Je ne suis pas très active ici (je participe de temps en temps aux challenges), mais j'avais envie de vous partager la première fanfic dont je sois assez fière pour la faire lire à d'autres.
C'est un one-shot, une vignette, dans laquelle j'ai voulu imaginer qu'une certaine rouquine faisait bel et bien partie du Canon parce qu'elle me/nous manque terriblement.
J'espère que ça vous plaira :
Un bruit de pas, suivi du son reconnaissable entre mille d’une porte automatique qui s’ouvre et se referme. Des bottes, martelant doucement le sol dur. Elle connaissait cette démarche. Même à travers la brume qui submergeait son esprit, elle la reconnue. Elle ne l’avait jamais oubliée. Elle n’avait jamais pu.
Le son se fit plus fort mais son rythme ralentit jusqu’à s’arrêter. Elle se tenait prête, sans être sûre de savoir si elle devait se sentir soulagée ou contrariée.
L’homme aux bottes s’accroupit devant elle. À travers les barreaux de sa cellule, elle distingua dans l’ombre d’une capuche des yeux bleus perçants qui la dévisageait avec préoccupation. Elle ne les avait pas oubliés, eux non plus. Ni la façon dont elle avait pu s’y noyer autrefois.
La femme soupira et leva une main. Ou, plus exactement, la souleva mollement.
— Avant que tu ne dises… quoi que ce soit… je me débrouillais très bien… toute seule…
Ce fut au tour de l’homme encapuchonné de soupirer.
— Toi et moi avons toujours eu des définitions très différentes de ce concept, Mara, rétorqua-t-il, sa voix grave inchangée.
Fatiguée, la femme aux cheveux roux ne put s’empêcher de frissonner à cause de son ton réprobateur.
— Je ne me rappelais pas que tu pouvais être si amer.
— Je ne me rappelais pas qu’on pouvait t’enfermer si facilement, contra-t-il d’une voix égale.
Mara ne prit pas la peine de répondre ; sa fierté en avait déjà pris un coup. À l’époque, c’était elle qui faisait dans le sauvetage. Être sous les verrous était déjà suffisamment dérangeant pour ne pas y ajouter l’embarras d’être sauvée par nul autre que Luke Skywalker en personne.
Mais à part ça, je me débrouille très bien toute seule.
Comme s’il pouvait lire dans ses pensées, le Maître Jedi poussa à nouveau un soupir. Il se releva et passa une main, sa vraie main, au-dessus du panneau de contrôle ; la grille s’ouvrit, ce qui lui permit d’entrer. Il se baissa pour être au même niveau qu’elle, un genou au sol, évaluant ses blessures du regard, et passa un bras autour d’elle pour l’aider à se remettre debout.
— On dirait que tu t’es surpassée cette fois…
Elle grimaça lorsque Luke la souleva. La tête lui tournait mais elle aurait largement préféré mourir que de s’évanouir dans ses bras. Il l’avait déjà vu plus mal en point, mais… Les choses avaient été différentes en ce temps-là.
— Ces fils de murglak m’ont balancé un… foutu poison… ou gaz… pas pu utiliser la Force depuis…
— Ça explique qu’ils soient encore en vie, fit remarquer Luke.
Ce qui ne fit pas rire Mara. Mais elle ressentit une légère vibration, de la chaleur qui se répandit depuis là où la main de Luke lui pressait le flanc. La Force afflua à travers elle, son cerveau commença instantanément à s’éclaircir, le brouillard s’estompa et elle retrouva sa vivacité d’esprit. Elle s’ouvrit à cette énergie, juste assez longtemps pour lui envoyer un remerciement silencieux. Il n’y avait pas besoin de prendre le risque de rouvrir le lien qu’il y avait entre eux. Il valait mieux laisser certaines choses dans le passé.
Malgré le fait qu’elle se sentait bien mieux, Mara s’appuya lourdement sur Luke tandis qu’il la faisait sortir de sa cellule, puis passer devant d’autres désertes pour la guider dans un couloir. Les murs de métal gris étaient recouverts de plaques de rouille, du fait de la salinité ambiante sur Trask, et les quelques plafonniers en état de marche projetaient une lueur blafarde qui clignotait à un rythme étrange.
