’un de ses crimes, si ce n’est pour protéger leurs agents ?
Il s’enfonça dans son fauteuil, soupirant doucement.
— Dès que j’ai compris que Vandrens était membre de l’Alliance, je me suis arrangé pour le faire surveiller. Des agents ont infiltré sa cellule et m’ont révélé tout ce que je voulais savoir. D’autres gardent directement un œil sur lui et me tiennent informé ; sa secrétaire, par exemple, qui m’a rapporté votre récente visite.
Celric ferma les yeux. Il se souvenait parfaitement de la jeune fille, congédiée avant que ne commence l’entretien. Il se sentait pris dans une nasse inextricable, sans la moindre issue en vue…
— Et vous n’avez pas agi.
— Pourquoi le ferais-je ? Vandrens ne m’est pas hostile. C’est un pacifiste, comme je l’étais jadis… Comme je le suis encore par moments. Je sais que tant qu’il sera là, les Rebelles n’attaqueront pas la planète, qu’il n’y aura pas d’atteinte à ma personne ou quelque autre désagrément. Plus encore, je reste informé de leurs faits et gestes et je contrôle les informations qui leur parviennent. Comme lorsque j’ai fait fuiter les enregistrements de l’assaut de Polcaphran… De la destruction de notre station spatiale civile…
— Détruite par la Rébellion.
— Vous savez déjà que ce n’est pas le cas. N’est-ce pas ? Vandrens a bien dû laisser échapper à un moment ou un autre que c’était une initiative bothane…
— Quelle importance ?
Poldrei le fixa d’un regard intense, ses yeux couleurs d’argent sondant le visage du jeune homme pour en décrypter les expressions.
— Je sais ce que tu ressens, dit-il à voix basse en passant au tutoiement. Plus que tu ne l’imagines. Nous sommes semblables, Celric.
— Vous m’en direz tant…
— Ton cœur a été brisé quand tu as appris le décès de tes parents. Tu t’es retrouvé sans attaches, tes buts anéantis. Et tu as voulu les venger. C’est pour ça que tu t’es engagé dans la Chasse ; tu voulais affronter les Rebelles. Tuer les meurtriers de tes parents. Et c’est pour ça que tu es à présent sur tes gardes, et que tu haïs désormais l’Empire autant que tu haïssais la Rébellion.
— Je n’éprouve pas de haine, corrigea le pilote. Seulement de la détermination.
— Alors, ton cœur est plus sage que le mien, admit le Moff. Moi, j’ai toujours ressenti une colère ardente à l’encontre de ceux qui m’ont fait souffrir ou ont menacé ceux que j’aime. Palder Jaderan. Leight Barton. Derth Beny’lya… Mais je respecte ton choix et ton attitude.
— Qu’allez-vous faire de moi ? demanda Celric d’une voix dure. J’imagine que vous ne pouvez pas me laisser repartir librement, avec tout ce que j’ai appris…
— Ce serait problématique, en effet… Je serais sans doute obligé de prendre des mesures contre Ardin Vandrens pour éviter que tu ne le préviennes… Avec le moins d’effusions de sang possible, bien sûr ; mais je ne pourrais pas garantir son intégrité s’il résiste. Bien sûr, il existe une autre solution.
— Impliquant mon don ? Ma capacité à utiliser la Force ?
— Oui, confirma simplement Poldrei. Que sais-tu des Jedi ?
Celric décida qu’il n’avait plus rien à perdre ; l’impérial savait trop de choses, avait trop d’avance sur lui. Il décida donc de le prendre en défaut.
— Je sais que ma mère en était une, lança-t-il d’une voix aussi claire que possible.
À sa grande satisfaction, il constata que cette révélation avait décontenancé le Moff, qui ne s’attendait pas du tout à une réponse de ce genre.
— Lysie Tavill ? dit-il doucement. Une Jedi ?
— Je sais aussi que l’Ordre dont elle faisait partie, issu d’une tradition vieille de nombreux millénaires, réputé pour sa sagesse et son altruisme, a été détruit par traîtrise par l’Empire –
votre Empire. Que ses membres ont été traqués et exterminés par vos congénères… Et peut-être même par vous.
Poldrei avait perdu de son aplomb, et mit un certain temps avant d’encaisser tout cela ; mais il finit par acquiescer.
— Oui, c’est vrai.
Celric croisa les bras et attendit que le Moff reprenne contenance.
— L’Empire a fait tout cela, reprit le vieil homme avec lassitude.
Nous l’avons fait… Et je n’en connais même pas les véritables motifs. Pendant des années, j’ai cru à la version officielle du coup d’֤État manqué… Je m’y suis accroché. Depuis, j’ai vu le sommet de l’Empire. La corruption qui y règne. Des hommes promus par Palpatine, nourrissant leurs ambitions personnelles… Et le pire, c’est que ce n’est pas la mort de l’Empereur qui a changé leur nature ! Non, ils étaient déjà comme ça avant ! Muselés par la peur, mais voraces quand même. Des kaths en cage, et la serrure explosée… Cet Empire-là, Celric, je veux le voir détruit. Peux-tu me croire quand je te le dis ?
Le jeune homme hésita. Une lueur nouvelle, bien moins affirmée que la précédente, brillait dans les yeux du Moff. Comment pouvait-il s’assurer de sa sincérité ?
