Kunra poussa un cri de douleur lorsqu’il fut projeté dans les airs. Profitant de la diversion, Alkor se jeta sur l’humaine et dérober la vibrolame des mains. La combattante pivota et décocha un terrible coup de pied sur la poitrine du Twi'lek, qui perdit également son arme dans la mêlée. Parmi le public les cris redoublèrent d’intensité.
Je me fais vieux pour ce genre de chose. Elle est forte. Vraiment forte. Cependant, je gagnerais car la Force est mon alliée. Il n'y a pas d'émotion, il y a la paix…
Le vieux maître inspira longuement et se concentra sur son adversaire, qui leva les poings, prête à frapper. Le combat redoubla de violence. Les deux guerriers s’affrontaient à mains nues, parant et esquivant de nombreuses attaques. Alkor roula sur le côté et bondit à une vitesse fulgurante mais il fut contré. Cette fois il n’y avait plus de doute, seule une adepte de la Force pouvait avoir des réflexes aussi rapides. Dans ces conditions le combat pouvait durer une éternité. Il fallait donc y mettre un terme, et le plus rapidement possible.
Je vais devoir y aller au plus court. Je n’aime pas cette méthode mais c’est la seule qui permettrait de mettre fin à cet affrontement. C’est la seule solution. Je dois le faire pour Sarika.
Alkor ferma les yeux et se concentra. Les mouvements de l’humaine se firent plus lents, plus maladroits. Elle perdait plusieurs millièmes de secondes par rapport au Twi'lek. Un temps fuyant qui la mettait en position de faiblesse. Les secondes devinrent des minutes, les minutes des heures. Puis elle se retrouva étendue sur le sol, sans avoir connu l’origine du coup qui venait de lui être porté. Le combat était terminé, tandis que l’assemblée applaudissait et criait. Goorda haussa la voix pour se faire entendre de tous.
- Mon maître est très impressionné, traduisit le droïde de protocole. Vous avez battu son meilleur duelliste, Astrila Jorell, jusqu’alors invaincue. Vous êtes les invités de Goorda jusqu’à ce que vos amis soient retrouvés par ses bons soins.
- J’imagine qu’on n’a pas le choix, dit Kunra à voix basse, dont un filet de sang s’échappait de la bouche.
Les deux compagnons furent escortés en dehors de la salle de réception, montant un escalier particulièrement sombre et glissant. Ils atteignirent finalement les quartiers d’habitation, suivis de près par trois gardes.
- Vous êtes conscient qu’ils vont nous faire exécuter ? grimaça le Zabrak.
Alkor hocha la tête et nota que le corridor dans lequel ils s’étaient enfoncés était sans issue. Bien entendu, il avait un plan pour se sortir de cette situation.
- Terminus, siffla l’un des hommes de main de Goorda. C’est ici qu’on se quitte les gars.
L’ancien Jedi se tourna vers les mercenaires et déploya une brusque poussée de Force, tandis que de son autre main il réceptionnait les blaster. Par la suite tout s’enchaina très rapidement, l’un des gardes se prit un tir en plein visage, sa mâchoire fut réduite en bouillie et ses dents volèrent dans une gerbe de sang. Le suivant reçut une décharge en plein cœur, périssant sur le coup. Et le troisième reçut une vibrolame dans la poitrine.
- Je me disais bien que votre visage m’était familier, annonça Astrila en arrachant brutalement l’arme du corps sans vie. Je pensais que les Sith étaient venu pour moi… mais je me trompais.
Alkor fixa l’humaine ranger sa vibrolame dans son étui dorsal. Un hématome s’était formé sous sa joue gauche, l’une des nombreuses blessures émanant de leur affrontement.
- J’avais espéré en interroger un pour découvrir où étaient emprisonnés mes compagnons.
- Ne vous inquiétez pas pour ça. En tant que fugitifs on doit se serrer les coudes. Je vous mènerais à eux mais le chemin pour y parvenir ne vous enchantera guère.
Astrila tourna les talons avec un déhanchement ravageur et abattit violement un panneau d’évacuation des ordures. Une vive odeur de moisie imprégna l’étage.