Le Maitre Jedi ne dit rien. Il ne la connaissait que trop bien, sachant à quel point cela lui coûtait d’être aussi impuissante, ne serait-ce que l’espace d’un instant. Et d’autant plus avec lui. Elle avait toujours été féroce, chérissant son indépendance et son libre-arbitre comme des trésors. Il avait toujours respecté ça. L’avait admirée pour ça. L’avait aimé pour ça.
Ils atteignirent la porte au bout du couloir et Mara s’arrêta un moment, s’appuyant toujours sur Luke mais jetant des coups d’œil à la ronde. Les pièces du puzzle se mirent enfin en place.
— C’est terriblement silencieux, fit-elle remarquer. Qu’est-ce qu’ils font tous ?
— Ils regardent ailleurs.
Une réponse on ne pouvait plus laconique. Elle le regarda de travers.
— Évidemment. L’honorable Maître Jedi ne veut blesser personne… Je te jure Luke, déclara-t-elle avec une pointe d’exaspération dans la voix, un de ces jours ta compassion va se retourner contre toi et ça causera ta perte.
La porte coulissa lentement, révélant une pièce circulaire ; des fauteuils usés et affaissés entouraient une table basse branlante. Un groupe de gardes de la pègre était assis là, absorbé par une partie de sabbacc. Ils ignorèrent leur présence, comme si les deux Jedi n’existaient pas, ou bien dans une autre dimension. Mara eu l’impression qu’elle et Luke avançaient sous couvert d’une cape d’invisibilité.
Elle n’aurait pas dû être surprise de découvrir qu’il avait appris de nouveaux tours depuis la dernière fois qu’elle l’avait vu. Elle avait toujours su que sa maîtrise de la Force était sans égale parmi les vivants. Pourtant, elle était impressionnée. Et Mara Jade, anciennement Skywalker, ne l’était pas facilement. Elle se sentit extrêmement frustrée. Ce que, bien évidemment, Luke décela, Comme au bon vieux temps.
— Crache le morceau, Jade, grommela-t-il. Quoiqu’il te passe par la tête, dis-le.
Il la sentit se raidir contre lui.
— Je suis désolée, mais je ne comprends toujours pas. Comment tu peux manier un tel pouvoir… et le gâcher…
Le Maître Jedi exerça une pression sur sa taille afin qu’ils continuent à avancer.
— J’ai des principes, Mara, riposta-t-il. Je ne vais pas m’en excuser.
— C’est bien d’avoir des principes, jusqu’à ce qu’on bute sans arrêt dedans au lieu de faire ce qui devrait être fait.
Sa voix était dure, emplie de jugement et il savait qu’elle ne parlait pas de quelques gardes anonymes dans une prison quelconque sur un monde reculé. Ils avaient déjà eu cette discussion. Plein de fois. Trop de fois.
Ouvrant une porte sur sa gauche, il la mena en haut d’un escalier sale, poussiéreux et qui empestait l’eau croupie. Mara avait déjà retrouvé une bonne partie de ses forces grâce à lui, mais l’ascension lui coupa le souffle et elle s’assit sur la dernière marche pour reprendre sa respiration.
— C’est Maz, n’est-ce pas ?
Il s’agissait plus d’une affirmation que d’une question.
— Maz t’a envoyé, insista-t-elle.
Luke hocha la tête. Il se tenait deux marches plus bas afin d’être à sa hauteur.
— Tu l’as assez inquiétée, visiblement.
— Eh bien, c’est sa faute, fulmina Mara. À m’envoyer dans une de ses chasses au mythosaure… tout ça pour rien, en plus. On aurait pu croire que j’aurais plus de jugeote que ça maintenant…
Le reste de sa phrase se perdit dans un grognement, mais il l’entendit distinctement maugréer quelque chose à propos d’une maudite vieille dame. Il en rit presque, ce qui aurait été incongru. Elle était suffisamment sur les nerfs comme ça, bien que Luke ne puisse dire si c’était à cause de la situation, de Maz… ou de sa présence. Probablement un mélange des trois.
Il tapota sa poche de poitrine avec un sourire entendu.
— À vrai dire, ça n’était pas pour rien.
— Tu as trouvé la carte ? s’exclama-t-elle. Comment ?
— J’ai mes astuces.
Mara le fusilla du regard mais garda le silence. Il lui donna une minute de plus pour se ressaisir avant de la faire sortir de la cage d’escalier.
