Depuis son retrait volontaire, George Lucas voit aujourd'hui Star Wars sous un oeil neuf, celui en tant que simple spectateur.
Durant la production de l'épisode VII, Lucas souhaitait que la production ne lui dévoile rien, afin de pouvoir être le plus surpris possible quand il verrait le film. Il attendit ainsi de voir le teaser au cinéma plutôt que sur le net, le trouvant au passage "génial" et "intéressant".
Début décembre 2015, Katleen Kennedy révéla au Hollywood Reporter que Lucas avait vu Le Réveil de la Force et "il l'a[vait] vraiment aimé", ajoutant que le créateur de Star Wars assisterait aux premières de Los Angeles et de Londres. Kennedy avoua que cela a été dur pour Lucas de "voir les choses se poursuivre sans qu'il soit directement impliqué. Mais en même temps, il voulait vraiment s'écarter." Le créateur de Star Wars put donc vivre une expérience inédite : "Je n'ai jamais pu voir le vaisseau spatial passer [en 1977]. Je n'ai jamais eu l'expérience que tous les autres ont eu. Je n'ai jamais pu voir Star Wars. Donc cette fois j'irai." De son côté, Vulture recueillit l'avis du créateur de Star Wars : "Je pense que les fans vont l'adorer. C'est plus ou moins le genre de films qu'ils recherchaient."
Pour les Derniers Jedi, Lucas se montra tout aussi élogieux, pensant que le film était "magnifiquement fait".
Si aujourd'hui, le créateur de la saga ne s'implique plus dans le développement des films, Kennedy affirme qu'"il murmure à [s]on oreille de temps à autre. En général, il s'agit de quelque chose de précis ou d'important pour lui concernant la formation des Jedi. Des choses comme ça."
Mais toutes ces belles déclarations ne seraient en réalité qu'une façade.
Dans son nouveau livre The Ride of a Lifetime: Lessons Learned from 15 Years as CEO of the Walt Disney Company, le PDG de Disney Bob Iger raconte les relations en coulisses avec George Lucas durant la création de Star Wars : Le Réveil de la Force. Il s'agissait du premier film Star Wars fait après que le créateur de la saga ait vendu Lucasfilm à Disney et se soit retiré. On apprend notamment que Lucas n'a pas caché sa déception en visionnant l'Episode VII de J.J. Abrams.
"À un moment du processus [de négociations], George m'a dit qu'il avait achevé des esquisses pour les [Episodes VII, VIII et IX]. Il a accepté de nous envoyer trois copies des esquisses : une pour moi, une pour [le vice-président de Disney] Alan Braverman, et une pour Alan Horn, qui venait juste d'être embauché pour diriger notre studio. Alan Horn et moi avons lu les esquisses de George et nous avons décidé qu'il fallait les acheter, tout en précisant dans le contrat d'achat que nous ne serions pas contractuellement obligés de respecter les intrigues qu'il avait conçues."
"[Lucas] savait que j'allais rester ferme sur la question du contrôle créatif, mais ce n'était pas facile pour lui d'accepter cela. Et il a donc accepté à contrecoeur d'être disponible pour se concerter avec nous à notre demande. Je lui ai promis que nous serions ouverts à ses idées (ce n'était pas une promesse difficile à faire ; évidemment que nous serions ouverts aux idées de George Lucas), mais que comme pour les esquisses, nous n'aurions aucune obligation."
"Dès le départ, [la présidente de Lucasfilm Kathleen Kennedy] a emmené [le réalisateur] J.J. [Abrams] et [le scénariste] Michael Arndt en Californie du Nord pour rencontrer George dans son ranch et discuter de leur idées pour le film. George s'est immédiatement énervé quand ils ont commencé à décrire l'intrigue et qu'il a compris que nous n'utilisions pas une des histoires qu'il avait soumises durant les négociations.
La vérité, c'est que Kathy, J.J., Alan et moi avions discuté de la direction que devait prendre la saga, et que nous avions tous convenu que ce n'était pas ce que George avait esquissé. George savait que nous n'étions pas contractuellement tenus de faire quoi que ce soit, mais il pensait que notre achat des traitements était une promesse tacite que nous allions les suivre, et il était déçu que son histoire soit abandonnée. J'ai fait très attention dès notre première conversation à ne l'induire en erreur d'aucune manière, et je ne pense pas aujourd'hui l'avoir induit en erreur, mais j'aurais pu mieux gérer cela. J'aurais dû le préparer à la réunion avec J.J. et Michael et lui parler de nos conversations, du fait que nous pensions qu'il valait mieux prendre une autre direction. J'aurais pu parler de ça avec lui, et peut-être éviter de l'énerver en ne le surprenant pas. À la première réunion avec lui concernant le futur de Star Wars, George s'est senti trahi, et bien que tout ce processus n'aurait jamais pu être facile pour lui, nous avons fait un départ inutilement difficile."
"Juste avant la sortie mondiale, Kathy a projeté Le Réveil de la Force pour George. Il n'a pas caché sa déception. "Il n'y a rien de nouveau", a-t-il dit. Dans chacun des films de la trilogie originale, c'était important pour lui de présenter de nouveaux mondes, de nouvelles histoires, de nouveaux personnages, et de nouvelles technologies. En ce qui concerne celui-ci, il a dit qu'"il n'y a pas assez de bonds en avant visuels ou techniques". Il n'avait pas tort, mais il ne se rendait pas compte de la pression sous laquelle nous étions pour donner aux fervents fans un film ressemblant fondamentalement à Star Wars. Nous avions volontairement créé un monde dont les visuels et le ton étaient reliés aux précédents films, pour ne pas trop s'éloigner de ce que les gens adoraient et attendaient, et George nous critiquait exactement pour la chose que avions tenté de faire. En regardant en arrrière après plusieurs années, avec quelques films Star Wars de plus, je pense que J.J. a accompli le quasi-impossible : créer un pont parfait entre ce qui avait précédé et ce qui allait suivre."
"Bien qu'il avait eu des problèmes avec le film, je pensais qu'il était important pour George d'être à la première du Réveil de la Force. Au début, il ne voulait pas venir, mais Kathy, avec l'aide de Mellody Hobson, aujourd'hui son épouse, l'a convaincu que c'était la bonne chose à faire. Avant que le marché soit conclu, une des dernières choses que nous avons négocié était une clause de non-dénigrement. J'ai demandé à George d'accepter de ne critiquer publiquement aucun des films Star Wars que nous ferions. Quand j'ai abordé le sujet avec lui, il a dit : "Je vais être un gros actionnaire de la Walt Disney Company. Pourquoi vous critiquerais-je ? Pourquoi critiquerais-je ce que vous faîtes ? Vous devez me faire confiance." Je l'ai cru sur parole."