par Code 44 » Sam 20 Avr 2019 - 22:04 Sujet: Elephant Noir
I.
Il y avait une bonne ambiance ce soir au Rancor qui Fume. Un peu comme tous les soirs du reste. Les clients étaient tous un peu entassés au comptoir, aux tables ou dans des box, un nuage de fumée artificielle se mêlait aux vapeurs d'alcool, et d'ordinaire, les enceintes de l’établissement diffusaient un scrak de plutôt bonne facture. Circonstance exceptionnelle, en raison de la finale d'hoverball qui opposait Naboo à Bespin, c'était le son du match qu'on pouvait percevoir par dessus le choc des verres, les éclats de voix, et le bourdonnement des lourds ventilateurs.
Loxo considéra sa choppe de lait bleu, essayant d'estimer si elle avait assez refroidi pour qu'elle soit tiède et juste comme il l'aimait. Ça pouvait paraître stupide de boire du lait dans un bar, surtout en début de soirée, mais il devait bien faire face à un problème physiologique évident. En tant que cragmoloïde, il était très lourd, et très massif, et de fait, les quantités d'alcool nécessaires pour ressentir l'ivresse étaient phénoménales. Or, les affaires marchaient mal, et Loxo devait surveiller son budget. Ca ne le dérangeait pas trop. A quatre-vingt dix ans, il avait passé depuis longtemps l'époque où il se déchirait la trompe au whisky corellien tous les soirs, et il savait que s'il voulait vivre sereinement les trente ou quarante années de vie qui lui restaient, il fallait qu'il lève un peu la patte.
Ce n'était visiblement pas l'avis de Ple, son compagnon, joyeux ithorien caramel qui en était déjà à pas mal de pintes, et qui ne semblait pas vouloir s'en arrêter là.
_Je te préviens, dit Loxo d'un air sérieux, si tu en reprends, c'est pour ta gueule, je t'avance plus.
Ple, outré, décolla brusquement son verre de son cou, et le claqua avec force sur la table.
_Sérieusement Lo ? Tu peux pas faire ça pour un pote ?
_Je t'ai déjà payé trois pintes ce soir, grogna le cragmoloïde de sa voix grave. D'habitude, je vais pas au delà de deux. Commence pas à abuser.
Ple leva les bras au ciel, prenant visiblement la Mère de la Jungle ithorienne à partie.
_Je te demande pas non plus de payer le crédit de mon vaisseau !
_Vu la ruine que c'est, encore heureux, pouffa Loxo avant de tester la température du lait avec sa trompe.
Ple avait un espèce de vieux vaisseau cargo qui prenait la pluie depuis des années sur un spatioport au nord de la ville. Il s'était mis en tête de devenir orpailleur, et de trouver des métaux précieux dans les ceintures d'astéroïdes. L'idée en elle-même n'était pas bête, mais acheter le vaisseau à crédit à un toydarien, si, surtout quand le vaisseau en question passait son temps à tomber en panne. Résultat des courses, Ple passait plus de temps à se débrouiller en magouillant pour rembourser son crédit, et réparer son appareil que de partir forer on ne sait-où. Malgré tout, Loxo l'aimait bien. Les contacts de l'ithorien l'avaient plus d'une fois bien aidé sur ses dossiers, d'où sa propension à lui payer à boire au Rancor. Mais il y avait des mois, et le cragmoloïde avait l'impression que ces derniers temps, il y en avait beaucoup, où les dossiers étaient bien peu nombreux, et payaient mal. Enfin, Loxo était fataliste. Fallait prendre la vie comme elle venait, et il ne mourrait pas de faim, c'était au moins ça.
Un rugissement monta du milieu du bar. Ple et Loxo se retournèrent pour comprendre et virent sur les écrans géants que Naboo venait de marquer un but à trois minutes de la fin de la mi-temps. Les supporters de Bespin ou juste ceux qui avaient pariés leurs crédits sur la planète au tibanna étaient forcément un peu déçus. Cela fit sourire le cragmoloïde, dévoilant un peu plus largement ses épaisses dents. Il avait eu sa période de parieur professionnel quand il vivait sur Ahakista. Il avait compris à la dure que de l'argent vite gagné était tout aussi vite parti, et il avait préféré plier bagages ailleurs. On ne mentionnera pas qu'au passage, il s'était refait en visitant de nuit, le coffre du Daystar Casino. Bons souvenirs...
