Entertainment Weekly a diffusé une interview de
Michael Giacchino, le compositeur de la musique de
Rogue One. Pour rappel, il avait du remplacer Alexandre Desplat en septembre suite à un problème de planning causé par le tournage additionnel. On apprend dans l'article que Giacchino n'a eu que quatre semaines et demi pour composer toute la bande originale. L'enregistrement s'est achevé il y a deux semaines.
Giacchino admet que le délai court n'était
"pas vraiment" idéal.
"Mais on travaille dans le temps qu'on a", dit-il.
"Et je ne suis pas quelqu'un qui a une bande d'autres compositeurs travaillant pour moi, donc je fais les choses seul, assis ici dans cette pièce. Mais je suis plutôt bon pour me concentrer et me mettre au travail. J'ai vu le film, et je l'ai vraiment, vraiment, vraiment apprécié, donc il n'y avait pas de manque d'idées ou d'inspiration, ça c'est sûr. La seule inquiétude durant tout ce temps pour moi était le calendrier. Mais je me suis organisé et je me suis dit : "Ok, si je fais telle quantité ce jour-ci et si je termine
cela, ça me laissera du temps pour revenir en arrière et faire des améliorations si nécessaire avant d'avoir à orchestrer"."
Pour ne pas se déconcentrer, Giacchino n'a pas cherché à en savoir plus sur les raisons du départ de Desplat. Il n'a pas non plus voulu écouter ce que son confrère avait composé avant d'être remplacé.
Il raconte ainsi la journée où il a été embauché :
"J'ai reçu un appel un jour. Je devais prendre l'avion le lendemain car j'avais passé deux jours à orchester Doctor Strange à Londres. Et le jour après mon dernier jour passé à orchestrer Doctor Strange, [Lucasfilm] m'a demandé : "Pouvez-vous venir à Pinewood ?" Donc j'ai été aux Studios Pinewood et j'ai rencontré tout le monde. Ils m'ont montré le film. Et je suis littéralement rentré chez moi avec le film."

Quatre semaines et demi plus tard, l'enregistrement commençait. Giacchino assure que la pression du planning était contrebalancée par le plaisir qu'il trouvait à travailler sur Star Wars.
Le compositeur a eu des réunions avec le réalisateur Gareth Edwards, le scénariste et réalisateur de la seconde équipe Tony Gilroy, et la présidente de Lucasfilm Kathleen Kennedy. "On finit toujours par parler seulement des émotions", dit-il. "Moins on parle de musique et plus on parle d'émotions, plus c'est facile pour moi de comprendre ce que je dois faire. Après avoir vu le film, je leur ai dit ce que je ressentais par rapport au film, ce que le film pourrait utiliser selon moi, ce dont il avait besoin. Et nous étions tous d'accord sur ces choses."
Giacchino décrit
Rogue One comme "
un film qui est vraiment un grand film de la Seconde Guerre Mondiale à bien des égards. Mais il a aussi cette énorme, énorme âme en son centre, et c'était la chose que je ne voulais pas écarter. Oui, c'est un film d'action, et c'est un film Star Wars, et il a toutes les choses auxquelles on s'attend et qu'on adore là-dedans, mais je ne voulais pas oublier que c'était aussi un film incroyablement émotionnel. C'est ce qui m'a vraiment attiré. J'adore travailler sur des projets qui ont un centre émotionnel... Et pas de l'émotion fabriquée non plus, même si, vous savez, [rires] c'est bizarre à dire car c'est littéralement ce que nous faisons : fabriquer de l'émotion."
"Ce que j'aimais dans ce film est que ça ne me semblait pas faux", ajoute-t-il.
"Ca semblait réel, et jai été capable de tirer parti de ces émotions, que ce soit la tristesse, la solitude... Toutes ces choses s'enveloppent au sein de la musique que nous faisons. Cétait important pour Gareth, Tony, Kathy et moi."
