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An 20, Coruscant
 
Joen Belis entendit du bruit et immédiatement jaillit hors de sa cachette, conscient que, les choses s’étant tassées, il ne servait plus à rien de rester caché dans le couloir. Il déboula dans la salle à manger (pour la première fois, contrairement à ses collègues) et avisa les otages, visiblement affolés. Il eut la gorge serrée et voyant Tavel, dit Terminator, allongé sur le dos, avec deux impacts de blaster sur la poitrine et le ventre. Il n’eut pas le temps de s’en soucier davantage, les otages criant que l’ambassadeur avait tiré puis s’était échappé.
Sans perdre une seconde, Belis s’élança dans la direction que lui indiquaient les otages, après leur avoir assuré que des renforts viendraient bientôt les chercher. Il courut dans la pièce suivante (où gisait encore l’homme à la grenade, abattu par Smoo Delik) et continua son chemin, entendant l’ambassadeur qui s’enfuyait désespérément. Soudain, une forme se plaça devant lui et Joen percuta violemment un terroriste qui s’était interposé. Apparemment le ménage n’avait pas été fait parfaitement… En tombant, Belis lâcha son fusil blaster, qui glissa sur le marbre de luxe et alla cogner contre le mur opposé.
Vif comme l’éclair, Joen Belis bondit sur ses pieds et, d’un geste fluide, dégaina son petit blaster de rechange, dans son dos. Par réflexe, il braqua le canon de l’arme sur la forme la plus proche, à savoir la tête du terroriste. Il allait faire feu quand il se rendit compte que l’autre faisait le même geste : tous deux se tenaient donc debout, face à face, leurs armes braquées sur la tempe de l’autre. Un seul faisait un geste et c’était fini…
Belis vit du coin de l’œil l’ambassadeur qui revenait, visiblement satisfait que son plan ait marché : il avait attiré le commando dans les griffes d’un de ses camarades. Les deux impériaux entouraient donc le républicain, qui finit par lâcher son arme devant la constatation de son infériorité numérique.
Tout du moins, c’était ce qu’il voulait faire croire. L’ambassadeur approcha encore, ramassa le blaster de Joen et le braqua à son tour sur la tête du commando. Il ricana :
– Merci d’être venu me chercher, mais à présent je me passe de vous…
Il allait faire feu, quand soudain la détonation retentit, bien plus puissante. Une tête explosa sous le choc, mais pas celle de Joen : la tête de l’ambassadeur avait été vaporisée en un instant, éclaboussant toute la pièce. Le coup prit par surprise le terroriste, mais pas Joen : il savait pertinemment que Smoo Delik, depuis l’immeuble d’en face, ne tarderait pas à réagir, et ne laisserait jamais procéder à une exécution sommaire sur un de ses camarades (et ami). Prêt à l’action depuis un moment, Joen se baissa pour éviter le tir du terroriste qui reprenait ses esprits, puis il se jeta en avant et renversa son adversaire. Il se retrouva à califourchon sur le ventre de son adversaire, et lui décocha un direct du droit en pleine figure. Son frère Turan Belis, décédé l’année précédente en défendant un convoi républicain (le même que celui où s’était aussi trouvé son supérieur Golpi Rilim, en mission secrète), lui avait appris comment calmer efficacement une personne récalcitrante… Le terroriste gémit quand son nez se brisa, et Joen enchaîna sur un second coup tout aussi violent. Il sauta sur ses pieds, tandis que l’impérial sonné gisait toujours à terre. Belis récupéra son blaster et mit en joue le vaincu.
S’autorisant son premier soupir de soulagement, il parla dans son comlink :
– Merci du coup de main, Delik.
Puis il regarda un court instant la dépouille de l‘ambassadeur.
– Mais je crois que l’ambassadeur ne sera jamais en état d’expliquer sa trahison. Par contre, son pote ici présent se fera un plaisir de répondre aux questions de Drayson…
Derrière lui, dans la pièce principale, des soldats débarquaient enfin pour prendre en charge les otages. Trois républicains arrivèrent, constatèrent le massacre et saluèrent Belis d’un signe de tête, auquel il répondit avec gratitude : sa vigilance pouvait enfin se relâcher après plusieurs heures de stress…
Les renforts s’emparèrent sans ménagement du prisonnier, qui allait passer un sale quart d’heure auprès des Services de Renseignements de la Nouvelle République. Joen retourna dans la salle à manger, où étaient aussi revenus Naryl Brey’lya et Eil Sywr, qui avaient certainement nettoyé d’autres zones de l’étage pendant que Belis faisait la chasse à l’ambassadeur. Il fit un signe de tête en direction de ses camarades.
– Tout va bien ?
– Ca peut aller ouais, fit le bothan, rapidement imité par le shistavanen.
– Et moi, personne ne veut savoir comment je vais ?
Les trois commandos tournèrent leurs regards éberlués vers l’homme allongé sur une civière. Bien que sérieusement atteint, le hortek Tavel paraissait tenir largement le coup, alors que des médecins commençaient à le soigner et que les brancardiers l’emmenaient vers l’hôpital le plus proche.
– Terminator ! s’exclama Belis, réalisant soudain combien le surnom du solide hortek lui allait bien.
– Hé ho, vous ne croyez quand même pas que j’allais vous lâcher à cause d’un misérable traître de larve d’indépendantiste impérial ! tonna Tavel en s’agitant sur sa civière.
– Calmez-vous je vous prie, demanda doucement un des médecins. Vous souffrez encore de…
Les commandos n’entendirent pas la suite, les brancardiers ayant atteint l’ascenseur avec leur patient encore excité après le combat. Rassuré, Joen Belis empoigna son comlink.
– Contrôle, ici Belis. Comment vont les autres ?
Il ne reçut aucune réponse.

