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Elephant Noir

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Messagepar Code 44 » Sam 20 Avr 2019 - 22:04   Sujet: Elephant Noir

I.



Il y avait une bonne ambiance ce soir au Rancor qui Fume. Un peu comme tous les soirs du reste. Les clients étaient tous un peu entassés au comptoir, aux tables ou dans des box, un nuage de fumée artificielle se mêlait aux vapeurs d'alcool, et d'ordinaire, les enceintes de l’établissement diffusaient un scrak de plutôt bonne facture. Circonstance exceptionnelle, en raison de la finale d'hoverball qui opposait Naboo à Bespin, c'était le son du match qu'on pouvait percevoir par dessus le choc des verres, les éclats de voix, et le bourdonnement des lourds ventilateurs.

Loxo considéra sa choppe de lait bleu, essayant d'estimer si elle avait assez refroidi pour qu'elle soit tiède et juste comme il l'aimait. Ça pouvait paraître stupide de boire du lait dans un bar, surtout en début de soirée, mais il devait bien faire face à un problème physiologique évident. En tant que cragmoloïde, il était très lourd, et très massif, et de fait, les quantités d'alcool nécessaires pour ressentir l'ivresse étaient phénoménales. Or, les affaires marchaient mal, et Loxo devait surveiller son budget. Ca ne le dérangeait pas trop. A quatre-vingt dix ans, il avait passé depuis longtemps l'époque où il se déchirait la trompe au whisky corellien tous les soirs, et il savait que s'il voulait vivre sereinement les trente ou quarante années de vie qui lui restaient, il fallait qu'il lève un peu la patte.

Ce n'était visiblement pas l'avis de Ple, son compagnon, joyeux ithorien caramel qui en était déjà à pas mal de pintes, et qui ne semblait pas vouloir s'en arrêter là.

_Je te préviens, dit Loxo d'un air sérieux, si tu en reprends, c'est pour ta gueule, je t'avance plus.

Ple, outré, décolla brusquement son verre de son cou, et le claqua avec force sur la table.

_Sérieusement Lo ? Tu peux pas faire ça pour un pote ?

_Je t'ai déjà payé trois pintes ce soir, grogna le cragmoloïde de sa voix grave. D'habitude, je vais pas au delà de deux. Commence pas à abuser.

Ple leva les bras au ciel, prenant visiblement la Mère de la Jungle ithorienne à partie.

_Je te demande pas non plus de payer le crédit de mon vaisseau !

_Vu la ruine que c'est, encore heureux, pouffa Loxo avant de tester la température du lait avec sa trompe.

Ple avait un espèce de vieux vaisseau cargo qui prenait la pluie depuis des années sur un spatioport au nord de la ville. Il s'était mis en tête de devenir orpailleur, et de trouver des métaux précieux dans les ceintures d'astéroïdes. L'idée en elle-même n'était pas bête, mais acheter le vaisseau à crédit à un toydarien, si, surtout quand le vaisseau en question passait son temps à tomber en panne. Résultat des courses, Ple passait plus de temps à se débrouiller en magouillant pour rembourser son crédit, et réparer son appareil que de partir forer on ne sait-où. Malgré tout, Loxo l'aimait bien. Les contacts de l'ithorien l'avaient plus d'une fois bien aidé sur ses dossiers, d'où sa propension à lui payer à boire au Rancor. Mais il y avait des mois, et le cragmoloïde avait l'impression que ces derniers temps, il y en avait beaucoup, où les dossiers étaient bien peu nombreux, et payaient mal. Enfin, Loxo était fataliste. Fallait prendre la vie comme elle venait, et il ne mourrait pas de faim, c'était au moins ça.

Un rugissement monta du milieu du bar. Ple et Loxo se retournèrent pour comprendre et virent sur les écrans géants que Naboo venait de marquer un but à trois minutes de la fin de la mi-temps. Les supporters de Bespin ou juste ceux qui avaient pariés leurs crédits sur la planète au tibanna étaient forcément un peu déçus. Cela fit sourire le cragmoloïde, dévoilant un peu plus largement ses épaisses dents. Il avait eu sa période de parieur professionnel quand il vivait sur Ahakista. Il avait compris à la dure que de l'argent vite gagné était tout aussi vite parti, et il avait préféré plier bagages ailleurs. On ne mentionnera pas qu'au passage, il s'était refait en visitant de nuit, le coffre du Daystar Casino. Bons souvenirs...

Loxo savoura son lait tiède alors que son ami, d'un pas chancelant, allait se chercher une quatrième bière, qu'il avait finalement trouvé la force de payer de sa poche. Une vibration depuis son veston interrompit le pachyderme dans sa dégustation. Il se saisit de son comlink, et fronça les sourcils en écoutant le message automatique venant de son bureau. On venait de s'enregistrer pour un rendez-vous lui apprenait-on, et pour pas plus tard qu'immédiatement. Loxo grommela, ce qui fit buller le lait. Il avait effectivement, depuis que les affaires allaient mal, autorisé les clients à prendre rendez-vous jusqu'à 22H, mais quand même, on était vendredi soir ! Il hésita un moment à faire décaler la rencontre, mais le souvenir de son compte en banque vacillant l'emporta sur sa volonté de détente. Tant pis. Il y aurait d'autres laits bleus.

Ple revenait à la table, faisant attention à ne pas renverser son grand verre mousseux, quand il écarquilla les yeux en voyant son camarade debout, en train d'enfiler manteau et chapeau.

_Tu t'en vas déjà ? On a dit qu'on restait jusqu'au bout du match ! dit-il, pouce pointé en direction des écrans qui diffusaient maintenant de la publicité pour du dentifrice jawa.

_Le devoir m'appelle, répondit le pachyderme avec un petit sourire. Faut bien que je bosse si tu veux que je te paye des coups.

Il scruta la banquette sur laquelle il était assis il y a encore un instant.

_T'aurais pas vu ma canne des fois ?