Loxo savoura son lait tiède alors que son ami, d'un pas chancelant, allait se chercher une quatrième bière, qu'il avait finalement trouvé la force de payer de sa poche. Une vibration depuis son veston interrompit le pachyderme dans sa dégustation. Il se saisit de son comlink, et fronça les sourcils en écoutant le message automatique venant de son bureau. On venait de s'enregistrer pour un rendez-vous lui apprenait-on, et pour pas plus tard qu'immédiatement. Loxo grommela, ce qui fit buller le lait. Il avait effectivement, depuis que les affaires allaient mal, autorisé les clients à prendre rendez-vous jusqu'à 22H, mais quand même, on était vendredi soir ! Il hésita un moment à faire décaler la rencontre, mais le souvenir de son compte en banque vacillant l'emporta sur sa volonté de détente. Tant pis. Il y aurait d'autres laits bleus.
Ple revenait à la table, faisant attention à ne pas renverser son grand verre mousseux, quand il écarquilla les yeux en voyant son camarade debout, en train d'enfiler manteau et chapeau.
_Tu t'en vas déjà ? On a dit qu'on restait jusqu'au bout du match ! dit-il, pouce pointé en direction des écrans qui diffusaient maintenant de la publicité pour du dentifrice jawa.
_Le devoir m'appelle, répondit le pachyderme avec un petit sourire. Faut bien que je bosse si tu veux que je te paye des coups.
Il scruta la banquette sur laquelle il était assis il y a encore un instant.
_T'aurais pas vu ma canne des fois ?
Ple dans un geste très souple, posa sa pinte sur la table et se pencha pour passer en dessous de celle ci. Un instant plus tard, il refaisait surface, les doigts serrés autour d'une solide tige en veshok, dont le pommeau était gravé de charmes shamaniques et signes de bonne fortune. Loxo ne pouvait pas vraiment dire que ça lui avait porté chance, mais c'était un vieux copain mandalorien qui lui avait offert ce cadeau, et le cragmoloïde en connaissait la valeur symbolique. Et puis quand on faisait son poids, c'était toujours bien d'avoir du veshok contre lequel s'appuyer.
Loxo recupéra sa canne, remercia son ami et lui promit de ne pas manquer leur prochaine sortie au Rancor qui fume. Puis, le pachyderme alla jusqu'au bar, régla sa consommation et se dirigea vers la porte, vérifiant au passage qu'il n'avait rien oublié. Il tapota rapidement ses poches dans un ordre bien établi. Portefeuille. Comlink. Canne. Chapeau. Tout était en ordre. Il poussa la porte du bar et sortit au dehors, frissonnant quand il quitta son atmosphère chaude et poisseuse pour la pluie glacée des rues. Franchement. Les clients ne pouvaient pas appeler à une heure décente ?
***
Loxo arriva essoufflé devant la porte de son bureau. Il sentait une auréole de sueur se former entre son cuir et son chapeau. C'était toujours compliqué de marcher quand il pleuvait. Sa prothèse n'aimait pas trop ça, fonctionnait mal, et le faisait trébucher. Quelle idée de vivre dans une ville où l'équipe météo faisait pleuvoir en quasi permanence ! S'il avait pu, il aurait encore préférer se laisser dorer aux soleils de Tatooine. Mais bon, déjà que les affaires ne marchaient pas trop ici, là bas, hormis des vols de banthas ou des chicaneries entre fermiers hydroponiques, ça serait pas la joie non plus. Il jeta un œil à son holomontre. Bon ça allait, il lui restait bien un quart d'heure pour tout mettre en place.
Il passa sa carte de sécurité et la porte se déverrouilla automatiquement. Le pachyderme pénétra dans ce qui lui servait à la fois de lieu de travail et de lieu de vie. Un simple deux pièces, plutôt sobre, dans les quartiers est. La pièce principale était le bureau proprement dit, avec sa table de travail, son fauteuil renforcé – pour lui – et son fauteuil rembourré – pour le confort des clients -, un ordinateur, quelques dossiers desquels s'échappaient toujours une ou deux feuilles de flimplast, et une grande fenêtre à stores de laquelle on pouvait voir Duro. Bon, ce n'était pas la vue la plus exaltante du monde, de voir une planète polluée jusqu'à son noyau, tournoyer lentement au dessous de soi, mais Loxo était presque content. La plupart de ceux qui vivaient sur le vaisseau-ville étaient coincés dans des tours sans fin, sans aucune autre vue que plus d'immeubles, ou une benne à ordure. Au moins, le cragmoloïde pouvait voir l'espace.