L’amiral Drayson avait en effet peu de temps pour répondre à l’appel de son subordonné. Le terroriste fou tirait comme un enragé, faisant sauter tout le matériel militaire déployé, et forçant les officiers à rester cachés pour éviter de subir le même sort que leur collègue abattu.
Criant pour dominer le vacarme, Drayson s’adressa à ses voisins.
– Couvrez-moi !
Les autres ne se firent pas prier. Tous militaires de carrière, ils se levèrent et lâchèrent quelques salves sur leur ennemi, avant de se hâter de s’abriter à nouveau. Pendant ce temps, Hiram Drayson s’était déplacé vers la droite, dans un angle que le terroriste ne pensait pas à couvrir. De toute façon, dans quelques secondes, des troupes interviendraient pour le mettre en pièce. Mais quelques secondes pourraient suffire à abattre d’autres officiers ou civils.
Alors que ses collègues se levaient à nouveau pour faire feu, Drayson, malgré son âge, jaillit de son abri et se précipita en direction de son adversaire. Ce dernier était toujours occupé à mitrailler le poste de commande, et vit Drayson arriver au dernier moment. Il commença à se tourner vers sa nouvelle cible, mais l’amiral des services secrets républicains fut plus rapide.
Braquant son arme de service et continuant à courir, il fit feu deux fois. La première balle toucha le terroriste à la ceinture, l’autre au cou. Puis Drayson se laisse tomber à terre pour éviter une rafale post-mortem, et quand il leva la tête il vit ses collègues qui tiraient à nouveau, déchiquetant l’impérial vaincu.
Quelques instants plus tard, le silence revint à l’étage 888, au pied de la tour Valorum. Drayson et les autres se relevèrent lentement, même s’il ne faisait aucun doute que la menace était écartée. Néanmoins, au autre kamikaze pourrait faire son apparition, et des soldats se postèrent aux sorties de l’immeuble pour une interception éventuelle.
Encore tremblant (décidément il avait passé l’âge d’être sur le terrain), Drayson retourna vers ce qu’il restait du poste de contrôle des opérations. La plupart des appareils avaient été détruits, et il constata que les écrans de seuls trois des membres de l’équipe affichaient encore ce qu’ils voyaient.
Celui du tireur Smoo Delik montrait son viseur et la salle à manger désormais investie par les renforts, celui de Joen Belis le montrait papotant avec ses camarades après les combats, et celui de Graltek montrait le ciel mais… la caméra bougeait. Le verpine avait certainement eu le temps de quitter sa position avant de se faire bombarder, et Drayson supposait qu’il avait dû sauter en contrebas et s’était blessé. Ne perdant pas une seconde, il envoya des secours pour porter assistance à Graltek.
Les cinq autres écrans avaient été mis hors service par les tirs du kamikaze, et il était impossible de savoir ce que voyaient les autres membres de l’équipe. Drayson présumait que la situation était sous contrôle, mais c’était encore loin d’être le cas.