Vous avez un don, Celric. C’est ce que Poldrei lui avait dit au début de leur entretien. Peut-être que le moment d’en faire un bon usage était enfin venu…
Il ignorait comment s’y prendre, et choisit donc de s’en remettre à son seul instinct. Il visualisa ce qu’était sa conscience ; cette perception du moindre sentiment, de la plus infime variation d’humeur de son être profond, et imagina qu’il l’étendait autour de lui.
Il sentit le bois précieux du sol, des planches taillées au laser pour ne pas présenter la moindre aspérité, renforcées par une couche d’enduit translucide protecteur. Il perçut la dureté de la roche volcanique, ces pierres noires couvrant les murs, ici dépourvues d’aspérités ; il frissonna en touchant mentalement le métal froid qui les décorait ou soutenait le bureau.
Et il perçut la conscience du Moff Poldrei.
C’était un sentiment étrange ; il percevait l’essence d’un autre, avec ses certitudes et ses contradictions. Si Poldrei se montrait plus hésitant qu’avant sur la forme – la façon de présenter ses idées à Celric –, ses convictions, elles, étaient solidement ancrées. Il pensait chacun de ses mots, il y croyait fermement.
— D’accord, admit-il. Qu’est-ce que je viens faire dans tout ça ?
— J’ai les moyens nécessaires pour faire renaître l’Ordre Jedi. Des ressources financières, bien sûr. L’accès à de vastes connaissances stockées pendant toutes ces années dans les archives secrètes de l’Empereur. De quoi détecter les chevaliers potentiels. Le problème, c’est le professeur. Celui que le Grand Amiral Thrawn a déniché est… Instable. Il risque de poser problème et de jeter les apprentis dans les bras du Chaos. S’il y parvient… Cela risque d’avoir des conséquences désastreuses pour toute la Galaxie.
Il ne mentait pas. Celric retint son souffle.
— Si j’accepte… Que devrai-je faire ?
— J’ai besoin d’un homme de confiance qui agirait en mon nom sur Jomark – la planète d’élection de ce « professeur ». Effectuant des tâches simples mais essentielles. Surveiller les autres apprentis, repérer ceux qui montreraient des tendances… Comment disent-ils, déjà ? Ah, oui. Ceux qui utiliseraient le Côté Obscur. Haine, colère… Les sentiments négatifs… La recherche du pouvoir… Tous ceux-là seront dangereux. Pour en venir à bout, il faudrait que tu te rapproches des autres, tout en ne leur révélant tes motivations qu’une fois certain de leur fidélité.
— Vous voulez un espion.
— Cet homme – ce « Jedi » – est un clone, même s’il semble l’ignorer. Il est mentalement instable et potentiellement dévastateur. Mais il possède une aptitude que Thrawn semble considérer essentielle : la méditation de combat. C’est une arme qui pourrait retourner complètement le cours de la guerre et assurer la victoire à nos forces avec des pertes minimum… Des deux côtés.
— C’est ce que vous dites… Pour me ménager.
— Je n’ai aucun intérêt à ce qu’il y ait beaucoup de morts, répliqua Poldrei avec virulence. Je ne suis pas sadique. Si je veux la victoire, c’est parce qu’elle sert d’onction pour les dirigeants qui veulent aller plus loin. Pour jeter à bas l’ancien Empire et en fonder un autre, plus juste et moins oppressant, il me faut une victoire sur la Rébellion. Thrawn la veut aussi… Mais il sous-estime la dangerosité de la Force. Il ne comprend pas ce qu’il a réveillé… Alors, je t’en conjure, Celric, accepte.
Le jeune homme prit le temps de la réflexion. Il percevait la sincérité du Moff et sa réelle volonté de changer les choses. Il y avait aussi, derrière ces nobles sentiments, une part plus sombre que Poldrei n’avait guère exprimée, mais qui restait présente et influente dans le cœur du dirigeant polcaphréen ; le tableau n’était donc pas aussi absolu qu’il l’aurait souhaité. Il ne pouvait pas se fier entièrement au Moff, et ne devait donc s’en remettre qu’à lui-même.
Que désirait-il ? La vengeance ? Les paroles échangées avec Vandrens l’avaient écarté de ce chemin, il en avait maintenant conscience ; la discussion avec Poldrei lui avait ouvert les yeux. Isard étant morte, il n’avait plus de raisons de se venger, si ce n’est de l’Empire lui-même. Et, pour cela, il n’avait que deux options : ou rallier la Rébellion, comme l’avaient fait ses parents, entraînant leur perte, ou adhérer au projet du Moff et contribuer à le miner de l’intérieur jusqu’à son remplacement final. Poldrei lui offrait la possibilité de devenir un Jedi, l’un de ces héros de ses rêves d’enfance, un légendaire chevalier de l’ancien temps déterminant par ses actes le destin de la Galaxie.
Il pensa à ces autres hommes qui allaient également être sélectionnés et n’auraient peut-être pas les mêmes scrupules que lui vis-à-vis du pouvoir ou des sentiments obscurs ; et à ceux qui, voulant suivre la même voix que lui, auraient besoin d’un guide.
Alors il put enfin prendre sa décision.
— Entendu, lâcha-t-il avec un creux au ventre.
Il ressentait dans tout son être l’importance de cette décision.
— J’accepte.