Je sais pas si c'est toujours d'actu, mais j'ai une nouvelle à proposer. Un autre point de vue, où il n'y a aucun héroïsme, ni d'adhésion à la cause. Mais que sans ces petits arrangements, il serait difficile pour une rebellion de s'armer.
Je propose donc une anti-héroïne, très grise, qui pourrait tout aussi bien être une belle raclure impériale tout comme l'un des meilleurs atouts de la rebellion
Univers canonTout a un prix.
Meghara Rioga-Togara soupira et ordonna au droïd-nounou d'emporter les enfants dans leur chambre. Pourquoi fallait-il que sa progéniture fît autant de bruit et de mouvement. Elle sentit la migraine venir. Une heure avec eux, elle estima avoir rempli ses obligations de mère. Elle avait hâte qu'ils grandissent et deviennent autre chose que de petits singes hurleurs. Elle les reverrait un peu avant le dîner, juste avant de partir pour le palais où Pitina Voor donnait une fête à but de propagande. Elle s'était rapidement liée d'affection avec le ministre de l'information, toutes les deux avaient le même âge et beaucoup d'ambition. Meghara savait que son amie avait fait exécuter son mari pour prendre sa place, ce qui était une bonne chose. Elle se rappelait du conseiller Voor comme un gros parasite paresseux et stupide. Pitina, elle, avait une vraie vision pour l'Empire : rendre réelles toutes les promesses de la Coalition pour le Progrès : l'ordre, la sécurité et la prospérité.
Concernant cette dernière, il y avait encore du travail. Son monde natal ployait encore sous les contre-coups de la guerre des clones.
Vae victis. Meghara était d'accord sur le principe. Même s'il n'avait pas quitté officiellement la République, son monde était resté trop proche des Séparatistes et particulièrement du Clan Bancaire avec qui il était affilié. Il était donc normal d'avoir à payer les réparations de guerre, mais l'Empire avait frappé un peu trop fort.
Saisir les fonds des banques qui avaient financé l'effort de guerre séparatiste ? C'était justifié.
Retirer le statut de paradis fiscal ? À la place de Palpatine, elle aurait fait pareil.
Nationaliser certaines banques, imposer des mesures fiscales et économiques drastiques les empêchant de se relever, là, c'était odieux autant que mesquin.
Pitina lui avait promit de faire lever certaines sanctions, mais ça tardait à venir. L'Empire était particulièrement efficace lorsqu'il s'agissait de prendre, mais beaucoup moins lorsqu'il devait rendre.
Elle alluma son terminal. Aucun message de son mari.
Rien d'étonnant, l'amiral Togara avait d'autres préoccupations que d'écrire à sa femme. Leur union était purement intéressée. L'homme avait besoin d'argent pour financer sa carrière, et elle, d'un prête-nom impérial bon teint. Le couple avait eu ses bons moments, conçu deux enfants sur qui reposaient toutes leurs ambitions avant de convenir de faire chacun leur vie de leur côté. Ils restaient cependant loyaux l'un à l'autre, plus amis, associés qu'amants.
Elle savait que son mari tapait dans son équipage pour ses plaisirs, elle faisait de même, en restant très discrète. Les apparences étaient primordiales dans l'Empire et le couple Togara était une très bonne entreprise d'investissement. Elle savait qu'elle pouvait compter sur son mari, comme lui pouvait compter sur elle. Régulièrement, des envieux mal renseignés tentaient d'exploiter leurs aventures extra-conjugales contre eux, ce qui était systématiquement un échec. D'ailleurs l'amiral lui avait envoyé en riant l'holo d'exécution de sa dernière maîtresse.
Meghara était montée à la capitale un peu avant la fin de la guerre des clones, et contrairement à son sénateur de père, elle avait senti le vent tourner et avait donc pris sa carte du COMPORN. Après la chute de la CSI, le clan Rioga avait besoin de se refaire une virginité, de faire oublier leur ancienne allégeance. Elle était donc entrée à la Cour avec une idée en tête : trouver une caution morale dans cet ordre nouveau. C'était facile, elle était d'une vieille famille du Noyau, riche, jolie à regarder et particulièrement manipulatrice. Elle avait même pensé à taper le plus haut possible. Après tout, le nouvel empereur était célibataire, sans descendance, âgé, la proie idéale pour une princesse qui n'avait pas froid aux yeux. Elle se rappelait très bien que le Chancelier, malgré son âge, était un homme charmant, posé, courtois, pas trop désagréable à regarder, et plutôt intelligent et ambitieux, les qualités qu'elle appréciait le plus chez un homme.