Ple dans un geste très souple, posa sa pinte sur la table et se pencha pour passer en dessous de celle ci. Un instant plus tard, il refaisait surface, les doigts serrés autour d'une solide tige en veshok, dont le pommeau était gravé de charmes shamaniques et signes de bonne fortune. Loxo ne pouvait pas vraiment dire que ça lui avait porté chance, mais c'était un vieux copain mandalorien qui lui avait offert ce cadeau, et le cragmoloïde en connaissait la valeur symbolique. Et puis quand on faisait son poids, c'était toujours bien d'avoir du veshok contre lequel s'appuyer.

Loxo recupéra sa canne, remercia son ami et lui promit de ne pas manquer leur prochaine sortie au Rancor qui fume. Puis, le pachyderme alla jusqu'au bar, régla sa consommation et se dirigea vers la porte, vérifiant au passage qu'il n'avait rien oublié. Il tapota rapidement ses poches dans un ordre bien établi. Portefeuille. Comlink. Canne. Chapeau. Tout était en ordre. Il poussa la porte du bar et sortit au dehors, frissonnant quand il quitta son atmosphère chaude et poisseuse pour la pluie glacée des rues. Franchement. Les clients ne pouvaient pas appeler à une heure décente ?

***

Loxo arriva essoufflé devant la porte de son bureau. Il sentait une auréole de sueur se former entre son cuir et son chapeau. C'était toujours compliqué de marcher quand il pleuvait. Sa prothèse n'aimait pas trop ça, fonctionnait mal, et le faisait trébucher. Quelle idée de vivre dans une ville où l'équipe météo faisait pleuvoir en quasi permanence ! S'il avait pu, il aurait encore préférer se laisser dorer aux soleils de Tatooine. Mais bon, déjà que les affaires ne marchaient pas trop ici, là bas, hormis des vols de banthas ou des chicaneries entre fermiers hydroponiques, ça serait pas la joie non plus. Il jeta un œil à son holomontre. Bon ça allait, il lui restait bien un quart d'heure pour tout mettre en place.

Il passa sa carte de sécurité et la porte se déverrouilla automatiquement. Le pachyderme pénétra dans ce qui lui servait à la fois de lieu de travail et de lieu de vie. Un simple deux pièces, plutôt sobre, dans les quartiers est. La pièce principale était le bureau proprement dit, avec sa table de travail, son fauteuil renforcé – pour lui – et son fauteuil rembourré – pour le confort des clients -, un ordinateur, quelques dossiers desquels s'échappaient toujours une ou deux feuilles de flimplast, et une grande fenêtre à stores de laquelle on pouvait voir Duro. Bon, ce n'était pas la vue la plus exaltante du monde, de voir une planète polluée jusqu'à son noyau, tournoyer lentement au dessous de soi, mais Loxo était presque content. La plupart de ceux qui vivaient sur le vaisseau-ville étaient coincés dans des tours sans fin, sans aucune autre vue que plus d'immeubles, ou une benne à ordure. Au moins, le cragmoloïde pouvait voir l'espace.

Ca l'avait toujours apaisé ce grand espace vide et ses pointillés d'étoiles, comme des diamants piqués dans du velours noir. Ses frères de race étaient plutôt sédentaires, se trouvant très bien sur Ankus et n'ayant pas spécialement l'envie d'explorer ailleurs. Ca n'avait pas trop servi les pachydermes quand l'Empire avait envoyé ses stormtroopers réduire tout le monde en esclavage, et refiler les clés de la planète à TaggeCo, qui s'était fait un plaisir de ravager l'écosystème par son minage intensif. Par chance, ça n'avait duré que peu de temps, et Ankus était assez forte pour se relever de quinze ans d'occupation. Et puis on était loin du niveau de saloperie écologique que les duros avaient infligé à leur propre monde, donc on pouvait relativiser.

Loxo s'arracha à ses pensées. Il allait finir par être en retard. Il clopina jusqu'à la petite salle de bain, à droite du bureau, et jeta rapidement son manteau sur un cintre, judicieusement pendu au dessus de la douche. Il pourrait s’égoutter tranquillement sans ruiner le parquet, un malheur qui lui était arrivé bien trop de fois depuis qu'il s'était installé ici. Le chapeau suivi le même chemin. Le pachyderme retourna dans la pièce principale, posa sa canne contre la table, et prépara quelques affaires. Bloc notes neuf. Nouvelle cartouche d'encre de j'feh dans son stylo. Un verre propre, et un choix de bouteilles d'eau pour le client. Et bien sûr, mais ça, le cragmoloïde était le seul à le voir, son bon vieux fusil lance-fléchette, installé sous la table. Une pression sur la gâchette, et des centaines de petits projectiles tranchants comme un sabrolaser partaient droit devant, déchiquetant tout sur leur passage. Loxor avait vu des êtres sensibles réduits en marmelade ewok par l'action de cette arme. Souvent parce qu'il en était la cause, mais pas toujours. Il faisait un métier dangereux après tout, qui demandait presque toujours de se frotter à la pègre. Un peu de prudence n'avait jamais tué personne, et ce n'était pas le blaster lourd zabrak glissé en permanence dans la poche droite de son trench-coat qui dirait le contraire.