Ca l'avait toujours apaisé ce grand espace vide et ses pointillés d'étoiles, comme des diamants piqués dans du velours noir. Ses frères de race étaient plutôt sédentaires, se trouvant très bien sur Ankus et n'ayant pas spécialement l'envie d'explorer ailleurs. Ca n'avait pas trop servi les pachydermes quand l'Empire avait envoyé ses stormtroopers réduire tout le monde en esclavage, et refiler les clés de la planète à TaggeCo, qui s'était fait un plaisir de ravager l'écosystème par son minage intensif. Par chance, ça n'avait duré que peu de temps, et Ankus était assez forte pour se relever de quinze ans d'occupation. Et puis on était loin du niveau de saloperie écologique que les duros avaient infligé à leur propre monde, donc on pouvait relativiser.
Loxo s'arracha à ses pensées. Il allait finir par être en retard. Il clopina jusqu'à la petite salle de bain, à droite du bureau, et jeta rapidement son manteau sur un cintre, judicieusement pendu au dessus de la douche. Il pourrait s’égoutter tranquillement sans ruiner le parquet, un malheur qui lui était arrivé bien trop de fois depuis qu'il s'était installé ici. Le chapeau suivi le même chemin. Le pachyderme retourna dans la pièce principale, posa sa canne contre la table, et prépara quelques affaires. Bloc notes neuf. Nouvelle cartouche d'encre de j'feh dans son stylo. Un verre propre, et un choix de bouteilles d'eau pour le client. Et bien sûr, mais ça, le cragmoloïde était le seul à le voir, son bon vieux fusil lance-fléchette, installé sous la table. Une pression sur la gâchette, et des centaines de petits projectiles tranchants comme un sabrolaser partaient droit devant, déchiquetant tout sur leur passage. Loxor avait vu des êtres sensibles réduits en marmelade ewok par l'action de cette arme. Souvent parce qu'il en était la cause, mais pas toujours. Il faisait un métier dangereux après tout, qui demandait presque toujours de se frotter à la pègre. Un peu de prudence n'avait jamais tué personne, et ce n'était pas le blaster lourd zabrak glissé en permanence dans la poche droite de son trench-coat qui dirait le contraire.
Tout était en ordre, quand à 22h précise, on sonna. Le cragmoloïde jeta un très rapide coup d'oeil à droite vérifiant que le cadre holographique dans lequel flottait sa licence était bien en vue, avant de pousser le bouton permettant l'ouverture de la porte. La personne qui se tenait derrière entra dans le bureau d'un air un peu hésitant. Loxo n'était pas vraiment surpris. C'était forcément toujours un peu intimident de se rendre dans une agence de privé, surtout tenue par un aussi gros morceau que lui. Le fait qu'il soit cragmoloïde avec le poids et la taille qui allaient de pair, plus la nuit et la pluie ne devaient rien arranger. Le pachyderme s’efforça néanmoins de sourire et de se lever, par politesse. Tendant sa grosse main et se présentant, il observa avec attention son hôte. Femelle. Un peu plus d'une trentaine d'années standard. Humanoïde, avec une fourrure blanche sur les parties visibles de son corps. Deux larges cercles noirs équidistants au front, et des cheveux bruns bouclés. Une dévaronienne. Ca faisait un bout de temps que Loxo n'en avait pas croisé. Il avait toujours eu ce truc pour les femelles avec des poils, même s'il ne courrait plus la gueuse depuis quelques dizaines d'années maintenant. Elle accepta son geste d'une élégante main gantée de noir – soie de killik, non ? - et accepta l'invitation à s'asseoir dans le fauteuil rembourré. Elle cherchait ses mots, ne sachant visiblement pas très bien comment se lancer. Loxo lui laissait son temps. Ca permettait d'observer, et de comprendre deux trois trucs. De noter la combinaison ocre, parfaitement coupée, et la griffe du sac à main. De remarquer les boucles trop régulières de la chevelure, c'était artificiel, elle se faisait coiffer, et pas par n'importe qui. D'entrapercevoir enfin, le petit pendentif d'aurodium caché entre le col de l'habit et la fourrure de neige du cou, qui disparaissait à la toute naissance des seins. Clairement, cette fille n'était pas du cru. On ne se baladait pas ici, et encore moins dans ce quartier habillée comme ça. Loxo supposa que la dévaronienne le savait très bien et avait du prendre des mesures de protection, ce qu'il crut confirmer dans le renflement du sac, qui évoquait très clairement un blaster de poche.
