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[EDITO] Le handicap dans Star Wars, une béquille souvent trop pratique
 
[Point de Vue] Les représentations du handicap dans la Saga
09/12/2024

Bonjour à tous, pardonnez-moi pour l’absence d’édito ces derniers mois, l’architecture de ce texte était prête mais on ne choisit pas quand la vie décide de nous tomber dessus violemment.

Pour rappel vous pouvez retrouver les deux précédents par ici :

J’essaie de reprendre le train en marche et je démarre la locomotive avec cet édito qui me tenait à cœur pour le mois de septembre en plein paralympique.

Pour cet exercice je me fais accompagner par un expert dans ce domaine : doctorant, chercheur et co-animateur du podcast Faucon Millenial - le tout depuis son fauteuil à répulsion - je veux parler d’Adrien Du Patelin !

Aujourd’hui on va parler de handicap dans Star Wars. Rapidement on va se rendre compte que la représentation en bien ou mal du handicap a pour ainsi dire toujours fait partie de l’ADN de Star Wars. On le sait notre Saga préférée est un univers où perdre un membre est aussi commun qu’attraper un rhume, mais les handicaps ne s’arrêtent pas seulement à des handicaps physiques. Or Star Wars a toujours été avant-gardiste sur un certain nombre de sujets, il n’est donc pas surprenant d’y voir la notion de handicap bien présente malgré qu’elle n’y soit jamais vraiment abordée. C’est subtil ? Je sais !

Bon comme je n’aime pas les longues introductions, ni ne souhaite vous dévoiler tout l’article dans ces quelques lignes, passons directement aux différentes représentations desdits handicaps dans la Saga. Ensuite nous parlerons des messages perçus et des pistes d’améliorations possibles.

 

Handicaps visibles


De nos jours la représentation d’un véritable handicap est plus présente, mais quand Star Wars sort en 1977 cette dernière était encore rare. D’autant plus qu’il y a toujours eu une fascination, presque une fétichisation, à vouloir faire paraitre un handicap comme une force, un « avantage ». On comprend facilement que ce procédé à tendance à invisibiliser le handicap. On connait tous l’exemple de Daredevil, qui dès 1964 est rendu aveugle par des produits chimiques mais dont les autres sens deviennent sans commune mesure et surhumains. Ce procédé à tendance à faire oublier quelque chose de simple : un handicap est un handicap et mérite d’être représenté comme tel.

Star Wars ne déroge pas à cette règle. Evitons de tomber directement dans la littérature des années 90 et début 2000 qui nous présentait régulièrement des Jedi aveugles qui « voient » grâce à la Force, puisqu’on a en a eu un exemple récemment dans un média beaucoup plus mainstream avec Kanan Jarrus (dans Star Wars Rebels). De même le personnage aveugle de Chirrut Îmwe (Rogue One: A Star Wars Story), dont on nous répète sans cesse qu’il n’a pas de sensibilité à la Force, fait preuve de dons surhumains dans son handicap. On a donc dans Star Wars des personnages qui font preuve de certains talents dont même des personnes sans handicap sont incapables (comme détruire un TIE Fighter avec un arbalète laser en pleine tempête).

On a, tout de même, quelques exemples de personnes à mobilité réduite dont aucune prothèse ne viendra « améliorer » leur condition. Les plus parlants sont les personnages de Cliegg Lars (L'Attaque des Clones) en fauteuil à répulsion ou Saw Gerrera (Rogue One : A Star Wars Story) dont la mobilité et la capacité respiratoire semblent définitivement réduites.

Heureusement dès 1980 le personnage de Yoda apparait à l’écran. Il nous permet d’exposer un fait simple, la vieillesse amène le handicap. Dans son cas on constate rapidement une certaine forme de douce folie ainsi qu’une réduction des fonctions motrices. On n’est donc pas surpris de voir le personnage se déplacer avec une canne quand on apprend qu’il est âgé de 900 ans.

Enfin on pourrait sans doute mentionner le Seigneur Noir des Sith, Dark Vador lui-même, mais gardons le sous le coude pour un paragraphe dédié aux cyborgs.

Que conclure avec ces quelques exemples ? Star Wars peut tomber dans le travers du handicap idéalisé (perdre un sens décuple les autres) mais peut aussi réussir à avoir de bonnes représentations, voire des très bonnes comme je le développerai après. Cependant il reste un type de handicap physique qui nécessitera son propre paragraphe : celui des prothèses et des cyborgs, car il y a de quoi dire.