Tout était en ordre, quand à 22h précise, on sonna. Le cragmoloïde jeta un très rapide coup d'oeil à droite vérifiant que le cadre holographique dans lequel flottait sa licence était bien en vue, avant de pousser le bouton permettant l'ouverture de la porte. La personne qui se tenait derrière entra dans le bureau d'un air un peu hésitant. Loxo n'était pas vraiment surpris. C'était forcément toujours un peu intimident de se rendre dans une agence de privé, surtout tenue par un aussi gros morceau que lui. Le fait qu'il soit cragmoloïde avec le poids et la taille qui allaient de pair, plus la nuit et la pluie ne devaient rien arranger. Le pachyderme s’efforça néanmoins de sourire et de se lever, par politesse. Tendant sa grosse main et se présentant, il observa avec attention son hôte. Femelle. Un peu plus d'une trentaine d'années standard. Humanoïde, avec une fourrure blanche sur les parties visibles de son corps. Deux larges cercles noirs équidistants au front, et des cheveux bruns bouclés. Une dévaronienne. Ca faisait un bout de temps que Loxo n'en avait pas croisé. Il avait toujours eu ce truc pour les femelles avec des poils, même s'il ne courrait plus la gueuse depuis quelques dizaines d'années maintenant. Elle accepta son geste d'une élégante main gantée de noir – soie de killik, non  ? - et accepta l'invitation à s'asseoir dans le fauteuil rembourré. Elle cherchait ses mots, ne sachant visiblement pas très bien comment se lancer. Loxo lui laissait son temps. Ca permettait d'observer, et de comprendre deux trois trucs. De noter la combinaison ocre, parfaitement coupée, et la griffe du sac à main. De remarquer les boucles trop régulières de la chevelure, c'était artificiel, elle se faisait coiffer, et pas par n'importe qui. D'entrapercevoir enfin, le petit pendentif d'aurodium caché entre le col de l'habit et la fourrure de neige du cou, qui disparaissait à la toute naissance des seins. Clairement, cette fille n'était pas du cru. On ne se baladait pas ici, et encore moins dans ce quartier habillée comme ça. Loxo supposa que la dévaronienne le savait très bien et avait du prendre des mesures de protection, ce qu'il crut confirmer dans le renflement du sac, qui évoquait très clairement un blaster de poche.

Elle s'éclaircit la voix avant de finalement prendre réellement la parole.

_Merci de me recevoir aussi tard.

Loxo esquissa un sourire, qu'il cacha pudiquement de sa trompe. Ca faisait très visite chez le médecin comme phrase.

_Je m'appelle Susika, et j'aimerais que vous m'aidiez à retrouver mon frère.

Plutôt inhabituel. La plupart du temps, c'était quand le mari avait filé sur les plages de Naboo avec sa jeune et jolie secrétaire, et qu'on voulait des preuves ; ou quand on soupçonnait un concurrent d'avoir copié d'un peu trop près son nouveau modèle de moteur d'aérospeeder. Mais bon, le pachyderme n'allait pas faire la fine bouche.

La dévaronienne fit glisser un petit holoportrait sur la table. Une famille de quatre personnes prenait la pose, sur ce qui semblait être une terrasse ensoleillée. On reconnaissait sans peine Susika, grâce à sa fourrure blanche, même si elle devait avoir bien vingt ans de moins. Ce qui était curieux en revanche, c'était que les autres sujets holophotographiés étaient tous humains.

_J'ai été adoptée, crut bon d'expliquer la femelle au cragmoloïde qui avait du exprimer un peu trop franchement sa surprise. Ca faisait des années que mes parents n'arrivaient pas à avoir un enfant, alors ils ont opté pour une autre solution, et j'ai dû leur plaire puisqu'ils m'ont choisie. Je n'étais chez eux que depuis quelques mois quand maman est finalement tombée enceinte. Neuf mois plus tard, Yksleib débarquait.

Un sourire ourla ses lèvres maquillées de violet.

_Voilà comment une petite dévaronienne sortie de l'orphelinat se retrouve grande sœur d'un kuatien.

_Quand est-ce que vous avez vu votre frère pour la dernière fois ?

_En personne, ça remonte à pas trop mal d'années. Il a eu des soucis avec les autorités sous l'Empire, alors il évitait de venir nous voir, pour ne pas nous impliquer.

_Des soucis ? répéta le détective. Votre frère était un rebelle ?

_Pas au début, répondit Susika d'une voix douce. Ma famille est gestionnaire de biens pour les barons de Kuat, vous imaginez bien que nos parents ne nous ont pas vraiment biberonnés dans le culte de la révolution.

Loxo appréciait son sens de l'euphémisme. Il y avait en effet rarement plus conservateur que les baronnies des chantiers navals et ceux qui travaillaient pour elles.

_Mais à l'adolescence, Yksleib s'est mis en tête de réformer le système. Il s'est lié à des activistes pendant ses études sur Sanbra, et il a pris part aux manifestations de la place de la Paix.

Le pachyderme fronça les sourcils. Sale histoire ça, la place de la Paix. Ca avait commencé comme une manifestation étudiante classique, à demander des choses en lien avec les classes et l'Université, et très vite, les critiques avaient évolué. On avait critiqué le doyen, puis le gouverneur, jusqu'à remonter jusqu'aux sommets. On parlait ouvertement de changement majeur au sein de l'Empire, de la corruption des élites, voire de Palpatine lui-même. Toute la galaxie pouvait voir sur l'holonet cette poignée d'étudiants occuper la plus grande place de Sanbra avec leurs tentes, leur liberté d'expression et leur non-violence. Ca n'avait pas plu au grand manitou qui avait envoyé les chars régler le problème. Les TX 130T et leurs tourelles à laser continu avaient fait de la charpie des manifestants, bien que les chaînes d'information officielle avaient parlé de terroristes rebelles dissimulés dans la foule.

_Il a été capturé par les forces de sécurité de l'Empire à ce moment là, et il a disparu pendant plusieurs mois. Mes parents et moi pensions qu'il était mort.

La voix de la dévaronienne s'était cassée sur la fin. Loxo lui proposa à boire, et lui tendit une petite bouteille d'eau filtrée. Susika but quelques secondes avant de reprendre le fil de son histoire.

_Puis un jour, il est revenu à la maison. L'Empire l'avait finalement laissé partir, après l'avoir gardé longtemps en prison. Je crois qu'il a été torturé, même s'il ne nous l'a jamais dit clairement. A partir de là, il a commencé à...changer.

La femelle reposa la bouteille devant elle. En passant par ce contenant la lampe du bureau faisait de drôles de taches de lumière sur sa fourrure.

_La prison l'avait rendu plus instable, plus agressif. Mais surtout, c'est là bas qu'il s'est radicalisé. Les impériaux ont jeté un simple étudiant derrière les barreaux, et c'est un rebelle qui en est ressorti.

_Votre frère avait des contacts avec l'Alliance ?

_Je pense que oui. Il partait souvent loin de Kuat, officiellement pour ses affaires, mais c'était souvent sur la Bordure Extérieure, dans des trous perdus comme Dantooine ou je ne sais où. Là encore, ça a duré quelques temps, avant qu'il ne se mette doucement à couper les ponts, et à ne plus nous parler que par le réseau holonet. Et encore, de manière cryptée.

