En fait, ce qui m'ennuie, ce n'est pas tant ton jugement sur la Prélogie, qui vaut ce qu'il vaut, et que je partage sur beaucoup de points. J'ai été parmi les premiers vieux fans à brailler contre l'Episode I, à l'époque, je le trouvais épouvantable, pour rester poli. Cependant, avec le recul, avec les visionnages, avec le temps et les autres épisodes mis bout à bout, il ne me dérange plus tant.
Puisque tu trouves certaines choses irrationnelles, je vais rationaliser un peu.
Le fait que Anakin soit "donné au premier venu" ce n'est pas tout à fait exact. Qui-gon n'est pas le premier venu, c'est un Jedi, un maître, qui plus est, et il a gagné la liberté de Anakin, à une époque où un esclave se vend et s'achète librement, en principe. Et Shmi a prit la meilleure décision pour que son rejeton ne se contente pas d'une vie misérable sur Tatooine. Vue d'un autre point de vue (d'un certain point de vue, comme dirait Obi-Wan), tout se tient. En extrapolant un peu vers l'
UE, ce que je n'aime pas faire mais bon... on peut imaginer qu'il a été plus facile à un Darth Plaeguis d'utiliser une esclave pour porter son "Elu" que d'utiliser une femme libre, logique. Qu'Anakin soit un esclave ne m'a jamais choqué, loin de là, au contraire, ça lui donne une motivation supplémentaire.
Pour l'achat de la mère: Ce n'est pas Amidala qui achète qui que ce soit. Elle n'a rien à voir la-dedans et elle a d'autres chats à fouetter (pardon pour les chats !). Qui-gon gagne la liberté d'Anakin. Il n'a pas de pognon: il ne peut pas acheter la mère. Et Amidala n'est pas sensée savoir ce qui se passe vu qu'elle assume l'identité de la suivante Padmé, y compris pour le spectateur. Et la situation est bien plus grave qu'il n'y parait, le but premier étant de racheter une hyperdrive pour retourner sur Naboo où la situation est explosive pour des milliers d'être vivants. La libération d'Anakin n'est qu'une situation secondaire sans grande importance mis à part pour Qui-Gon lui-même. Tu me diras: Padmé aurait pu la racheter après, mais à ce moment-là Anakin était déjà officiellement novice Jedi, et les liens familiaux n'ont plus court. Donc inutile qu'elle se retrouve près de son fils. De plus, son destin n'a pas été si mauvais que ça, ensuite, elle a connu de beaux jours près de Lars, en tant qu'épouse et non qu'esclave.
Et que les Jedi soient cruels ou avares, la question n'est pas là. Les Jedi ne sont pas une œuvre de bienfaisance. S'ils avaient de la compassion, ça se saurait: le simple fait d'interdire l'amour chez les Jedi est déjà le signe d'une vie rigoureuse de renoncement, de sacrifice, voire de douloureux choix, pas de compassion. Une fois Anakin novice, la mère devient inutile. Et après tout, avouons qu'elle n'a pas une vie si mauvaise que ça sur Tatooine, même pour un esclave: elle a un toit, un logis (plutôt grand, même, si on le compare objectivement avec les cabanes dans lesquelles vivent entassés certaines famille brésiliennes même à notre époque civilisée et sans être esclave), un travail, de quoi manger à sa faim, de quoi s'habiller décemment, sa situation est très loin d'être précaire, avouons-le. Donc pourquoi s'en faire pour elle, finalement ? D'accord, c'est une "pauvre esclave" mais elle vit nettement mieux que bien des gens réels qui hantent nos rues aujourd'hui.
Pour ce qui est de la course de pod, j'admets qu'il puisse y avoir un truc qui ne colle pas. Mais dans des grands prix de F1, on a déjà vu des pilotes sortir de piste, se retrouver derrière et remonter tout le monde jusqu'à la première place. La rapidité ne fait pas tout dans la course de pod. Dans le dernier grand prix d'Abu-Dhabi, Massa, 9ème, remonte à la première position.
Supprimer Jar-jar, ça peut être une bonne idée, vue sous un certain angle. Mais c'est un personnage qui, s'il n'a pas plu aux vieux fans comme moi, a en tout cas plu à pas mal de gamins lors de la sortie de l'Episode I. Il a le rôle du bouffon de service, et son absence ne rend pas les choses plus "adultes". Plus graves, peut-être, mais pas plus adultes. Il y a des tas de films, d'histoires très adultes où un bouffon de service se trouve là pour faire des pitreries et ajouter de l'humour là où la situation ne s'y prête pas nécessairement.
Supprimer les personnages en synthèse pour privilégier les acteurs ? Jar-jar n'est-il pas joué par un véritable acteur ? Un acteur de talent, qui plus est ? Pourquoi minimiser son travail, voire le supprimer ?
J'ai vu la version d'Adywan, bien entendu, moi qui suis un grand fan de
ANH, avec ses effets retouchés, son remontage discret, la suppressions de certaines incohérences et faux raccords que même la version blu-ray maintient. C'est un joli travail, je l'admet, c'est même mieux sous certains aspects que ce que Lucas nous propose toujours. Mais l'objectif d'Adywan est diamétralement opposé au tien, il n'y a pas de comparaison possible.
Mais voilà: à mon avis, il ne faut pas retoucher une œuvre à outrance. Elle est ce qu'elle est, point barre. Elle a ses défaut, ses erreurs, ses incohérences, mais l’œuvre parfaite n'existe pas. Même un tableau de De Vinci contient des erreurs, des trucs qui peuvent nous déplaire, nous sembler ridicule; c'est le cas par exemple de "La Cène" que je trouve totalement illogique au regard de l'Evangile lui-même, voire franchement incohérente. La cohérence et la logique ne sont pas un critère de jugement de l’œuvre par elle-même. Les films de la Prélogie valent ce qu'ils valent, certaines choses sont horripilantes, déplaisantes, d'autres plaisent et sont formidables. Mais de là à découper au ciseaux (voire au hachoir de boucher...) les films pour les faire coller absolument à notre vision des choses, et surtout à les proposer publiquement (et présomptueusement, je trouve aussi) comme meilleures, il y a un fossé que je ne franchirai pas. Qu'on tourne un fan-film, qu'on explore l'histoire, qu'on la réécrive dans des romans, des BD, des épisodes de série, OK, au contraire, c'est génial, ça fait avancer le schmilblick, mais qu'on fasse du révisionnisme starwarsien aussi poussé, j'avoue que j'ai du mal.
Un mensonge peut faire le tour de la terre le temps que la vérité mette ses chaussures — Mark Twain