Elle s'éclaircit la voix avant de finalement prendre réellement la parole.
_Merci de me recevoir aussi tard.
Loxo esquissa un sourire, qu'il cacha pudiquement de sa trompe. Ca faisait très visite chez le médecin comme phrase.
_Je m'appelle Susika, et j'aimerais que vous m'aidiez à retrouver mon frère.
Plutôt inhabituel. La plupart du temps, c'était quand le mari avait filé sur les plages de Naboo avec sa jeune et jolie secrétaire, et qu'on voulait des preuves ; ou quand on soupçonnait un concurrent d'avoir copié d'un peu trop près son nouveau modèle de moteur d'aérospeeder. Mais bon, le pachyderme n'allait pas faire la fine bouche.
La dévaronienne fit glisser un petit holoportrait sur la table. Une famille de quatre personnes prenait la pose, sur ce qui semblait être une terrasse ensoleillée. On reconnaissait sans peine Susika, grâce à sa fourrure blanche, même si elle devait avoir bien vingt ans de moins. Ce qui était curieux en revanche, c'était que les autres sujets holophotographiés étaient tous humains.
_J'ai été adoptée, crut bon d'expliquer la femelle au cragmoloïde qui avait du exprimer un peu trop franchement sa surprise. Ca faisait des années que mes parents n'arrivaient pas à avoir un enfant, alors ils ont opté pour une autre solution, et j'ai dû leur plaire puisqu'ils m'ont choisie. Je n'étais chez eux que depuis quelques mois quand maman est finalement tombée enceinte. Neuf mois plus tard, Yksleib débarquait.
Un sourire ourla ses lèvres maquillées de violet.
_Voilà comment une petite dévaronienne sortie de l'orphelinat se retrouve grande sœur d'un kuatien.
_Quand est-ce que vous avez vu votre frère pour la dernière fois ?
_En personne, ça remonte à pas trop mal d'années. Il a eu des soucis avec les autorités sous l'Empire, alors il évitait de venir nous voir, pour ne pas nous impliquer.
_Des soucis ? répéta le détective. Votre frère était un rebelle ?
_Pas au début, répondit Susika d'une voix douce. Ma famille est gestionnaire de biens pour les barons de Kuat, vous imaginez bien que nos parents ne nous ont pas vraiment biberonnés dans le culte de la révolution.
Loxo appréciait son sens de l'euphémisme. Il y avait en effet rarement plus conservateur que les baronnies des chantiers navals et ceux qui travaillaient pour elles.
_Mais à l'adolescence, Yksleib s'est mis en tête de réformer le système. Il s'est lié à des activistes pendant ses études sur Sanbra, et il a pris part aux manifestations de la place de la Paix.
Le pachyderme fronça les sourcils. Sale histoire ça, la place de la Paix. Ca avait commencé comme une manifestation étudiante classique, à demander des choses en lien avec les classes et l'Université, et très vite, les critiques avaient évolué. On avait critiqué le doyen, puis le gouverneur, jusqu'à remonter jusqu'aux sommets. On parlait ouvertement de changement majeur au sein de l'Empire, de la corruption des élites, voire de Palpatine lui-même. Toute la galaxie pouvait voir sur l'holonet cette poignée d'étudiants occuper la plus grande place de Sanbra avec leurs tentes, leur liberté d'expression et leur non-violence. Ca n'avait pas plu au grand manitou qui avait envoyé les chars régler le problème. Les TX 130T et leurs tourelles à laser continu avaient fait de la charpie des manifestants, bien que les chaînes d'information officielle avaient parlé de terroristes rebelles dissimulés dans la foule.
_Il a été capturé par les forces de sécurité de l'Empire à ce moment là, et il a disparu pendant plusieurs mois. Mes parents et moi pensions qu'il était mort.
La voix de la dévaronienne s'était cassée sur la fin. Loxo lui proposa à boire, et lui tendit une petite bouteille d'eau filtrée. Susika but quelques secondes avant de reprendre le fil de son histoire.
_Puis un jour, il est revenu à la maison. L'Empire l'avait finalement laissé partir, après l'avoir gardé longtemps en prison. Je crois qu'il a été torturé, même s'il ne nous l'a jamais dit clairement. A partir de là, il a commencé à...changer.
La femelle reposa la bouteille devant elle. En passant par ce contenant la lampe du bureau faisait de drôles de taches de lumière sur sa fourrure.
_La prison l'avait rendu plus instable, plus agressif. Mais surtout, c'est là bas qu'il s'est radicalisé. Les impériaux ont jeté un simple étudiant derrière les barreaux, et c'est un rebelle qui en est ressorti.