 

Handicaps invisibles


Un point dans lequel Star Wars n’est pas avare en représentation, ce sont les handicaps invisibles, que ce soit dans les films, les séries, les livres et les jeux vidéo.

Mentionnons rapidement la folie chez les utilisateurs de la Force, c’est une pathologie intéressante mais beaucoup trop propre à Star Wars. Voir un Sith ou un Jedi noir aveuglé par la haine, la colère, la peur et/ou la douleur jusqu’à en perdre la tête est très commun (Taron Malicos, Anakin Skywalker, Ulic Qel-Droma, Dark Krayt, Kyp Durron et j’en passe).

Ce que j’aimerais souligner ici, ce sont les handicaps mentaux qui existent réellement chez nous. On peut donc trouver dans Star Wars des personnages qui souffrent de dépression comme Luke Skywalker (dans Les Derniers Jedi), des personnages hypersensibles avec Burryaga (via la Force, dans la Haute République), certains dont les comportements rappellent des formes d’autisme comme Neeku (Resistance) ou Tech (The Bad Batch), des personnages souffrant de stress post traumatique à l’image de Cal Kestis (Jedi Fallen Order) ou encore une véritable folie (non induite par la Force) comme chez Marchion Ro (La Haute République).

Les handicaps sensoriels et les douleurs chroniques sont aussi bien représentés dans Star Wars. Lobot dès 1980 (L’Empire Contre-Attaque) qui nous apparait comme muet, dont on apprendra plus tard dans la littérature qu’il souffre aussi de troubles mentaux. Ou la mère de Leia, Breha Organa (dans le roman Leia Princesse d’Alderaan) qui souffre de douleur et de fatigue chronique (ce qui l’empêche d’avoir des enfants) à la suite d’un accident dans sa jeunesse. Chose surprenante dans son cas, elle refusera même que la médecine la « soigne », puisque c’est possible dans l’Univers de Star Wars, pour se rappeler son passé, l’imprudence et l’orgueil qui causèrent son accident.

On comprend donc bien que dans ce genre de handicap, on a presque que des bons points à distribuer. La vraie question à se poser serait : pourquoi ces représentations sont-elles plus nombreuses ou en tout cas mieux représentatives de ce qu’on trouve dans notre monde ? Pour le nombre la réponse est facile, ce n’est pas le cas car il reste les handicaps physiques « corrigés » par des prothèses. Ils sont en sur-représentation dans Star Wars, mais il est difficile de les considérer comme une forme de handicap comme on va le voir dans le paragraphe suivant. En ce qui concerne leur traitement plus « réel » il faudrait jeter un coup d’œil sur ce que la sociologie a à en dire, mais les troubles mentaux ont toujours fasciné, sans doute trop, les scénaristes au point de presque les trouver « sexy » (la jeune fille de bonne famille qui tombe amoureuse d’un garçon sombre et torturé ; le bon élève premier de la classe qui veut à tout prix « aider » ou « soigner » la jeune fille dépressive et suicidaire ; oui ce sont de vrais résumés de livres qui se trouvent dans ma bibliothèque).

Il est maintenant temps d’aborder la véritable béquille bien trop pratique de la représentation du handicap dans Star Wars, la correction des handicaps physiques via des prothèses, ce qui nous ouvre le paragraphe sur les cyborgs.

 

Cyborgs


Dark Vador, Valance, Greez, Fennec, Grievous, Azlyn Rae, Anakin, Luke ... Je pourrai facilement en remplir une page complète.

En règle générale dans Star Wars les prothèses sont trop parfaites. On peut y voir, comme dans la représentation des minorités sexuelles et de genre, un idéal à atteindre. Un monde « parfait » où les prothèses sont si performantes qu’elles permettent de remplacer parfaitement, voire d’améliorer les performances (force, rapidité, réflexes etc.) de la personne. Mais là où ça pèche c’est dans le manque de représentation de personnes atteintes de handicaps physiques sans « correction à la Star Wars ». Elle est où la jeune fille dans l’univers Star Wars en fauteuil à répulsion qui ne peut pas aller rendre visite à sa meilleure amie de l’autre côté de Tatooine à cause du manque d’accessibilité de la planète ? La faible offre de transports en commun, qui plus est non adaptés ?

Cependant on voit déjà dans notre monde apparaitre des prothèses très techniques, pour un certain coût, ce qui me permet d’aborder un autre point, l’accessibilité des prothèses.