Mais non. Elle oublia très vite cette idée lorsqu'elle se rendit compte que l'attentat Jedi et ses conséquences n'étaient pas de la propagande. Elle ne comprenait d'ailleurs pas pourquoi il ne se faisait pas retaper dans une clinique de rajeunissement. Peut-être souhaitait-il jouer jusqu'au bout son rôle de victime des Jedi.
En plus de son effroyable laideur, il s'en dégageait une aura malsaine, terrifiante. Ses yeux jaunes, luisant sous la capuche, semblaient la transpercer jusqu'au fond de son âme. Et si Pitina se vantait de ses propres talents de déduction psychologique et affirmait qu'elle était meilleure que lui, elle préférait éviter que l'homme le plus puissant de la galaxie puisse lire en elle. Parce qu'il y avait plein de choses que Meghara Rioga-Togara souhaitait cacher à l'Empire. Comme son envie revancharde de lui faire payer les sanctions sur son monde. L'amirale avait profité du nom de son mari pour monter l'une des plus grosses banques d'investissement du Noyau. Et ce qui rapportait le plus était ce que l'Empire ne voulait pas voir financer. Il y avait la vitrine officielle et toutes les opérations bancaires secrètes : investissements et prêts à la pègre, extorsions, blanchiment d'argent… Meghara profitait de ses contacts à la Cour pour se précipiter sur tous les placements les plus juteux et fournir des services bancaires à qui en avait le plus besoin.
L'information, c'est le pouvoir, professait Pitina.
l y avait pas que le visage qui avait été brûlé par les Jedi, le cerveau avait pris cher derrière, vu les choix politiques débiles faits par l'Empire. Aussi, elle devait être une des rares courtisanes à éviter le maître de la galaxie comme la peste. Même elle se doutait qu'il avait autre chose à faire que de se préoccuper des pensées de la femme d'un de ses amiraux, elle préférait ne pas prendre le risque qu'il lise dans son esprit qu'elle le considérait comme le roi des cons.
Con, mais dangereux. Elle avait très vite compris qu'il fallait pas l'attaquer de face. Ni par derrière. Ne pas l'attaquer du tout. Baisser la tête et ne pas l'approcher. La paranoïa était la qualité principale pour survivre à la Cour.
Elle se connecta rapidement sur la Bourse de Coruscant pour surveiller ses placements. Certes, elle avait des employés en permanence d'astreinte pour intervenir, mais il valait mieux compter sur personne à part soi-même. Tout allait bien. Le cours des métaux était encore à la hausse. Elle avait monté une combine avec le ministre pour s'emparer de mines de rhodium dans la Bordure Médiane.
– Passe me voir avant la fête. Je n'arrive pas à choisir ma robe.
Elle sourit. C'était un code entre elles pour signifier que la ministre avait une nouvelle opportunité lucrative et besoin d'un écran. La Coalition pour le Progrès manquait de fonds et Pitina se plaignait en privé que les priorités de l'Empereur fussent d'accorder tout et n'importe quoi à l'Initiative Tarkin au lieu de se consacrer à rendre ses promesses réelles. L'Empire se militarisait à outrance. Ce qui était complètement stupide dans une galaxie pacifiée. Mais ça arrangeait des gens comme elle, qui avaient besoin d'argent et d'influence. Plus l'Empire dépensait, plus Meghara s'enrichissait et en faisait profiter ses amis. C'était une toile qu'elle tissait à l'échelle galactique, faite de corruption et d'alliance, comme de coups bas.
D'ailleurs, il était temps de penser à sa tenue, quelque chose d'à la fois discret et tapageur. Ces fêtes, qui rassemblaient tout le gratin impérial, était l'occasion de se faire des clients. C'était tout un équilibre entre exhiber sa fortune suffisamment pour rassurer ses cibles et pas trop pour ne pas susciter la jalousie dans ce nid de vipères. Les assassinats étaient monnaie courante à la Cour, et le nec plus ultra était de faire éliminer la concurrence par un tiers, en le faisant accuser de trahison ou de déloyauté. Meghara était plutôt douée en montages financiers opaques, utilisant de nombreuses sociétés écrans dans le Secteur Corpo, faisant transiter ses fonds dans des zones franches de l'espace Hutt ou de la Bordure Extérieure hors contrôle de l'Empire, mais elle n'était pas protégée d'une descente du BSI.
Elle se leva. Il était temps de passer au Sénat. Elle avait rendez-vous avec son père qui allait certainement mendier ses services pour un de ses amis.