_Ca remonte à quand ça ? questionna le privé.

_Deux ans après la bataille de Yavin.

Ouais donc ça remontait bien à dix années galactiques, ça. Pour un cragmoloïde ce n'était rien du tout, mais pour une race qui vieillissait aussi vite que les humains, c'était déjà un peu.

_Et la dernière fois que vous vous êtes parlés par Holonet ?

_Je n'avais plus aucune nouvelle depuis des années, même lorsque Palpatine est mort. Mais il m'a recontactée il y a quelques semaines, par un message enregistré.

Elle sortit un petit appareil de sa poche et pressa un bouton. Se matérialisa le visage de son frère, qui ressemblait à une version très vieillie et très fatiguée de leur holoportrait de famille.

_Salut Susi. Je suis désolé de pas t'avoir donné de nouvelles depuis tout ce temps, mais tu sais que c'est compliqué par rapport à la cause. Je voulais te dire que j'aurais bientôt fini ce qu'il me reste à faire, et qu'après, je rentrerais à la maison pour de bon. Je t'aime, grande sœur.

La kuatienne par adoption éteignit le diffuseur.

_J'ai fait analyser le message, et on a remonté sa trace jusqu'ici, dans les vaisseaux-villes en orbite au dessus de Duro. L'expert que j'ai payé a été incapable de m'en dire plus, c'est là que j'ai besoin de vous.

Loxo croisa ses grosses pattes.

_Pardonnez moi, mais si j'en crois votre frère, il lui reste une dernière tache à accomplir, et il aura terminé. Pourquoi ne pas l'attendre chez vous sur Kuat, au lieu de donner vos crédits à un vieux privé comme moi pour le retrouver ?

Voilà qu'il donnait de lui-même des arguments aux clients pour ne pas signer ! Et après ça se plaignait des affaires qui marchaient mal.

_Je connais mon frère, et j'ai un mauvais pressentiment. Je reste son aînée, et c'est mon rôle de le protéger. J'ai peur que si on ne le retrouve pas maintenant, quelque chose de grave pourrait lui arriver.

Loxo en doutait un peu. Si Yksleib avait grenouillé dix ans chez les rebelles, et donc dans la guerre civile, il avait dû apprendre un ou deux trucs pour s'en sortir. Mais bon. L'affaire était intéressante au moins. Ca le changeait des maris adultères. Il donna son prix et la dévaronienne accepta sans sourciller. Il aurait dû gonfler un peu ses tarifs, une richarde comme elle aurait tout autant signé sans discuter. Sans doute devenait-il un peu trop honnête avec l'âge.

Dernières discussions de mise au point, signature d'un contrat en bonne et due forme, poignée de main. Quelques instants plus tard, la kuatienne s'en allait, laissant juste dans son sillage, une légère odeur de fleur de muja. Loxo resta un instant au milieu de son bureau, mettant ses pensées en ordre. Il procédait toujours ainsi quand il commençait une enquête.

Son regard glissa jusqu'à l'horloge murale puis à son ordinateur. Il était tard et il était fatigué, mais il voulait démarrer sans attendre. Deux trois rapides vérifications lui apprirent que Susika avait raison, et que l'émission du dernier message de son frère provenait bien d'un vaisseau-ville duros. Trouver une personne en particulier ici revenait à chercher un droïde unique au milieu d'une casse de jawas, mais Loxo avait confiance en ses capacités, et en son réseau. Et puis, il fallait voir le verre de jus de juma à moitié plein, quelqu'un qui se cachait au milieu de dizaines de millions de personnes était toujours plus facile à trouver qu'au travers de toute la galaxie. Enfin, ça c'était si Yksleib n'avait pas mis les voiles depuis son appel fraternel.

Mais bon au pire, le privé avait assuré ses arrières : les frais de déplacement, ils étaient à la charge des clients.
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Messagepar TiinLènVa » Sam 20 Avr 2019 - 23:23   Sujet: Re: Elephant Noir

J’aime beaucoup ! :) C’est très bien écrit. Le lore est très bien utilisé. On se place donc une douzaine d’années après la bataille de Yavin ? Ta fan-fic s’inscrit dans l’UE legend ou canon ?

En tout cas hâte de lire la suite. ;)
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Messagepar Code 44 » Sam 20 Avr 2019 - 23:45   Sujet: Re: Elephant Noir

TiinLènVa a écrit:J’aime beaucoup ! :) C’est très bien écrit. Le lore est très bien utilisé. On se place donc une douzaine d’années après la bataille de Yavin ? Ta fan-fic s’inscrit dans l’UE legend ou canon ?

En tout cas hâte de lire la suite. ;)


J'ai presque envie de te répondre que je ne reconnais pas la légitimité du nouvel UE :D

Plus sérieusement, UE Legends. Il me semblait l'avoir précisé quand je parlais de "la seconde mort/la mort définitive" de Palpatine, mais je l'avais effacé du brouillon, parce que je trouvais que ça sonnait trop bizarre dans la bouche des personnages. Et oui, on est donc plus ou moins en 12 après Yavin, soit une année après Dark et Crimson Empire.
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Messagepar LL-8 » Dim 21 Avr 2019 - 0:04   Sujet: Re: Elephant Noir

Je connais pas grand chose au Legends post-ROTJ, mais c'est vraiment bien écrit ! Ça m'a captivée, et cette ambiance mi-roman noir, mi-Jessica Jones, j'accroche bien ! Je reviendrai pour la suite :jap:
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Messagepar Dark vador40 » Dim 21 Avr 2019 - 0:24   Sujet: Re: Elephant Noir

Le récit m'a captivé. C'est très bien écrit et j'adore l'ambiance qui se dégage du texte.
Je serais moi aussi là pour la suite. :wink:
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Messagepar Code 44 » Dim 21 Avr 2019 - 0:32   Sujet: Re: Elephant Noir

LL-8 a écrit:Je connais pas grand chose au Legends post-ROTJ, mais c'est vraiment bien écrit ! Ça m'a captivée, et cette ambiance mi-roman noir, mi-Jessica Jones, j'accroche bien ! Je reviendrai pour la suite :jap:


Sorti des éléments des Jedi Outcast/Academy et Dark/Crimson Empire je suis loin d'être un spécialiste non plus :D

Après je te rassure, c'est surtout par nécéssité d'effacer l'Empire hors du paysage que j'ai placé mon histoire dans cette période, ça ne demande pas des connaissances approfondies pour suivre, c'est juste une toile de fond néo-noire pour notre éléphant en imper. Parce que je voulais ABSOLUMENT que le héros du privé soit un éléphant en imper. :lol:



Dark vador40 a écrit:Le récit m'a captivé. C'est très bien écrit et j'adore l'ambiance qui se dégage du texte.
Je serais moi aussi là pour la suite. :wink:


On va s'y employer. :wink: La fic ne sera pas très longue, une dizaine de chapitres max je pense, c'est surtout histoire de me remettre doucement à du Star Wars, étant privé de mes autres plateformes de diffusion d'écrire pour encore pas mal de temps. Je suis ravi, en tant que très très vieux pilier de bar de la section fanfic de SWU, de la voir aussi active d'ailleurs !
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Messagepar Dark vador40 » Ven 01 Nov 2019 - 3:27   Sujet: Re: Elephant Noir

Salut ! Je voulais savoir si la FF était abandonnée ? Ce serait dommage à la vue du potentiel.
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Messagepar Code 44 » Dim 17 Nov 2019 - 20:49   Sujet: Re: Elephant Noir

Elle ne l'est pas. :) Je dois toujours affronter de trèèèèèèèèèès longs passages à vide quand j'écris, surtout depuis que j'ai perdu mes lieux principaux d'écriture et surtout d'échange (sans retour des lecteurs je suis incapable d’aligner deux phrases) mais je vais essayer de me forcer un peu. Ne serait-ce que pour me blinder et sublimer ce que risque fortement d'être le IX. :D
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Messagepar Mitth'raw Nuruodo » Mar 03 Déc 2019 - 19:53   Sujet: Re: Elephant Noir

Coooooode ! :love:

J'aime beaucoup ce début avec le côté très réaliste de la description du personnage et de son environnement, à la fois familier et exotique :) Je ne connaissais pas les Cragmoloïdes jusque-là^^ Maintenant j'attends la suite aussi :o

L'idée en elle-même n'était pas bête, mais acheter le vaisseau à crédit à un toydarien, si, surtout quand le vaisseau en question passait son temps à tomber en panne. Résultat des courses, Ple passait plus de temps à se débrouiller en magouillant pour rembourser son crédit, et réparer son appareil que de partir forer on ne sait-où.


Mais t'as vraiment un problème avec les Toydariens :lol:
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Messagepar Code 44 » Sam 28 Déc 2019 - 1:19   Sujet: Re: Elephant Noir

Mitth'raw Nuruodo a écrit:Coooooode ! :love:

J'aime beaucoup ce début avec le côté très réaliste de la description du personnage et de son environnement, à la fois familier et exotique :) Je ne connaissais pas les Cragmoloïdes jusque-là^^ Maintenant j'attends la suite aussi :o


On s'y remet doucement camarade. ;)

Mais t'as vraiment un problème avec les Toydariens :lol:


Pas de ma faute si sans Watto, on aurait jamais eu Dark Vador. :o
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Messagepar Code 44 » Sam 28 Déc 2019 - 1:20   Sujet: Re: Elephant Noir

II.


Le Swa-Lu était l'un d'un des grandes centres commerciaux de la ville. Le bâtiment occupait plusieurs dizaines d'étages, et permettait à tous les duros, et les autres, d'échanger leurs crédits durement gagnés par un honnête labeur – ou non mais gagnés quand même – contre des habits en cuir de gundark, les derniers parfums à base de phéromones falleen ou bien encore les tous nouveaux speeders, encore plus rapides que le modèle précédent. Mais on y trouvait surtout de quoi se sustenter, et c'était en partie pour cette raison que Loxo avait traîné sa carcasse jusque là. A cette heure matinale, on trouvait surtout dans la cantina des ouvriers au bleu de travail maculé de graisse, qui sortaient de leur travail de nuit sur les chaînes de montage, qui reprenaient des forces à grands coups de café, et les fonctionnaires du vaisseau-ville en petit costume étriqué, qui avalaient quelque chose se chaud avant d'affronter leur journée. On pouvait toujours croiser les deux trois jeunes assez fous ou fauchés pour faire leurs études à la fac de bio de Duros, et on avait à peu de chose près la faune habituelle. Assis sur une banquette citron, Loxo et son interlocuteur ne dépareillaient pas vraiment dans ce décor, même si l'éternel trench-coat du cragmoloïde, et son chapeau passé de mode faisaient parfois stopper quelques secondes les yeux des oisifs. L'humain qui l'accompagnait en revanche, n'aurait pas plus attiré l'attention que n'importe lequel de ses frères de race : petit, anguleux, une toison de cheveux noirs sur une tête en diamant, il n'y avait guère que sa particularité faciale capillaire – une grosse moustache en guidon de swoop – qui le faisait un peu sortir de l'ordinaire.

Loxo et son invité – ils se connaissaient depuis pas mal de cycles, mais fallait-il dire « ami » ? - échangèrent un sourire quand ils entendirent un habitué, au comptoir, demander des œufs de kaadus. Une vieille histoire entre les deux sur Naboo, des trafics de boomas. Le bon temps.

Le privé laissa sa trompe tournoyer un court instant devant le nerfburger braisé aux patates douces qu'on lui avait apporté. Même quand il était en délicatesse financière, il n'oubliait jamais de se faire plaisir sur la nourriture. Il n'était pas aussi hédoniste qu'un zeltron, il ne fallait pas exagérer, mais ne voulait pas se priver. L'humain le regarda faire, amusé.

_J'ai jamais compris ce que tu trouvais de bon là dedans, dit-il en désignant le plat dont la sauce fumait encore. C'est plus gras que le cul d'un hutt. T'as beau avoir le cœur solide, ça finira par te boucher les artères un jour.

