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Chapitre VI
 

Je vous présente mes condoléances, le docteur Iblir et ses médecins ont fait tout ce qu'ils ont pu pour la sauver.
Le Général Varulg Fayg-Jehd les avait rejoints après un laps de temps indéterminé.
- Je sais, répondit Telin, étrangement détaché. Elle a fait tout ce qu'elle a pu pour que nous nous échappions de ce système, et maintenant, elle va en mourir... Si seulement je pouvais faire quelque chose... essayer, au moins... Je donnerais ma vie pour elle... sauf qu'il n'y a rien à faire.
Varulg et Iblir s'entreregardèrent un instant et échangèrent quelques paroles dans leur langue ; finalement, Iblir se retourna vers Telin :
- Lieutenant... il y a peut-être encore quelque chose à faire... mais c'est extrêmement risqué... Vous risquez d'y laisser la vie, et il y a de bonnes chances pour que votre camarade ne s'en porte pas mieux pour autant...
Telin sembla brusquement revenir à la vie, ramené par une lueur d'espoir infime mais suffisante.
- Ça n'a pas d'importance, docteur, vraiment pas ; si je peux faire quelque chose pour elle, alors je dois le faire.
- Nous devons le faire, précisa Safera. Quoi que vous tentiez, je serais avec vous.
- Moi aussi, approuva Wyntar. Dites-nous seulement de quoi il retourne.
- Très bien... Je ne sais pas si je dois appeler cela du courage ou de la folie, mais quoi qu'il en soit, ça force le respect.

Finalement, leurs aventures sur Hautemer s'achèveraient donc probablement de la même façon qu'elles avaient commencées, par une tentative désespérée de sauver une camarade. Ils auraient pu rester vivre au fond de l'océan pour le restant de leurs jours, ils auraient pu mourir dans un assaut désespéré contre la base Kryshzla, ils auraient pu, tout simplement, passer en hyperespace de façon hasardeuse en acceptant la mort de Valdie comme une chose inévitable ; mais ils n'avaient rien fait de tout cela, parce que... parce que la Galaxie avait plus besoin de gens loyaux que de gens sains d'esprits, parce qu'ils se sentaient le devoir ne pas faire une chose pareille, tout simplement.
- Vous êtes sûrs que c'est ce que vous voulez ? demanda une dernière fois le docteur Iblir. Je pense que Valdie comprendrait, vous savez...
- Oui, elle comprendrait pourquoi j'aurais fait ça, admit Wyntar. Mais moi, je ne me comprendrais pas.
Ils étaient bien loin de Fayg et son éclairage chaleureux, plus encore de la surface et de sa face jaune, aussi les Chiss ne voyaient-ils que grâce à leurs casques ; et ce que Safera voyait avait quelque chose de réellement surréaliste... Elle était dans une forêt, mais une forêt qui n'avait rien à voir avec les forêts terrestres, une forêt faite d'immenses algues rouges et violettes, tentaculaires, plus hautes que tous les arbres que Safera connaissait, et une forêt si dense que la jeune femme devait souvent s'ouvrir un chemin de ses bras. Pour Safera, qui était petite et mince, même pour une femme, le cadre était impressionnant, comme extrait d'un conte de fées sous-marin... Les Chiss y avançaient prudemment, accompagnés du docteur Iblir et d'une douzaine de soldats Hynors ; Telin et Wyntar portaient le corps inerte de Valdie, vêtue d'une combinaison. Parfois, ils se figeaient tous, un bruit leur faisant craindre la présence d'un monstre marin à proximité ; dans ces cas-là, soit ils voyaient surgir au-dessus d'eux une gigantesque silhouette sombre aux formes indiscernables qui ne semblait pas leur prêter attention, soit ils repartaient après un moment, considérant que la créature était le fruit de leur imagination ou était simplement endormie.
À d'autres moments, ils rencontraient de petites choses lumineuses, grosses comme le poing de Safera ; les Hynors se figeaient alors et invitaient les Chiss à en faire autant, ils laissaient passer les sphères de lumières blanches avec une révérence qui avait quelque chose de religieux.
- Que sont ces créatures ? demanda Wyntar après qu'un groupe d'entre elles eut disparu entre les algues géantes.
- Difficile à dire, même pour nous, avoua Iblir. Mais ceux qui les ont attaquées sont presque toujours morts dans d'horribles souffrances pour autant que nous nous souvenions... Nous les craignons depuis toujours... Autrefois, lorsque l'un de nous les attaquait par folie ou mégarde et survivait, nous essayions de l'interpréter comme un présage ou nous considérions l'intéressé comme un élu... Nous n'agissons plus ainsi depuis des siècles, mais nous n'avons jamais oublié de craindre les Chayerda, elles sont de toutes évidences liées aux Ômus...