— Courage, on est presque dehors.
L’ancienne Jedi se contenta d’acquiescer d’un signe de tête et s’appuya sur son compagnon, sautillant à travers une autre porte. Ils atterrirent dans un cellier qui ressemblait à un container de marchandises recyclé. Ce qui n’avait rien de surprenant : sur une lune telle que Trask, tout semblait être fait de récup. Les gens de la Bordure Extérieure étaient plutôt créatifs. Survivre était un talent.
Les étagères collantes étaient remplies de fûts de bière, de bouteilles d’eau-de-vie à bas prix et de choses sensées être de la nourriture mais qui retournèrent plutôt l’estomac de Mara. Le cellier menait à un bouge qui n’aurait pas dépareillé sur Nar Shaddaa ou dans le Secteur Corporatif. Gras, gluant, rempli de travailleurs venant des chantiers navals et des gens moins respectables, il sentait le tabac bon marché et la bière éventée. Et l’humidité. Comme absolument tout sur ce monde paumé. Elle collait à la peau, vous alourdissant.
Mara s’attendait à ce que des gens tournent la tête vers eux. Que certains réagissent. Elle se prépara à l’inévitable confrontation…
Qui ne se produisit pas. Luke passa encore une fois en tête et elle frissonna tandis qu’ils se frayaient à nouveau un chemin à travers la foule, qui comprenaient des membres d’espèces hypersensibles qui ne leur prêtèrent pas la moindre attention tandis qu’ils avançaient vers la sortie. Elle eut l’impression étrange que Luke et elle étaient là en bas, d’une façon ou d’une autre, et qu’ils étaient à présent des fantômes hantant le bâtiment. Son tour d’illusion semblait fonctionner jusque-là. Mais elle pouvait bien voir que ça lui coûtait.
— D’accord, mais les caméras de sécur… ok, laisse tomber, marmonna-t-elle en secouant la tête.
Surtension de force. C’était comme ça qu’il s’en débrouillait. Il brouillait les caméras avec la Force au fil de leur avancé. Fichu Maître Jedi.
— J’ai entendu, chuchota-t-il sans la regarder.
— Skywalker, ne vient pas fourrer ton nez dans mes pensées, lui répondit-elle dans un sifflement.
Elle sentit un léger petit rire plus qu’elle ne l’entendit. Certaines choses ne changeaient jamais vraiment.
Alors qu’ils traversaient le sas hors du bar, Mara dut lever une main pour se protéger les yeux du soleil. Après plusieurs jours passés sous terre, il leur fallut quelques instants pour s’ajuster à la lumière vive de ce qu’elle supposait être le milieu de l’après-midi, prenant note de l’air salé de Trask et de la sensation du vent sur ses joues. C’était étrange, de sortir nonchalamment de prison. Il fut un temps où ils se seraient frayés un chemin à coup de blasters, leurs sabres vrombissants à la main, les lames étincelantes abattant quiconque se dressant entre eux et la liberté. Le bon vieux temps… avant que tout ne change pour le pire.
La femme à la chevelure rousse prit le temps d’observer l’homme à ses côtés. Son visage était plus ridé que dans son souvenir, ses cheveux et sa barbe étaient maintenant striés de gris. C’était une vision à laquelle elle ne s’était pas encore habituée, la barbe. Parce que ça signifiait que son garçon de ferme n’était plus.
Tu te ramollis, Jade, se morigéna-t-elle.
— Donc… je crois que je t’en dois une.
Par les étoiles ! C’est gênant !
—Mara…
Il laissa la dernière syllabe en suspend, le son imprégné de non-dits. Leurs regards se croisèrent et elle posa une main sur son bras. Une marque sincère d’affection.
— Luke, énonça-t-elle doucement. C’est mieux ainsi. Crois-moi.
— Laisse-moi au moins te ramener sur Takonada, insista-t-il. Juste histoire d’être prudents. R2 peut conduire mon chasseur tout seul.
L’ancienne Jedi hésita mais, aussi tentante et raisonnable qu’était son offre, elle ne pouvait accepter. Lorsqu’elle l’avait quitté la première fois, elle en avait eu le cœur brisé. Plus ils attendaient pour aller chacun de leur côté et plus ça deviendrait difficile de le faire. Elle ne pouvait pas revivre ça.