_Tu sais Bertal, faut bien mourir de quelque chose, répondit Loxo en haussant les épaules.

Il porta le nerfburger à sa bouche et mordit dedans. Chaud, riche, sucré, avec ce petit goût relevé par la sauce. Parfait.

Bertal leva les yeux au ciel avant de tourner la tête vers le comptoir, essayant de voir si on lui apportait enfin sa salade. Les pousses de pissenlits de Chandrila coûtaient un bras, mais puisque c'était Loxo qui offrait...

_Alors, dit le cragmoloïde, reposant une moitié de son burger dans son assiette. T'as quelque chose pour moi ?

_Ca pas été facile de mettre la main dessus, tu sais. Surtout dans le peu de temps où tu le voulais.

_J'allais pas te le demander pour dans trois mois, gronda l'alien.

_Ce que je veux dire, c'est que cette fois, ça va te coûter pas mal.

Loxo ricana, dévoilant ses dents rougies par la sauce.

_Pas assez pour atteindre ta dette, je crois non ?

Bertal regarda le sol en grommelant. Il savait très bien ce qu'il devait au cragmoloïde. Des années plus tôt, l'humain s'était retrouvé dans une situation très délicate, quand un petit seigneur de la pègre de Duros, avait découvert qu'il entretenait une liaison avec sa fille. Le fait que cette dernière fut mineure au moment des faits n'avait pas vraiment arrangé la situation. Un contrat sur la tête ; et pas mal d'assassins aux fesses, Bertal avait été contraint de demander l'aide de son vieux copain Loxo. L'affaire s'était réglée entre gentilshommes, le privé s'introduisant nuitamment dans l'appartement de l'infortuné beau-père, fracassant le crâne dudit parrain avec sa canne en veshock, et effaçant la prime offerte contre Bertal par quelques manipulations informatiques. Les bras-droits du mafieux étant plus occupés à s’entre-tuer pour prendre sa place vacante que poursuivre un humain pour des histoires de mœurs qui ne les concernaient pas, l'avaient laissé tranquille. Depuis, Bertal avait une dette envers Loxo, sans doute assez forte pour qu'un wookie la qualifie de dette de vie. Et Ankus sait que le privé ne s'était pas privé de le rappeler à son camarade.

Un petit holodisque glissa sur le table, que Loxo introduisit dans son lecteur portable. Une image de mauvaise qualité, bouffée par les parasites fit alors jour. C'était visiblement une vidéo amateur, rien n'était stabilisé, le cadre penchait comme si l'on essayait de filmer par dessus un balcon sans être vu. Par dessus la balustrade, une masse apeurée de jeunes de toute race et de tout sexe, qui couraient dans tous les sens alors que se rapprochaient au loin des troupes en uniforme kaki. Beaucoup de fumée, des cris. Ca aurait pu être n'importe où, mais Loxo avait déjà vu aux informations ces tours végétalisées, et ces ruisseaux qui courraient en chaos ordonné sur l'esplanade. Sanbra. Les manifestations étudiantes. Les chars arriveraient dans quelques minutes.

Tandis que Loxo était concentré sur la vidéo, Bertal attaquait enfin sa salade. Quelques années en arrière, un holodisque comme celui ci lui aurait coupé l'appétit, mais depuis qu'il avait fait sien le métier de receleur d'information, il avait vu bien pire. Bon il ne pouvait pas dire que le passage où les forces de sécurité avaient nettoyé ce qui resté après le passage des tanks à l'incinérateur portable, puis au banthadozer jusqu'au réseau d'égouts de Sanbra avait été joyeux à voir. Mais bon. C'était aussi un bon rappel que la gestion par la terreur – ce qu'on avait appelé plus tard la doctrine Tarkin – ça avait fichu l'Empire droit dans les planètes-décharges de l'histoire. Pas certain que les gamins de Sanbra le voient ça comme une victoire cela dit.

Loxo mit brusquement la vidéo sur pause, et se mit à zoomer. Là. Le jeune homme saisi aux aisselles par les forces de sécurité, qui faisaient pleuvoir sur lui des coups d'électrobâtons. Ce n'était pas encore celui que Loxo avait vu sur le message enregistré, qui semblait avoir vécu mille enfers. Ni plus le gamin souriant du portrait de famille. C'était juste un garçon aux sourcils broussailleux, qui semblait se rendre compte qu'avoir suivi ses copains de fac dans cette histoire de blocus était au final une mauvaise idée, et qu'il aurait dû s'en cantonner à draguer de l'étudiante à l'holobibliothèque universitaire.

Le pachyderme avait un peu l'impression de regarder un extrait d'une fiction, le moment précis où le héros était frappé par une tragédie et se transformait à jamais. Loxo fit reprendre la vidéo. Après quelques coups de bâtons, Yksleib disparut hors du cadre, toujours encadré par les forces de sécurité. C'était paradoxalement peut-être là sa chance. S'il n'avait pas été arrêté à ce moment précis, il aurait encore été dans la foule quand les TX 130T tireraient dans le tas. Déjà, quelques grands jets lumineux continus pouvaient être aperçus dans le chaos. Le privé reposa l'appareil sur la table. Il n'avait ni envie, ni besoin de voir le reste de l'holodisque. Déjà, son nerfburger lui semblait un peu moins appétissant.

_Ca va te servir à quoi d'avoir la vidéo de son arrestation ? Ca remonte à plus de dix ans, non ? lui demanda Bertal, mâchonnant ses pissenlits.

La question n'était pas bête en soi. Mais Loxo savait comment il travaillait. Il avait besoin de se plonger dans la tête des gens qu'il recherchait. Ca permettait de mettre en relief des pistes auxquelles on aurait pas pensé si on faisait pas l'effort de le faire. Bon bien sûr, ça avait ses limites. Quand on lui demandait de retrouver un type qui s'était engagé dans une secte, le pachyderme commençait pas non plus à prier la Lanterne Sacrée des Ewoks. Ni dans le cas d'Yksleib, aller se faire casser un électrobâton sur le crâne.

_Je bosse mieux comme ça, répondit Loxo en haussant les épaules.