Là où Star Wars touche juste, c’est quand des personnages comme Saw Gerrera ou Cliegg Lars se retrouvent avec des prothèses moins performantes ou pas de prothèse/soin faute de moyen ou d’accès (difficile d’avoir une belle armure à la Dark Vador quand on est un barbouze rebelle pourchassé par l’Empire). On sait qu’en France/dans le monde des fauteuils roulants plus ou moins performants avec plus ou moins d’options existent, mais ils ont un coût. Même avec des aides d’Etat ils ne sont pas à la portée de toutes les bourses… Chez nous comme dans Star Wars, les plus précaires se retrouvent avec des prothèses, des fauteuils, moins performants…

Donc dans Star Wars une grande majorité de personnages principaux sont handicapés mais ils sont si bien remplacés qu’on les oublie. D’ailleurs un bon point des Episodes VII et VIII est d’avoir donné à Luke une main en métal au lieu d’une main recouverte de fausse peau, comme un rappel aux spectateurs de son handicap.

 

Point acteur


Avant de parler de ce qu’apportent ces représentations faisons un petit point acteur dans la Saga.

Pendant des années, un des principaux défauts qu’on pouvait reprocher à Star Wars dans sa représentation du handicap est de recruter des acteurs non handicapés pour jouer des personnages handicapés. Ce qui ne veut pas dire que Star Wars était, avant le rachat par Disney, exempt d’acteurs handicapés. Les plus connus, atteints de nanisme, sont Kenny Baker et Warwick Davis (dans les costumes de R2-D2 et de Wicket d’Ewoks). Cependant il faut attendre la sortie de l’Episode I pour que Warwick Davis interprète un personnage lui aussi de petite taille en la personne de Weazel, personnage qu’il interprètera de nouveau dans Solo : A Star Wars Story.

C’est en 2019 dans The Mandalorian (puis 2021 dans Book of Boba Fett) que Troy Kotsur, acteur sourd, est embauché pour inventer une langue des signes pour les guerriers Tusken avant d’interpréter lui-même le Tusken qui signe.

Une belle évolution sous l’ère Disney pour la Saga, les handicapés commencent à être joués par des handicapés !

 

Représentation


Parlons maintenant de ce que peuvent amener toutes ces représentations aux personnes concernées.

Un exemple assez frappant pour mon ami Adrien, qui m’aide à écrire ces lignes, a été la série The Mandalorian. Dans la saison 3, Grogu, qui bien qu’il ne souffre pas de handicap (encore que sa petite taille et sa communication non verbale pourraient être considérées comme telles), rentre dans son droïde comme une personne handicapée s'assoit dans son fauteuil roulant. Une représentation bienvenue qui remplit le cœur des concernés.

Malgré tous les défauts qu’on peut trouver à l’ère Disney de Star Wars on y note de réelles améliorations. Auparavant le handicap était un outil trop pratique (pour les scénaristes et même pour certains personnages) utilisé d’avantage comme une « originalité » que comme une représentation. Il restera toujours du chemin à parcourir mais heureusement Star Wars reste du côté avant-garde de la Force !

 

Pour conclure je vous propose un échange entre Adrien et moi sur ces questions :

Lain-Anksoo : En règle générale qu’est-ce que ça fait de voir ces représentations ?

Adrien : En- y réfléchissant il y en a plus que ce qu’on pense. Le handicap peut-être invisible, même si ce n’est pas parfait, qu’il y a des problèmes, c’est déjà génial de voir de la diversité au niveau des handicaps. C’est une bonne base.

Lain-Anksoo : Mais cette représentation est-elle suffisante ou bien faite ?

Adrien : Pas toujours. Le bon point c’est que ça touche tout le monde, le personnage figurant comme le héros. Mais le vrai problème c’est quand le personnage handicapé n’est pas interprété par une personne handicapée. On appelle ça du cripping up, et c’est une pratique très problématique qui trouve ses racines à l’époque du début du cinéma. Faire semblant d’être handicapé-e pour un rôle ne sera jamais plus cohérent qu’un vrai-e handicapé-e dans le rôle. Ensuite le handicap est souvent peu visible ou si bien compensé qu’il est gommé. Enfin même si on a aussi besoin de personnages handicapé-e-s bad-ass et super fort-e-s, parfois j’aimerais bien que les personnages parlent un peu de leur handicap et des difficultés qu’ils peuvent vivre dans leur monde. En littérature Star Wars, heureusement ils en parlent un peu plus.

Lain-Anksoo : On peut donc dire qu’on peut faire mieux ?