— Tu peux me raccompagner jusqu’à mon vaisseau, lui proposa-t-elle.
Ils méritaient mieux tous les deux qu’un au revoir à la va-vite sur le seuil d’une cantina crasseuse. Il méritait mieux. Il n’était pas obligé, mais il venait après tout de traverser la moitié d’une galaxie pour venir à son aide.
Luke ne discuta pas, acceptant avec grâce sa défaite. Il n’avait jamais cru qu’elle pourrait accepter. Il n’était même pas sûr qu’il aurait pu en découler quoi que ce soit de bon.
Le vent s’intensifia et il remarqua que Mara s’était mise à frissonner. Sans dire un mot, il ôta sa cape et la lui mit sur les épaules. Elle le remercia silencieusement d’un signe de tête et s’emmitoufla dedans, appréciant la chaleur que le lourd tissu fournissait toujours.
Ils marchèrent lentement en direction de la plateforme d’atterrissage où elle avait posé une vieille canonnière GAT-12 qui datait de l’époque où elle travaillait dans l’organisation de Karrde. Mara grimpa sur l’aile, ouvrit le sas principal et se retourna pour faire face à l’homme qu’elle avait profondément aimé autrefois. Il s’agissait de leur ultime adieu. Peut-être était-ce ce que Maz avait réellement recherché. Peut-être avait-elle orchestré tout cela depuis le début. Pour leur permettre de tourner la page, en quelque sorte.
Luke lui décocha un sourire en coin qui avait clairement quelque chose de très Solo, mais dont l’éclat échoua à parvenir jusqu’à ses yeux.
— Embrasse Jaina pour moi, s’il te plaît.
Mara s’immobilisa, interdite. Comment … ?
— C’est le nom que tu lui as donné, n’est-ce pas ? À cette petite fille solaire aux cheveux blonds et aux magnifiques yeux verts, dont la meilleure amie au monde semble être une vollka très mal lunée ?
Elle ne put s’empêcher de sourire face à ce sacré euphémisme. Quelque chose dans la voix de Luke lui fit comprendre qu’il avait dû faire lui-même l’expérience désagréable du caractère du dit animal. Netini était une méchante chatte électrique, mais qui, pour une raison quelconque, aimait la petite humaine de tout son cœur de félin et la protègerait de sa vie.
— Je ne suis pas en colère, Mara, ajouta celui qui fut son époux tandis qu’elle descendait l’aile de la canonnière pour se rapprocher de lui. Je l’étais. Je t’en ai voulu, pendant un long moment, pour la façon dont tu es partie. Maintenant je sais. Tu a fait ce que tu devais pour assurer sa protection. Je comprends. Simplement, je… J’aurais simplement aimé que les choses soient différentes.
Ses épaules s’affaissèrent et le vernis calme du Maître Jedi craquela, révélant le véritable être humain dessous. Un homme abattu, désabusé, qui n’avait plus d’espoir dans la vie.
— Est-ce que tu es toujours à sa recherche ? demanda Mara à voix basse.
Elle ne pouvait pas se résoudre à prononcer son nom. Son nouveau nom, celui qu’il s’était choisi.
— Il faut que j’essaie de réparer mes erreurs, répondit-il en lui offrant un sourire triste alors qu’une partie du feu qui l’avait animé revenait dans son regard. Tu m’as donné une raison de continuer à essayer. Même si je ne pourrais jamais faire partie de sa vie.
Luke leva la main, la gauche, celle faite de chair et de sang, pour la poser sur la joue de Mara, effleurant sa peau du pouce. Elle ferma les yeux tandis qu’il lui embrassait doucement le front.
— Au revoir Mara. Prends soin de notre fille.
Il disparut en un claquement de doigts, la laissant se demander s’il avait été véritablement présent ou non. La cape paraissait réelle, en tout cas.
Elle secoua la tête, ses cheveux emmêlés voletant dans le vent tel un panache de feu, et s’avança à l’intérieur du vaisseau. Se saisissant d’un kit médical, elle se fit deux injections de stimulant avant de se diriger vers le cockpit pour les vérifications d’avant-vol.
Quelques minutes plus tard, les moteurs s’allumèrent en rugissant et une silhouette solitaire observa le décollage de la canonnière jusqu’à ce qu’elle ne soit plus qu’un point noir dans le lointain, partie pour toujours.
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