- Génial, siffla Kunra. Pour un peu ça nous changerait de la décharge.
- Cette bâtisse n’est que la partie émergée de l’iceberg. Vos amis sont quelque part en dessous, dans les geôles de Goorda. Je connais ces souterrains comme ma poche, donc ne vous éloignez pas de moi. Il y a des rencontres à ne pas faire dans ces tunnels.
Kunra voulut protester mais Astrila lui adressa un coup de pied aux fesses et il tomba dans le conduit. Alkor se pencha à son tour et suivit son acolyte.
Le Twi'lek était allongé dans les eaux putrides jusqu’au cou. Il se redressa lentement en respirant par la bouche pour ne plus sentir l’odeur de pourriture. Impossible de distinguer quoique se soit dans ce tunnel obscur. Néanmoins, le chevalier pouvait sentir la présence de Kunra à proximité.
- Ce n’est pas le chemin que j’emprunte habituellement, souffla Astrila en atterrissant tout près. Ca risque d’être intéressant. Méfiez-vous des dianogas.
Elle alluma une lampe torche et éclaira la galerie. Les murs semblaient très anciens, recouverts d’une imposante couche de mousses noirâtres et de petits écoulements d’eau.
- Pas de sabre laser ?
- J’ai du m’en séparer provisoirement, expliqua Alkor en sondant les environs.
- Tant pis, on se débrouillera sans. Surtout ne vous éloignez pas de moi.
Astrila leva le bras et saisit sa vibrolame, puis elle guida ses partenaires dans les souterrains labyrinthiques.
- Comment vous êtes vous retrouvé au service de Goorda ? demanda Alkor en s’approchant de l’humaine.
- Le Conseil m’avait envoyé sur Eriadu pour infiltrer l’organisation de Goorda en tant que mercenaire, mais l’Ordre s’est effondré peu de temps après. Depuis je suis restée anonyme.
- Impressionnante performance que d’être parvenu à cacher vos liens avec la Force après tout ce temps. Et vous dites que mon visage vous est familier ?
- C’était à l’académie de Dantooine. Je n’étais encore que Padawan à l’époque, toutefois, je me souviens des conseils que vous aviez prodigué à moi et d’autres étudiants. Enfin, cette époque est loin derrière nous.
La jeune femme continua de progresser dans les eaux sales des égouts, empruntant un nouveau couloir après une intersection. Soudain, Alkor fut entrainé sous les flots. Quelque chose s’était accrochée à sa jambe et refusait de le lâcher. Après un laps de temps interminable il refit enfin surface, avalant une grande bouffée d’air.
- Un dianoga, glissa Astrila en agitant un morceau de tentacule du bout de sa vibrolame. Vous avez de la chance, c’était un petit.
- Un petit ? répéta Kunra en faisant les yeux ronds. Cette chose faisait déjà plus de deux mètres de longueur.
Astrila observa un instant le Zabrak. Elle n’éprouvait aucune confiance envers l’humanoïde. Ce qu’elle avait vu pendant son combat contre Alkor renforçait encore plus ses soupçons.
- Nous y sommes, dit-elle en s’accroupissant derrière un tas d’ordures.
Elle pointa l’index vers l’extrémité du tunnel. Un pont était suspendu plusieurs mètres au-dessus du niveau d’eau. Le passage menait à une porte verrouillée, sous la surveillance d’un garde armé.
- On va devoir s’occuper du garde, murmura Alkor.
- Pas nécessairement, poursuivit Astrila. Il y a un autre accès un peu plus en retrait. Gardez un œil sur la sentinelle. Kunra et moi allons partir en éclaireur.
Alkor hocha la tête, tout en dégainant son blaster en cas de besoin.
Kunra arpentait les galeries sombres situées sous la surface de Eriadu, progressant dans les eaux sales et grouillantes de créatures infernales. Sans oublier la Jedi qui lui collait aux fesses. En définitive, même si l’apprentie manquait, le compte y était. Il n’aurait qu’à quitter les souterrains et rejoindre la civilisation avec les deux Jedi. Sa mission serait alors accomplie et le seigneur Talhon le récompenserait de sa loyauté.