En effet, quatre terroristes étaient encore en fuite et un vaisseau les protégeait, à l’insu des forces de police. Quand la navette d’Ace Azzameen surgit, Golpi Rilim sut qu’il pouvait agir : le vaisseau de couverture serait occupé par Ace, lui pouvait donc prendre en chasse les quatre fuyards. Il quitta la cage d’escalier et courut à toute vitesse pour tenter de récupérer son retard sur ses cibles.
Ace Azzameen, de son côté, inondait de tirs de lasers bien sentis le vaisseau de soutien impérial, apparemment un modèle avancé du vieux T-16 Skyhopper, mais en plus gros avec une puissance de feu bien plus importante. L’impérial vira pour esquiver, puis tira à son tour, délaissant Golpi Rilim. Les tirs fusèrent entre les deux vaisseaux, et Ace partit en chandelle vers le haut pour éviter tout en s’approchant. Azzameen était un vétéran ayant participé à la destruction de l’Etoile de la Mort lors de la Bataille d’Endor, et n’était pas le genre de type à provoquer en duel aérien.
Même si aucun des deux vaisseaux n’était conçu pour le combat, celui-ci fut tout de même acharné. Une rafale de l’impérial manqua Ace mais alla décimer la façade d’une tour derrière. Ace fonça, fit une embardée au dernier moment et ajusta sa visée. Deux lasers allèrent percuter le vaisseau terroriste, qui fut ébranlé mais résista. Ace fut atteint à son tour et dut lutter pour reprendre les commandes. Avec un doigté exceptionnel, il poussa les gaz et se retrouva juste en dessous de son adversaire. Tirant sur le manche, il mena le nez de son appareil vers le haut, avec une vue imprenable sur la coque inférieure de l’impérial. Avec un cri de défi, Ace Azzameen écrasa la commande de tir et lacéra l’appareil ennemi, l’envoyant voltiger dans les airs avant qu’il ne s’écrase sur le toit dans une explosion impressionnante.

Pendant ce temps, Golpi Rilim courait à perdre haleine, parvenant à peine à garder les quatre fuyards dans son champ de vision. Ces derniers arrivaient au bout du toit mais, comme souvent sur Coruscant, une passerelle permettait de rejoindre le toit de la tour suivante (pour peu qu’elle soit proche).
A la plus grande surprise de Golpi, seul un des trois terroristes s’engagea sur la passerelle, les trois autres restants en arrière et épaulant leurs armes. Golpi se coucha pour éviter d’être touché, et tira à son tour. Sa précision fut exemplaire, et un impérial fut touché, bascula en arrière et tomba dans le vide, pour une chute de plusieurs centaines de mètres.
Mais il en restait deux, et Golpi aurait toutes les peines du monde à les avoir : ils étaient en position, c’était lui qui devait bouger pour s’approcher et ce désavantage serait fatal. Avec amertume, Golpi songea que c’était probablement le leader qui était ainsi couvert par ses hommes, et que ce leader était en train de lui glisser entre les doigts. Le temps que les forces de police envahissent le quartier, le chef aurait trois fois le temps de se cacher pour leur échapper…
Puis soudain un sifflement, un vrombissement léger se fit entendre au-dessus de Golpi. Levant la tête, il vit la navette de son équipe, pilotée par Ace Azzameen, qui flottait doucement au-dessus de lui. Les filins de déploiement pendaient encore, et Golpi comprit où Ace voulait en venir : il bondit sur ses pieds et agrippa fermement une des cordes.
Juste après, Ace repartait, et Golpi devait se tenir durement pour ne pas tomber. Ils passèrent au-dessus des deux tireurs qui, surpris, firent feu sans parvenir à atteindre la cible mouvante que représentait le commando au bout de son fil. Toujours suspendu dangereusement, Golpi Rilim vit que le vaisseau rattrapait peu à peu le leader qui courait sur le toit du bâtiment suivant.
L’impérial n’entendit pas arriver le vaisseau furtif, et Azzameen fit exactement ce que son supérieur attendait de lui : il descendit, de plus en plus proche du terroriste et à à peine un mètre cinquante du sol. Golpi ne perdit pas de temps, et lâcha prise.
La chute fut plutôt douloureuse, mais Golpi avait l’habitude et amortit en faisant un roulé-boulé qui l’envoya directement dans les jambes de sa cible. Tous deux se retrouvèrent étalés par terre, puis se relevèrent d’un bond, avant de se rendre compte qu’ils avaient chacun perdu leurs armes respectives…