Telin hocha la tête ; alors qu'ils sortaient de l'hôpital, Iblir leur avait parlé des Ômus, les Seigneurs des Abysses, ces mystérieuses créatures aux pouvoirs terrifiants qui résidaient au plus profond de forêts d'algues telles que celles-ci. Iblir leur avait expliqué que s'ils étaient vraiment prêts à tout pour sauver leur amie, le dernier recours était de quémander l'aide de ces créatures ; c'était une solution désespérée, car les Ômus étaient imprévisibles, ils pouvaient sauver comme ils pouvaient tuer, et les Hynors les craignaient presque autant qu'ils plaçaient leur confiance en eux.
L'expédition reprit sa marche à travers les algues une dizaine de minutes, jusqu'à ce que le docteur Iblir et les Hynors s'arrêtent.
- C'est là... expliqua le médecin. C'est à partir de là que commence le territoire des Ômus proprement dit, c'est à partir de là que ne doivent plus s'avancer que ceux qui ont une requête à faire aux Seigneurs des Abysses ; à partir de là... vous ressortez votre vœu exaucé, ou vous ne ressortez pas. Vous devrez continuer votre route seuls... Je ne peux pas vous dire quand vous rencontrerez un Ômu, encore moins que vous quatre ressortirez en vie...
- Très bien. Merci de nous avoir accompagnés jusque-là, et à plus tard, j'espère, répondit Telin d'une voix qui laissait transparaitre son inquiétude.
- Lieutenant, si les choses tournent mal... n'essayez pas de vous enfuir, encore moins de combattre les Ômus, c'est perdu d'avance et cela ne ferait que les rendre plus furieux ; ils sauront ce que avez en tête bien avant que même vous ne le mettiez en œuvre, la puissance qu'ils maîtrisent rassemble tous les êtres vivants, même les Chiss, même les Kryshzlas, et ils connaissent parfaitement vos pensées...
- Nous ne l'oublierons pas, merci.
- Un dernier conseil, et pas le moindre : ne vous laissez en aucun cas détourner de votre objectif, d'accord ? On voit et on entend des choses parfois très étranges sur le territoire des Ômus, mais aussi séduisant ou effrayant que cela puisse être, ne fuyez pas, et n'abandonnez pas Valdie... Vous devez rencontrer un Ômu pour lui demander de guérir votre amie, c'est tout ce qui doit compter ; le reste... le reste n'existera pas réellement si vous gardez cela à l'esprit. Ici, détourner le regard et surtout votre attention vous sera bien plus utile que de fuir ou d'essayer de vous battre.
Safera était sûr que Wyntar avait frissonné sous sa combinaison.
- Que voulez-vous dire ?
- Cela ne vous aiderait pas de le savoir à l'avance, vraiment pas, Wyntar... Allez rencontrer les Ômus, et que votre détermination ne faillisse pas.
Les Hynors tournèrent le dos aux Chiss et disparurent à travers les algues ; Safera se demanda vaguement comment elle ferait pour retrouver son chemin dans ce labyrinthe, mais elle avait des soucis plus urgents pour le moment.
- Que voulait-il dire, à votre avis ? demanda difficilement Wyntar, comme s'il craignait qu'évoquer plus précisément sa peur ne la rende plus réelle.
- Aucune idée... mais j'avoue que ça ne me rassure pas...
- Les gars... j'ai vraiment peur, là... dit Safera d'une voix blanche.
Son estomac semblait si noué qu'il ne lui vint même pas à l'idée de taire ce qu'elle ressentait, pour une fois ; elle osait à peine respirer, effrayée par de simples images nées de son esprit en écoutant Iblir... Elle nageait en plein cauchemar, elle s'enfonçait de plus en plus loin de la réalité depuis qu'ils avaient eu cette fameuse idée d'inspecter en détail la planète Hautemer. Les chasseurs Kryshzlas surgis de nul part, Fayg et les Hynors, c'était une chose, mais ça...
- Je ne peux pas vous en vouloir, lui accorda Telin. J'avoue que quand j'ai dit que j'étais prêt à tout pour sauver Valdie, ce n'est pas exactement ce que j'avais en tête...
Wyntar ricana nerveusement.
- Est-ce que quelqu'un peut m'expliquer pourquoi nous acceptions froidement l'idée de mourir pour sauver Valdie lorsque nous pensions à des légions de soldats Kryshzlas et pourquoi nous avons le sang glacé maintenant que nous savons que nous allons simplement devoir nous confronter à des légendes Hynors ?
- Ce n'est pas la même chose... expliqua Telin. Les Kryshzlas, les Hynors, les Pashagas, tout ça, ce sont des menaces matérielles, palpables ; vous ne pouvez peut-être pas les vaincre, mais vous comprenez de quoi il s'agit, vous pouvez au moins essayer de les combattre ; et ça, ça rassure drôlement votre inconscient, même si la partie plus calculatrice sait très bien que vous n'avez aucune chance de vous en tirer... là... qu'est-ce que vous voulez faire contre une hallucination ou un esprit ? Rien, même si vous pouvez avoir des raisons de croire qu'il ne vous tuera pas. Et admettre leur existence revient à remettre en cause la vision du monde que nous donne la science, c'est aussi cela qui vous fait peur...