Malgré toute l'affection qu'elle avait pour son géniteur, elle considérait le sénateur Rioga comme un incompétent crasse, responsable de tous les problèmes de leur monde. Il était nul en politique, comme en affaires. Il ne s'était pas caché de ses préférences pacifistes durant la guerre, affichant sans vergogne ses liens avec les Séparatistes. Il n'avait même pas caché ses financements à l'effort de guerre de la CSI et avait trouvé rien de mieux que d'aller provoquer Palpatine quelques jours avant l'ordre 66. Depuis, il se tenait à peu près tranquille, avait remisé, sur ses conseils, ses opinions dissidentes, et votait avec les lèches-bottes de l'Empire. Après tout, c'était un mauvais moment à passer. Il fallait faire profil bas, arrêter de troublionner avec la bande à Mothma et patienter.
La prospérité de leur clan et de leur planète valait bien un peu de salive sur les pompes impériales.
L'Empereur était âgé, son règne n'était qu'une question d'années, voire de mois vu son état de santé. Il avait d'ailleurs rien prévu pour sa succession dans la Constitution. Peut-être se croyait-il immortel, ou peut-être avait-il décidé de tenir sa promesse, celle de rendre ses pouvoirs à ceux qui les lui avaient conférés, après sa mort. Rendre au Sénat le soin de choisir le nouveau souverain. Après tout, Palpatine avait toujours eu cette réputation de tenir parole… avant.
Et il se pourrait que son règne fût encore plus court.
Meghara avait entendu parler d'attentats. Les dents des courtisans rayaient les dalles du palais, c'était d'ailleurs le plus gros de son travail d'influence. Bien se placer auprès de ceux qui auraient le plus de chance de remporter la course au trône, sans se créer d'ennemis. Un jeu d'équilibriste particulièrement périlleux.
Si elle préférait se tenir très loin du maître de la galaxie, il y aurait pourtant un conseil qu'elle aurait aimé lui glisser à l'oreille : terminer la Purge.
Meghara avait applaudi l'ordre 66 des deux mains, elle aurait presque pu s'en faire greffer une seconde paire pour encore mieux acclamer la décision. Elle n'avait jamais pu saquer ces moines arrogants qui se mêlaient de politique et se pensaient au-dessus des lois à cause de leurs pouvoirs magiques. Des saloperies, responsables de la guerre, qui semaient le chaos partout où ils passaient. Qui avait créé et dirigé la CSI ? Un Jedi. Qui avait commandé une armée avant même la moindre rumeur de guerre ? Un Jedi. Qui avait pris le contrôle de cette même armée : des généraux Jedi. Au final, tout s'imbriquait pour parvenir à un coup d’État qui visait le Chancelier et certainement tout le Sénat. Elle comprenait pas pourquoi les amis de son père continuaient à les regretter avec toutes ces preuves que même un enfant pouvait comprendre.
Quant à cette idée de créer une armée de Jedi impériaux, c'était d'une stupidité crasse. Certes, il fallait combattre le mal par le mal, mais Vador et les inquisiteurs étaient incontrôlables. Brutaux, saccageurs, allant jusqu'à faire exploser des bâtiments civils juste pour courir après quelqu'un. Ils se croyaient, à l'instar de leurs prédécesseurs, tout permis. Elle gardait ce genre de pensées pour elle, mais elle savait que c'était largement partagé. Et que bientôt, une fois qu'il n'y aurait plus l'excuse de survivants à traquer, il faudrait rapidement éliminer les chasseurs avant qu'ils ne se retournent contre leur maître.
Bingo.Elle reconnut facilement l'invité de son père. Bail Organa. Un traître de la pire espèce. Lui et feue Amidala avaient grenouillé pour promouvoir Palpatine à la fonction suprême, pour finalement le renier après que leur marionnette décidât d'en faire qu'à sa tête. Le sénateur d'Alderaan jouait double-jeu, comme son père. Profil bas d'un côté, allant jusqu'à laisser l'Empire exécuter ses alliés, et complots en douce de l'autre.
– Papa, je vais être directe. Je ne travaille pas avec des traîtres. Et je te conseille d'en faire autant, nous avons déjà payé le prix de ton opposition.
Bail Organa afficha son sang-froid en n’altérant pas son sourire face à l'attaque.
– Ma puce, je sais très bien ce que tu n'hésites pas à financer et que ce qui est hors-la-loi t'indiffère si ça rapporte. C'est important et seule ta banque en a les moyens. Tu es notre seul espoir.
– Papa, Mothma et Organa ont planté les 2000. Je veux pas prendre le risque que ton ami me dénonce pour sauver sa tête. C'est non, je ne financerai pas votre stupide rébellion. Comme je vous l'ai déjà dit, il suffit d'attendre. Palpatine ne durera pas éternellement.
– Meghara, coupa Organa, nous pouvons pas attendre. L'étau de l'Empire se resserre de plus en plus et nous avons toutes les raisons de croire qu'il prépare le pire.