Conscient que la partie n’était pas finie, Ace Azzameen fit demi-tour et repartit en arrière, pour retrouver les deux terroristes qui empruntaient à leur tour la passerelle, n’ayant plus personne à arrêter. Les deux cibles en mouvement étaient de petite taille et par conséquent difficiles à atteindre pour les canons laser d’un vaisseau.
Cela n’empêcha pas Ace de faire feu, arrosant le toit de tirs mortels qui s’écrasèrent tout autour des terroristes. Mais il ne fut pas assez rapide : les deux types atteignirent l’accès à des escaliers, qui les menèrent vers l’intérieur d’une tour. Azzameen plongea alors pour arriver près de la façade de la tour et là… la Force lui sourit.
Les fuyards s’étaient arrêtés au dernier étage, préférant ne pas descendre plus bas, et couraient à présent le long des fenêtres de la tour pour accéder à d’autres escaliers, avec pour stratégie évidente de semer leurs éventuels poursuivants. Mais là où ils étaient perdants, c’était que Ace les surveillait toujours, et qu’ils étaient à un étage encore en travaux… Des échafaudages et des murs sans couleurs le démontraient, et amenèrent un sourire sur les lèvres du pilote.
Il arrêta son appareil au niveau de l’étage en question et lança son appareil dans une manœuvre délicate (enfin pas pour lui) de déplacement latéral. Il n’y avait vraisemblablement aucun civil dans cet étage, donc aucun risque pour Ace… Se déplaçant sur le côté au même niveau que les terroristes, Azzameen déclencha ses canons laser.
Les terroristes se rendirent compte à ce moment qu’ils avaient perdu la partie. Les lasers déchiquetèrent tous les échafaudages autour d’eux et créèrent une situation de panique chez les deux humains. Peu après, les lasers les atteignirent et ils furent taillés en pièce par le canon gros calibre du vaisseau.
Fier de sa victoire, Ace amorça sa remontée pour voir s’il avait encore du boulot, laissant derrière lui deux cadavres, un étage dévasté et des travaux à reprendre à zéro pour les ouvriers de la tour.

A peine se furent-ils levés que le chef terroriste se rua vers Golpi et lui envoya son poing dans la figure, pour enchaîner ensuite sur un coup du tibia en plein ventre. Golpi tomba à genoux, puis leva ses deux bras pour parer les poings de son adversaire. Il frappa alors à son tour, en plein dans les côtes de l’impérial qui recula sous la force de l’impact.
Mais le terroriste avait fait jaillir une vibro-lame de sa manche et entailla le bras de Golpi. Le commando poussa un cri, et sortit sa propre vibro-lame, accrochée à sa jambe comme tous les membres de son équipe. Il évita un coup en inclinant la tête sur le côté, puis se fendit pour attaquer. L’autre se décala sur le côté et n’eut que son uniforme de tranché. Il riposta par une série de petites attaques, que Golpi esquiva de son mieux, concentré sur la lame ennemie.
Les deux combattants s’écartèrent un court instant, aucun ne pensant à aller chercher son fusil, et Golpi oubliant le blaster accroché dans son dos. Tous deux comptaient en finir loyalement, en duel. Surtout quand ils comprirent.