- Tu as sûrement raison, mais ce n'est pas parce que je le sais que j'ai moins peur...
- Moi non plus, à vrai dire... Après, ce qui nous fait peur, c'est aussi l'idée que nous sommes peut-être en train de perdre la raison, puisque la plupart des gens ne croient pas aux esprits... (Telin rit, mais d'un rire triste) J'ai plusieurs fois réfléchi à ce genre de choses, mais je ne pensais pas que j'aurais à m'appliquer mes propres idées... Safera, ça va aller ?
- J'ai peur, sérieusement... mais il faudra bien que ça aille, parce que Valdie peut mourir d'une minute à l'autre ; allons-y.
- Oui... Allons-y maintenant, sinon nous n'oserons jamais partir, approuva doucement Telin.
Malgré leur peur, malgré les images effrayantes qui leur venaient probablement tous à l'esprit, les Chiss se remirent en marche, portant toujours Valdie inanimée ; Safera ouvrait le chemin, écartant les algues lorsque celles-ci gênaient trop le passage. Il était intéressant de voir à quel point Safera pouvait être concentrée sur sa marche lorsqu'elle voulait éviter de penser à autre chose...
Cependant, après plusieurs dizaines de minutes à progresser au hasard dans la forêt d'algues, aucun Chiss n'avait eu à souffrir d'hallucinations, nul démon des profondeurs n'avait surgi pour leur ordonner de rebrousser chemin... En revanche, il n'y avait toujours pas trace non plus des Ômus, que les Hynors décrivaient pourtant comme des créatures gigantesques...
Toutefois, alors que son esprit se détendait et cessait de chercher des esprits sous-marins, Safera se rendit compte qu'il y avait effectivement quelque chose de différent dans cette partie de la forêt... C'était très étrange, elle ne voyait ni n'entendait rien de différent, et pourtant, son esprit lui disait que ces lieux étaient chargés de colère et de haine, qu'il y avait ici quelque chose qu'elle ne tenait vraiment pas à rencontrer, quelque chose qui exigeait de tuer, détruire, effacer... Quelque chose d'incontrôlable et d'incompréhensible, une chose obscure qu'il ne fallait pas approcher...
Elle se reprit ; qu'est-ce qui lui passait par la tête ? Elle ressentait exactement ce qu'elle s'attendait à ressentir... Qu'il y ait des créatures dangereuses ici, elle voulait bien le croire, mais comment son esprit pouvait-il en avoir vent ?
Mais les paroles du docteur Iblir lui revinrent à l'esprit... « La puissance qu'ils maîtrisent rassemble tous les êtres vivants, même les Chiss, même les Kryshzlas, et ils connaissent parfaitement vos pensées... »... Cela pouvait-il marcher dans l'autre sens ? Était-ce la haine des Ômus qu'elle percevait ? Et si oui, qui pouvaient-ils bien haïr ? Les Chiss ? Les Kryshzlas ? Les Hynors ? Peut-être haïssaient-ils tous les petits êtres qui construisaient des villes...
En tout cas, Safera avait du mal à se convaincre que toute cette obscurité qu'elle percevait était le fruit de son imagination... Il y avait là quelque chose d'ancien et plein de haine, une chose totalement coupée des autres êtres vivants par sa fureur, elle en aurait mis la main au feu...
- Safera... l'interpella Wyntar dans un murmure.
Ça y est, il va me dire que lui aussi il sent cela, et je saurai que nous sommes tous perdus... pensa instantanément Safera, le sang glacé.
- Qu'y-a-t-il ? trouva-t-elle la force de demander.
- Regardez sur votre gauche... Je dois savoir : est-ce que vous voyez ce que je vois ?
Lentement, Safera détourna le regard de son chemin pour le tendre dans la direction indiquée par Wyntar... Il n'y avait rien... si, il y avait bien quelque chose hélas, elle ne pouvait le nier, une lueur d'un blanc tirant sur le jaune qui avait quelque chose de cadavérique illuminait les algues, là-bas, et l'anomalie devait faire la taille d'un homme...
- Oui... Oui, j'ai bien peur que oui, avoua-t-elle.
- C'est sûrement une Chayerda, n'allez pas chercher midi à quatorze heures, coupa Telin si fermement que Safera sut immédiatement qu'il ne pensait pas un mot de ce qu'il disait.
- De cette taille ? demanda-t-elle, sceptique.
- Contentez-vous de cette explication... N'oubliez pas ce qu'a dit le docteur, nous sommes là pour sauver Valdie, pas pour faire la chasse aux fantômes, d'accord ?
- Bien sûr, ce n'est pas ce que je voulais dire...
- Je sais, mais... Wyntar, si ces lumières te dérangent trop... regarde simplement ailleurs. Si ce sont vraiment des... des esprits, le savoir ne nous aidera pas à grand-chose, de toute façon.