Adrien : Bien sûr, on peut toujours faire mieux. Solo : A Star Wars Story et The Mandalorian ont ouvert la voie avec des personnages handicapé-e-s joué-e-s par des acteur-rice-s handicapé-e-s et avec une langue des signes dans l’Univers Star Wars. Il faut toujours garder espoir, espérer une baisse de la marginalisation des acteur-rice-s handicapé-e-s, et une plus grande visibilité dans la fiction. À quand un-e Jedi en fauteuil à répulsion ?

On existe, on est là, on doit aussi être correctement représenté-e-s.

Adrien Du Patelin et Lain-Anksoo à <a href='/livre-2443-star-wars-celebration-europe.html' class='qtip_motcle' tt_type='livre' tt_id=2443>Star Wars Celebration Europe</a> 2023
Lain-Anksoo et Adrien du Patelin à Star Wars Celebration Europe 2023

Comment pourrais-je mieux conclure qu’avec cette phrase ? Encore un grand merci à Adrien pour son aide, je n'aurais pas pu écrire cet article sans lui !

Encore désolé pour le délai de cet article, j’espère qu’il vous aura plu. Pour en discuter c'est par ici et je vous dis à très bientôt pour un nouvel édito !

Parution : 09/12/2024
Source : le staff
Validé par : Lain-Anksoo
Section : SWU > SWU
On en parle sur nos forums
 
Les 10 derniers messages (voir toutes les réponses) :
  • 09/12/2024 - 21:38
    Comme me l'a fait remarquer notre incontournable jedi-mich, il manquait un topic pour discuter des articles de la rédaction, sur StarWars-Universe.

    Ça en fait déjà trois que je vous ai proposé ces derniers mois, dont deux qu'on pouvait rattacher à un topic série ou livre, mais ce dernier était tout simplement "inclassable". Autant ouvrir un nouveau topic pour ce cas de figure.

    Il était donc question ce mois-ci de la représentation des handicaps dans star wars, article rédigé en collaboration avec une personne concernée : Adrien du Patelin !
    L'article aurait dû sortir il y a quelques mois pour les paralympiques mais des contretemps personnels ont repoussé sa publication.
    C'est aujourd'hui de l'histoire ancienne, je suis donc fier de vous présenter le résultat :

    https://www.starwars-universe.com/actu- ... ique-.html
  • 09/12/2024 - 21:57
    Sur Lobot, j'ai cru un certain temps que c'était un cyborg à cause du moment le montrant se réveiller tandis que Lando active son bracelet lorsque les Impériaux emmènent Leïa et Chewbacca au vaisseau de Vador.

    K.
  • 09/12/2024 - 22:05
    Lobot était présenté comme un cyborg dans l'Univers Legends, notamment dans la trilogie de Flotte Noire, où il participait à tout le passage sur le Vagabond Teljkon. Et il était qualifié "d'interfacé" dans la duologie de la Main de Thrawn, lors de l'infiltration sur Bastion. ;)
  • 12/12/2024 - 21:50
    Chouette article :jap:

    On pourrait quand même dire que SW n'a pas attendu le rachat pour avoir des personnages handicapés dans l'UE : Zao, Empatojayos Brand, Tenel Ka, Nawara Ven, Dengar... J'ai l'impression que ce n'est pas arrivé si souvent que ça qu'on soit face à des handicaps idéalisés, sur le nombre. C'est plus les cyborgs qui sont toujours un peu trop boostés :transpire:
    L'article m'a aussi fait penser à certains Hutts : en romans, comics, et même récemment en série, on en retrouve sur des chariots à répulseurs, des exo-squelettes, pas mal de moyens de gagner en mobilité et en force.

    Côté droïdes y'aurait aussi des choses à aborder : c'est un peu "le handicap facile" quand C-3PO se fait démonter/remonter dans plusieurs films, mais les problèmes de mobilité de R2 et C-3PO sont souvent utilisés dans les histoires, comme des éléments à prendre en compte pour le reste du groupe :oui:

    Et un dernier angle que je trouve intéressant dans cet univers (et propre à cet univers), ce sont les handicaps de la Force. Des personnages doivent faire sans leurs capacités "normales", en se retrouvant privés de la Force : via un ysalamari, pour affronter les Vongs, par des blocages internes ou avec des techniques de privation... On pourrait même parler du cas de Callista, qui propose un vrai exemple de Jedi qui a perdu ses capacités et le vit extrêmement mal pendant des années.

    Enfin, comme toujours, c'est un article qui ouvre beaucoup de portes :ange:
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