Plus tôt dans sa carrière, Giacchino a composé la musique de plusieurs jeux vidéos de guerre : les
Medal of Honor et
Call of Duty. Il admet quelques similarités avec
Rogue One :
"C'est juste de dire qu'il y a un peu de cette impression là-dedans, c'est sûr. J'aime à penser que j'ai probablement écrit plus de musique sur la Seconde Guerre Mondiale que quiconque sur la planète après tous les Medal of Honor et Call of Duty. [Rires] Mais, ouais, j'espère qu'il y aura une sensation d'aventure sans perdre de vue ce qui est vraiment important dans le film et dans l'histoire. Parfois, tout peut être dissipé par de l'ostentation, et j'essayais très fort de ne pas faire ça. Il faut l'utiliser quand c'est nécessaire, mais il faut aussi se rappeler que l'ostentation peut être une chose dangereuse."
Quand à ses inspirations, le compositeur est revenu aux classiques :
"Ca emprunte aux traditions auxquelles John [Williams] et George Lucas ont eux-mêmes emprunté lorsqu'ils ont fait le Star Wars original, vous voyez. George étudiait Flash Gordon, les vieux serials, et John étudiait [Gustav] Holst et différents compositeurs afin d'avoir une base pour ce qu'il voulait communiquer. John a élaboré un merveilleux langage musical pour les films originaux. Je voulais honorer cette langue vernaculaire, mais en faisant quelque chose de nouveau avec, quelque chose qui me réprésentait toujours dans un sens."
Kennedy l'incitait d'ailleurs à trouver sa propre voie :
"Kathy me l'a dit aussi : "Personne ne te demande de faire ce qui a déjà été fait"", raconte-t-il.
"J'ai le sentiment que c'est important d'être moi-même, mais dans cet univers, nous travaillons dans certaines limites. C'était le défi, en quelque sorte. Ca n'a jamais été : "Oh, tu dois faire ceci, ceci et ceci." Ca a toujours été simplement : "Voilà les émotions que nous devons traiter.""
Giacchino est fier d'un thème en particulier :
"J'ai vraiment apprécié de travailler sur le thème de Jyn, et de le rattacher au film, et de le faire se développer lentement. Et il est très émotionnel et radical, ce qui était vraiment bon à faire. À l'heure actuelle, j'ai l'impression qu'il y a une chose intéressante qui se passe dans la composition pour le cinéma où tout est dans la retenue. Et j'approuve par moments, mais à d'autres moments il est bon de tout déchaîner et de laisser cent-dix joueurs d'instruments tenter le coup."
Le compositeur raconte que
Don Williams, le frère de John, l'a aidé à gérer l'utilisation des timbales.
"Je ne crois pas avoir déjà composé plus de choses pour les timbales que dans ce film. [Don] a fait un travail incroyable et ça donne un grand poids, un grand ancrage à beaucoup des morceaux. Mais ça aide aussi dans les moments plus chaotiques."
Giacchino a aussi fait d'autres expérimentations :
"Je pense qu'il y a peut-être légèrement plus de choses éthérées qui interviennent dans ce film aussi. Nous nous sommes demandé comment on pourrait utiliser une guitare électrique... ou comment on pourrait utiliser des ajouts au synthétiseur... C'est de la musique symphonique, mais nous avons rajouté des petits accents pour traiter de certains éléments de l'histoire dans le film."
Les thèmes classiques de Williams ne seront pas absents du film :
"Absolument, il y a certaines fois où on veut toucher à des choses du passé", dit Giacchino.
"En tant que fan, je me disais : "Oh, cette idée particulière serait géniale si nous la faisions ici. J'aimerais voir ça si je regardais un film Star Wars." Ayant été un gamin qui a grandi avec la musique de John et qui a été catapulé dans cette direction à cause de ce qu'il a fait, j'avais une idée très spécifique de ce que je voulais utiliser et de la manière dont je voulais l'utiliser. Cela dit, je dirais que la musique est à 95 % originale, mais avec des petits moments [de compositions classiques de John] ici où là pour accentuer. Si j'étais assis dans mon siège et que j'entendais ça, mes poils se dresseraient complètement."
Le compositeur confirme à son tour l'absence du traditionnel texte défilant au début du spin-off. Il promet toutefois une chose concernant la piste musicale qui ouvrira
Rogue One :
"Je pense que vous vous sentirez à la maison."
Rogue One : A Star Wars Story sortira le 14 décembre.