- Telin... je me sens vraiment mal, déclara Wyntar d'un ton qui ne lui ressemblait pas. Je vais passer pour un dingue, mais je sens une présence dans cette forêt... Il y a quelque chose qui ne veut pas de nous, ici...
- Je sais, je la sens aussi, et ça me fait peur... Ce n'est pas une impression.
- Je sens la même chose... avoua Safera. Mais c'est un peu tard pour renoncer...
- C'est sûr... soupira Wyntar. On doit affronter ça pour Valdie, de toute façon...
- Taisez-vous ! Ne bougez plus ! ordonna brusquement Telin au détour d'un énorme rocher de basalte.
Il avait parlé avec tant de sérieux que Safera cessa même de respirer et resta ainsi, figée derrière le rocher, sans oser demander ce qu'il se passait... Craignant d'y croire, elle compris en voyant une ombre de lumière jaunâtre étrangement solide s'élever au-dessus du rocher, les survolant, les étudiant de son... de son regard ? Oui, la chose, plus haute qu'un homme, avait bien une sorte de tête qui semblait les étudier...
Non, oublie ça tout de suite, c'est juste une lumière ! s'ordonna implacablement Safera.
Mais voilà que la lumière spectrale changeait de forme sous le regard médusé des Chiss... Des bras apparaissaient, sa tête se faisait triangulaire... Un Hynor ? Mais Safera n'avait pas eu le temps d'en juger que la chose se repliait déjà sur elle-même, pour mieux se transformer à nouveau... Des bras, encore ? Oui, mais cette fois, des jambes semblaient aussi se former alors que Safera retenait sa respiration, de crainte que la chose la repère si elle ne l'avait pas déjà fait... La tête reprit forme, cette fois plus humanoïde, mais étrangement lisse, comme si elle portait un casque... Et les bras étaient étrangement formés... Et soudain, Safera comprit ; la chose était tout bonnement un soldat Kryshzla en armure, elle voyait à présent distinctement une réplique de fusil blaster émerger de son bras! Elle eut envie de crier, de prendre ses jambes à son coup, de se jeter sur la chose... Une inexplicable terreur s'emparait d'elle, quelque chose dans son esprit lui hurlait que cette chose était à craindre par-dessus tout, qu'elle devait immédiatement partir et prier pour ne pas être rattrapée... Elle ordonna implacablement à son corps de rester immobile et silencieux, se forçant à penser à ce qui se passerait s'ils étaient découverts...
Elle entendit Wyntar hurler de terreur dans son casque... La chose ne pouvait logiquement pas l'avoir entendu dans l'eau, et pourtant...
Et pourtant, un immense éclat de rire retentit, un rire sonore que Safera entendit aussi distinctement que si la chose avait partagé sa combinaison, un rire cruel et désincarné qui força Safera à se jeter à terre en fermant les yeux comme une petite fille, tremblante de peur, à deux doigts de supplier la chose de l'épargner... Et tant que le rire diabolique dura, elle n'osa pas remuer d'un cil...
Le rire s'évanouit soudain comme s'il n'avait jamais existé... Safera resta un moment à terre, terrorisée... Puis elle se contraignit à rouvrir les yeux et à se relever... L'apparition avait disparue. Le cœur de Safera battait encore à toute vitesse, sa respiration était toujours haletante, mais c'était fini à présent, et c'était le principal.
Wyntar était recroquevillé derrière une plante, Telin était resté accroupi derrière le rocher et il rouvrit les yeux.
- Elle n'est plus là ? demanda-t-il faiblement.
- On dirait que non... C'est bon, Wyntar, c'est fini, la chose est partie...
Le jeune homme se releva difficilement.
- Qu'est-ce que c'était que cette chose ? demanda-t-il, sur le ton du cri de terreur plus que de la question. Qu'est-ce que c'était ?
- Qui peut le dire ? lui répliqua Telin, et Safera avait l'impression d'entendre parler un homme d'une centaine d'années. Un esprit, une hallucination collective, un envoyé des Ômus, le fantôme d'un soldat Kryshzla tué ici... Nous sommes dans un autre monde, Wyntar, ce ne sont pas les mêmes règles qui s'appliquent ici, le possible et l'impossible, le naturel et le surnaturel... Toutes ces notions n'ont plus de sens ici, pas suivant les critères de la surface, en tout cas. À propos, je n'ai pas rêvé, il a bien pris l'apparence d'un...
- D'un fantassin Kryshzla, oui, confirma sombrement Safera. Nous ne saurons probablement jamais ce que nous avons vu exactement, et c'est peut-être mieux ainsi... Peut-être en rencontrerons-nous d'autres... peut-être que cette fois, la peur va nous rendre fous... mais Valdie a besoin de nous, alors reprenez-la, nous devons continuer.