Ce fut le terroriste le premier à comprendre. Golpi le vit ouvrir de grands yeux ronds, ouvrir la bouche et abaisser sa garde. Il allait en profiter lorsque lui aussi fut stoppé net en découvrant à qui il avait affaire.
Vingt ans après. Il avait certes bien changé mais la ressemblance était trop évidente. A peu près sa taille. Des yeux bleu acier et des cheveux châtains. Un regard espiègle jadis mais désormais assombri par de trop nombreuses horreurs accomplies.
– K… Keel ?! bafouilla Golpi, sous le choc.
Il n’y avait pas de doute possible. Même après tout ce temps, Golpi pouvait reconnaître son ami d’enfance. Qui était devenu un malade au service de l’Empire, qui avait été mis en échec lors de la Bataille de Kuat, et qui avait disparu depuis, apparemment pour continuer ses actes meurtriers. Comme cette prise d’otages. La découverte provoqua chez Golpi un blocage quasi-total, il était incapable de faire ou dire quoi que ce soit. Une nausée difficilement contrôlée s’empara de lui un instant.
Keel Rylos, lui, avait plus vite repris possession de ses moyens.
– Golpi Rilim… Alors comme ça c’est toi qui joue les héros… Je pense que je devrais être fier de toi, fit-il sur un ton sarcastique.
– Keel… répéta doucement Golpi, incrédule. Non…
– Je le savais. Je savais qu’un jour j’aurais à nouveau à te faire face. Pour réaliser que tu étais bel et bien devenu mon ennemi.
– Pourquoi ? parvint à articuler Rilim. Pourquoi…
– Je pense que c’était notre destin, de nous retrouver un jour face à face. Pour que je puisse te faire réaliser ton erreur.
– Keel, qu’es-tu devenu ? lâcha Golpi, abattu.
– Et toi donc ! s’exclama l’impérial. Je te rappelle que TU m’as trahi, nous aurions dû être côte à côte et tu m’as abandonné !
– J’ai découvert ce qu’était réellement l’Empire, Keel, rétorqua Golpi, avec tout le calme dont il était capable en cet instant. Chaque jour qui passait jusqu’au Traité de Paix m’en apprenait plus sur les bouchers de l’Empire, comme…
– Comme moi ? acheva Keel. Oui, Golpi, j’ai servi l’Empire, et même aujourd’hui je continue !
– L’Empire n’existe plus, Keel, fit doucement Golpi. Du moins, pas celui que tu as servi. Pas celui au service duquel tu as commis tant d’horreurs. Je ne t’en aurais jamais cru capable…
– Justement ! Pellaeon nous a tous trahis, seul moi et les miens avons eu le courage nécessaire pour continuer à défendre notre cause !
Golpi secoua lentement la tête, les deux hommes ayant baissé leurs armes. La tension ne passait plus par les armes, mais cela ne l’avait pas empêché de monter d’un cran.
– En prenant des innocents en otages ? C’est cela que tu appelles du courage ? Tu es descendu bien bas, Keel Rylos…
– J’ai pris les mesures nécessaires ! Regarde-toi Golpi. Tu n’es qu’un faible, qui s’est rallié à un gouvernement incompétent…
– Peu m’importe le gouvernement, rétorqua Golpi. Je suis allé du côté de la justice. Je me suis battu aux côtés de gens qui avaient un vrai courage, comme tous ceux qui sont morts sur Kuat. Pour la justice…

A ces mots, Rilim vit Rylos pâlir à vue d’œil.
– Tu… Tu étais sur Kuat ? demanda Keel, soudainement blafard.
– Oui. Et j’ai vu tes appartements, dit Golpi en fixant Keel Rylos droit dans les yeux. Ce jour là, tu as cessé d’être mon ami, Keel. Pendant les dix ans précédant cette bataille, j’avais espéré que tu avais compris quel était le bon côté, j’espérais même que tu sois mort pour ne jamais être mon adversaire. J’aurais préféré cela, je crois…
– Tu étais sur Kuat… répéta Keel. Espèce de salopard, cracha-t-il.
– Tu es bien placé pour parler…maugréa Golpi.
– Tu y étais, par ta faute et celle des autres j’ai tout perdu ! Tu as tout détruit, Golpi ! En ce jour, j’ai maudit les soldats républicains, toi y compris donc ! Tu m’as tout pris…
– Tu es devenu un malade, Keel. Même si cela me fait mal de le dire, j’ai bien fait de t’arrêter, il y a dix ans. Comme je vais t’arrêter aujourd’hui. Parce qu’il le faut.
– Essaye toujours… rétorqua l’impérial avec mépris.
– Tu as encore perdu, Keel. Tous tes hommes ont été arrêtés, et tu ne pourras jamais partir d’ici.
– Toi non plus, Golpi. Je crois qu’il n’y a pas d’autre issue, pour l’un comme pour l’autre. Au bout de vingt ans, voici la fin du parcours…
– Keel, mes hommes ne vont pas tarder à arriver. Moi je te laisse une chance de te rendre et de survivre, les autres ne seront pas aussi indulgents. Tu as tiré sur mes camarades, tu as séquestré des innocents et tu as terrorisé la galaxie. Mais… Mais tu restes mon ami. Non, en fait tu ne l’es plus. Mais il y a tout au fond de toi l’être que j’ai connu dans mon enfance, avant que l’Empire n’en fasse un monstre. Par respect pour cet autre Keel, je te laisserai partir. Une dernière fois.
Keel Rylos ricana fortement, avant de s’approcher de Golpi.
– Pourquoi ne serait-ce pas moi qui te laisserais partir, à l’inverse ? Tu ne penses pas que les rôles pourraient être inversés ?
– Non. Tes hommes ont été abattus jusqu’au dernier, tu as perdu. Ne me pousse pas à en rajouter.