Pendant les prochaines minutes, seul le bruit des mâchoires humaines et cragmoloïdes planèrent au dessus de la table. Les patates douces stimulèrent un peu plus ses cellules grises.

_Tu aurais moyen de me retrouver dans quelle prison il s'est retrouvé ?

Bertal s'étrangla à moitié avec une pousse de pissenlit.

_Ca va être coton. Palpatine aimait encore plus les prisons que les robes moches, et il avait des robes TRES moches.

Le receleur d'information se mit à compter sur ses doigts.

_Oovo IV, Kessel, le Lusankya...la plupart des registres ont été publiés par les Rebelles quand ils ont mit la main sur les datapads, mais certaines archives ont été définitivement perdues, y avait des copies que sur Byss par exemple. Je te laisse imaginer la gueule de ce qui reste après un coup de Canon Galactique. Et ça, c'est les données qui existent. Y a des opposants qui se sont pris des années de placard sans que personne soit jamais au courant. Le COMPORN aimait bien faire ça.

Loxo grimaça à l'annonce du sigle. Le privé avait beau être un vieux routard qui se foutait d'un peu tout dans la galaxie du moment qu'il avait toujours une chopine à la fin de la journée avec un bol de pistaches d'un agrimonde sympa ; les actions du groupe de soutien à l'Empire, qui avait commencé par une réunion d'étudiants avant de finir par un holocauste galactique de tout ce qui n'était pas humain ; ça secouait un peu les entrailles.

_Tu peux quand même essayer de voir si tu trouves quelque chose ? Avec un peu de bol, on peut tomber sur un compagnon de cellule, ou quelque chose du genre. Il est peut-être venu ici voir un copain.

_Je peux toujours essayer, répondit son camarade, finissant son assiette, et passant sa serviette dans sa moustache pour en dégager quelques traces graisseuses.

Loxo sourit et lui donna une claque amicale sur l'épaule.

_Je savais que j'avais raison de te payer un casse-dalle.

Le pachyderme se releva, posant son chapeau sur sa grosse tête.

_Tiens moi au courant dès que tu apprends quelque chose, hein. Et tu peux finir mon assiette si tu veux. Je sais que t'es pas très viande, mais y reste des frites.

Bertal leva le pouce d'un air enjoué, disant au revoir à son camarade. Il ne refusait jamais un peu de rab. Faisant revenir la garniture dans la sauce, le receleur d'information laissa son esprit s’égarer vers le dernier dossier qu'on lui avait remis avant que Loxo ne le contacte. Est-ce que cette rumeur d'un jedi jawa justicier galactique pouvait être vraie ? L'humain décida de poursuivre ses réflexions avec plus de sauce. On réfléchissait toujours mieux avec plus de sauce.

***

Les rues du vaisseau ville de Duros étaient déjà bien animées. La foule était compacte et jouait des épaules. Il faisait gris et de grosses flaques matinées d'huile dans lesquelles naissaient des arc en ciel maculaient le sol. Loxo était planté au milieu du trottoir, la trompe sur ses notes de filmiplast. Les piétons devaient le contourner, lui jetant parfois un regard noir, sans qu'il ne soit trop appuyé toutefois. On avait beau être habitué à la vie difficile sur les vaisseaux-villes, défier un cragmoloïde ne se faisait pas à la légère.
Loxo, lui s'en moquait bien. Il avait cette habitude quand il devait vérifier une hypothèse de tout laisser en plan au risque que l'idée lui échappe. Et dire qu'un proverbe louait la mémoire des cragmoloïdes ! De la connerie tout ça. Enfin, dans son cas.

Ses notes sur le filmiplast étaient étonnement claires. On aurait pu croire que c'était difficile d'être précis quand on avait les doigts qui faisaient la taille d'un bébé jawa, et c'était vrai que les natifs d'Ankus n'avaient jamais été reconnus comme les plus grands calligraphes de la galaxie. Mais Loxo avait bien dû l'apprendre un peu, quand il s'était associé avec un faussaire de Corellia qui lui avait appris deux trois trucs. Loxo avait laissé depuis longtemps derrière lui les faux permis de construire et les permis de travail bidon, mais il avait gardé un certain style dans l'écriture pour ne pas dire un style certain.

Le pachyderme replia le filmiplast dans sa poche, et leva les yeux vers l'enseigne en néon grésillante au dessus de la foule. « Marché aux poissons ».

Loxo s'avança. Les étals se composaient la plupart du temps de bicoques branlantes, et sur la devanture de celles ci, des poissons luisants de toute race étaient posés à moitié en vrac sur des blocs de glace fumants. L'atmosphère chaude et moite du vaisseau-ville la faisait fondre et elle gouttait en permanence, charriant avec elle l'odeur marquée des animaux. Loxo fronça la trompe. Pourquoi fallait-il que ce soit toujours au marché aux poissons ?

Il s'avança. Les vendeurs l'apostrophaient, lui promettant le meilleur venu tout droit des profondeurs de Mon Calamari, ou cette délicieuse anguille de Manaan, bien gorgée de kolto naturel ; tout ce qu'il fallait pour retrouver la forme ! Un sourire éclaira ses défenses. Il fallait vraiment être naif pour croire ce qu'ils disaient.

Bien entendu, la plupart des produits alimentaires étaient importés sur les vaisseaux, et hormis quelques exceptions, on ne cultivait ou élevait rien sur place. Les poissons en question cela dit constituaient justement une de ces exceptions. Elevés était sans doute un mot un peu pompeux vu le bassin graisseux, matinée de produits chimiques et d'hormones de croissance dans lequel grandissaient les pauvres bêtes mais enfin. Au moins c'était du fait main.

Le pachyderme fit un écart pour laisser passer un advozse chargé de paniers jusqu'à la corne. Loxo s'approcha d'un petit vaisseau de transport duquel on avait tiré la bâche. Des doo et des laa de toutes les couleurs frétillaient sur la glace fumante. Au milieu des marchandises, un grand célégien, engoncé dans sa capsule remplie de gaz, remettait de l'ordre dans ses produits de ses longues tentacules.

_Yoq, le salua le privé.