Les Chiss saisirent à nouveau Valdie et poursuivirent leur exploration de la forêt ; Safera ressentait toujours cette présence sinistre pesant sur son esprit et elle était sûre d'apercevoir d'autres spectres qui les observaient de loin, derrière des algues géantes, mais elle se força à penser à Valdie, et seulement à Valdie... Tant pis si finalement, les Ômus voulaient la tuer, elle voulait faire tout son possible pour ceux qui avaient besoin de son aide, et elle le ferait... Elle se força à ne pas regarder les spectres...
- Euh, Safera ? l'interpella encore Wyntar.
- Quoi ?
La jeune femme regarda autour d'elle, et le regretta aussitôt ; les choses qui n'auraient pas dû exister étaient bien là, et il n'y en avait pas une, ni deux, ni trois, mais au moins une douzaine formant un cercle qui se resserrait peu à peu sur les Chiss... Elle constata avec horreur que plusieurs avaient adopté la forme de soldats Kryshzlas, mais ce n'était pas tout, elle voyait aussi ce qui ressemblait bien trop à son goût à des têtes flottant toutes seules dans l'eau, des têtes d'Hynors, de Kryshzlas, peut-être même de Chiss, sans traits discernables... Il y en avait même qui... ces trois-là... Safera aurait juré que leurs traits étaient une grossière imitation des visages des trois Chiss... Le spectacle figea Safera bien plus que ne l'avait jamais fait n'importe quelle flotte Kryshzla, elle se sentit brusquement incapable de parler, de bouger, de respirer, même de penser tant l'effroi mobilisait chacun de ses neurones ; sa vessie lâcha tant son corps était paralysé par cette peur inexplicable, mais c'était le cadet de ses soucis en cet instant.
Le temps sembla s'arrêter alors qu'elle voyait malgré elle les spectres des profondeurs les cerner, son cerveau formula mille craintes confuses auxquelles ne répondirent que le silence et l'immobilité... Et soudain, une multitude de rires que Safera n'aurait pas dû entendre fusèrent, des rires clairs, froids, dénués de vie.
- Oh non... murmura Telin.
Safera sentait sa santé mentale vaciller devant cette horreur... Cela ne pouvait pas être réel, cela ne le pouvait pas, ou si cela l'était, si c'était désormais la réalité de son existence, elle préférait mourir... Elle sombrait toute entière dans le bain de la terreur, trop terrorisée pour se débattre...
Aucun des Chiss n'esquissa un geste ni ne dit mot tandis que le rire impitoyable résonnait dans leurs esprits, recroquevillant sur lui-même ce qui leur restait de courage... Safera n'osait même pas fermer les yeux cette fois, elle avait trop peur de ce qui pouvait se passer... Les êtres surnaturels allaient se jeter sur eux à coup sûr, et ce qu'ils leur feraient alors dépasserait son imagination... C'était trop tard... Ils étaient perdus, elle sentait qu'elle était impuissante face à ces choses qu'elle ne comprenait pas, dont elle ne parvenait même pas à accepter la réalité de l'existence... Non, elle devait se reprendre, elle n'avait pas toujours vécu dans ces eaux noires où ne parviendrait jamais la lumière du soleil, sa vie n'avait pas toujours été entourée de terreurs surnaturelles, elle avait autrefois contenu des choses qui lui donnaient de la valeur ; des images issues d'une autre vie lui vinrent à l'esprit, celles de Sev'rance, celles de Fayg, celles de tous les moments heureux qu'elle avait autrefois connu... Il y avait une réalité en-dehors de la forêt des Ômus, une réalité depuis laquelle elle avait emmené quelqu'un qui avait besoin d'elle... Valdie, elle était venue ici demander le secours de Valdie, elle ne pouvait pas baisser les bras maintenant ! Peu importait le rire dans son casque, cela ne serait jamais aussi réel que le besoin qu'elle ressentait d'aider Valdie...
Péniblement, elle retrouva l'usage de la parole :
- Ne vous arrêtez pas... murmura-t-elle. Nous devons sauver Valdie, nous ne devons pas nous arrêter tant qu'elle ne sera pas morte ou hors de danger... Allez, on ne sait pas quand elle va mourir, nous n'allons pas tous rester là, bêtement paralysés par des hallucinations, non ?
- Vous avez raison... articula péniblement Telin. Vous avez raison... Mais je n'arrive vraiment pas à...
Safera se força à se mouvoir à nouveau, à marcher, à marcher vers l'un des spectres, imposant à son subconscient l'idée qu'elle allait avoir extrêmement peur d'une façon ou d'une autre et qu'elle n'avait pas le choix... Tout en elle lui disait d'arrêter, mais elle se contraignit néanmoins à ne pas ralentir devant le spectre, dont les traits demeuraient toujours aussi indiscernables à mesure qu'elle s'approchait... Voilà, elle s'approchait de la mort en personne... Qu'il la tue, qu'il la torture autant qu'il le veuille, elle l'avait fait, elle avait bravé sa peur... Elle tremblait comme une feuille devant la chose qui ne pouvait pas exister, mais qu'importait, elle se tenait quand même devant elle... En revanche, lorsque l'idée de toucher cet être de cauchemar lui traversa l'esprit, elle dut admettre que sa détermination n'allait pas jusque-là...