Si seulement je n’avais pas perdu connaissance pendant l’attaque. Le vieux et la gosse n’auraient pas atteint les nacelles d’évacuation. Tout serait fini depuis longtemps mais au lieu de ça je me retrouve dans cette merde. Et à présent je ne peux plus contacter la base d’opération.
Kunra stoppa sa progression, tendit l’oreille et nota que sa partenaire avait cessé de marcher depuis quelques temps. C’est alors qu’un bourdonnement s’éleva dans les airs. Il se tourna pour se rendre compte que Astrila avait tiré la lame de son fourreau.
- Nous sommes suffisamment loin, annonça-t-elle d’une voix déterminée. Vous avez été très malin. Duper un maître Jedi, il fallait oser. Cependant il y a des signes qui ne trompent pas. Par exemple, votre manière de combattre ou encore ce transmetteur Sith.
- Je ne comprends pas.
Astrila continua de fixer le Zabrak.
- Vous n’abuserez pas de moi, Kunra. Vos pensées, ou devrais-je dire vos doutes, vous trahissent.
- Très bien, vous m’avez démasqué, gloussa Kunra. J’imagine qu’il n’y a pas d’autres accès… Et à présent, qu’allez-vous faire ? m’exécuter ?
- Pas personnellement. Et puis, ça ne serait pas très Jedi.
Une masse gigantesque s’éleva au-dessus du traître. Ce dernier se retourna à temps pour pousser un terrible cri d’effroi avant que plusieurs dizaines de tentacules gigantesques ne l’entraînent sous les flots. C’en était fini de Kunra.
Alkor était toujours dissimulé derrière l’amas de déchets, les yeux rivés sur le garde en faction près de la porte. Il s’inquiétait de l’absence de Kunra et Astrila. Cela faisait un moment déjà qu’ils s’étaient absentés et aucun signe de leur part jusqu’à présent.
- Pourquoi avez-vous été aussi long ? demanda le Twi'lek en apercevant Astrila.
Elle faisait triste figure. Sa combinaison était déchirée à plusieurs endroits et recouverte de boue.
- Kunra n’est pas avec vous ?
- Il est mort, répondit-t-elle en secouant la tête. Un dianoga. Je suis désolé.
Le regard du chevalier porta de nouveau sur la sentinelle. Il déplorait la perte de son compagnon mais Sarika comptait également sur lui. Toute émotion superflue devait être écartée au risque de faire rater l’opération. L’heure n’était pas encore venue de pleurer les disparus.
- Allons-y, finit-il par dire en quittant l’abri. Nous avons perdu trop de temps.
Astrila s’exécuta à son tour et visa soigneusement le garde avec son blaster, qui était réglé sur la puissance maximale. Un seul tir suffit pour libérer le passage. Le garde s’écroula sur le pont en produisant un bruit sourd. Les deux chevaliers escaladèrent l’échelle et atteignirent la passerelle.
- Nous y voilà, souffla Astrila en débloquant le sas de sécurité.
Les panneaux coulissants s’écartèrent, leur libérant ainsi le passage.
Alkor et Astrila s’introduisirent précautionneusement dans les installations secrètes de Goorda, tâchant de ne pas attirer l’attention d’un garde ou d’un quelconque système de sécurité. Malgré un éclairage faible, un taux d’humidité élevé et cette éternelle odeur de moisissure il faisait toujours bon de progresser ici que dans les égouts. Astrila s’approcha d’une porte et en força le panneau d’ouverture.
- C’est le local de la sécurité.
Alkor se joignit à sa partenaire, qui s’était déjà chargé du garde. Il étudia rapidement la pièce et nota qu’elle n’était pas volumineuse. Un panneau de surveillance relié à plusieurs écrans d’ordinateurs et un compartiment de stockage.
- Je l’ai trouvée, dit Alkor après s’être penché sur les moniteurs.
- Dans le quartier de détention. Je ne vois que trois gardes.
C’est alors que d’étranges bruits émanèrent du compartiment.