Les deux hommes restèrent un moment à se regarder droit dans les yeux. Golpi Rilim avait fait le choix de laisser partir un criminel notoire et recherché. Si Drayson l’apprenait, il le dégraderait immédiatement. Et pourtant… Au fond de lui il savait qu’il serait incapable de tuer celui qui, pendant toute son enfance, avait été son meilleur ami. Tous deux n’étaient plus les mêmes après vingt ans, mais une partie de leur enfance résidait encore dans leurs cœurs, une époque bénie qu’aucun des deux ne pouvait renier. Une époque où ils s’étaient tant dit, tant promis… Il ne restait plus rien de ces promesses, la guerre civile ayant séparé les deux amis avec la violence d’une tempête de Force. Ils avaient été séparés et les événements de ces vingt dernières années avaient fait que jamais plus ils ne pourraient être amis. Leur opposition était symbolique de tout le mal que la guerre avait fait dans les cœurs des citoyens de la galaxie.
– La guerre est finie, Keel.
– Dans les âmes des faibles comme Pellaeon, répondit Rylos. Pas pour moi. Pas pour nous deux. Il restera toujours des comptes à régler, quelles que soient les bonnes intentions.
– La paix est revenue. Une paix faite pour des gens comme toi et moi. Nous avons enfin l’occasion de faire également la paix. Ce que la guerre a détruit, la paix peut le réparer. Crois-moi, Keel, insista Golpi, légèrement suppliant et tentant de croire à ses belles paroles.
– Tu parles ! Même si je me rendais, je finirais sur Kessel comme tant de braves qui se sont battus à mes côtés ! Tu appelles ça la paix ?
– En effet, Keel. Mais tu pourrais expier tes crimes. Alors seulement je pourrais te les pardonner et redevenir ton ami. Si seulement tu redeviens le Keel Rylos que j’ai connu. Si le général impérial disparaît à jamais…
– Jamais, Golpi. Tu ne peux pas me demander de renier ce pour quoi je me suis battu pendant vingt ans avec toute mon énergie.
– Tu t’es battu contre moi, se désola Golpi.
– Oui, par la force des choses. Et je ne me rendrai pas.

D’un geste Golpi rangea son poignard et leva la main. Keel, surpris, ne sut que faire.
– Soit, Keel. Je t’offre ta chance. Fiche le camp tout de suite. La Nouvelle République te croira mort. J’espère que ce sera le cas : que Keel Rylos l’impérial disparaîtra et que subsistera uniquement le Keel que j’ai connu. Disparais de ma vue et je te laisserai cette opportunité.
Rylos allait parler, mais Rilim l’interrompit sèchement.
– Mais je te mets en garde. Si un jour tu croises à nouveau mon chemin et que tu es resté le même qu’en ce jour…
Il marqua une pause pour appuyer ses propos.
– Je te tuerai. Qui que tu sois, je te tuerai comme un criminel et un être qui méprise la paix et la vie. Sache le, Keel Rylos. Maintenant fiche-moi le camp.
Golpi prenait un ton dur, mais son cœur était meurtri par la certitude que, quoiqu’il advienne, il ne reverrait jamais son ami de jadis. Il était mort définitivement, et laisser partir le monstre qui se tenait devant lui ne servait qu’à apaiser sa conscience.
Keel commença à reculer vers le bord du toit, prêt à s’enfuir et à se cacher dans la foule de la tour voisine. Il voulut parler, mais Golpi le coupa à nouveau.
– Ne dis rien. Pars avant que je ne change d’avis.
Les deux amis se regardèrent une dernière fois, chacun arborant une expression que l’autre ne put déchiffrer. Puis Keel tourna le dos vivement et avança.