L'effroyable apparition resta un moment à la dévisager sans ralentir son rire glacial tandis que Safera attendait désespérément qu'il se passe quelque chose... Et soudain, le rire se volatilisa pour faire place à un coup de tonnerre, un déchirement furieux qu'elle n'aurait pas dû entendre dans l'eau... Le cœur de la jeune femme battait à une vitesse qu'elle n'aurait pas cru possible, elle ferma les yeux, se demandant si elle n'avait pas provoqué la colère d'un être supérieur en bravant les spectres... Mais il n'y avait plus rien. Seule l'eau se dressait entre elle et les algues monumentales...
Lorsqu'elle se retourna, Wyntar et Telin étaient bien là en revanche, tenant toujours Valdie, fixant étrangement Safera.
- Ce n'était que des hallucinations, assura-t-elle sans grande conviction. Ces choses n'existent pas, ou elles n'existeront plus si nous n'oublions pas pourquoi nous sommes ici... Nous ne devons pas nous en préoccuper, aussi terrifiantes soient-elles...
Quelques secondes passèrent avant que Telin ne trouve suffisamment de salive pour répondre :
- Intellectuellement, je le sais... Mais... mais je n'ai pas eu le courage, vraiment pas. Tu es... tu es incroyable, Safera...
- Euh, merci, mais ça ne m'a pas empêché de trembler comme une feuille, vous savez... Allez, il faut vraiment que nous repartions...
- J'ai peur de savoir ce que ce sera la prochaine fois, dit Wyntar.
- Quoi que ce soit, je ne pense pas que ça nous tuera, estima Telin.
- Peut-être pas, mais... je ne sais pas, je crois que j'ai... fichez-vous de moi, mais j'ai peur d'avoir peur, voilà.
- Je comprends... je ressens la même chose.
- Si ça peut vous rassurer... c'est la dernière fois que nous devons affronter tout cela, affirma Safera. À l'issue de ce voyage, nous pourrons repartir avec Valdie, ou nous serons morts... mais ces apparitions ne sont qu'un mauvais moment à passer.
- Ouais, il vaut mieux voir les choses ainsi, approuva Wyntar.
Une fois de plus, les Chiss reprirent leur marche, toujours oppressés par une présence sinistre... Tout au long de leur progression, ils eurent droit à d'autres frayeurs, les esprits venaient régulièrement les harceler de leurs cris, se dresser devant eux dans de terrifiantes imitations d'armures Kryshzlas ; les Chiss ne parvenaient vraiment pas à s'y habituer, et à chaque fois, ils étaient obligés de s'arrêter brusquement et sentaient leurs cœurs dont le rythme commençait tout juste à ralentir faire une nouvelle embardée... Néanmoins, jamais ils ne tournèrent les talons en hurlant de terreur, jamais ils ne supplièrent les horreurs qu'ils rencontraient de les épargner ; elles disparaissaient alors comme si elles n'avaient jamais existé... Les choses semblaient devenir de plus en plus irréelles à mesure qu'ils progressaient, Safera était sûre d'avoir aperçu des traces de pas s'éloigner d'eux sans personne pour les imprimer, et ils avaient tous entendu des craquements sinistres sans origine apparente... Les algues elles-mêmes semblaient à présent s'obstiner à leur faire barrage... Pire encore, ils purent observer des algues broyés par une créature de toute évidence énorme ; des images de crustacés monstrueux et de géants noir d'ébène arpentant les profondeurs s'imposèrent immédiatement à l'esprit de Safera...
- Et celui-là, c'est une hallucination aussi ? demanda Wyntar à cette vue sinistre. Les hallucinations ne font pas de tels dégâts... Je continuerais jusqu'au bout parce que j'ai dit que je ferai n'importe quoi si cela peut sauver Valdie, mais il y a vraiment quelque chose qui ne va pas, dans cette forêt, je vous le dis...
- D'un autre côté, qui te dit que les algues brisées elles-mêmes sont réelles ? objecta Safera.
- À ce rythme-là, nous ne savons même pas si toi, tu es vraiment en train de nous parler, Safera, commenta Telin.
Et soudain, sans prévenir, Safera rit brièvement au milieu des eaux noires.
- En effet... Je peux vous assurer que j'existe et que je suis bien là ; la preuve, c'est que je m'entends penser. Mais bien sûr, une hallucination pourrait vous en dire autant...
Le trait d'humour eut l'effet recherché et Safera vit des sourires incongrus au possible en de telles circonstances se peindre sur le visage de ses amis.
- Eh bien, tu es une très gentille hallucination, Safera... reconnut Wyntar. Mais on fera de la philosophie ou de l'humour lorsque nous serons sortis d'ici, si cela ne te dérange pas...
- Vous pensez que nous devrions suivre cette pente ? demanda Safera.