– Un banquier ne croit pas. Je m'engage sur du concret, pas sur des croyances, sénateur Organa. Je vous tolère, parce que vous êtes un ami de mon père et que je vous connais depuis l'enfance, mais j'ai d'autres objectifs que de relancer une guerre.
– L'Empire prépare la guerre.
– Mes enfants appartiennent à l'Empire, tout ce que je construis est pour eux. Et vous comptez réduire en cendres tout ce que j'ai fait, tout ce que j'ai donné depuis des années ? J'ai travaillé dur, vous n'imaginez même pas à quel point j'ai dû me compromettre pour redorer notre nom. Et vous deux, vous comptez gâcher tous mes efforts ?
– Ton statut n'est qu'une illusion, Meghara. Tu peux tout perdre en quelques secondes. La vie de ton mari dépend d'un mouvement d'humeur de Vador ou des caprices d'un Moff. Et la tienne, il suffirait que ton amie Pitina trouve que tu n'es plus utile.
– Pitina sait que si je tombe, elle tombe avec moi.
– Meghara, écoute le Sénateur Organa. Les conditions qu'il te propose sont plus que raisonnables.
Elle consulta le datapad. Une demande de prêt à 6 % avec une part des actions. Organa était assez flou sur quel genre d'usine il comptait construire, mais elle n'avait aucun doute sur le fait que ce n'était pas du civil.
– Pourquoi moi ?
– Parce que personne n'est jamais arrivé à remonter tes flux, ma chérie. Et crois-moi, le BSI a déjà tenté.
Elle sentit un frisson glacial sur son échine.
– Comment ça, le BSI a déjà tenté ?
– Ils sont venus me poser des questions, ma puce, mais rassure-toi, ils ont rien de trouvé de convainquant.
– Tu m'as caché cette information ? Et tu veux que je prenne des risques ?
– Écoutez, Meghara, fit la voix posée d'Organa. Je comprends les doutes, surtout au vu de votre histoire. Ce que vous avez à savoir, c'est que l'Empire ne pardonne pas. Et que le temps est déjà trop court. Vous avez raison de vous méfier, mais je vais vous montrer que vous ne prenez pas de risques. Voici une demande de prêt à mon nom, un document que vous pouvez produire à l'Empire pour avoir ma tête. Vous pouvez vous en servir comme caution loyaliste si vous le désirez.
Elle saisit la datacarte. Tout semblait correct, pas de falsification.
– Je comprends pas. C'est un arrêt de mort que vous me remettez.
– Je fais un pari, fit Organa. Celui que vous n'aurez jamais l'envie de me dénoncer.
– C'est risqué, sénateur.
– Nous verrons. Je suis prêt à mettre ma tête à couper et vous voyez, ce sont pas des paroles en l'air.
– Très bien, je vous accorde votre prêt, mais à 7 % avec 15 % des parts. Il me faudra beaucoup d'intermédiaires pour semer les mouchards du BSI, tout a un prix.
– Je sais. Puis-je considérer que nous avons un accord ?
– Je n'engagerais ni la sécurité de mes enfants, ni la mienne et celle de mes proches pour une cause perdue d'avance, sénateur. Si je vous aide, c'est que j'ai des parts sur les chantiers navals de Kuat. Plus l'Empire devra s'armer, plus je serai riche.
– Alors aidez-vous à devenir plus riche.
Touché.– Vous aurez les fonds dans quelques semaines. Ne cherchez pas à comprendre d'où ils viennent et qui les verse. Tout ce que vous avez à constater, c'est le virement.
– Merci. Je ferai certainement à nouveau appel à vous.
Pauvre naïf.Elle était gagnante sur tous les points.
Elle n'avait aucun doute sur le fait que l'Empire allait les écraser comme des moucherons. Elle n'aimait pas l'idée de relancer une guerre civile, mais ce serait très bref. Paradoxalement, elle avait conscience de rendre un service à l'Empereur, en lui offrant sur un plateau le moyen de justifier ses délires militaristes. Mais elle prendrait pas le risque de lui réclamer des remerciements. Ce qui lui importait, c'était combien la course aux armements allait lui rapporter.
Elle savait déjà qui allait lui servir d'écran. Par le jeu des montages financiers, elle allait injecter l'argent sous un prétexte fumeux dans une filiale de l'un de ses concurrents, qui, ravi de l'aubaine, effectuerait le virement. Et serait donc la cible du BSI à sa place. Ça faisait partie des affaires qu'elle adorait monter… faire coup double ou coup triple si elle sacrifiait Organa à ses ambitions.
Elle était à ce moment-là incapable de deviner que son prêt allait un jour produire ce qui détruirait l'Etoile Noire et sonnerait le glas du régime. Et qu'elle ne dénoncerait jamais Organa.