Soudain, un cri retentit
– Pas un geste !
Surpris, Golpi se tourna pour voir que, derrière lui, des soldats républicains venaient de surgir et tenaient en joue Keel. Au même moment, la navette d’Ace Azzameen apparut au-dessus d’eux. Golpi aurait espéré que Keel puisse partir incognito et que sa fausse mort soit crédible, mais c’était fichu…
Quand il se tourna à nouveau pour tenter de s’excuser, il ne vit pas Keel. Non… il a sauté, pensa-t-il. Mais le coup qu’il reçut en pleine figure lui démontra le contraire. Keel Rylos s’était jeté sur lui et Golpi tomba à quatre pattes. Du coin de l’œil, il vit l’impérial qui levait sa vibro-lame, prêt à en finir.
– Salaud ! Espèce de traître ! hurla-t-il avec rage.
Ne fais pas ça…S’il te plaît.

Tout se mélangea dans la tête de Golpi Rilim. Les images de son enfance. Le souvenir amer des actes commis par Keel. Les détonations qui l’assourdissaient. Le rire espiègle du jeune Keel Rylos. Le regard furieux de son ancien ami. Le sang qui l’éclaboussait. L’odeur d’ozone environnante. Leurs secrets d’enfance partagés. Les cris des soldats. La peine infligée à son cœur. La déception, la fatalité, l’injustice. Et enfin le corps qui s’écroulait sur lui.

Assis par terre, le corps de Keel Rylos entre les bras, Golpi Rilim pleura en silence. Keel respirait encore faiblement, la poitrine lacérée, à la fois carbonisée et ensanglantée. Dans l’urgence, les soldats n’avaient pas dû savoir que faire. Craignant de toucher Golpi, beaucoup s’étaient abstenus. Mais d’autres avaient ouvert le feu, et l’un d’entre eux avait tiré juste.
Keel avait lâché son poignard juste avant de toucher Golpi, mais ce dernier ignorait encore pourquoi : parce qu’un des soldats l’avait atteint… ou parce que son dernier geste d’humanité avait été de s’empêcher de tuer celui qui avait été son ami. Ou encore parce que le Keel Rylos de leur enfance s’était réveillé, avant de mourir à jamais. Les larmes continuèrent de couler sur les joues de Golpi, regardant Keel dans les yeux pour une ultime fois.
– Je… Je suis désolé.
Keel leva une main ensanglantée et toucha la joue de Golpi, la maculant de sang. Il jeta un regard où luisaient des larmes mais également… comme une sorte de paix intérieure retrouvée.
– C’est la fin… grogna-t-il.
– Pardonne-moi… Keel…
– J’aurais voulu ouvrir les yeux… et te retrouver…
Golpi pleura de plus belle et serra le corps de son ami retrouvé contre le sien. Alors que la vie quittait le corps de Keel Rylos, succombant peu à peu à sa blessure, celui-ci murmura quelques mots.
– Pardon.. Et merci…
Les soldats arrivèrent, continuant à tenir en joue la victime, et l’un d’eux tenta de relever Golpi, qui résista sans un regard vers les nouveaux arrivants, profitant de cet ami retrouvé, mais perdu aussitôt. Keel parla pour la dernière fois, dans un dernier souffle rauque.
– Adieu… Mon ami.
Alors que tout le monde s’agitait autour de lui, que l’amiral Drayson tentait désespérément de le joindre par comlink, Golpi resta par terre pour les seuls instants intimes avec son ami, depuis vingt ans. Keel avait laissé sa main sur la joue de son ami. Une main pleine de sang, qui représentait bien ce qu’avait été Rylos : un assassin aux mains pleines de sang.
Mais son autre main était blottie dans celle de Golpi, comme les mains de deux amis. Ce qu’avait aussi été Keel, des années auparavant mais aussi pendant les derniers instants de sa vie. Quand la mort qui était venue le chercher lui avait enfin ouvert les yeux, ce qu’il avait par principe refusé de faire toute sa vie. S’il avait revu Golpi plus tôt, peut-être aurait-il réalisé avant qu’il avait choisi la mauvaise voie.
Malgré tout, Golpi Rilim savait que l’issue aurait été la même. Dès le début de leur opposition, leur destin était scellé. Et au grand jeu de hasard qu’était la vie, mais aussi la mort, ce n’était pas que Keel Rylos qui avait perdu. C’était leur amitié.
– Adieu… Mon ami, murmura Golpi en fermant les yeux de son ami.