Devant les Chiss, la forêt d'algues suivait à présent ce qui ressemblait à une colline du relief sous-marin ; Safera n'avait aucune envie d'y monter, elle sentait que la noirceur qui hantait ces lieux était la plus forte dans cette direction, mais cela signifiait peut-être aussi que les Ômus s'y trouvaient... Et dans ce cas, elle irait, peu importait ce qu'elle aurait à y affronter.
- Je pense que oui... déclara Telin. J'ai un mauvais pressentiment sur cet endroit, mais cela veut peut-être dire que c'est là que nous trouverons les Ômus...
- Alors on y va... Et quoi qu'il y ait là-haut, ne nous laissons pas impressionner ; on s'est déjà battu à un contre trois contre des Kryshzlas, nous n'allons pas reculer face à des choses qui n'existent même pas, non?
- Je ne suis pas si convaincu qu'elles n'existent vraiment pas, intervint Wyntar. Mais ça n'a pas d'importance... Allons-y.
Les Chiss commencèrent à gravir la pente, écartant les énormes algues sur leur chemin ; ils ne voyaient plus ni n'entendaient d'anomalies à présent, mais Safera restait sur ses gardes, une horde d'horreurs les observaient peut-être de là-haut, attendant qu'ils aient fini de monter pour les mettre en pièces, les Ômus ayant décidé qu'ils n'étaient pas dignes de traverser leur territoire plus longtemps... Mais si Safera commençait à réfléchir à ce genre de choses, elle deviendrait folle.
Si elle ne l'était pas déjà, du moins...
Peut-être viendrait-il un moment où elle s'éveillerait de ce cauchemar ou de ce délire, et elle y verrait alors des incohérences flagrantes qui lui confirmeraient que ce n'était pas réel, elle serait à nouveau dans leur maison à Fayg ou dans un vaisseau de guerre Chiss ; mais en cet instant, tout cela semblait si terriblement vrai, elle se sentait parfaitement marcher sur le fond océanique, elle sentait le poids de sa combinaison, elle sentait son cœur battre, elle sentait l'humidité à l'intérieur de sa combinaison, elle sentait résister les algues qu'elle écartait pour ouvrir la voie... Et la présence obscure que Safera ressentait dans son esprit semblait tout aussi réelle...
Les Chiss n'étaient même pas arrivés au bout de leur ascension lorsqu'ils entendirent le cri... Mais cette fois-ci, ce n'était pas l'un de ces cris à glacer le sang que lâchaient les apparitions en s'approchant d'eux, c'était un cri de terreur poussé par un être bien vivant, par une femme Chiss, Safera en aurait mis sa main à couper ! Ils se tournèrent comme un seul homme vers la direction d'où venait le cri, et ils virent une longue langue de flammes s'élever dans les airs en contrebas... Dans les airs ? Une longue langue de flammes ? Ils étaient sous l'eau !
Et pourtant, lorsqu'ils se rapprochèrent, ils virent bien de longues dents de flammes dévorer la carcasse noircie de ce qui avait dû être autrefois un vaisseau spatial imposant, il s'étendait sur des centaines de mètres au moins... Une petite silhouette sombre s'agitait en contrebas.
- Au secours ! Aidez-moi, je vous en supplie !
Safera frémit de tout son être devant la détresse qu'exprimait la voix de cette... de cette femme ? Oui, on ne pouvait pas s'y tromper, c'était bien une Chiss qui tentait de s'éloigner du vaisseau en flammes pour monter à leur rencontre, Safera voyait maintenant distinctement sa peau bleue et ses yeux rouges ; elle devait être blessée... Oh non, elle ne pouvait pas rester là, ce n'était pas possible, Safera devait faire quelque chose pour l'aider...
- Vous voyez ce que je vois ? demanda Telin, subjugué.
- Oui... Oui, je vois, admit Wyntar.
- Venez vite, je vous en prie ! hurlait la Chiss. Ils vont venir... ils savent que je suis vivante... et ils vont revenir me tuer... nous tuer !
Telin fit un pas hésitant dans la direction de la Chiss ; Safera fut un instant sur le point de faire de même, mais quelque chose la retenait... Quoi ? Il y avait urgence, hurlait une voix dans sa tête, elle devait aller aider la jeune femme en bas, elle s'occuperait du reste plus tard... Elle ne savait même plus où elle était ni ce qu'elle faisait là, d'ailleurs ça n'avait pas d'importance...
- Qui êtes-vous ? demanda Wyntar, mais Safera sentait à sa voix qu'il irait sauver la Chiss quoi qu'elle lui réponde.
- Les voilà ! cria la jeune femme pour toute réponse. Par pitié, sortez-moi de là !
L'appel à l'aide était tout simplement déchirant, il serait intolérable de ne pas y répondre... Et soudain, ils tombèrent de nulle part ; Safera écarquilla les yeux en voyant surgir les silhouettes dorées de trois chasseurs Kryshzlas, oui, elle devait bien reconnaître que c'était des chasseurs Kryshzlas... Ils crachèrent leur feu rougeoyant sur ce qui restait de l'appareil avant de se rediriger vers la Chiss...