Le célégien fit pivoter son appareil pour se retrouver en face du cragmoloïde. Par nature, avec leur apparence de méduse, leurs émotions n'étaient pas faciles à lire, mais Yoq était d'une nature plus expressive que ses frères de races. Enfin ses tentacules l'étaient déjà un peu plus.

_Loxo, mon ami !

Le détective privé resserra un peu sa prise sur sa canne lorsque la voix du célégien résonna sous son crâne. Ankus qu'il n'aimait pas quand on communiquait avec lui par télépathie. Ca manquait de franc-parler, sans aucun jeu de mot.

Le gaz autour de Yoq prit une teinte jaunâtre, signe que le marchand s'agitait.

_Ca fait des semaines et des semaines que je ne t'avais pas vu ! Qu'est-ce qui t'amènes sur mon modeste étal ? Tu cherches un peu de quoi remplir tes réserves pour l'hiver ?

Loxo étouffa un sourire. Yoq Liep était bon. A l'entendre ainsi, on jurerait que le célégien était un honnête poissonnier et on lui donnerait la Force sans confession.

_J'ai plus besoin d'information. Tu saurais où trouver du para de Bogano ?

Le gaz de son interlocuteur vira au ocre.

_Bien entendu, mais je n'ai pas mes holocartes sous le tentacule. Tu me suis une minute ?

Cragmoloïde et célégien passèrent ensemble dans la cabine du véhicule. D'une pression de son appendice, Yoq fit tourner un bouton avant de déclarer.

_Brouilleur en place. On peut parler. Tu as besoin de quoi Loxo ? Bâtons de la mort ? Bile de bantha ? J'ai du très bon qui vient juste de Kessel sinon.

_Je te l'ai dit, c'est d'info dont j'ai besoin, répondit le privé en sortant l'hologramme d'Yksleib de sa poche et en le faisant jouer. Tu peux me dire à quoi y tourne selon toi ?

L'idée s'était imposée assez vite. Pour le moment, le privé manquait d'angles pour retrouver sa cible. Il était sur un des vaisseaux-villes, génial, ça faisait quand même encore des millions d'endroits où se cacher. Bertal pourrait sans doute l'aider à affiner, mais pour le moment, le privé devait travailler avec ses petites cellules grises.

La prison sous l'Empire, c'était dur, alors quand on était opposant politique, c'était tout de suite plus compliqué. Susika avait dit que son frère avait changé après son incarcération et elle avait mit ça sur les conditions de détention. C'était sans doute le cas du reste, mais Loxo savait que pour tenir en prison, c'était pas rare que les détenus s'évadent dans un paradis artificiel. L'épice était populaire comme jamais entre quatre murs et c'était rarement de la pure, qu'on sniffait avec une paille d'aurodium. La plupart du temps, c'était des mélanges infâmes, coupés de copeaux de bois de résineux et de lessive fabriquée sur Nar Shaada. Et le truc, c'était que ce genre de produit, ça rendait très vite accro. Si Yksleib avait plané un peu pendant ses mois de prison pour oublier les tortures et l'isolement, y avait des chances qu'il ait besoin encore aujourd'hui de quelques doses. Même si ça remontait à des années.

Loxo n'était pas un spécialiste des drogues. Il ne crachait pas sur l'alcool, mais c'était à peu près tout. Par contre, il avait quelques connaissances dont c'était le rayon principal, dont Yoq.

Le célégien s'était tu pendant toute la séquence, et la fit rejouer deux fois.

_Quel âge doit avoir ton humain normalement ?

_Dans les trente cycles environ.

Le gaz prit une coloration plus chaude, signe que le célégien riait.

_Et ben il est pas mal fracassé ton gars. Pourquoi tu le cherches ?

_C'est pas tes ojomians. Par contre, si tu me donnes de quoi travailler, y aura quelques crédits pour toi.

_Refais moi passer encore le message.

Loxo s’exécuta. Yoq croisa les tentacules.

_La qualité est moyenne, on arrive pas à bien voir, mais je dirais du saurin.

_Du saurin ?

_Une merde dérivé d'un médoc d'Adascorp. A la base ça devait servir pour traiter les douleurs post opératoires chez les patients allergiques au bacta. Bon ben avec deux trois modifs, ça s'injecte très bien en sous cutané, et ça permet de planer aussi bien que si t'avais ton skyhook personnel.

_Où est-ce qu'on peut en trouver sur Duro ?

Le rire de Yoq éclata sous le crâne du pachyderme tandis que le gaz de la capsule devenait franchement rouge.

_Pas chez moi mon ami. Et pas chez les collègues non plus. C'est trop dangereux comme produit. Autant on nous laisse à peu près tranquilles quand on deale de l'épice, autant du saurin, non, ça se vend beaucoup trop cher. C'est un coup à avoir le vigo de son système ET le chef de clan hutt ensemble sur le dos pour concurrence déloyale.

_Y a bien quelqu'un qui doit en avoir ici, quand même ? demanda le privé perdant patience.

_J'ai pas dit que personne en avait, rappela le célégien, j'ai dit que moi et mes collègues on en avait pas, nuance.

_Alors qui ?

Pour toute réponse, Yoq tendit un tentacule. Loxo grommela avant de lui remettre une belle poignée de crédits. Il fallait vraiment qu'il prenne l'habitude de demander une avance sur contrat à ses clients.

_Que je sache, sur tous les vaisseaux-villes, répondit le vendeur, y a qu'un seul gars assez fou pour tremper là dedans. Et tu le connais, ça devrait simplifier vos négociations.

Le poissonnier lâcha un nom. Le détective, lui, accusa le coup, se passa les mains sur le visage, et lâcha un juron fleuri. Il sortit du véhicule en grommelant, marchant à moitié sur un poisson tombé au sol, et salissant le bas de son pantalon. Génial. Et en plus il aurait des frais de teinturier.

Yoq Lieb se borna à compter et recompter les crédits que son ami lui avait laissé.
Plus facile à dire qu'à faire quand toute sa vision était obstruée par l'écarlate de son gaz. Mais l'avantage d'être poissonnier et dealer, c'est qu'on avait l'habitude de le faire, même dans les moments peu évidents.
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