Astrila actionna le système d’ouverture, tout en brandissant son blaster. Un droïde astromécanicien se précipita sur elle en émettant une sérénade de cliquetis.
- Très heureux de te revoir aussi, dit Alkor en s’approchant de T3-D3. Je vais récupérer les armes si ça ne te dérange pas.
Le droïde secoua la tête pour faire comprendre qu’il n’y avait aucun problème. Il rendit les sabres laser avec l’aide de son bras mécanique.
- Pourrait-il désactiver le système d’alerte ? demanda Astrila en désignant le robot.
T3-D3 acquiesça en produisant un léger balancement, puis il se précipita vers la console alors que ces complices organiques s’échangeaient quelques mots.
- Prenez ce sabre, glissa Alkor. Il vous sera très utile.
- Entendu. Il n’en faudra pas plus pour convaincre les geôliers.
Les deux chevaliers attendirent leur compagnon mécanique, puis ils quittèrent la salle de maintenance pour prendre la direction de la zone carcérale.
Les gardes présents dans le quartier de haute sécurité furent maîtrisés avec facilité. L’affrontement se termina en deux temps trois mouvements de sabre laser. Alkor se dirigea vers la cellule de sa protégée et la libéra de ses chaînes. Apparemment, elle avait été droguée. Il l’a souleva avec précaution et la plaça dans ses bras.
- Un petit coup de main ne serait pas de refus, s’exclama un autre captif.
Le vieux maître plissa les yeux et reconnu le Snivvien qui l’avait conduit jusqu’au repaire de Goorda.
- Comment vous êtes vous retrouvé ici ?
- Les Hutt n’apprécient pas de se faire escroquer. Je reconnais ma faute mais vous n’allez quand même pas me laisser moisir dans ce trou à rats, plaisants Jedi ? poursuivit le Snivvien en faisait les yeux doux.
Astrila délivra finalement l’extraterrestre, qui se jeta à ses pieds pour la remercier.
- Sans doute avez-vous un plan de sortie ? poursuivit Alkor.
La jeune femme fit écarter le Snivvien, poussant un grognement d’irritation. Elle espérait intérieurement ne pas avoir à prendre d’autres créatures durant leur fuite.
- On fait le trajet inverse, glissa Astrila. Nous continuons dans les égouts afin de rejoindre le spatioport de Phelar. Puis nous empruntons une navette. Il y a bien ce vaisseau cargo qu’a récupéré Goorda il y a quelques jours, l’Ebon Hawk. Certaines sections sont encore verrouillées mais le vaisseau vole, c’est tout ce qu’on lui demande.
Alkor approuvait ce plan. Il était temps de quitter cette planète.
Le groupe avait tout juste dépassé le sas d’accès du quartier de détention qu’une voix grave s’éleva dans le couloir. Astrila fit volte-face et aperçut Goorda accompagné de plusieurs mercenaires armés jusqu’aux dents. Visiblement, le Hutt avait quitté son chariot antigrav pour assister au spectacle.
- Jorell, tu paieras cher pour ta trahison. Les tourments de tes amis ne seront rien comparés à ce que je te ferais subir.
- Et moi qui pensais que de vous avoir côtoyé pendant toutes ces années était déjà la pire des tortures, poursuivit cette dernière.
Une créature aux dimensions gigantesques se fraya un chemin parmi les hommes de main du Hutt. Elle avait une tête minuscule reposant sur un cou musclé, ainsi que deux longs bras qui touchaient presque le sol, chaque main était pourvue de griffes acérées.
- J’n’ai jamais vu plus laid qu’aujourd’hui, glissa le Snivvien en observant le Savrip Mantellien.
- Mon garde du corps personnel va se faire un plaisir d’en finir avec vous.
Astrila actionna discrètement une grenade à fragmentation et la balança dans la direction des mercenaires. Intrigué, le Savrip Mantellien se tourna alors vers son maître en agitant l’explosif récupéré quelques secondes plus tôt. Goorda manqua de perdre son équilibre et poussa un cri déchirant peu avant que la déflagration ne le souffle. Puis ce fut le noir total.