Alors Telin cessa d'hésiter, il posa le corps qu'il portait sans même y prêter attention et dévala la pente en courant vers la Chiss alors que les chasseurs Kryshzlas incendiaient la colline à coup de canon, tout n'était plus que flammes dans le champ de vision de Safera... Qu'attendait-elle ? Elle vit Wyntar s'élancer à la suite de Telin, et elle se mit à courir à son tour vers la Chiss, son sang brûlant du désir de faire quelque chose pour l'aider...
Une seconde ! Il y avait aussi quelqu'un qui avait besoin d'elle là-haut, un corps qui reposait à présent sur la colline, lâché par Telin et Wyntar... Valdie ! Elle était là pour Valdie ! Où était-elle d'ailleurs ? Elle était sous l'eau, comment avait-elle pu l'oublier ? Et comment était-il possible qu'elle voie des chasseurs Kryshzlas au fond des océans ? Sans parler du vaisseau en flammes... Mais qu'elle était bête, tout cela n'était qu'une hallucination, c'était évident, à présent... Une hallucination qui n'avait rien d'effrayante cette fois, mais une hallucination quand même...
- Wyntar, Telin, arrêtez ! Ce n'est pas réel ! C'est une hallucination !
- Tais-toi et rejoins-nous, elle a besoin d'aide !
Telin saisit la Chiss et commença péniblement à remonter la colline avec elle ; Wyntar le rejoignit très vite pour l'aider, mais Safera resta bêtement en haut de la colline à les regarder, elle qui d'habitude n'écoutait que son cœur...
- Telin, réveille-toi ! Nous sommes sous l'eau ! Sous l'eau ! Sur Hautemer ! Ça ne peut pas être réel ! Et Valdie a besoin de nous !
- Qu'est-ce qui n'est pas réel ? Qu'est-ce qui l'est ? Comment veux-tu que je fasse la différence ? Nous ne devrions pas non plus être en train de marcher ici sous la pression océanique, alors qu'est-ce qui te fait croire que l'eau est plus réelle que cette femme ? (se frayant un chemin à travers les flammes, il se tourna vers la naufragée) Tenez bon, nous allons vous sortir de là...
- Merci... articula la Chiss.
Safera fit une dernière tentative :
- Si tu ne sais plus faire la différence entre ce qui est réel et ce qui ne l'est pas, alors fais au moins ce à quoi tu t'es engagé !
Mais Telin ne l'écoutait déjà plus, inquiet de voir que les chasseurs Kryshzla se posaient, probablement pour essayer de les prendre vivants, lui, Wyntar et la naufragée... Safera ne pouvait que lui pardonner, elle-même avait complètement perdu le sens des réalités quelques minutes plus tôt... La vérité s'abattit sur elle tel un couperet de glace, elle devrait continuer toute seule... Pourquoi elle ? Elle n'était ni plus courageuse ni plus intelligente que Telin et Wyntar...
- Occupez-vous d'elle et attendez-moi là, je vais voir ce que je peux faire pour Valdie... annonça Safera en désespoir de cause.
Elle n'eut d'accusé de réception ni de Telin ni de Wyntar, mais elle ne pouvait pas attendre là que la forêt décide qu'elle avait assez joué avec eux, et elle ne pouvait pas non plus les forcer à venir avec elle ; prenant son courage à deux mains, espérant qu'elle trouverait Telin et Wyntar vivants et lucides à son retour, elle souleva Valdie et reprit l'ascension. Elle progressait très lentement et ses muscles protestaient sous l'effort, Valdie était plus grande qu'elle ; mais la fatigue physique était presque un soulagement après tout ce que son esprit avait subi aujourd'hui... Elle ne pouvait plus écarter les algues, cela lui ferait perdre trop de temps, elle se contentait donc à présent de se contorsionner ou de faire des détours lorsqu'elle ne pouvait pas passer...
Enfin, après une marche longue et pénible, portant toujours Valdie, elle parvint au sommet, où elle fit une pause ; la forêt d'algues s'arrêtait là, elle était à l'eau libre, surplombant l'immense étendue d'algues dans la nuit éternelle du fond des océans...
Nul spectre n'était visible à présent, ni aucune hallucination d'aucune sorte, Safera était seule avec Valdie, toujours inconsciente... Elle vérifia rapidement que son pouls battait encore. Soulagée, elle regarda autour d'elle, à la recherche de quelque chose pouvant lui indiquer où elle trouverait les Ômus.
La première chose qui la frappa fut la présence en face de l'endroit où elle se trouvait de ce qui ressemblait beaucoup à l'entrée d'une caverne sous-marine, assez large pour la laisser passer... Elle sut tout de suite aux ténèbres que son esprit percevait dans cette caverne qu'elle avait vu juste.
Elle n'avait pas le choix...
Son cœur brûlant de l'espoir de sauver Valdie pour toute chandelle, elle s'enfonça de son plein gré dans les ténèbres de la caverne.
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