_Votre frère avait des contacts avec l'Alliance ?
_Je pense que oui. Il partait souvent loin de Kuat, officiellement pour ses affaires, mais c'était souvent sur la Bordure Extérieure, dans des trous perdus comme Dantooine ou je ne sais où. Là encore, ça a duré quelques temps, avant qu'il ne se mette doucement à couper les ponts, et à ne plus nous parler que par le réseau holonet. Et encore, de manière cryptée.
_Ca remonte à quand ça ? questionna le privé.
_Deux ans après la bataille de Yavin.
Ouais donc ça remontait bien à dix années galactiques, ça. Pour un cragmoloïde ce n'était rien du tout, mais pour une race qui vieillissait aussi vite que les humains, c'était déjà un peu.
_Et la dernière fois que vous vous êtes parlés par Holonet ?
_Je n'avais plus aucune nouvelle depuis des années, même lorsque Palpatine est mort. Mais il m'a recontactée il y a quelques semaines, par un message enregistré.
Elle sortit un petit appareil de sa poche et pressa un bouton. Se matérialisa le visage de son frère, qui ressemblait à une version très vieillie et très fatiguée de leur holoportrait de famille.
_Salut Susi. Je suis désolé de pas t'avoir donné de nouvelles depuis tout ce temps, mais tu sais que c'est compliqué par rapport à la cause. Je voulais te dire que j'aurais bientôt fini ce qu'il me reste à faire, et qu'après, je rentrerais à la maison pour de bon. Je t'aime, grande sœur.
La kuatienne par adoption éteignit le diffuseur.
_J'ai fait analyser le message, et on a remonté sa trace jusqu'ici, dans les vaisseaux-villes en orbite au dessus de Duro. L'expert que j'ai payé a été incapable de m'en dire plus, c'est là que j'ai besoin de vous.
Loxo croisa ses grosses pattes.
_Pardonnez moi, mais si j'en crois votre frère, il lui reste une dernière tache à accomplir, et il aura terminé. Pourquoi ne pas l'attendre chez vous sur Kuat, au lieu de donner vos crédits à un vieux privé comme moi pour le retrouver ?
Voilà qu'il donnait de lui-même des arguments aux clients pour ne pas signer ! Et après ça se plaignait des affaires qui marchaient mal.
_Je connais mon frère, et j'ai un mauvais pressentiment. Je reste son aînée, et c'est mon rôle de le protéger. J'ai peur que si on ne le retrouve pas maintenant, quelque chose de grave pourrait lui arriver.
Loxo en doutait un peu. Si Yksleib avait grenouillé dix ans chez les rebelles, et donc dans la guerre civile, il avait dû apprendre un ou deux trucs pour s'en sortir. Mais bon. L'affaire était intéressante au moins. Ca le changeait des maris adultères. Il donna son prix et la dévaronienne accepta sans sourciller. Il aurait dû gonfler un peu ses tarifs, une richarde comme elle aurait tout autant signé sans discuter. Sans doute devenait-il un peu trop honnête avec l'âge.
Dernières discussions de mise au point, signature d'un contrat en bonne et due forme, poignée de main. Quelques instants plus tard, la kuatienne s'en allait, laissant juste dans son sillage, une légère odeur de fleur de muja. Loxo resta un instant au milieu de son bureau, mettant ses pensées en ordre. Il procédait toujours ainsi quand il commençait une enquête.
Son regard glissa jusqu'à l'horloge murale puis à son ordinateur. Il était tard et il était fatigué, mais il voulait démarrer sans attendre. Deux trois rapides vérifications lui apprirent que Susika avait raison, et que l'émission du dernier message de son frère provenait bien d'un vaisseau-ville duros. Trouver une personne en particulier ici revenait à chercher un droïde unique au milieu d'une casse de jawas, mais Loxo avait confiance en ses capacités, et en son réseau. Et puis, il fallait voir le verre de jus de juma à moitié plein, quelqu'un qui se cachait au milieu de dizaines de millions de personnes était toujours plus facile à trouver qu'au travers de toute la galaxie. Enfin, ça c'était si Yksleib n'avait pas mis les voiles depuis son appel fraternel.
Mais bon au pire, le privé avait assuré ses arrières : les frais de déplacement, ils étaient à la charge des clients.
"Votre manque de foie me consterne..." Dark Vador, Seigneur Sith sur le mess de l'Etoile Noire